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15/12/2009 | FRANCE | N°08-20934

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 décembre 2009, 08-20934


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 septembre 2008), qu'après la mise en redressement judiciaire, le 2 mai 2007, de la société Mediterranean Fruit Juices (la société MFJ), le tribunal a, sur assignation de l'administrateur judiciaire, étendu la procédure à la société Estalie ; que la cour d'appel, après avoir annulé le jugement, a accueilli la demande ;

Attendu que les sociétés MFJ et Estalie font grief à l'arrêt d'avoir dit que l'action a étÃ

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 septembre 2008), qu'après la mise en redressement judiciaire, le 2 mai 2007, de la société Mediterranean Fruit Juices (la société MFJ), le tribunal a, sur assignation de l'administrateur judiciaire, étendu la procédure à la société Estalie ; que la cour d'appel, après avoir annulé le jugement, a accueilli la demande ;

Attendu que les sociétés MFJ et Estalie font grief à l'arrêt d'avoir dit que l'action a été valablement introduite par l'administrateur judiciaire de la société MFJ, alors, selon le moyen, que l'administrateur judiciaire n'a pas pour mission de défendre l'intérêt collectif des créanciers ; qu'en lui reconnaissant le droit d'agir en extension de procédure à l'encontre de la société Estalie tandis qu'il avait pour mission d'assister la société MFJ placée en redressement judiciaire et non de représenter ses créanciers, la cour d'appel a violé les articles L. 621-2, L. 631-7 et L. 622-1 du code de commerce ;

Mais attendu que l'administrateur judiciaire a qualité pour exercer l'action, prévue à l'article L. 621-2, alinéa 2, du code de commerce issu de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, dans sa rédaction alors applicable, aux fins d'extension de la procédure collective d'une personne à une autre sur le fondement de la confusion des patrimoines ou de la fictivité ; que le moyen n'est pas fondé ;

Et attendu que le second moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les sociétés Mediterranean Fruit Juices et Estalie aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par Mme le conseiller doyen faisant fonctions de président en son audience publique du quinze décembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.

Moyens produits par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour les sociétés Mediterranean Fruit Juices et Estalie.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé que l'action avait été valablement introduite par l'administrateur judiciaire de la société Mediterranean Fruit Juices ;

AUX MOTIFS QUE, organe de la procédure collective, l'administrateur judiciaire dispose du pouvoir propre d'agir, en présence de la société débitrice, sur le fondement des articles L 621-2 et L 631-7 du code de commerce, aux fins d'extension de la procédure collective à une autre personne, dès lors que cette action tend à établir la situation active et passive de l'entreprise en réunissant des patrimoines qui ont été confondus ; que l'action a été valablement introduite par l'administrateur judiciaire ; que la mission de ce dernier ayant pris fin par l'effet de la liquidation judiciaire, l'action est régulièrement poursuivie par le liquidateur judiciaire ; qu'il convient de mettre hors de cause la SCP Douhaire Avazeri, ès-qualités ;

ALORS QUE l'administrateur judiciaire n'a pas pour mission de défendre l'intérêt collectif des créanciers ; qu'en lui reconnaissant le droit d'agir en extension de procédure à l'encontre de la société Estalie tandis qu'il avait pour mission d'assister la société Mediterranean Fruit Juices placée en redressement judiciaire et non de représenter ses créanciers, la cour d'appel a violé les articles L 621-2, L 631-7 et L 622-1 du code de commerce.

SECOND MOYEN (SUBSIDIAIRE) DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR étendu à la société Estalie la liquidation judiciaire prononcée à l'égard de la société Mediterranean Fruit Juices ;

AUX MOTIFS QU'au cours de l'année 2006, l'activité de la société MFJ a été exercée, en tout ou partie, par sa filiale, la société Estalie ; que c'est ainsi notamment, qu'en octobre 2006 les contrats d'assurance souscrits par la société MFJ ont été transférés au nom de la société Estalie qui a réglé les primes en retard dues par la société MFJ ; qu'en outre, des documents commerciaux ont été établis sous les deux dénominations de Estalie et de MFJ, dans des conditions qui laissaient penser qu'il s'agissait d'une seule entreprise (cf. plaquette de présentation commerciale et lettre adressée par monsieur Nicolas X... à monsieur Jean-Pierre Y...) ; qu'en contrepartie de « l'exploitation de l'activité de la société MFJ par la société Estalie », la société MFJ a facturé des « commissions sur vente » à la société Estalie ; que ces commissions n'ont pas donné lieu à des mouvements de fonds ; qu'elles ont été compensées avec le règlement par la société Estalie de certaines dettes de la société MFJ ; que les opérations de compensation ont été enregistrées au sein de la comptabilité de la société MFJ dans le compte de caractère générique n° 467000 intitulé "autres dettes" ; que la société MFJ n'ayant plus de compte bancaire depuis la fin de l'année 2005, toutes les opérations financières la concernant ont été effectuées par l'intermédiaire des comptes bancaires de la société Estalie ; que les sociétés MFJ et Estalie reconnaissent le transfert de l'activité accompagné du transfert des contrats en cours, l'identité des sièges sociaux, l'absence d'actif corporel au jour de l'ouverture de la procédure collective de la société MFJ et l'absence de compte bancaire au nom de la société MFJ ; qu'elles soutiennent que la société MFJ a donné, selon une convention restée verbale, son fonds en location-gérance à la société Estalie moyennant le versement de commissions ; que l'allégation d'une telle convention est contredite par divers éléments : la réalité même des commissions allouées à la société MFJ n'est pas établie, dès lors qu'elles n'ont donné lieu qu'à de simples écritures comptables, non suivies de transferts de fonds et qu'aucune explication n'est donnée quant à leur mode de calcul, ni d'ailleurs quant à la date d'effet de la location-gérance prétendue, la convention n'a pas donné lieu à une publication et les tiers n'en ont pas été informés, les sociétés Estalie et MFJ se présentant dans les documents commerciaux comme une seule entreprise, les comptes produits aux débats révèlent que la société MFJ a effectué des achats et des ventes pour des montants importants au cours des années 2006 et 2007 (en 2006 des ventes de 188.848 € pour des achats de 152.550 € et un chiffre d'affaires de 951.068 € ; en 2007 des ventes de 181.250 € pour des achats de 105.427 € et un chiffre d'affaires de 834.366 €), il en résulte que la société MFJ a poursuivi une activité de négoce à une époque où elle était censée avoir perdu la jouissance de son fonds de commerce ; qu'il apparaît que la société Estalie s'est appropriée le fonds de commerce de la société MFJ en contrepartie du règlement de certains créanciers de la société dépossédée, ces règlements étant compensés par des écritures comptables portant l'intitulé « commissions » ; que la confusion de patrimoines des sociétés MFJ et Estalie est caractérisée par l'appropriation du fonds commercial de la première par la seconde, par l'utilisation de documents commerciaux laissant croire aux tiers que les deux sociétés ne constituaient qu'une seule entreprise et par l'existence de relations financières anormales puisque toutes les opérations financières de la société MFJ, notamment celles afférentes à son activité de négoce, ont été réalisées par l'intermédiaire des comptes bancaires de la société Estalie ;

1) ALORS QUE la confusion de patrimoines entre deux sociétés se caractérise par un « désordre généralisé des comptes et un état d'imbrication inextricable entre ces deux sociétés » ou l'existence de relations financières anormales ; qu'en déduisant la confusion de patrimoine du fait que la société Estalie se serait appropriée le fonds de commerce de la société MFJ, tandis qu'elle a constaté qu'une telle appropriation avait eu lieu en contrepartie de commissions identifiées en comptabilité, peu important que ces dernières n'aient pas occasionné de mouvements de fonds en raison des compensations opérées, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs impropres à caractériser la confusion de patrimoine invoquée, a privé sa décision de base légale au regard des articles L 621-2 et L 631-7 du code de commerce ;

2) ALORS QU'en se contentant d'affirmer que les opérations financières de la société MFJ avaient été réalisées par l'intermédiaire des comptes bancaires de la société Estalie pour retenir l'existence de relations financières anormales, tandis qu'elle avait constaté que les mouvements financiers entre les deux sociétés avaient été retracés en comptabilité, de sorte que les opérations effectuées par cet intermédiaire étaient clairement identifiées et dissociées de celles réalisées par la société Estalie elle-même, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs impropres à caractériser la confusion de patrimoines, a privé sa décision de base légale au regard des articles L 621-2 et L 631-7 du code de commerce ;

3) ALORS QU'en se contentant d'affirmer que les sociétés MFJ et Estalie étaient apparues ensemble et sans distinction dans des documents commerciaux, que leur siège social était identique et que la société MFJ était dépourvue d'actif corporel au jour de son redressement judiciaire, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à établir la fictivité ou la confusion du patrimoine de ces deux sociétés ; qu'elle a ainsi privé sa décision de base légale au regard des articles L 621-2 et L 631-7 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 08-20934
Date de la décision : 15/12/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Sauvegarde - Ouverture - Extension de la procédure - Action en extension - Qualité pour l'exercer - Administrateur judiciaire

L'administrateur judiciaire a qualité pour exercer l'action, prévue à l'article L. 621-2, alinéa 2, du code de commerce issu de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 18 décembre 2008, aux fins d'extension de la procédure collective d'une personne à une autre sur le fondement de la confusion des patrimoines ou de la fictivité


Références :

ARRET du 18 septembre 2008, Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre commerciale, 18 septembre 2008, 08/01371
article L. 621-2, alinéa 2, du code de commerce issu de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 18 décembre 2008

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18 septembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 15 déc. 2009, pourvoi n°08-20934, Bull. civ. 2009, IV, n° 170
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, IV, n° 170

Composition du Tribunal
Président : Mme Pinot (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : Mme Bonhomme
Rapporteur ?: Mme Orsini
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.20934
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