LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé par contrat à durée indéterminée du 17 mai 1999 par la société Marcel Robbez-Masson diffusion (la société) en qualité de délégué commercial non VRP en articles de bijouterie sur le secteur géographique du Nord-Est de la France ; que par courrier du 10 juin 2004, il a informé l'employeur de sa décision de démissionner ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à ce qu'il soit jugé que la rupture du contrat de travail s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et à ce que lui soient allouées diverses sommes ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n' y a pas lieu de statuer sur ce moyen, qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande relative à la contrepartie financière à l'obligation de non concurrence et aux congés payés afférents, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en retenant, pour le débouter de sa demande de contrepartie financière à la clause de non concurrence, que le délai de quinze jours prévu par le contrat de travail pour lever ladite clause avait été respecté par la société, sans même répondre au moyen déterminant des conclusions de l'exposant soulignant que les dispositions conventionnelles, plus favorables que les dispositions contractuelles, prévoyaient un délai de renonciation de huit jours, délai largement écoulé lorsque l'employeur avait cru pouvoir exercer cette faculté, la cour d'appel a gravement méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ subsidiairement, que le délai de renonciation par l'employeur à se prévaloir d'une clause de non concurrence expire le jour où la lettre notifiant cette décision a été reçue par le salarié ; qu'en l'espèce, alors qu'il lui avait notifié la rupture des relations contractuelles par lettre du 10 juin, reçue le 12 juin, il n'avait reçu la lettre de la société Marcel Robbez-Masson diffusion que le 2 juillet 2004, soit au delà du délai de deux semaines prévu par le contrat de travail ; que la cour d'appel qui, constatant que la société avait jusqu'au 28 juin 2004 pour lever la clause de non concurrence et qu'elle avait exercé cette faculté par lettre du 23 juin reçue le 2 juillet suivant par le salarié, a néanmoins estimé que la renonciation avait été faite dans les délais prévus, a violé l'article L. 1221-1 ancien article L. 121-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a retenu que la convention collective de la bijouterie ne s'appliquait pas et que l'employeur qui devait, selon le contrat de travail, libérer le salarié de la clause de non-concurrence par notification expresse dans les deux semaines suivant le début du préavis, a, alors que le préavis avait commencé le 14 juin 2004, posté le 22 juin 2004 la lettre de renonciation ; qu'elle en a exactement déduit que la notification avait été effectuée dans le délai contractuellement prévu ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le troisième moyen :
Vu les articles L. 1237-1, L. 1237-4 et L. 2254-1 du code du travail ;
Attendu que pour condamner M. X... à verser à l'employeur la somme de 1 067,14 euros au titre du troisième mois de préavis et celle de 100 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice issu de la rupture, la cour d'appel a retenu que la société relevait du code APE 511R "autres intermédiaires spécialisés de commerce", exerçant une activité d'agence commerciale d'articles de bijouterie, négociation et conclusion de contrats de vente ou dépôt de vente d'articles de bijouterie au nom et pour le compte de producteurs, fabricants ou commerçants, activité de services et non de commerce de gros et n'entrait donc pas dans le champ d'application de la convention collective de la bijouterie, comme le soutient M. X... pour affirmer qu'il ne devait exécuter que deux mois de préavis et non trois comme le prévoit l'article 13 de son contrat de travail en cas d'ancienneté supérieure à un an, ce qui est son cas ; qu'en l'absence de convention collective applicable, il y a lieu de s'en tenir à l'article L. 122-6 du code du travail et au contrat de travail de l'intéressé et de confirmer la décision critiquée en ce qu'elle a alloué à la société la somme correspondant au troisième mois de préavis, ainsi qu'une équitable réparation du préjudice issu de la rupture, qui n'a pas lieu d'être revue à la hausse ;
Attendu, cependant, que selon l'article L.1237-1 susvisé, "en cas de démission, l'existence et la durée du préavis sont fixés par la loi, ou par convention ou accord collectif de travail", et "en l'absence de dispositions légales, de convention ou accord collectif de travail relatifs au préavis, son existence et sa durée résultent des usages pratiqués dans la localité et dans la profession" ;
Qu'en se déterminant comme elle a fait, par des motifs inopérants, sans rechercher, en l'absence de convention ou d'accord collectif, s'il existait des usages pratiqués dans la localité et dans la profession, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné M. X... à verser à l'employeur la somme de 1 067,14 euros au titre du troisième mois de préavis et celle de 100 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice issu de la rupture, l'arrêt rendu le 14 janvier 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Condamne la société Marcel Robbez-Masson diffusion aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Marcel Robbez-Masson diffusion à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat aux Conseils pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir considéré que la rupture des relations contractuelles s'analysait en une démission claire et non équivoque et d'avoir, en conséquence, débouté M. X... de ses demandes à ce titre ;
AUX MOTIFS QUE le 10 juin 2004, Monsieur Laurent X... a adressé à son employeur une lettre recommandée avec accusé de réception ainsi libellée : « Je vous informe par la présente de ma décision de démission de votre société. Mon préavis de deux mois (art. L.122-6) commencera à réception de la présente et je vous invite à me préciser si vous souhaitez ou non que je l'exécute. Je vous prie de recevoir, Monsieur, mes respectueuses salutations » ; que le salarié affirme que cette démission, où ne figurent ni motifs ni réserves, est due à l'absence de revalorisation de la partie variable de sa rémunération malgré ses excellents résultats et la promesse qui lui en avait été faite, et à un calcul injuste, discriminatoire et opaque des primes versées dans ce cadre ; qu'il y a lieu de constater, au vu de l'avenant au contrat de travail, que ce calcul est au contraire très explicite et prévoit trois niveaux de primes en fonction des résultats obtenus par le salarié par rapport aux objectifs, minimum et maximum, en matière de chiffre d'affaires, dénommé MTF : montant total « façon », ce qu'ont observé également les premiers juges ; que par ailleurs, M. X... n'apporte aucun élément de preuve concernant le prétendu engagement de l'employeur à une revalorisation des salaires, ni aucun élément chiffré pour établir ses propres résultats et ceux de ses collègues, pas plus que les primes perçues par chacun et la discrimination alléguée n'est en rien démontrée ; que le salarié, embauché en mai 1999, n'a jamais remis en cause auparavant les primes et salaires perçus conformément à son contrat de travail et à l'avenant et la chronologie des faits permet de constater qu'une semaine avant de démissionner, il avait finalisé son embauche auprès d'une entreprise monégasque concurrente, au sein de laquelle il devait commencer à travailler le 23 août suivant ; qu'il y a lieu par conséquent de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur X... de ses demandes de rappel de salaire et de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la rupture s'analysant au contraire en une démission claire et non équivoque au vu de ce qui précède ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en se contentant d'affirmer qu'au vu de l'avenant au contrat de travail en date du 27 novembre 2002, le calcul de la partie variable du salaire de M. X... était très explicite sans même s'expliquer sur le moyen déterminant des conclusions de l'exposant soulignant que la formule de calcul de la prime ne comportait aucun chiffre, qu'elle ne précisait ni le ratio, ni le pourcentage du chiffre d'affaires qui devrait être réalisé et que chacun des paramètres destinés selon l'avenant à calculer cette prime ne dépendait que de la bonne volonté de la Société, la Cour d'appel a d'ores et déjà méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ET ALORS, D'AUTRE PART, QU'il appartient au salarié qui invoque une atteinte à au principe d'égalité, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de traitement, à charge ensuite pour son employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs justifiant cette différence ; qu'en se contentant d'affirmer que la discrimination alléguée n'était en rien démontrée alors que M. X... avait satisfait à la charge de l'allégation qui pesait sur lui, en produisant un email de son collègue, M. Y..., indiquant qu'il avait lui même alerté en vain la direction sur l'existence d'une discrimination dans les salaires, ainsi qu'un email, émanant de la Société, au terme duquel elle indiquait « nous donnerons des primes discrétionnaires en fonctions de réalisations d'objectifs et du travail bien accompli », attestant ainsi d'un traitement différencié des salariés sans qu'aucune justification objective n'ait été avancée, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L.1132-1 ancien article L.122-45, alinéa 1 et L.1134-1 ancien article L.122-45, alinéa 4 du Code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande de contrepartie financière à l'obligation de non concurrence et des congés payés afférents ;
AUX MOTIFS QUE l'appelant réclame une indemnité de non concurrence et les congés payés afférents en soutenant que l'employeur a levé la clause correspondante, mais hors délais ; qu'il a démissionné par lettre recommandée datée du 10 juin 2004, dont il ne produit pas l'accusé de réception par la société, qui n'a reçu ce courrier que le 14 juin 2004 et avait donc jusqu'au 28 juin suivant pour lever la clause de non concurrence, ce qu'elle justifie avoir fait par courrier daté et posté le 22 juin 2004, dans lequel elle prenait également acte de la démission du salarié, cette lettre a été présentée le lendemain 23 juin à l'adresse de Monsieur X... à VOSNE ROMANEE et il a attendu le 2 juillet suivant pour la retirer ; que par conséquent, il convient de considérer, comme l'a fait le Conseil, que le délai de 15 jours pour lever la clause de non concurrence a été respecté par l'employeur et de confirmer le débouté du salarié de sa demande à ce titre ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en retenant, pour débouter M. X... de sa demande de contrepartie financière à la clause de non concurrence, que le délai de 15 jours prévu par le contrat de travail pour lever ladite clause avait été respecté par la Société, sans même répondre au moyen déterminant des conclusions de l'exposant soulignant que les dispositions conventionnelles, plus favorables que les dispositions contractuelles, prévoyaient un délai de renonciation de 8 jours, délai largement écoulé lorsque l'employeur avait cru pouvoir exercer cette faculté, la Cour d'appel a gravement méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ET ALORS, D'AUTRE PART (et subsidiairement), QUE le délai de renonciation par l'employeur à se prévaloir d'une clause de non concurrence expire le jour où la lettre notifiant cette décision a été reçue par le salarié ; qu'en l'espèce, alors qu'il lui avait notifié la rupture des relations contractuelles par lettre du 10 juin, reçue le 12 juin, M. X... n'avait reçu la lettre de la Société MARCEL ROBBEZ-MASSON DIFFUSION que le 2 juillet 2004, soit au delà du délai de deux semaines prévu par le contrat de travail ; que la Cour d'appel qui, constatant que la Société avait jusqu'au 28 juin 2004 pour lever la clause de non concurrence et qu'elle avait exercé cette faculté par lettre du 23 juin reçue le 2 juillet suivant par le salarié, a néanmoins estimé que la renonciation avait été faite dans les délais prévus, a violé l'article L.1221-1 ancien article L.121-1 du Code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. X... à verser la somme de 1.067,14 à la Société MARCEL ROBBEZ-MASSON DIFFUSION au titre du troisième mois de préavis et de 100 à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice subi ;
AUX MOTIFS QUE la société MARCEL ROBBEZ-MASSON DIFFUSION relève du code APE 511R « autres intermédiaires spécialisés de commerce », exerçant une activité d'agence commerciale d'articles de bijouterie, négociation et conclusion de contrats de vente ou dépôt de vente d'articles de bijouterie au nom et pour le compte de producteurs, fabricants ou commerçants, activité de services et non de commerce de gros et n'entre donc pas dans le champ d'application de la Convention collective de la bijouterie, comme le soutient Monsieur X... pour affirmer qu'il ne devait exécuter que deux mois de préavis et non trois comme le prévoit l'article 13 de son contrat de travail en cas d'ancienneté supérieure à un an, ce qui est son cas ; qu'en l'absence de convention collective applicable, il y a lieu de s'en tenir à l'article L.122-6 du Code du travail et au contrat de travail de l'intéressé et de confirmer la décision critiquée en ce qu'elle a alloué à la société MRMD la somme correspondant au troisième mois de préavis, ainsi qu'une équitable réparation du préjudice issu de la rupture, qui n'a pas lieu d'être revue à la hausse ;
ALORS QU'au terme du premier alinéa de l'article L.1237-1 ancien article L.122-5 du Code du travail, en cas de démission, l'existence et la durée du préavis sont fixés par la loi, ou par convention ou accord collectif de travail et, au terme du deuxième alinéa, en l'absence de dispositions légales, de convention ou accord collectif de travail relatifs au préavis, son existence et sa durée résultent des usages pratiqués dans la localité et dans la profession ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsque la convention collective est muette, le préavis inscrit dans le contrat de travail ne s'impose pas au salarié démissionnaire ; que dès lors, la Cour d'appel qui, considérant que la rupture s'analysait en une démission et qu'aucune convention collective ne déterminait en l'occurrence la durée du préavis, s'est référée aux dispositions de l'article L.1234-1 ancien article L.122-6 du Code du travail, relatif au préavis en cas de licenciement, et au contrat de travail pour en conclure que le préavis de M. X... devait être fixé à trois mois et le condamner à verser à la Société MARCEL ROBBEZ-MASSON DIFFUSION la somme de 1.067,14 à ce titre, a violé ensemble les articles L.1237-1, L.1234-1 et L.2254-1 ancien article L.135-2 du Code du travail.