LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1382 du code civil et le principe de la réparation intégrale du préjudice ;
Attendu que l'indemnisation due par l'auteur d'une infraction intentionnelle contre les biens ne peut être réduite en raison de la négligence de la victime lorsqu'il en résulterait pour lui un profit quelconque ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X..., engagée par la société des Orchidées pour tenir sa comptabilité, a, entre le mois de novembre 2000 et le mois de décembre 2001, imité la signature d'un des dirigeants afin d'encaisser huit chèques tirés sur le compte de la société ; qu'elle a été assignée par la société des Orchidées en remboursement des sommes détournées ;
Attendu que pour limiter le montant de la réparation du préjudice subi par la société des Orchidées à une certaine somme, l'arrêt retient que cette société a mis plus de deux ans à s'apercevoir de l'existence de détournements portant sur des chèques d'un montant variant chacun entre 5 000 et 18 000 euros, échelonnés sur dix sept mois et deux exercices sociaux ce qui caractérise sa négligence dans le contrôle de sa comptabilité ; que si la société avait vérifié sa comptabilité de l'exercice 2000, ce qui lui appartenait de faire, elle se serait rendu compte des détournements d'ores et déjà commis et aurait empêché les détournements commis en 2001 ; qu'elle a ainsi participé à la réalisation de son propre préjudice dans une proportion qui, eu égard au montant des chèques détournés et à leur date, sera estimée à la moitié ;
Qu'en statuant ainsi la cour d'appel a violé le texte et le principe susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 juin 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme X... à payer à la société des Orchidées la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour la société des Orchidées
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir limité la réparation du préjudice subi par la S.C.I. Les Orchidées à la somme de 49.775,97 euros ;
AUX MOTIFS QU' il n'est nullement établi que les prélèvements effectués pour son compte par Mme X... ont été autorisés par la S.C.I. Les Orchidées ni même par M. Y... son cogérant, les relations personnelles entre M. Y... et Mme X... ne pouvant valoir autorisation de détournement de fonds sociaux ; que la preuve d'une procuration bancaire qui aurait été donnée à Mme X... sur le compte bancaire de la S.C.I. Les Orchidées n'est pas plus rapportée ; que l'argument selon lequel Mme X... se serait vu confier des tâches excédant ses compétences est enfin sans portée, n'étant pas de nature à justifier la falsification des chèques ni leur détournement ; Considérant que par la faute commise, Mme X... a engagé sa responsabilité envers la S.C.I. Les Orchidées ; Mais considérant que la S.C.I. Les Orchidées a mis plus de deux ans à s'apercevoir de l'existence de détournements portant sur des chèques d'un montant variant chacun entre 5.000 et 18.000 euros, échelonnés sur dix sept mois et deux exercices sociaux ce qui caractérise sa négligence dans le contrôle de sa comptabilité ; que si la S.C.I. Les Orchidées avait vérifié sa comptabilité de l'exercice 2000, ce qu'il lui appartenait de faire, elle se serait rendu compte des détournements d'ores et déjà commis et aurait empêché les détournements commis en 2001 ; qu'elle a ainsi participé à la réalisation de son propre préjudice dans une proportion qui eu égard au montant des chèques détournés et à leur date, sera estimé à la moitié ;
ALORS QUE la faute de la victime ne permet pas de réduire le montant des réparations qui lui sont dues par l'auteur d'une infraction intentionnelle contre les biens ; qu'en limitant la réparation du préjudice à la somme de 49.775,97 euros en raison de la négligence de la victime, après avoir constaté que Mme X... avait frauduleusement détourné la somme de 99.551,00 euros, la cour d'appel, qui a ainsi permis l'enrichissement de l'auteur des détournements frauduleux, a violé l'article 1382 du code civil.