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18/11/2009 | FRANCE | N°08-44175

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 novembre 2009, 08-44175


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée en 2001 par la société Frans Maas France, aux droits de laquelle se trouve la société DSV ; que l'employeur a décidé de fermer l'agence à laquelle était affectée Mme X... à la suite du départ de l'unique client de l'agence ; que par lettre du 22 février 2005, Mme X... a été licenciée pour motif économique ; qu'elle a saisi le conseil de prud'hommes de demandes tendant à des rappels de salaire, et à la condamnation de son employeur pour licencie

ment sans cause réelle et sérieuse, notamment pour violation de l'obligati...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... a été engagée en 2001 par la société Frans Maas France, aux droits de laquelle se trouve la société DSV ; que l'employeur a décidé de fermer l'agence à laquelle était affectée Mme X... à la suite du départ de l'unique client de l'agence ; que par lettre du 22 février 2005, Mme X... a été licenciée pour motif économique ; qu'elle a saisi le conseil de prud'hommes de demandes tendant à des rappels de salaire, et à la condamnation de son employeur pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, notamment pour violation de l'obligation individuelle de reclassement ; que le syndicat CFDT est intervenu à l'instance ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident de la société qui est préalable :
Vu les articles L. 2132 3 et L. 1235 8 du code du travail ;
Attendu que pour condamner l'employeur à verser au syndicat CFDT la somme de 1 euro au titre du préjudice subi par le syndicat en raison de la violation par l'employeur de son obligation de reclassement en faveur de la salariée, la cour d'appel énonce que dans la mesure où l'article L. 1235 8 du code du travail ouvre aux organisations syndicales de salariés une action en substitution en cas de violation des dispositions légales régissant le licenciement économique, le syndicat CFDT est recevable à intervenir volontairement et principalement au côté de Mme X... ;
Attendu, cependant, que si l'article L. 1235 8 du code du travail autorise les organisations syndicales représentatives à exercer en justice, aux lieu et place du salarié, les actions qui naissent des dispositions régissant le licenciement pour motif économique, l'action du syndicat, qui, en complément des demandes formées par le salarié au titre de son préjudice individuel, vise à faire sanctionner par une indemnisation séparée l'attitude de l'employeur, nécessite en application de l'article L. 2132 3 du code du travail que le litige porte atteinte aux intérêts collectifs de la profession ;
Et attendu que le litige relatif au manquement de l'employeur à son obligation de reclassement individuel ne portait pas atteinte aux intérêts collectifs de la profession ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Sur le moyen unique du pourvoi provoqué de la société DSV :
Attendu qu'il n'y pas lieu de statuer sur ce moyen, qui n'est pas de nature à justifier l'admission du pourvoi ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il n'y ait lieu de statuer sur le pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré recevable l'intervention du syndicat CFDT et condamné la société DSV à lui verser une somme symbolique de 1 euro, l'arrêt rendu le 20 juin 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare le syndicat CFDT irrecevable en son intervention volontaire ;
Condamne la société DSV aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit novembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour le syndicat général des transports du Rhône CFDT, (demandeur au pourvoi principal).
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR, condamné la Société DSV à verser au syndicat la somme de 1 à titre symbolique en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession
AUX MOTIFS QUE dans la mesure où l'article L 1235-8 du code du travail ouvre aux organisations syndicales de salariés une action en substitution en cas de violation des dispositions légales régissant le licenciement économique, le syndicat général des transports du Rhône CFDT est recevable à intervenir volontairement et principalement au côté de Sonia X... du fait de la violation par l'employeur de l'obligation de reclassement instituée par le législateur ; que le préjudice subi par le syndicat doit être réparé par la somme symbolique 1 à laquelle doit être condamnée la société DSV
ALORS QUE la Cour d'appel a constaté que la violation de l'obligation légale de reclassement imposée à l'employeur, disposition protectrice des salariés, porte préjudice à l'intérêt de l'ensemble de la profession ; qu'en allouant cependant au syndicat une somme expressément qualifiée de symbolique dans le dispositif même de son arrêt, la cour d'appel a méconnu le principe de la réparation intégrale, en violation de l'article 1382 du Code civil, ensemble l'article L 422-11 devenu L 2132-3 du Code du travail.

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société DSV (demanderesse au pourvoi incident).

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'exposante à payer au Syndicat Général des Transports du Rhône CFDT la somme symbolique de 1 ;
AUX MOTIFS QUE « l'article L. 2132-3 du code du travail autorise les syndicats à agir en justice pour tous les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent ; En l'espèce, le syndicat général des transports du Rhône CFDT invoque trois atteintes distinctes aux intérêts collectifs de la profession qu'il représente : la violation des obligations relatives à la consultation des institutions représentatives du personnel par refus de consultation du comité central d'entreprise, la violation des dispositions de la convention collective relatives à la majoration de la rémunération en raison de la pratique d'une langue étrangère et la violation de l'obligation de reclassement ; Il n'a pas été retenu à l'encontre de l'employeur la violation de l'obligation de consulter le comité central d'entreprise ; La demande en paiement de sommes présentée par un salarié et fondée sur l'application de la convention collective peut présenter un intérêt pour l'ensemble des membres de la profession ; tel n'est pas le cas en l'espèce dans la mesure où l'employeur ne discute pas du principe de l'indemnité prévue par la convention collective et ne remet donc pas en cause la convention collective ; l'employeur soutient que la salarié ne pratiquait pas les langues étrangères ; le litige est purement individuel et factuel et ne pose aucune question de principe concernant la convention collective ; Dans la mesure où l'article L. 1235-8 du code du travail ouvre aux organisations syndicales de salariés une action en substitution en cas de violation des dispositions légales régissant le licenciement économique, le syndicat général des transports du Rhône CFDT est recevable à intervenir volontairement et principalement au côté de Sonia X... du fait de la violation par l'employeur de l'obligation de reclassement instituée par le législateur ; Le préjudice subi par le syndicat doit être réparé par la somme symbolique de 1 au paiement de laquelle doit être condamnée la société D. S. V. et le jugement entrepris doit être infirmé » ;

ALORS QUE la méconnaissance par l'employeur de l'obligation de reclassement qui pèse sur lui dans ses rapports avec son salarié ne caractérise pas en elle-même une atteinte à l'intérêt collectif de la profession exercée ; qu'en se bornant à relever que l'employeur n'avait pas proposé à la salariée de postes qui étaient disponibles, pour le condamner à verser un euro symbolique au Syndicat Général des Transports du Rhône CFDT, sans caractériser un préjudice distinct du préjudice individuel subi par la salariée, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, ensemble les article L1235-8 et L2132-3 du code du travail.

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société DSV (demanderesse au pourvoi provoqué).

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné l'exposante à payer à Mme X... 11. 352, 57 à titre de rappel de rémunérations, outre 1. 135, 25 de congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « l'article 5 de l'annexe 2 de la convention collective nationale des transports routiers applicable à la cause fait bénéficier au salarié dont l'emploi nécessite la connaissance suffisante d'une langue étrangère pour assurer couramment la traduction et la rédaction de documents d'une indemnité ayant la nature de complément de salaires ; l'indemnité est allouée pour chacune des langues étrangères pratiquées par le salarié et est égale à 8, 80 % du salaire garanti au coefficient 148, 5 si le salarié est seulement traducteur et à 13, 20 % du même salaire si le salarié est à la fois traducteur et rédacteur ; Les pièces au dossier révèlent que Sonia X... traduisait et rédigeait régulièrement des documents aussi bien en langue italienne qu'en langue anglaise ; elle pouvait donc prétendre à une indemnité de 13, 20 % du salaire garanti au coefficient 148, 5 ; L'employeur et la salariée ont chiffré pour chaque mois le montant de la rémunération minimale conventionnelle augmentée des indemnités dues pour les langues ; leurs résultats diffèrent en raison de désaccords sur les salaires versés ; les vérifications à partir des feuilles de paye au dossier montrent l'exactitude des calculs opérés par la salariée ; En conséquence, la société D. S. V. doit être condamnée à verser à Sonia X... la somme de 11. 352, 57 à titre de rappel de salaires, outre 1. 135, 25 de congés payés afférents, et le jugement entrepris doit être confirmé » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Madame X... sollicite un rappel de salaire fondé sur les dispositions de l'article 5 de l'Annexe n° 2 de la convention collective nationale du transport routier. Cet article prévoit des indemnités ayant le caractère de complément de salaires attribuées pour langues étrangères " lorsqu'un emploi exige la connaissance d'une langue étrangère suffisante pour assurer couramment la traduction (version) ou la rédaction (thème) d'un texte, l'employé chargé normalement de ce travail a droit, en sus du salaire minimum de son emploi, à une indemnité mensuelle égale à 8, 80 % du salaire garanti au coefficient 148, 5 sans ancienneté dans le tableau de salaire applicable au lieu de travail de l'intéressé lorsqu'il n'est que traducteur ou égale à 13, 20 % de ce même salaire s'il est traducteur et rédacteur. Les indemnités sont attribuées indépendamment pour chaque langue lorsqu'il y a utilisation de plusieurs langues étrangères (...) " Madame X... a été recrutée le 30 mars 2001 à la suite de l'offre d'emploi déposée par l'employeur à L'ANPE ainsi rédigée : " secrétaire traitement de texte : vous assurerez au sein d'une société de transports le montage de dossiers administratifs sur informatique et divers travaux administratifs. Une connaissance du secteur du transport et affrètement sera très appréciée ainsi qu'une connaissance en anglais et italien (..) langue anglaise souhaitée. " Il faut rappeler que la société ayant recruté en mars 2001 Madame X... était alors la société CARGO SERVICE représentée par Monsieur BORMIOLI (pièce 1) et que la société BORMIOLI était l'unique client géré par l'agence de Rive de Gier (cf conclusions de la société page 3). Par ailleurs Monsieur Y... responsable jusqu'en 2004 de l'administration des ventes de la société BORMIOLI atteste que Madame X... travaillait en italien pour gérer les affrètements de la société BORMIOLI (pièce 18). Enfin Madame X... produit divers documents rédigés en italien et anglais dans le cadre de son activité (pièce 19) ; En conséquence, il faut retenir que Madame X... utilisait deux langues étrangères en traduction et rédaction ce qui ouvre droit à une indemnité de 13, 20 % calculée sur le salaire mensuel professionnel garanti. Le décompte versé par le salarié (pièce 15) a été établi conformément aux dispositions conventionnelles et il sera fait droit à la demande soit 11. 352, 57 brut outre 1. 135, 25 au titre des congés payés afférents » ;

1. ALORS QUE l'article 5 de l'annexe 2 de la Convention collective nationale des Transports Routiers subordonne le bénéfice du complément de rémunération qu'il prévoit à la preuve que le salarié « assure couramment la traduction et la rédaction de documents » ; qu'en l'espèce, la salariée produisait, pour prétendre à ce complément, quelques mails et autres courriers adressés en anglais et en italien, révélant de simples contacts entretenus par la salariée avec des interlocuteurs étrangers, et non la réalisation de travaux de traduction et / ou de rédaction de textes ; qu'en se bornant à relever que « les pièces au dossier » révèlent que la salariée traduisait et rédigeait régulièrement des documents, sans viser ni analyser, serait-ce sommairement, le ou les documents établissant que la salariée assurait « couramment » en langues étrangères la « traduction et la rédaction de documents » au sens de la disposition conventionnelle invoquée, la Cour d'appel, qui a ainsi procédé par un visa général des pièces de la procédure, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
2. ET ALORS en tout état de cause QUE les différences de montants des salaires versés entre ceux visés par les tableaux établis par l'employeur et ceux mentionnés dans les tableaux de la salariée concernaient les mois de février 2002 (1. 189, 86 selon l'employeur et 1. 158, 54 selon la salariée), de mars 2002 (1. 189, 86 selon l'employeur et 1. 158, 54 selon la salariée), de février 2003 (1. 189, 86 selon l'employeur et selon la salariée), de juin 2003 (1. 785, 31 selon l'employeur et 1. 190, 38 selon la salariée), de septembre 2003 (1. 189, 86 selon l'employeur et 1. 785, 31 selon la salariée), et d'avril 2005 (3. 371, 70 euros selon l'employeur et 1. 264, 64 selon la salariée) ; que les bulletins de paie correspondant aux périodes litigieuses mentionnaient les montants de salaires versés visés par l'employeur ; qu'en affirmant, après avoir relevé que les calculs respectifs des parties différaient en raison de désaccords sur les salaires versés, que « les vérifications à partir des feuilles de paie montrent l'exactitude des calculs de la salariée », la Cour d'appel a dénaturé lesdites feuilles de paie, ensemble les tableaux respectifs des parties, violant l'article 1134 du code civil ;


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44175
Date de la décision : 18/11/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Analyses

SYNDICAT PROFESSIONNEL - Action en justice - Conditions - Intérêt collectif de la profession - Exclusion - Applications diverses

SYNDICAT PROFESSIONNEL - Action en justice - Action de substitution - Nature - Portée

Si l'article L. 1235-8 du code du travail autorise les organisations syndicales représentatives à exercer en justice, aux lieu et place du salarié, les actions qui naissent des dispositions régissant le licenciement pour motif économique, l'action du syndicat, qui, en complément des demandes formées par le salarié au titre de son préjudice individuel, vise à faire sanctionner par une indemnisation séparée l'attitude de l'employeur, nécessite en application de l'article L. 2132-3 du code du travail, que le litige porte atteinte aux intérêts collectifs de la profession. Tel n'est pas le cas lorsque le litige porte sur le manquement par l'employeur à son obligation de reclassement individuel


Références :

article L. 1235-8 et L. 2132-3 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 20 juin 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 nov. 2009, pourvoi n°08-44175, Bull. civ. 2009, V, n° 261
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, V, n° 261

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Aldigé
Rapporteur ?: Mme Pécaut-Rivolier
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.44175
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