LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 18 octobre 2007), qu'après la mise en redressement judiciaire de la SCP Berlioz et compagnie (la SCP), la société Franfinance location a, le 9 mai 2005, déclaré sa créance au titre d'un contrat de crédit-bail ; que le représentant des créanciers ayant contesté la régularité de la déclaration, en invoquant l'absence de pouvoir spécial donné à Mme X..., auteur de la déclaration, qui n'était pas la salariée de la société Franfinance location, le juge-commissaire a admis la créance ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la SCP fait grief à l'arrêt d'avoir admis la créance à concurrence de la somme de 1 37480, 54 euros, alors, selon le moyen :
1° / que réserve faite du cas où elle émane d'un avocat, la déclaration de créance, dès lors qu'elle émane d'un tiers, suppose un pouvoir spécial de la part du créancier ; que si le représentant légal de l'entité qui a la qualité de créancier peut déléguer, avec faculté de subdélégation, son pouvoir d'agir en justice, ce qui le dispense de donner un pouvoir spécial, ce pouvoir ne peut être délégué et subdélégué qu'au profit d'un salarié ; qu'en décidant que la qualité de salarié était indifférente, les juges du fond ont violé l'article L. 621-43 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;
2° / que, si les juges du fond ont considéré que l'auteur de la déclaration était le préposé, non seulement de la société Franfinance mais également de la société Franfinance location, cette circonstance ne le dispensait pas d'un pouvoir spécial dès lors qu'il n'avait pas la qualité de salarié ; qu'à défaut d'avoir constaté que l'auteur de la déclaration était le salarié de la société Franfinance location, les juges du fond ont à tout le moins entaché leur décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 621-43 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la société Franfinance location justifiait que le président du conseil d'administration avait donné pouvoir le 2 novembre 1999 à Mme Y... notamment de produire à toutes procédures de redressement ou de liquidation judiciaires, avec faculté de subdéléguer, que par acte du même jour, Mme Y... avait délégué ce même pouvoir à M. Z..., directeur du recouvrement de Franfinance location, avec faculté de subdéléguer, que par acte du 1er juillet 1999 M. Z... avait délégué à son tour à Mme X... le pouvoir de déclarer une créance dans une procédure collective, l'arrêt retient que celle-ci exerçait les fonctions de " responsable contentieux à l'unité " contentieuse régionale de Paris ", structure commune aux deux sociétés Franfinance location et Franfinance ; que de ces constatations, dont il résultait que Mme X... était la préposée de deux coemployeurs et qu'elle était investie d'une délégation régulière l'autorisant à effectuer des déclarations de créance pour la société Franfinance location, la cour d'appel a exactement déduit qu'elle n'avait pas à justifier d'un pouvoir spécial émanant de cette dernière ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la SCP fait encore le même grief à l'arrêt, alors selon le moyen, que si les juges du fond déterminent discrétionnairement s'il y a lieu pour eux de faire usage de la faculté de réduire la pénalité, ils sont tenus de se conformer aux règles applicables, dès lors qu'ils décident d'user de cette faculté ; que pour se prononcer sur le caractère manifestement excessif de la pénalité, les juges du fond sont tenus de motiver leur appréciation en comparant le montant de la peine conventionnellement fixée à celui du préjudice effectivement subi ; qu'en se bornant en l'espèce à rappeler le mode de calcul de la pénalité et à retenir la prise en compte par le créancier du prix de vente du matériel, sans s'expliquer sur le préjudice effectivement subi, eu égard à la valeur vénale du matériel, les juges du fond ont privé leur décision ;
Mais attendu que les juges n'ont pas à motiver spécialement leur décision lorsque, faisant application pure et simple de la convention, ils refusent de modérer la peine forfaitairement convenue ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SCP Berlioz et Co aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept novembre deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour la société civile professionnelle (SCP) Berlioz et Co
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a admis la créance de la Société FRANFINANCE LOCATION, à l'encontre de la SCP BERLIOZ et Compagnie, à hauteur de 137. 480, 54 ;
AUX MOTIFS QUE « le créancier déclarant justifie que le président du conseil d'administration de la société anonyme FRANFINANCE LOCATION a donné pouvoir le 2 novembre 1999 à Mme Hélène Y... notamment de produire à toutes procédures de redressement ou de liquidation judiciaire, avec faculté de subdéléguer ; que par acte du même jour, Mme Hélène Y... a délégué ce même pouvoir à M. Elie Z..., directeur du recouvrement de FRANFINANCE LOCATION, avec faculté de subdéléguer ; que par acte du 19 juillet 1999, M. Elie Z... a délégué à son tour à Mme Fabienne X... le pouvoir de déclarer une créance dans une procédure collective ; qu'ainsi, la Société FRANFINANCE LOCATION a justifié d'une chaîne ininterrompue de délégations de pouvoir jusqu'à la signataire de la déclaration ; que n'a pas d'influence sur la régularité du pouvoir de Mme X... le fait qu'elle exerçait à l'époque les fonctions de « responsable contentieux à l'unité contentieuse régionale de PARIS », structure commune des deux sociétés FRANFINANCE LOCATION et FRANFINANCE, dès lors que sa qualité de préposée des deux sociétés, donc de la Société FRANFINANCE LOCATION, ressort de l'attestation du responsable de la gestion des relations humaines, service également commun aux deux personnes morales, peu important qu'elle soit salariée par l'une ou l'autre des deux sociétés ; que, par conséquent, la déclaration de créance de la Société FRANFINANCE LOCATION, effectuée par un préposé titulaire d'une délégation de pouvoirs lui permettant d'accomplir un tel acte, est régulière (…) » (arrêt, p. 3, § 2, 3 et 4) ;
ALORS QUE, premièrement, réserve faite du cas où elle émane d'un avocat, la déclaration de créance, dès lors qu'elle émane d'un tiers, suppose un pouvoir spécial de la part du créancier ; que si le représentant légal de l'entité qui a la qualité de créancier peut déléguer, avec faculté de subdélégation, son pouvoir d'agir en justice, ce qui le dispense de donner un pouvoir spécial, ce pouvoir ne peut être délégué et subdélégué qu'au profit d'un salarié ; qu'en décidant que la qualité de salarié était indifférente, les juges du fond ont violé l'article L. 621-43 du Code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005 ;
Et ALORS QUE, deuxièmement, si les juges du fond ont considéré que l'auteur de la déclaration était le préposé, non seulement de la Société FRANFINANCE, mais également de la Société FRANFINANCE LOCATION, cette circonstance ne le dispensait pas d'un pouvoir spécial dès lors qu'il n'avait pas la qualité de salarié ; qu'à défaut d'avoir constaté que l'auteur de la déclaration était le salarié de la Société FRANFINANCE LOCATION, les juges du fond ont à tout le moins entaché leur décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 621-43 du Code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2005-845 du 26 juillet 2005.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a admis la créance de la Société FRANFINANCE LOCATION, à l'encontre de la SCP BERLIOZ et Compagnie, à hauteur de 137. 480, 54 ;
AUX MOTIFS QU'« il n'est pas contesté que les loyers n'ont pas été réglés ponctuellement, ce qui a entraîné la résiliation anticipée du contrat en application de son article 10, après une mise en demeure du 31 mars 2005 ; que l'article 10 précité met dans ce cas à la charge du locataire une indemnité égale à tous les loyers dus et à échoir jusqu'au terme, majorés de 10 % ; que la Société FRANFINANCE LOCATION réclame donc à bon droit à la SCP BERLIOZ et Compagnie les loyers dus au jour de la résiliation (8. 302, 11 + 5. 534, 74) et les loyers à échoir majorés de 20 % (137. 443, 28) moins des acomptes (6. 126, 24) ; que la SCP BERLIOZ et Compagnie est mal fondée à critiquer les conditions de la reprise des biens loués et de leur vente, dès lors que le contrat ne prévoit pas que la valeur de biens restitués viendrait en déduction de l'indemnité de résiliation ; que cependant, la Société FRANFINANCE LOCATION a déduit de sa créance le produit net hors taxes de la vente aux enchères des biens loués (8. 450, 79) ; que, dans ces conditions, l'indemnité contractuelle n'est pas manifestement excessive (…) » (arrêt, p. 3 in fine et p. 4, § 1 et 2) ;
ALORS QUE si les juges du fond déterminent discrétionnairement s'il y a lieu pour eux de faire usage de la faculté de réduire la pénalité, ils sont tenus de se conformer aux règles applicables, dès lors qu'ils décident d'user de cette faculté ; que pour se prononcer sur le caractère manifestement excessif de la pénalité, les juges du fond sont tenus de motiver leur appréciation en comparant le montant de la peine conventionnellement fixée à celui du préjudice effectivement subi ; qu'en se bornant en l'espèce à rappeler le mode de calcul de la pénalité et à retenir la prise en compte par le créancier du prix de vente du matériel, sans s'expliquer sur le préjudice effectivement subi, eu égard à la valeur vénale du matériel, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1152 et 1231 du Code civil.