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05/11/2009 | FRANCE | N°08-44607

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 novembre 2009, 08-44607


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué que Mme X... engagée le 10 octobre 2008 par la société Omnium de gestion et de financement en qualité de vendeuse a été licenciée pour faute grave le 26 juin 2002 ; que contestant cette décision elle a saisi la juridiction prud'homale ; que par arrêt du 24 janvier 2007 (pourvoi n°05 40.639), la chambre sociale de la Cour de cassation a cassé la décision de la cour d'appel de Douai rejetant les demandes de la salariée pour ne pas avoir expliqué les raisons objectives qui s'op

posaient à ce que l'un des postes disponibles dans la région d'Avignon...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu selon l'arrêt attaqué que Mme X... engagée le 10 octobre 2008 par la société Omnium de gestion et de financement en qualité de vendeuse a été licenciée pour faute grave le 26 juin 2002 ; que contestant cette décision elle a saisi la juridiction prud'homale ; que par arrêt du 24 janvier 2007 (pourvoi n°05 40.639), la chambre sociale de la Cour de cassation a cassé la décision de la cour d'appel de Douai rejetant les demandes de la salariée pour ne pas avoir expliqué les raisons objectives qui s'opposaient à ce que l'un des postes disponibles dans la région d'Avignon soit proposé à la salariée, contrainte de changer son domicile pour des raisons familiales sérieuses, et a renvoyé l'affaire devant la même cour autrement composée ;

Sur le moyen unique, pris en ses trois premières branches et sa cinquième branche :

Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes liées à un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen :

1°/ que dans la mesure où à l'issue d'un congé parental le salarié a droit à retrouver son emploi «ou un emploi similaire», la cour d'appel ne pouvait se borner à affirmer que le poste d'agent commercial était «différent» de celui de vendeur que Mme X... exerçait, sans rechercher s'il s'agissait en réalité d'un emploi «similaire», en sorte qu'elle a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1222-1, L. 1225-55 et L. 1234-1 du code du travail ;

2°/ qu'en s'abstenant de rechercher si les postes disponibles du secteur de Montpellier convenaient à Mme X..., qui souhaitait un poste dans la région d'Avignon, plutôt que de postuler d'emblée que ces postes étaient dans un rayon géographique ne lui convenant pas, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1222-1, L. 1225-55 et L. 1234-1 du code du travail ;

3°/ qu'en ne recherchant pas si l'employeur aurait dû à tout le moins, à supposer qu'il n'ait pas eu de poste en contrat à durée indéterminée à proposer à la salariée, lui proposer un poste en contrat à durée déterminée à son retour de congé parental, tel que celui d'hôte-vendeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1222-1, L. 1225-55 et L. 1234-1 du code du travail ;

5°/ qu'enfin, en s'abstenant de rechercher si Mme X... avait bénéficié d'un entretien avec son employeur à l'issue de son congé parental, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1222-1, L. 1225-55, L. 1225-57 et L. 1234-1 du code du travail ;

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a retenu, par une appréciation souveraine que le poste d'agent commercial était différent de celui de vendeur ce dont il se déduisait qu'il ne pouvait constituer un poste similaire ;

Attendu, ensuite, que la cour d'appel a pu retenir que l'employeur n'était pas tenu de proposer les emplois existant à Montpellier et à Avignon, dès lors que le premier n'était pas situé dans le secteur géographique où la salariée avait exprimé l'intention d'être affectée et que le second impliquait une modification de la nature juridique du contrat de travail en cours, qui devait être transformé en contrat à durée déterminée ;

D'où il suit que le moyen irrecevable en sa cinquième branche comme nouvelle et partant mélangée de fait et de droit, doit être rejeté pour le surplus ;

Mais sur le moyen, pris en sa quatrième branche :

Vu les articles L. 1234 1 et L. 1234 9 du code du travail ;

Attendu que, pour débouter Mme X... de ses demandes en paiement d'indemnité de préavis et de licenciement, la cour d'appel a retenu que son refus de rejoindre son poste de travail à Valenciennes obligeait l'employeur à la licencier et que le motif énoncé dans la lettre de licenciement, constitué par le refus de l'intéressée de rejoindre ce poste, à l'issue d'un congé parental d'éducation, justifiait un licenciement pour faute grave ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle relevait que le refus de rejoindre le poste de Valenciennes était lié à des raisons d'ordre personnel et familial, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a retenu une faute grave, l'arrêt rendu le 31 janvier 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Dit et juge que la faute grave de Mme X... n'est pas constituée ;

Renvoie les parties devant la cour d'appel de Lyon pour qu'il soit statué sur les conséquences du licenciement ;

Condamne la société Omnium de gestion et de financement aux dépens ;

Vu les articles 37 de la loi du 10 juillet 2009 et 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à la SCP Baraduc et Duhamel la somme de 2 500 euros à charge pour elle de renoncer à la part contributive de l'Etat ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq novembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils pour Mme X....

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la salariée de ses demandes contestant la légitimité de son licenciement pour faute grave ;

AUX MOTIFS PROPRES ET ADOPTES QU' à l'issue de son congé parental d'éducation qui se terminait le 12 mai 2002, Madame X... n'a pas repris ses fonctions à l'agence de Raismes ; qu'elle avait la possibilité d'accéder à la bourse de l'emploi mise en place par la société, cette bourse étant une banque de données internes permettant le recensement, chaque mois, des postes disponibles par régions et catégories professionnelles ; qu'un salarié ne peut imposer à l'employeur aucun changement de ses conditions de travail ni modification de son contrat ; qu'il résulte de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme et de l'article L 120-4 du Code du travail que lorsqu'un salarié change de domicile pour des raisons familiales sérieuses, l'employeur qui dispose de postes dans la région du nouveau domicile du salarié doit, sauf si des raisons objectives s'y opposent, lui proposer l'un des postes disponibles ; qu'en ne le faisant pas, l'employeur porte atteinte de façon disproportionnée à la liberté de choix du domicile de son salarié ; qu'en la cause, il est établi que Monsieur Y..., concubin de Sylvie X... qui travaillait pour la société Brico Dépôt de Cambrai, a fait l'objet d'une mutation au Pontet, dans la région d'Avignon, à compter du 18 juin 2001 ; que Sylvie X..., qui était en congé parental d'éducation, a fait une demande de mutation et, en raison d'absence de poste disponible, a sollicité la prolongation de son congé parental d'éducation jusqu'au 11 mai 2002, date du troisième anniversaire de son enfant ; qu'il peut être admis, à la lecture des courriers échangés entre Sylvie X... et la société OGF, qu'il était clair entre les parties que Sylvie X... repoussait la fin de son congé parental non de date à date mais dans l'attente de la libération, sur la région d'Avignon, d'un poste compatible avec ses capacités et susceptible de lui être proposé en mutation ; que la période à prendre en considération est donc juin 2001/mai 2002 ; que sur cette période, la consultation du registre du personnel (entrées et sorties) de la société OGF révèle que :
- certains des postes disponibles correspondaient à l'emploi d'assistant commercial, emploi qui, décrit à la convention collective applicable, comporte des fonctions différentes de celles de vendeur et relève d'une classification supérieure : la société OGF pouvait donc objectivement ne pas proposer ces postes à Sylvie X...,
- certains des postes relevaient d'un autre secteur géographique que celui d'Avignon (par exemple : Montpellier) : or Sylvie X..., qui souhaitait rejoindre son mari pour élever son (ou leurs) enfant(s), n'avait pas précisé le rayon géographique qu'elle désirait, et le site de Montpellier pouvait être considéré comme trop lointain d'Avignon pour être proposé ; il s'agissait en toute hypothèse d'un autre secteur géographique,
- un poste d'hôte-vendeur apparemment disponible sur la région d'Avignon correspondait en réalité à un emploi en contrat de travail à durée déterminée : or la société OGF, qui était liée à Sylvie X... par une relation à durée indéterminée, ne pouvait proposer un tel poste,
- un poste d'agent commercial s'est libéré en janvier 2002 à Avignon : cependant, là encore, il s'agissait d'un emploi différent de celui occupé par Sylvie X... à Valenciennes :
qu'en l'état de ces documents, il est utilement établi que la société OGF avait des raisons objectives de ne pas proposer à Sylvie X... de mutation sur la région d'Avignon, raisons objectives qui tenaient en l'absence de poste disponible et/ou susceptible de correspondre à la situation de l'intéressée pendant la période litigieuse ; que la société OGF a institué une bourse interne de l'emploi ; or, les postes aujourd'hui visés par Sylvie X... ont nécessairement été publiés dans le cadre de cette bourse et néanmoins Sylvie X... n'a formulé aucune candidature précise ; que dans la mesure où Sylvie X... a refusé de rejoindre son poste de travail situé à Valenciennes et qu'elle n'a pas démissionné, la société OGF ne pouvait que procéder au licenciement de sa salariée ; que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement, à savoir le fait de n'avoir pas repris ses fonctions au secteur opérationnel de Valenciennes, à l'issue de son congé parental d'éducation qui se terminait le 12 mai 2002, justifient le prononcé du licenciement pour faute grave ;

1°) ALORS QUE dans la mesure où à l'issue d'un congé parental le salarié a droit à retrouver son emploi «ou un emploi similaire», la cour d'appel ne pouvait se borner à affirmer que le poste d'agent commercial était «différent» de celui de vendeur que Madame X... exerçait, sans rechercher s'il s'agissait en réalité d'un emploi «similaire», en sorte qu'elle a privé sa décision de base légale au regard des articles L 1222-1, L 1225-55 et L 1234-1 du Code du travail ;

2°) ALORS QU' en s'abstenant de rechercher si les postes disponibles du secteur de Montpellier convenaient à Madame X..., qui souhaitait un poste dans la région d'Avignon, plutôt que de postuler d'emblée que ces postes étaient dans un rayon géographique ne lui convenant pas, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 1222-1, L 1225-55 et L 1234-1 du Code du travail ;

3°) ALORS QU' en ne recherchant pas si l'employeur aurait dû à tout le moins, à supposer qu'il n'ait pas eu de poste en contrat à durée indéterminée à proposer à la salariée, lui proposer un poste en contrat à durée déterminée à son retour de congé parental, tel que celui d'hôte-vendeur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 1222-1, L 1225-55 et L 1234-1 du Code du travail ;

4°) ALORS QUE, subsidiairement, quand bien même l'employeur n'aurait eu aucun poste similaire à proposer à Madame X..., il ne pouvait, compte tenu des circonstances l'ayant conduite à déménager pour suivre son concubin muté à Avignon, la licencier pour faute grave, mais tout au plus pour cause réelle et sérieuse ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé les articles L 222-1, L 1225-55 et L 1234-1 du Code du travail ;

5°) ALORS QU' enfin, en s'abstenant de rechercher si Madame X... avait bénéficié d'un entretien avec son employeur à l'issue de son congé parental, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L 1222-1, L 1225-55, L 1225-57 et L 1234-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-44607
Date de la décision : 05/11/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle partiellement sans renvoi
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 31 janvier 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 nov. 2009, pourvoi n°08-44607


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.44607
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