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27/10/2009 | FRANCE | N°09-80490

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 27 octobre 2009, 09-80490


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- LA SOCIÉTÉ MANURÉGION,

contre l'arrêt de la cour d'appel de REIMS, chambre correctionnelle, en date du 3 septembre 2008, qui, pour blessures involontaires, l'a condamnée à 5 000 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-2 et 222-20 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;



"en ce que l'arrêt attaqué a condamné la SAS Manurégion, prévenue, du chef de blessures inv...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- LA SOCIÉTÉ MANURÉGION,

contre l'arrêt de la cour d'appel de REIMS, chambre correctionnelle, en date du 3 septembre 2008, qui, pour blessures involontaires, l'a condamnée à 5 000 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 121-2 et 222-20 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné la SAS Manurégion, prévenue, du chef de blessures involontaires suivies d'une incapacité totale de travail n'excédant pas trois mois, et a prononcé sur la répression et les intérêts civils ;

"aux motifs que, le 12 juillet 2002, en fin de matinée, David X..., mis à disposition de la SAS Manurégion par la société Crit Intérim, est tombé d'une hauteur de près de quatre mètres alors que, monté sur une échelle, il procédait à des opérations d'installation de portes d'accès d'un entrepôt ; que David X... a déposé plainte avec constitution de partie civile contre X, pour blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail inférieure à trois mois ; qu'il expliquait que sa chute avait été causée par l'absence de patins antidérapants aux pieds de l'échelle mise à sa disposition par l'entreprise ; que ce point était confirmé par un témoin, M. Y..., qui travaillait sur les mêmes lieux pour le compte d'une autre entreprise ; qu'une autre personne présente sur les lieux lors de l'accident, Guy Z..., entendu sur commission rogatoire, exposait ne pas avoir vu la chute elle-même mais répondait à la question de savoir si l'échelle utilisée par David X... possédait des patins antidérapants : « oui, je suis formel » ; qu'il était en revanche beaucoup plus évasif quant à l'outil et aux équipements de sécurité dont pouvait être équipé David X... ; qu'il ajoutait en conclusion de sa déposition avoir travaillé plus de quatre ans en intérim pour la société Manurégion ; que la société Manurégion a fait citer à l'audience l'un de ses employés, Sébastien A..., lequel était selon ses dires chargé de répartir le travail sur le chantier où la chute s'est produite, exerçant ainsi la fonction de chef d'équipe ; qu'il a déclaré ne rien avoir constaté d'anormal après la chute et que l'échelle était bien équipée de patins aux deux pieds ; qu'il reconnaissait cependant avoir été pris de panique après l'accident et ne plus se souvenir de ce qu'il était advenu de l'échelle ; que ces deux témoignages ne sont pas de nature et de portée à réduire à néant les déclarations de la victime, corroborées par un témoin sans lien de subordination avec l'une ou l'autre des parties et n'ayant pas d'intérêt manifeste à un état de fait particulier ; qu'il y a lieu en conséquence de retenir que la société Manurégion n'a pas fourni à son employé un matériel disposant des équipements de sécurité exigés ; qu'un manquement aussi grossier aux obligations de sécurité ne peut être que délibéré ;

"1°) alors que la relaxe au bénéfice du doute s'impose lorsque la preuve de la culpabilité du prévenu n'est pas rapportée de façon certaine ; qu'en l'absence de certitude quant à la présence ou non de patins antidérapants aux pieds de l'échelle, celle-ci ayant été exclue par la partie civile et un salarié de l'entreprise, et admise au contraire par deux salariés de celle-ci, et le doute devant profiter à la prévenue, en affirmant que celle-ci n'avait pas fourni à son employé un matériel disposant des équipements de sécurité exigés, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble le principe de la présomption d'innocence ;

"2°) alors, en tout état de cause, que la violation manifestement délibérée suppose la démonstration du caractère, non seulement conscient, mais téméraire de l'acte ou de l'omission incriminés ; qu'en se bornant à retenir que l'absence de patins antidérapants aux pieds de l'échelle constituait un manquement si grossier aux obligations de sécurité qu'il ne pouvait être que délibéré, la cour d'appel, qui a statué par un motif général, sans démonstration aucune du caractère conscient et téméraire de l'omission incriminée, n'a pas justifié sa décision" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure qu'un salarié d'une société d'intérim mis à la disposition de la société Manurégion a été blessé en tombant d'une échelle ; qu'à la suite de cet accident, la société a été renvoyée devant le tribunal correctionnel pour blessures involontaires par violation d'une obligation de sécurité en ayant omis de fournir des patins antidérapants pour l'utilisation de l'échelle ;

Attendu que, pour la condamner de ce chef, l'arrêt confirmatif relève que les déclarations de la victime sur l'absence de patins antidérapants, qui sont corroborées par un témoin sans lien de subordination avec les parties, permettent de retenir que la société n'a pas fourni un matériel disposant des équipements de sécurité exigés et en déduit un manquement délibéré aux obligations de sécurité ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Mais sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 451-1 du code de la sécurité sociale, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la SAS Manurégion, prévenue, responsable du préjudice subi par David X... ;

"aux motifs adoptés que David X... s'est constitué partie civile ; que sa demande est recevable et régulière en la forme ; qu'il convient de déclarer la SAS Manurégion responsable du préjudice subi par David X... ;

"alors que, selon l'article L. 451-1 du code de la sécurité sociale, qui est d'ordre public, aucune action en réparation du préjudice causé par un accident du travail ne peut, en dehors des cas prévus par ce texte, être exercée, conformément au droit commun, par la victime contre l'employeur ou ses préposés ; qu'après avoir déclaré recevable la constitution de partie civile de David X..., la cour d'appel a dit la SAS Manurégion responsable du préjudice subi par la victime à la suite de l'accident ; qu'en prononçant ainsi, sur le principe même de la responsabilité civile de la prévenue, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé" ;

Vu l'article L. 451-1 du code de la sécurité sociale ;

Attendu que, selon l'article L. 451-1 du code de la sécurité sociale, qui est d'ordre public, aucune action en réparation du préjudice causé par un accident du travail ne peut, en dehors des cas prévus par ce texte, être exercée conformément au droit commun, par la victime contre l'employeur ou ses préposés ;

Attendu qu'après avoir confirmé, à bon droit, le jugement en ce qu'il avait déclaré la constitution de partie civile recevable, l'arrêt a également confirmé la décision en ce qu'elle avait déclaré la société responsable du préjudice subi par la victime ;

Mais attendu qu'en statuant ainsi, sur le principe même de la responsabilité civile de la prévenue, la cour d'appel a méconnu le texte sus-visé et le principe ci-dessus rappelé ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, par voie de retranchement, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Reims, en date du 3 septembre 2008, en ses seules dispositions ayant déclaré la société Manurégion responsable du préjudice subi par David X..., toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et attendu qu'il ne reste rien à juger ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Reims et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : Mme Anzani conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Degorce conseiller rapporteur, Mme Palisse conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 09-80490
Date de la décision : 27/10/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 03 septembre 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 27 oct. 2009, pourvoi n°09-80490


Composition du Tribunal
Président : Mme Anzani (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:09.80490
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