LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, qui est recevable :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 10 juillet 2008), que des fissurations ayant affecté un immeuble, un expert a été désigné par une ordonnance de référé du 18 juillet 1996 ; que les opérations d'expertise ont été étendues à plusieurs parties ou ont donné lieu à diverses ordonnances de référé, en 1998, 1999 et 2001, avant que, par actes délivrés en avril et mai 2003, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble (le syndicat) et les copropriétaires n'assignent divers constructeurs et la société GAN assurances IARD, assureur multirisques habitation (l'assureur), devant un tribunal ;
Attendu que l'assureur fait grief à l'arrêt de rejeter la fin de non recevoir tirée de la prescription biennale de l'action engagée contre lui, alors, selon le moyen, que l'effet interruptif de la prescription biennale courant contre l'assureur, résultant d'une décision de justice apportant modification quelconque à une mission d'expertise ordonnée par une précédente décision, ne peut jouer que si l'assureur a été appelé dans la procédure ultérieure ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher si l'assureur avait été partie aux ordonnances de référé ultérieures, prétendument interruptives de prescription, et notamment à la dernière ordonnance du 27 septembre 2001, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 114 1 et L. 114 2 du code des assurances et 2244 du code civil, dans sa rédaction applicable en l'espèce ;
Mais attendu que toute décision judiciaire apportant une modification quelconque à une mission d'expertise, ordonnée par une précédente décision, a un effet interruptif de prescription à l'égard de toutes les parties et pour tous les chefs de préjudice procédant du sinistre en litige ;
Et attendu que l'arrêt retient que l'expert a été désigné par une ordonnance de référé du 18 juillet 1996, que le GAN a été assigné en référé le 13 mars 1997, que le délai de prescription a été successivement interrompu par diverses ordonnances de référé, rendues entre le 12 février 1998 et le 27 septembre 2001, puis constate que moins de deux ans se sont écoulés entre la dernière décision et l'assignation au fond délivrée le 9 avril 2003 ;
Que de ces énonciations et constatations, la cour d'appel a exactement déduit sans avoir à effectuer une recherche inutile, que l'action formée contre l'assureur par ses assurés, le syndicat et les copropriétaires, n'était pas prescrite ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société GAN assurances IARD aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société GAN assurances IARD ; la condamne à payer au syndicat des copropriétaires du 50 avenue du Pont Juvénal et aux neuf autres défendeurs la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par la SCP Defrenois et Levis, avocat aux Conseils, pour la société GAN assurances IARD.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris et d'AVOIR en conséquence rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale de l'action à l'encontre de la société Gan assurances Iard engagée par le syndicat des copropriétaires 50 avenue du Pont Juvénal et divers copropiétaires ;
AUX MOTIFS QUE selon l'article L. 114-1 du code des assurances, toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance ; que toutefois, ce délai ne court (…), en cas de sinistre, que du jour où les intéressés en ont eu connaissance, s'ils trouvent qu'ils l'ont ignoré jusque là ; que les désordres litigieux ne constituent un sinistre au sens de ce texte qu'à partir du moment où l'assuré a identifié sa cause, c'est-à-dire lors des premières opérations d'expertise ; qu'il est établi, en effet, que les demandeurs ont d'abord imputé les fissures, apparues dans le courant de l'année 1994, aux travaux d'aménagement et de réhabilitation de l'immeuble voisin ; que moins de deux ans se sont écoulés entre les investigations initiales de l'expert X..., désigné en cette qualité par ordonnance de référé du 18 juillet 1996, et l'assignation en référé délivrée au Gan selon acte du 13 mars 1997 ; que l'interruption du délai se prolongeant le temps de l'instance, se termine, en matière de référé, au moment de l'ordonnance désignant l'expert ; qu'un nouveau délai identique commence alors à courir mais il a été, en l'espèce, successivement interrompu par les ordonnances de référé du 12 février 1998, du 19 février 1998, du 11 juin 1998, du 29 octobre 1998, du 7 janvier 1999, du 11 mars 1999, du 18 mars 1999, du 5 août 1999 et, enfin, du 27 septembre 2001 ; qu'il est, en effet, admis par la jurisprudence la plus récente de la Cour de cassation, que toute décision judiciaire apportant une modification quelconque à une mission d'expertise, ordonnée par une précédente décision, a un effet interruptif de prescription à l'égard de toutes les parties et pour tous les chefs de préjudice procédant du sinistre en litige, et ce alors même que l'expertise ne porterait que sur certains d'entre eux ; que moins de deux ans, enfin, se sont écoulés entre la dernière ordonnance de référé du 27 septembre 2001 et l'assignation au fond délivrée le 9 avril 2003 ; que le jugement entrepris doit, en conséquence, être confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription biennale de l'action soulevée par le Gan ;
ALORS QUE l'effet interruptif de la prescription biennale courant contre l'assureur, résultant d'une décision de justice apportant modification quelconque à une mission d'expertise ordonnée par une précédente décision ne peut jouer que si l'assureur a été appelé dans la procédure ultérieure ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher si l'assureur avait été partie aux ordonnances de référé ultérieures, prétendument interruptives de prescription, et notamment à la dernière ordonnance du 27 septembre 2001, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 114-1 et L. 114-2 du code des assurances et 2244 du code civil, dans sa rédaction applicable en l'espèce.