LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 avril 2008), que la société civile immobilière Alpha Paris, propriétaire de locaux à usage commercial donné à bail à la société Inès De La Fressange Paris, a, par actes des 4 et 7 juin 2002, notifié à cette dernière un refus de renouvellement du bail au 31 décembre 2002 sans indemnité d'éviction pour motifs graves et légitimes, puis l'a assignée pour voir valider le congé et fixer l'indemnité d'occupation ; que la bailleresse a demandé à titre subsidiaire que soit prononcée la résiliation judiciaire du bail aux torts exclusifs de la locataire ;
Attendu que pour prononcer la résiliation judiciaire du bail et dire qu'en conséquence, la locataire se trouve déchue du droit au paiement de l'indemnité d'éviction, l'arrêt retient que la locataire n'a pas réglé la totalité de l'indemnité d'occupation ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société Ines De La Fressange Paris qui faisait valoir que la bailleresse avait manqué à l'obligation de loyauté et délivré de mauvaise foi des commandements de payer, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le troisième moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a prononcé la résiliation du contrat de bail liant les parties et dit que, partant, la locataire était déchue de son droit à perception d'une indemnité d'éviction, l'arrêt rendu le16 avril 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne la SCI Alpha Paris aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SCI Alpha Paris à payer à la société Inès de la Fressange Paris la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de la SCI Alpha Paris ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat de la société Ines de la Fressange Paris
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé, à compter du 18 août 2005, la résiliation du contrat de bail liant les parties pour nonpaiement de la totalité des sommes dues en contrepartie de l'occupation des lieux et dit que, partant, la locataire était déchue de son droit à perception de l'indemnité d'éviction ;
AUX MOTIFS QUE « le bailleur peut solliciter la résiliation du bail pour retard réitéré du locataire demeuré dans les lieux à l'expiration du bail commercial dans le règlement des sommes dues en contrepartie de l'occupation des lieux, savoir de l'indemnité d'occupation se substituant au loyer ; qu'une telle attitude, en effet, caractérise un manquement à l'obligation principale du preneur susceptible de justifier la résiliation et, partant, la déchéance du droit à indemnité d'éviction ; que les parties ont, après la décision du juge de la mise en état du 29 avril 2003 ayant condamné la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS à une indemnité d'occupation provisionnelle annuelle de 400.000 , outre taxes et charges, signé un accord, dans la prévision d'une cession, selon une quelconque modalité, par la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS de son droit au bail avant la fin de l'année 2003 ; que cet accord prévoyait un étalement du paiement de l'indemnité d'occupation et une « indemnité supplémentaire » de 100.000 ; que si, comme l'a souligné le premier juge, les échéances fixées n'ont pas été ponctuellement respectées, à l'exception de la première, il n'en demeure pas moins que cet accord n'avait prévu, en cas de non réalisation de ses modalités et de la cession envisagée, aucune autre conséquence que la reprise des instances en cours qui fut effective dès le mois de janvier 2004 ; que cet accord, qui s'est inscrit dans une démarche transactionnelle, ne saurait provoquer, même en l'absence de son respect total, la résiliation du bail, alors que la SCI ALPHA PARIS, ayant pu reprendre ses poursuites et perçu une somme supplémentaire de 100.000 , n'a pas subi de préjudice particulier, cela d'autant que, selon le relevé de compte produit, il a été facturé une somme de 1.419,45 , « intérêts de retard », qui a été réglée par chèque le 1er décembre et qu'il n'est pas invoqué que l'absence de cession de son droit au bail par la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS soit imputable à faute à celle-ci ; que, par la suite, il résulte des propres courriers de la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS qu'elle n'a pas respecté l'obligation de paiement d'une indemnité d'occupation qui, même dans sa thèse, où elle contestait, à bon droit, sa privation d'indemnité d'éviction, était due ; que si les appels de versement du mandataire de la SCI ALPHA PARIS se sont faits, à tort, sur la base du montant fixé par le premier juge, il reste que la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS a versé, avant son expulsion :
- 100.000 le 22 mars 2004 ;
- 120.000 le 6 août 2004 ;
- 130.000 le 8 septembre 2004 ;
- 130.000 le 14 octobre 2004 ;
- 130.000 le 18 novembre 2004 ;
- 110.000 le 11 mai 2005 ;
- 110.000 le 3 juin 2005 ;
soit 830.000 au total ; que le dernier versement de la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS devait intervenir le 16 mars 2006 pour un montant de 29.999,99 portant sur les règlements totaux à cette date postérieure à l'expulsion, à 859.999,99 ; qu'il était dû au 1er juillet 2005, sur la base de la condamnation du juge de la mise en état du 29 avril 2003, seule exécutoire, étant souligné que l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 1er juillet 2005 a été signifiée le 9 août 2005 :
- 1er trimestre 2004 : 125.981, 52 ;
- 2ème trimestre 2004 : 125.981,52 ;
- 3ème trimestre 2004 : 125.981,52 ;
- 4ème trimestre 2004 : 125.981,52 ;
- 1er trimestre 2005 : 125.981,52 ;
- 2ème trimestre 2005 : 125.981,52 ;
- 3ème trimestre 2005 : 125.981,52 ;
soit au total 881.870,64 ; qu'à cette somme se rajoutent :
- la régularisation des charges 2002 (exigible au 25 février 2004) :
1.518,72 ;
- la régularisation des charges 2003 (exigible au 2 février 2005) :
10.498, 26 ;
- les régularisations des charges antérieures (2000 et 2001, compte tenu d'un avoir pour 1999), non réglées : 1.528,26 ;
- impôt foncier 2004 (demandé en septembre 2004) : 13.118,86 ;
soit au total 907.174,74 ; que si le mandataire de la SCI ALPHA PARIS ne s'est pas opposé à un étalement de la dette de la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS, il n'en demeure pas moins que l'on ne peut en déduire une renonciation de la SCI ALPHA PARIS à réclamer la résiliation du bail ; qu'en effet, parallèlement à cette attitude tolérante, la SCI ALPHA PARIS réclamait du conseiller de la mise en état, après un premier rejet, qu'il accorde l'exécution provisoire du jugement entrepris ; que cette position du mandataire est manifestement le fruit d'une prise en compte des limites des capacités financières de la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS qu'elle évoque, elle-même, dans cette instance, en faisant état des difficultés financières qu'elle a rencontrées avec un de ses cocontractants, la Société TOURS COUTURE ; qu'elle ne pouvait traduire une quelconque renonciation qui, ne se présumant pas, doit résulter d'actes manifestant, sans équivoque, la volonté de renoncer ; qu'en renouvelant des retards dans ses paiements, alors que, précédemment déjà, elle n'avait pas respecté les échéances contractuelles et alors que, quelles que soient les raisons de ses difficultés financières, qui, en tout état de cause, n'avaient pas entraîné de sa part la mise en oeuvre des procédures légales destinées à les prendre en compte, elle ne pouvait persister dans le transfert de celles-ci, au préjudice de son bailleur, sans provoquer le prononcé de la résiliation du contrat ; qu'à cet égard, la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS ne peut valablement faire grief à la SCI ALPHA PARIS de ne pas avoir eu recours aux garanties qui lui avaient été accordées alors qu'il lui était loisible de ne point le faire et que ce recours même aurait été révélateur des manquements de la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS ; que, par ailleurs, sont inopérants les moyens fondés sur la contestation de la validité des réclamations relatives aux charges alors qu'en vertu du contrat de bail et de l'article 1728 du Code civil, la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS était tenue de payer le prix du bail, en ce compris les charges, aucune décision judiciaire ne les ayant considérées comme indues (elle-même n'évoquant pas cela en première instance) et la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS ayant pu user des lieux conformément à leur destination contractuelle ; que pour le même motif, ne peut être retenu le moyen selon lequel l'irrégularité (au regard des exigences de l'article L. 441-3 du Code de commerce) alléguée par la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS des factures émises pour les loyers emporterait qu'aucune obligation de paiement ne pèserait sur la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS ; qu'en effet, l'obligation de paiement, qui vient d'être rappelée, repose non pas sur l'émission des factures mais sur la loi et le contrat précités ; que la résiliation prendra effet au 18 août 2005, date de l'expulsion de la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS ; qu'en conséquence du prononcé de cette résiliation, la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS sera déchue de son droit à perception d'une indemnité d'éviction » (cf. arrêt p. 7 à 9) ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en retenant que des retards de paiement de l'indemnité d'occupation justifiaient la résiliation du bail sans indemnité d'éviction, sans répondre aux conclusions de la Société INES DE LA FRESSANGE PARIS faisant valoir d'une part, que le bailleur avait, depuis l'origine, manqué à son obligation de reddition de compte des charges, avait émis des facturations irrégulières, ce qui lui interdisait d'en acquitter le montant, avait délivré de mauvaise foi des commandements de payer après avoir refusé d'encaisser des chèques qui lui avaient été régulièrement adressés, avait procédé à son expulsion le 16 août 2005 dans des conditions irrégulières, après avoir pourtant, en outre, accepté son maintien dans les lieux jusqu'au mois de décembre 2005 et, d'autre part, qu'il s'agissait là de manquements graves de la part de la SCI ALPHA PARIS à ses obligations contractuelles, à son devoir de loyauté et de bonne foi lui permettant non seulement d'exciper de l'exception d'inexécution mais privant également de toute légitimité la demande de la Société ALPHA PARIS en résiliation du bail et justifiant subsidiairement d'une telle résiliation aux torts de celle-ci, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QU'en vertu de l'article 1315 alinéa 1 du Code civil, c'est à celui qui se prétend créancier d'établir l'existence de sa créance ; qu'en estimant en l'espèce inopérant le moyen fondé sur la contestation des réclamations relatives aux charges, au motif que la société locataire est tenue de les payer tant qu'une décision judiciaire ne les a pas déclarées indues, alors qu'il appartenait au bailleur de justifier du montant exact des charges dues par sa locataire, la Cour d'appel a violé l'article 1315 alinéa 1 du code civil ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QUE dans ses conclusions d'appel, la Société INES DE LA FRESSANGE PARIS faisait valoir que la Société ALPHA PARIS refusait encore en cause d'appel « de justifier de la moindre reddition de compte de charges en bonne et due forme » et précisait qu' « à la veille de la date fixée pour la clôture et à quelques jours de l'audience », seule avait été communiquée « une reddition de compte de charges partielle ne concernant que les années 2003 à 2005 » et que le montant des charges locatives non détaillées depuis l'origine du bail était de 275.217,30 ; qu'en se bornant à affirmer que le bailleur « produit aux débats des pièces » qui ne seraient pas utilement contestées par la Société INES DE LA FRESSANGE, sans préciser quelles étaient ces pièces ni procéder à aucune analyse, même sommaire, de celles-ci, la Cour d'appel a entaché sa décision de défaut de motifs, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE QUATRIEME PART, QUE la renonciation à demander la résiliation du bail peut résulter tacitement d'une acceptation par le bailleur d'un échéancier de règlement pour l'occupation des locaux jusqu'à une date déterminée ; qu'en l'espèce, la Société INES DE LA FRESSANGE PARIS faisait valoir que la Société ALPHA PARIS avait renoncé à solliciter la résolution judiciaire du bail parce qu'elle avait accepté, par courrier du 14 juin 2005, un échéancier de règlement pour l'occupation des locaux jusqu'au mois de décembre 2005 ; qu'en se bornant à retenir qu'en ne s'opposant pas à un étalement de la dette de la Société INES DE LA FRESSANGE PARIS la Société ALPHA PARIS n'aurait pas renoncé sans équivoque à demander la résiliation du bail, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, en acceptant un échéancier de règlement pour une occupation des locaux jusqu'au mois de décembre 2005, la Société ALPHA PARIS n'avait pas tacitement renoncé à solliciter la résiliation antérieure du bail, la Cour d'appel a entaché sa décision de défaut de réponse à conclusions, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS, DE CINQUIEME PART, QU'en vertu de l'article L. 145-28 du Code de commerce, le droit au maintien dans les lieux s'exerce aux clauses et conditions du bail expiré ; qu'en conséquence, conformément à l'article L. 145-17 du même Code, seul un motif grave et légitime peut venir priver le locataire de son droit à une indemnité d'éviction ; qu'en l'espèce, en se fondant sur des retards de paiement de l'indemnité d'occupation, sans constater que ces retards minimes constituaient un motif grave et légitime de résiliation et de privation de l'indemnité d'éviction, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
ALORS, DE SIXIEME PART, QU'en vertu de l'article L. 415-17 du Code de commerce, le locataire ne peut être privé de son indemnité d'éviction que si l'infraction qu'il a commise constitue un motif grave et légitime et, s'il s'agit de l'inexécution d'une obligation, si l'infraction s'est poursuivie ou a été renouvelée plus d'un mois après mise en demeure du bailleur par acte extrajudiciaire d'avoir à la faire cesser ; qu'en l'espèce, en privant la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS de son droit à indemnité d'éviction, au motif qu'elle n'avait pas respecté les échéances contractuelles avant l'expiration du bail, bien qu'elle ait honoré dans le délai d'un mois tous les commandements de payer délivrés pendant la durée du bail, et sans relever que l'infraction reprochée à la société locataire après l'expiration du bail se serait poursuivie ou se serait renouvelée plus d'un mois après mise en demeure du bailleur d'avoir à la faire cesser, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du texte précité.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé à compter du 18 août 2005 la résiliation du contrat de bail liant les parties ;
AUX MOTIFS QUE « le bailleur peut solliciter la résiliation du bail pour retard réitéré du locataire demeuré dans les lieux à l'expiration du bail commercial, dans le règlement des sommes dues en contrepartie de l'occupation des lieux, savoir de l'indemnité d'occupation se substituant au loyer ; qu'une telle attitude, en effet, caractérise un manquement à l'obligation principale du preneur susceptible de justifier la résiliation et, partant, la déchéance du droit à indemnité d'éviction ; que les parties ont, après la décision du juge de la mise en état du 29 avril 2003 ayant condamné la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS à une indemnité d'occupation provisionnelle annuelle de 400.000 , outre taxes et charges, signé un accord, dans la prévision d'une cession, selon une quelconque modalité, par la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS de son droit au bail avant la fin de l'année 2003 ; que cet accord prévoyait un étalement du paiement de l'indemnité d'occupation et une « indemnité supplémentaire » de 100.000 ; que si, comme l'a souligné le premier juge, les échéances fixées n'ont pas été ponctuellement respectées, à l'exception de la première, il n'en demeure pas moins que cet accord n'avait prévu, en cas de non réalisation de ses modalités et de la cession envisagée, aucune autre conséquence que la reprise des instances en cours qui fut effective dès le mois de janvier 2004 ; que cet accord, qui s'est inscrit dans une démarche transactionnelle, ne saurait provoquer, même en l'absence de son respect total, la résiliation du bail alors que la SCI ALPHA PARIS, ayant pu reprendre ses poursuites et perçu une somme supplémentaire de 100.000 , n'a pas subi de préjudice particulier, cela d'autant que, selon le relevé de compte produit, il a été facturé une somme de 1.419,45 « intérêts de retard » qui a été réglée par chèque le 1er décembre et qu'il n'est pas invoqué que l'absence de cession de son droit au bail par la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS soit imputable à faute à celle-ci ; que, par la suite, il résulte des propres courriers de la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS qu'elle n'a pas respecté l'obligation de paiement d'une indemnité d'occupation qui même dans sa thèse, où elle contestait, à bon droit, sa privation d'indemnité d'éviction, était due ; que si les appels de versement du mandataire de la SCI ALPHA PARIS se sont faits, à tort, sur la base du montant fixé par le premier juge, il reste que la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS a versé, avant son expulsion :
- 100.000 le 22 mars 2004 ;
- 120.000 le 6 août 2004 ;
- 130.000 le 8 septembre 2004 ;
- 130.000 le 14 octobre 2004 ;
- 130.000 le 18 novembre 2004 ;
- 110.000 le 11 mai 2005 ;
- 110.000 le 3 juin 2005 ;
- 830.000 au TOTAL ;
que le dernier versement de la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS devait intervenir le 16 mars 2006 pour un montant de 29.999,99 portant sur les règlements totaux à cette date postérieure à l'expulsion, à 859.999,99 ; qu'il était dû au 1er juillet 2005, sur la base de la condamnation du juge de la mise en état du 29 avril 2003, seule exécutoire, étant soulignée que l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 1er juillet 2005 a été signifiée le 9 août 2005 :
- 1er trimestre 2004 : 125.981, 52 ;
- 2ème trimestre 2004 : 125.981,52 ;
- 3ème trimestre 2004 : 125.981,52 ;
- 4ème trimestre 2004 : 125.981,52 ;
- 1er trimestre 2005 : 125.981,52 ;
- 2ème trimestre 2005 : 125.981,52 ;
- 3ème trimestre 2005 : 125.981,52 ;
- TOTAL :…………… 881.870, 64
qu'à cette somme se rajoutent :
- la régularisation des charges 2002 (exigible au 25 février 2004) :
1.518,72 ;
- la régularisation des charges 2003 (exigible au 2 février 2005) :
10.498,26 ;
- les régularisations des charges antérieures (2000 et 2001, compte tenu d'un avoir pour 1999), non réglées : 1.528,26 ;
- impôt foncier 2004 (demandé en septembre 2004) : 13.118,86 ;
- TOTAL :………………907.174,74 ;
que si le mandataire de la SCI ALPHA PARIS ne s'est pas opposé à un étalement de la dette de la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS, il n'en demeure pas moins que l'on ne peut en déduire une renonciation de la SCI ALPHA PARIS à réclamer la résiliation du bail ; qu'en effet, parallèlement à cette attitude tolérante, la SCI ALPHA PARIS réclamait du conseiller de la mise en état, après un premier rejet, qu'il accorde l'exécution provisoire du jugement entrepris ; que cette position du mandataire est manifestement le fruit d'une prise en compte des limites des capacités financières de la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS qu'elle évoque, elle-même, dans cette instance, en faisant état des difficultés financières qu'elle a rencontrées avec un de ses cocontractants, la Société TOURS COUTURE ; qu'elle ne pouvait traduire une quelconque renonciation qui, ne se présumant pas, doit résulter d'actes manifestant, sans équivoque, la volonté de renoncer ; qu'en renouvelant des retards dans ses paiements, alors que, précédemment déjà, elle n'avait pas respecté les échéances contractuelles et alors que, quelles que soient les raisons de ses difficultés financières, qui, en tout état de cause, n'avaient pas entraîné de sa part la mise en oeuvre des procédures légales destinées à les prendre en compte, elle ne pouvait persister dans le transfert de celles-ci, au préjudice de son bailleur, sans provoquer le prononcé de la résiliation du contrat ; qu'à cet égard, la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS ne peut valablement faire grief à la SCI ALPHA PARIS de ne pas avoir eu recours aux garanties qui lui avaient été accordées alors qu'il lui était loisible de ne point le faire et que ce recours même aurait été révélateur des manquements de la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS ; que, par ailleurs, sont inopérants les moyens fondés sur la contestation de la validité des réclamations relatives aux charges alors qu'en vertu du contrat de bail et de l'article 1728 du Code civil, la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS était tenue de payer le prix du bail, en ce compris les charges, aucune décision judiciaire ne les ayant considérées comme indues (elle-même n'évoquant pas cela en première instance) et la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS ayant pu user des lieux conformément à leur destination contractuelle ; que pour même motif, ne peut être retenu le moyen selon lequel l'irrégularité (au regard des exigences de l'article L. 441-3 du Code de commerce) alléguée par la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS des factures émises pour les loyers emporterait qu'aucune obligation de paiement ne pèserait sur la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS ; qu'en effet, l'obligation de paiement, qui vient d'être rappelée, repose non pas sur l'émission des factures mais sur la loi et le contrat précités ; que la résiliation prendra effet au 18 août 2005, date de l'expulsion de la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS ; qu'en conséquence du prononcé de cette résiliation, la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS sera déchue de son droit à perception d'une indemnité d'éviction » (cf. arrêt p. 7 à 9) ;
ALORS QU'en vertu des articles 1741 et 1184 du Code civil, la résiliation d'un bail ne prend effet que du jour de la décision qui la prononce; qu'en décidant que la résiliation du bail litigieux aurait lieu au jour de l'expulsion de la locataire, c'est-à-dire antérieurement à son prononcé, la Cour d'appel a violé les textes susvisés.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la Société INES DE LA FRESSANGE PARIS à payer à la SCI ALPHA PARIS la somme de 316.570,12 avec intérêts aux taux légal et capitalisation de ces intérêts ;
AUX MOTIFS QUE « sur les charges et la répétition de l'indu, la recevabilité de l'action de la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS en répétition d'indu de charges n'est pas contestable ; qu'en effet, en application de l'article 564 du Code de procédure civile, il s'agit, pour la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS, d'opposer une compensation ; que, par ailleurs, malgré les dispositions de l'article 2277 du Code civil dans sa rédaction issue de la loi du 18 janvier 2005, les demandes de la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS ne sont pas prescrites, même pour les sommes perçues depuis plus de cinq ans avant les premières conclusions réclamant cette répétition ; qu'en effet, lorsque la loi réduit la durée d'une prescription, la prescription réduite commence à courir, sauf dispositions contraires, du jour de l'entrée en vigueur de la loi nouvelle sans que la durée totale puisse excéder le délai prévu par la loi ancienne qui était de 30 ans ;
- sur la taxe foncière :
que la stipulation du contrat est suffisamment claire pour entraîner l'obligation du preneur au remboursement de l'impôt foncier même si le précédent propriétaire ne la réclamait pas, une telle attitude ne pouvant caractériser une novation du contrat de bail ; que, par contre, l'obligation de remboursement ayant cessé avec le bail, la taxe foncière de 2005, d'un montant de 8.493,63 , réclamée fin septembre 2005 (seule date à laquelle elle pouvait être exigée n'ayant pas, avant, fait l'objet d'un avis d'imposition), n'a pas lieu d'être réglée ;
- sur les autres charges réclamées et/ou réglées :
que le bailleur produit aux débats des pièces auxquelles la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS n'oppose pas d'éléments suffisamment probants pour considérer que les règlements faits sur ce fondement sont indus en ce qui concerne la copropriété (sous réserve des régularisations de charges de 2000 et 2001) mais la SCI ALPHA PARIS réclame à tort les honoraires du Cabinet CPMS, son mandataire, pour la gestion de l'immeuble car ce remboursement n'est pas prévu au bail, non plus que celui de l'assurance du bailleur :
- pour les charges 2005 : sur la base de 15.621,30 de charges de copropriété et de provisions de 14.225,05 (la Cour ne retient pas 17.465,68 comme l'intimée qui a, à compter du 1er janvier 2005, réclamé une provision sur charges de 6.956,03 , comme indiqué supra) est caractérisée une somme due en plus de 1.396,24 hors taxes et 1.669,90 toutes charges comprises ; qu'il ne sera ainsi pas tenu compte de l'avis du mandataire de la SCI ALPHA PARIS en date du 27 juillet 2007 concernant un solde de charges à hauteur de 153,72 en faveur de la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS, mais du montant venant d'être calculé en plus, étant souligné que l'indemnité d'occupation avance sur charges comprise et toutes taxes comprises sera retenue à hauteur de 175.405,75 ;
A déduire :
- pour les charges 2004 : est caractérisée une somme réclamée à tort de :
honoraires 2.659,51 et assurance : 240,25 = 2.899,76 hors taxes et 3.468,11 toutes charges comprises ;
- pour les charges 2003 : est caractérisée une somme réclamée à tort de :
honoraires 1.877,87 et assurance : 160,32 = 2.038,19 hors taxes et 2.437,68 toutes charges comprises ;
- pour les charges 2002 : est caractérisée une somme réclamée à tort de :
honoraires 1.624,42 et assurance : 139,28 = 1.763,70 et, sur cette base, s'impose un calcul d'indu ; mais que, compte tenu de la provision sur charges, il devait être reversé à la SARL INES DE LA FRESSANGE PARIS une somme de 134,53 hors taxes et 160,90 toutes charges comprises au lieu de la réclamation de 1.518,72 ;
- pour les régularisations de charges de 2000 et 2001, elles ne sont pas accompagnées de factures détaillées, au contraire des précédentes, et les réclamations à hauteur respective de 1.514,83 et 557,72 seront écartées tandis que sera retenue la somme de 544,29 au titre d'un avoir pour 1999 » (cf. arrêt p. 9 in fine et p. 10) ;
ALORS QUE dans ses conclusions d'appel, la Société INES DE LA FRESSANGE PARIS faisait valoir que la Société ALPHA PARIS refusait encore en cause d'appel « de justifier de la moindre reddition de compte de charges en bonne et due forme » et précisait qu' « à la veille de la date fixée pour la clôture et à quelques jours de l'audience », seule avait été communiquée « une reddition de compte de charges partielle ne concernant que les années 2003 à 2005 » et que le montant des charges locatives non détaillées depuis l'origine du bail était de 275.217,30 ; qu'en se bornant à affirmer que le bailleur « produit aux débats des pièces » qui ne seraient pas utilement contestées par la Société INES DE LA FRESSANGE, sans préciser quelles étaient ces pièces ni procéder à aucune analyse, même sommaire, de celles-ci, la Cour d'appel a entaché sa décision de défaut.