LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- B... Malkhaz,
- LE PROCUREUR GÉNÉRAL PRÈS LA COUR D'APPEL
DE REIMS,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, en date du 9 avril 2009, qui dans la procédure d'extradition suivie contre le premier, à la demande du gouvernement russe, a émis un avis favorable ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I-Sur le pourvoi de Malkhaz B... :
Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;
II-Sur le pourvoi du procureur général :
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 696-13, alinéas 2, 3 et 4 et 696-15, alinéa 2, du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'à l'audience des débats qui s'est tenue le 2 avril 2009, Malkhaz B... était assisté de Catherine X..., interprète de langue russe, qui a prêté serment d'apporter son concours à la justice en son honneur et sa conscience ;
Attendu que, si le procès-verbal d'interrogatoire ne porte pas la signature de Catherine X... mais celle de l'interprète présent au moment du prononcé de l'arrêt, cette omission ne doit pas entraîner l'annulation de la décision dès lors qu'il n'est pas établi ni même allégué qu'elle ait porté atteinte aux intérêts de la personne réclamée ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Mais sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 696-1 et suivants du code de procédure pénale ;
Vu les articles 593 du code de procédure pénale et 1er de la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 ;
Attendu que, d'une part, tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que, d'autre part, dans les relations entre la France et la Fédération de Russie, les conditions, la procédure et les effets de l'extradition sont régis par la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 à l'exception des points non réglementés par cet accord ;
Attendu que, pour donner un avis favorable à la demande d'extradition de Malkhaz B..., l'arrêt après avoir constaté que la Fédération de Russie avait produit l'ensemble des pièces exigées par la Convention européenne d'extradition, retient qu'il ne se trouve en l'espèce aucun des empêchements à l'extradition tels que mentionnés aux articles 695-1 et suivants du code de procédure pénale et notamment que les faits ne sont pas prescrits au regard de la loi française ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations contradictoires qui ne permettent pas à la Cour de cassation de s'assurer que la chambre de l'instruction a examiné les conditions de l'extradition au regard des règles posées par la Convention précitée, la chambre de l'instruction n'a pas donné de base légale à sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Et, sur le troisième moyen de cassation près de la violation de l'article 3. 2 de la Convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 ;
Vu les articles 593 et 696-15 du code de procédure pénale, ensemble l'article 3. 2 de la Convention susvisée ;
Attendu que l'arrêt d'une chambre de l'instruction, statuant en matière d'extradition, doit répondre en la forme aux conditions essentielles de son existence légale ;
Attendu que, pour écarter l'argumentation du procureur général et de la personne réclamée qui invoquaient la situation de " réfugié géorgien " de l'intéressé, l'arrêt retient, notamment, que Malkhaz B... n'a pas lieu de craindre la rigueur des institutions de son pays d'origine puisque l'extradition est requise par l'Etat russe et non par l'Etat géorgien dont il a la nationalité ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans rechercher si en cas de remise aux autorités russes la situation de Malkhaz B... ne risquait pas d'être aggravée pour des considérations de race, de religion, de nationalité ou d'opinions politiques, l'arrêt ne satisfait pas, en la forme, aux conditions essentielles de son existence légale ;
Qu'il s'ensuit que la cassation est à nouveau encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Reims, en date du 9 avril 2009, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Reims, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Pelletier président, Mme Ponroy conseiller rapporteur, Mme Chanet, M. Arnould, Mme Koering-Joulin, MM. Corneloup, Pometan, Foulquié, Castel, Mme Ferrari conseillers de la chambre, Mmes Leprieur, Lazerges conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Davenas ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;