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16/09/2009 | FRANCE | N°08-42085

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 septembre 2009, 08-42085


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 4 mars 2008) que Mme X... a été engagée le 10 mai 1985 par la société Groupe Roditi, aux droits de laquelle se trouve la société Gan eurocourtage IARD ; qu'exerçant les fonctions de responsable du service assurance dommages relevant de la classe 6 de la convention collective nationale des sociétés d'assurance, elle a été licenciée par lettre du 24 février 2005 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir juger son licenciemen

t sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que l'employeur fait grief ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 4 mars 2008) que Mme X... a été engagée le 10 mai 1985 par la société Groupe Roditi, aux droits de laquelle se trouve la société Gan eurocourtage IARD ; qu'exerçant les fonctions de responsable du service assurance dommages relevant de la classe 6 de la convention collective nationale des sociétés d'assurance, elle a été licenciée par lettre du 24 février 2005 ; qu'elle a saisi la juridiction prud'homale aux fins de voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt d'avoir dit que le licenciement de Mme X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1° / que l'employeur faisait valoir que Mme X... avait la qualification de responsable de service d'assurance dommage et que ses responsabilités faisaient partie des plus élevées au sein de la hiérarchie ; que pour dire que ne justifiait pas un licenciement le fait pour la salariée d'avoir souscrit deux contrats d'assurance en dehors de son domaine de compétence et sans respecter les règles internes de souscription, la cour d'appel, après avoir pourtant relevé que la salariée avait connaissance de ces règles, s'est fondée sur l'absence de " mécanisme de contrôle interne pour prévenir ce type d'erreurs " et l'absence de consigne donnée à la salariée de réexaminer ses dossiers en cours et vérifier leur conformité avec la note de cadrage du 9 mars 2004, reprochant ainsi à l'employeur une insuffisance de directives données et de contrôle exercé sur le travail de la salariée ; qu'en se prononçant ainsi, sans à aucun moment prendre en considération la position hiérarchique et le niveau des responsabilités de la salariée qui impliquaient que celle-ci bénéficie d'une large autonomie dans l'exercice de ses fonctions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-14-3 devenu L. 1232-1 du code du travail ;
2° / que la charge de la preuve de la cause réelle et sérieuse n'incombe pas exclusivement à l'employeur ; qu'ayant relevé, ainsi qu'il lui était reproché dans la lettre de licenciement, que la salariée n'avait pas respecté l'obligation de solliciter l'autorisation de son supérieur hiérarchique pour la souscription de certains contrats ne relevant pas de son domaine d'intervention, la cour d'appel ne pouvait pas, sans inverser la charge de la preuve, encore exiger de l'employeur qu'il démontre que si l'autorisation avait été sollicitée, les contrats litigieux n'auraient pas été souscrits ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-3 devenu L. 1235-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'exerçant les pouvoirs qu'elle tient de l'article L. 1235 1 du code du travail, la cour d'appel a, sans inverser la charge de la preuve, estimé que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Gan eurocourtage IARD aux dépens ;
Vu les articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à Me Ricard la somme de 2 500 euros, à charge pour lui de renoncer à la part contributive de l'Etat ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour la société Gan eurocourtage IARD.
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR réformé le jugement déféré et statuant à nouveau d'avoir dit que le licenciement de Madame X... est dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'avoir en conséquence condamné la Société Gan Eurocourtage IARD à lui verser une indemnité de 60. 000 (soixante mille euros) pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que 1200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de lui avoir ordonné le remboursement aux organismes concernés des indemnités qui ont été avancées à la salariée au titre de l'assurance chômage dans la limite de trois mois.
AUX MOTIFS QUE « La lettre de licenciement adressée le 24 février 2005 à Madame Z... dont les termes fixent les limites du litige, est longuement rédigée et reprend les éléments suivants ; " Le 15 décembre 2004, un sinistre grave s'est produit au sein de la Société Sport Garage pour laquelle vous avez accordé à un courtier par téléphone la souscription d'un contrat multiprofessionnel. A l'occasion de ce sinistre, votre hiérarchie a découvert dans ce dossier :- vous aviez donné votre autorisation pour un type d'activité qui n'entrait pas dans vos pouvoirs-vous n'aviez pas effectué l'étude technique préalable requise à cet égard, vous n'avez pas respecté les instructions de la compagnie. La découverte de ces erreurs a été l'occasion pour votre hiérarchie d'étudier les autres contrats d'assurance nous liant à ce risque. Ainsi ont été relevés des fautes de même nature dans le dossier SCI Gesticoq pour lequel vous aviez mis en place, un groupement Multirisque Immeuble Propriétaire Non occupant.. " II lui était reproché pour ce dossier d'avoir souscrit un contrat au-delà de ses pouvoirs et sans précision sur la matérialité des risques. Il lui était rappelé qu'elle avait déjà été sanctionnée pour un dossier Briconaute en juin 2004. Il lui était également reproché une erreur dans le taux de commissionnement d'un agent. Dans le jugement critiqué, le Conseil de Prud'hommes de Bordeaux a considéré que les faits reprochés à Madame Z... étaient établis et étaient de nature à justifier un licenciement, Il appartient au juge de vérifier le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement allégués dans la lettre de licenciement. Il ressort des documents versés que Madame Z... a fait une carrière en progression constante dans son entreprise, sans incident disciplinaire sur une période de vingt ans. Le 14 février 2003, elle avait été chargée de la responsabilité du service assurance-dommage relevant de la classe 6 conformément à la Convention Collective des Sociétés d'Assurance. Courant 2004, le responsable hiérarchique de Madame Z... a changé. Lors de l'initiation de la procédure de licenciement, la salariée a demandé une réunion du Conseil de Discipline. Ce dernier s'est réuni en date du 21 février 2005 et a émis un avis partagé, les représentants salariés estimant. que les motifs n'étaient pas établis et les représentants de l'employeur estimant que le licenciement était fondé, Il ressort clairement d'un courrier que lui a adressé Monsieur A..., son ancien supérieur hiérarchique, qu'elle n'avait aucune responsabilité dans les conditions de souscription et de tarification dans les dossiers Briconautes. De même, ce courrier ainsi qu'une lettre émanant du cabinet M2A la déchargeant de toute responsabilité personnelle dans le commissionnement d'un expert. Pour ce qui est du sinistre survenu à la Société Sport Garage, il résulte des documents produits que si la Société Sport Garage avait une activité de concession motocycles, en revanche, la souscription de la police d'assurance sous la responsabilité de Madame Z... ne mentionnait que l'activité " ventes de pièces détachées sans pose " et ne concernant pas l'activité de concessionnaire motocycles. Cependant, ce même contrat prévoyait la prise en charge du risque incendie. De même, il est reproché à Madame Z... d'avoir conclu le 5 décembre 2003, un contrat d'assurance concernant la SCI Gesticoq propriétaire de l'immeuble dont Sport Garage était locataire. Il est précisé qu'elle aurait dû requérir une autorisation d'un supérieur hiérarchique dans la mesure où plusieurs commerces occupaient les locaux. Il est constant que le 15 décembre 2004, un incendie a détruit le fonds de commerce et l'immeuble, Le rapport de reconnaissance produit aux débats proposait que le sinistre soit ouvert à une somme de 1 500. 000, la compagnie d'assurance dans ses écritures disant qu'elle a été amenée à régler 600. 000 du fait du risque locatif que n'aurait pas du accepter de couvrir Madame Z.... Ce règlement n'est d'ailleurs pas justifié par les pièces du dossier. Il sera relevé que, pour ce qui est de l'assurance de l'immeuble, sa conclusion est intervenue effectivement avant la diffusion d'une note de cadrage en date du 4 mars 2004. Si cette note s'inscrit dans des règles antérieurement connues, il n'en demeure pas moins qu'aucune consigne n'était donnée clairement pour demander aux salariés concernés de réexaminer des dossiers en cours. Pour ce qui est du contrat d'assurance professionnelle couvrant l'activité de vente de pièces détachées sans pose, un doute sérieux subsiste sur l'existence d'une faute professionnelle de Madame Z.... En effet, elle ne pouvait assurer de son propre chef, les activités de concessions de motocyclettes et les documents produits démontrent que c'est un autre assureur qui a pris ce risque en charge. Il se déduit de l'ensemble de ses observations que, si Madame Z... a pu commettre deux imprudences dans l'établissement de ces deux contrats, d'une part aucun mécanisme de contrôle interne n'existait pour prévenir ce type d'erreurs, d'autre part, la note de cadrage correspond manifestement à un rappel de règles plus strictes ; cependant il sera observé que la Société Gan Eurocourtage IARD ne produit aucun élément pour justifier de ce qu'elle aurait refusé de prendre ces deux contrats en charge, si le supérieur hiérarchique de la salariée en avait été informé. L'ensemble de ces éléments ne permettent pas de considérer que ces manquements de Madame Z..., s'ils sont réels, étaient suffisamment sérieux pour justifier le licenciement d'une salariée travaillant depuis vingt ans dans la même entreprise, sans aucun incident disciplinaire et au contraire ayant fait l'objet de promotions régulières et d'augmentations de salaire. En effet, s'il est fait état dans la lettre de licenciement, d'un incident disciplinaire antérieur, il n'en demeure aucune trace dans le dossier. C'est à tort que le premier juge a considéré que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse et le jugement sera réformé. La réparation du préjudice causé à Madame Z... doit s'apprécier dans le cadre des dispositions de l'article L 122-14-4 du code du travail et, en fonction de son ancienneté et de ses difficultés à se réinsérer dans le monde du travail, la Cour dispose des éléments pour fixer à 60. 000 l'indemnité due à Madame Z... pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. L'équité commande de lui allouer 1. 200 au titre de l'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile »

1. ALORS QUE la société GAN EUROCOURTAGES faisait valoir que Madame Z... avait la qualification de responsable de service d'assurance dommage et que ses responsabilités faisaient partie des plus élevées au sein de la hiérarchie (conclusions d'appel de l'exposante p 5) ; que pour dire que ne justifiait pas un licenciement le fait pour la salariée d'avoir souscrit deux contrats d'assurance en dehors de son domaine de compétence et sans respecter les règles internes de souscription, la Cour d'appel, après avoir pourtant relevé que la salariée avait connaissance de ces règles, s'est fondée sur l'absence de « mécanisme de contrôle interne pour prévenir ce type d'erreurs » et l'absence de consigne donnée à la salariée de réexaminer ses dossiers en cours et vérifier leur conformité avec la note de cadrage du 9 mars 2004, reprochant ainsi à la société GAN EUROCOURTAGE une insuffisance de directives données et de contrôle exercé sur le travail de la salariée ; qu'en se prononçant ainsi, sans à aucun moment prendre en considération la position hiérarchique et le niveau des responsabilités de la salariée qui impliquaient que celle-ci bénéficie d'une large autonomie dans l'exercice de ses fonctions, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 122-14-3 devenu L1232-1 du code du travail ;
2. ALORS QUE la charge de la preuve de la cause réelle et sérieuse n'incombe pas exclusivement à l'employeur ; qu'ayant relevé, ainsi qu'il lui était reproché dans la lettre de licenciement, que la salariée n'avait pas respecté l'obligation de solliciter l'autorisation de son supérieur hiérarchique pour la souscription de certains contrats ne relevant pas de son domaine d'intervention, la Cour d'appel ne pouvait pas, sans inverser la charge de la preuve, encore exiger de l'employeur qu'il démontre que si l'autorisation avait été sollicitée, les contrats litigieux n'auraient pas été souscrits ; qu'en se déterminant ainsi, la Cour d'appel a violé l'article L122-14-3 devenu L1235-1 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-42085
Date de la décision : 16/09/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Bordeaux, 04 mars 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 sep. 2009, pourvoi n°08-42085


Composition du Tribunal
Président : M. Chollet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Ricard, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.42085
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