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16/09/2009 | FRANCE | N°08-42009

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 16 septembre 2009, 08-42009


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er janvier 1990 par la société Cariane Nord, devenue la SA Trans Val de Lys, en qualité de conducteur receveur ; qu'à compter de novembre 2003, il a été mis en invalidité 1re catégorie ; qu'un avenant au contrat de travail signé le 1er novembre 2003 a réduit le temps de travail du salarié à 75h83 par mois, soit un mi-temps de 17.5 heures par semaine ; que le 13 janvier 2005, il a été déclaré apte au poste par le médecin du travail mais su

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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 1er janvier 1990 par la société Cariane Nord, devenue la SA Trans Val de Lys, en qualité de conducteur receveur ; qu'à compter de novembre 2003, il a été mis en invalidité 1re catégorie ; qu'un avenant au contrat de travail signé le 1er novembre 2003 a réduit le temps de travail du salarié à 75h83 par mois, soit un mi-temps de 17.5 heures par semaine ; que le 13 janvier 2005, il a été déclaré apte au poste par le médecin du travail mais sur un car à transmission automatique avec un horaire de 3 heures et demie maximum par jour ; que suite à la fusion-absorption de la société Cariane Nord par la société Autocars Bolle pour devenir Trans Val de Lys, le salarié a été averti par courrier du 19 mai 2005 qu'à compter du 30 mai 2005, la prise de service s'effectuerait au dépôt de Comines, et non plus Marcq ; que par courrier du 24 mai 2005, M. X... a refusé cette modification mais s'est présenté normalement sur le nouveau poste de travail ; que le 31 décembre 2005, il était licencié pour inaptitude, après deux avis d'inaptitude délivrés par le médecin du travail les 17 et 31 octobre 2005 et autorisation de licenciement délivrée par l'inspection du travail ; que s'estimant insuffisamment rempli de ses droits, il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le second moyen :

Vu les articles L. 242 1 du code de la sécurité sociale, 4 de l'arrêté du 26 mai 1975, et 5 de l'annexe IV du code général des impôts ;

Attendu que pour débouter M. X... de sa demande tendant à l'indemnisation du préjudice résultant de l'application par son employeur d'un abattement forfaitaire de 20 % pour frais professionnels, la cour d'appel a retenu, par motifs adoptés, qu' en ce qui concerne l'entreprise, la Direction générale des Impôts de Lille avait donné son accord sur le droit à déduction supplémentaire pour les frais professionnels au bénéfice des chauffeurs et receveurs et qu'en outre, le ministère de l'Equipement avait confirmé le droit à abattement de 20 % dans la profession, que c'est donc en toute légalité que l'abattement avait été pratiqué, et par motifs propres que le calcul de pension tel qu'opéré par la CPAM de Lille n'avait pas pris en compte les années pour lesquelles le salarié forme sa demande et que celui ci ne justifiait dès lors d'aucun préjudice indemnisable en rapport avec l'abattement dont s'agit ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartient à l'employeur, pour pouvoir opérer une déduction corrélative sur l'assiette des cotisations sociales, d'établir l'existence d'une décision expresse des services fiscaux reconnaissant au salarié, en fonction de sa situation concrète, le droit de pratiquer un abattement supplémentaire pour frais professionnels, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande tendant à l'indemnisation du préjudice résultant de l'application par son employeur d'un abattement forfaitaire de 20 % pour frais professionnels, l'arrêt rendu le 29 février 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;

Condamne la société Trans Val de Lys aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Trans Val de Lys à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par M. Ludet, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément aux articles 452 et 456 du code de procédure civile, en son audience publique du seize septembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur René X... de ses demandes tendant au paiement en temps de travail effectif du temps de trajet inhabituel imposé par son employeur, à l'indemnisation des frais kilométriques exposés pour couvrir ces trajets, et à l'indemnisation du préjudice résultant de la discrimination dont il avait été la victime.

AUX MOTIFS QUE, sur la demande d'indemnisation relative au temps de trajet, le salarié réclame à ce titre à la fois la rémunération de son temps de trajet entre son domicile et le lieu de sa prise de fonction et l'indemnisation kilométrique de ce même trajet ; que toutefois conformément aux dispositions de l'article L 212-4 alinéa 4 du code du travail, le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d'exécution du contrat de travail n'est pas un temps de travail effectif ; que toutefois, s'il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile et le lieu habituel de travail, il doit faire l'objet d'une contrepartie soit sous forme de repos, soit financière, déterminée par convention ou accord collectif ou, à défaut, par décision unilatérale de l'employeur prise après consultation du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, s'ils existent ; qu'en l'espèce, le changement du lieu de prise de service habituel ne constitue pas une modification du contrat de travail mais un simple changement des conditions de travail, dans la mesure où il s'agit du même secteur géographique ; que par ailleurs, un trajet de 16 kms ne peut à l'évidence être considéré comme dépassant un trajet normal au regard de l'activité de conducteur de car exercée par le salarié ; que Monsieur René X... sera débouté de ses demandes sur ce point, le jugement étant partiellement réformé de ce chef.

ET AUX MOTIFS QUE le salarié soutient qu'il aurait dû faire l'objet d'un licenciement économique suite au refus de la modification de son lieu de prise de poste ; que cependant ainsi qu'il l'a été rappelé ci-dessus, le changement dont s'agit ne constitue pas une modification du contrat de travail, mais un simple changement des conditions de travail ; qu'au surplus, il convient de constater qu'en dépit de son refus initial, le salarié a accepté de se présenter sur le lieu de travail ; que les deux salariés qu'il cite comme ayant fait l'objet d'un licenciement économique n'avaient pas le même statut que lui; qu'il ne démontre pas l'existence d'un traitement discriminatoire à son détriment ; que le jugement sera confirmé de ce chef.

ALORS QUE Monsieur René X... faisait valoir que sa mutation sur le site de COMINES lui imposait des frais et des temps de trajet qu'il ne pouvait pas supporter compte tenu de ses revenus mensuels, représentant 80% du salaire minimum mensuel moyen, et de son état de santé ; qu'en se bornant à dire qu'il s'agissait du même secteur géographique sans aucunement préciser le temps de trajet ainsi imposé et sans rechercher si ce temps de trajet supplémentaire et les frais qui en résultaient pouvaient être supportés par le salarié qui, du fait de son invalidité, ne pouvait travailler qu'à mi-temps et ne percevait que 80% du salaire minimum mensuel moyen, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1134 du Code civil.

QU'à tout le moins a-t-elle ainsi entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.

ET ALORS QUE Monsieur René X... faisait encore valoir que son employeur avait reconnu, pour d'autres salariés, que la mutation litigieuse s'analysait en une modification de leur contrat de travail ; qu'en se bornant à affirmer que ces salariés n'avaient pas le même statut que lui pour débouter Monsieur René X... de ses demandes, sans aucunement préciser ce en quoi cette différence de statut justifiait une différence de traitement, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L.140-2 du Code du travail alors en vigueur, actuellement article L. 3221-2 du Code du travail.

ALORS enfin QUE l'acceptation par le salarié de la modification de son contrat de travail ne peut résulter de la seule poursuite par lui du travail ; qu'en retenant que Monsieur René X... avait accepté de se présenter sur le nouveau lieu de travail pour le débouter de ses demandes, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur René X... de sa demande tendant à l'indemnisation du préjudice résultant de l'application par son employeur d'un abattement forfaitaire de 20% pour frais professionnels.

AUX MOTIFS QUE les motifs des premiers juges sont pertinents, qu'ils seront adoptés, étant au surplus relevé que le calcul de pension tel qu'opéré par la CPAM de Lille n'a pas pris en compte les années pour lesquelles le salarié forme sa demande; qu'il ne justifie dès lors d'aucun préjudice indemnisable en rapport avec l'abattement dont s'agit ; que le jugement sera confirmé.

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE les dispositions du Code général des Impôts autorisent expressément ce disposition en fonction de l'article 5 de l'annexe IV du Code général des Impôts, confirmé par l'article du 26 mai 1975 puis par l'attestation de service des impôts du 16 juin 1992, de l'arrêté du 20 décembre 2002 et enfin par une prise de position du ministère de l'équipement du 10 septembre 2003 ; que les chauffeurs et receveurs de car bénéficient de l'abattement des 20% pour frais professionnels ; que Monsieur X..., comme tous les chauffeurs de car de l'entreprise TRANS VAL DE LYS, a bénéficié depuis des années de ces dispositions ; qu'il n'y a donc pas lieu de revenir sur cette mesure et qu'il convient de débouter Monsieur X... de cette demande ; que Monsieur X... ne peut prétendre à de nouvelles fiches de paie réintégrant l'abattement de 20%, étant donné que cette demande n'est pas justifiée au vu du Code des impôts.

ALORS QUE, pour la période régie par l'arrêté du 26 mai 1975, la déduction supplémentaire pour frais professionnels ne s'opérait pas de plein droit en faveur des salariés visés par l'article 5 de l'annexe IV du Code général des impôts ; que, pour bénéficier sur l'assiette des cotisations sociales d'une déduction forfaitaire égale à l'abattement fiscal invoqué, l'employeur devait justifier de l'existence d'une décision expresse de l'administration fiscale, prise en fonction de la situation concrète des salariés concernés ; qu'en jugeant la société TRANS VAL DE LYS fondée à procéder à un abattement forfaitaire de 20% pour frais professionnels, sans aucunement rechercher si, comme le soutenait le salarié, faute d'une décision expresse de l'administration fiscale, prise en fonction de la situation concrète de Monsieur X..., son employeur ne se trouvait pas dans l'impossibilité de lui imposer cet abattement, la Cour d'appel a violé les articles L. 242-1 du Code de la sécurité sociale, 4 de l'arrêté du 26 mai 1975 et 5 de l'annexe IV du Code général des impôts.

ALORS aussi QUE pour la période régie par l'arrêté du 20 décembre 2002 modifié par l'arrêté du 25 juillet 2005, l'employeur ne peut opter pour la déduction forfaitaire spécifique que lorsqu'une convention ou un accord collectif du travail l'a explicitement prévu ou lorsque le comité d'entreprise ou les délégués du personnel ont donné leur accord ; qu'à défaut, il lui appartient de justifier de l'acceptation de cette option par le salarié concerné ; qu'en jugeant la société TRANS VAL DE LYS à procéder, pour cette période encore, à un abattement forfaitaire de 20% pour frais professionnels quand elle ne justifiait ni d'un tel accord, ni d'une acceptation du salarié, la Cour d'appel a violé l'article 9 de l'arrêté du 25 avril 2005.

ET ALORS QUE Monsieur René X... soutenait dans ses écritures d'appel que l'abattement forfaitaire ainsi pratiqué par son employeur avait eu une incidence sur le montant de sa pension d'invalidité, calculée sur la base des dix meilleures années, dont cinq passées au sein de la société CARIANE NORD, devenue TRANS VAL DE LYS ; qu'en se bornant à dire «que le calcul de pension tel qu'opéré par la CPAM de Lille n'a pas pris en compte les années pour lesquelles le salarié forme sa demande» sans aucunement préciser les éléments lui permettant de parvenir à une telle conclusion, la Cour d'appel a statué par voie de simple affirmation en violation de l'article 455 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-42009
Date de la décision : 16/09/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 29 février 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 16 sep. 2009, pourvoi n°08-42009


Composition du Tribunal
Président : M. Ludet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.42009
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