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15/09/2009 | FRANCE | N°08-16696

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 septembre 2009, 08-16696


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Festina France (la société) ayant mis fin au contrat d'agent commercial qui la liait à M. X... pour faute grave, ce dernier l'a assignée en paiement de diverses sommes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à verser à M. X... certaines sommes à titre d'indemnités de préavis, de résiliation, de remploi et pour frais irrépétibles, alors, selon le moyen :

1° / que commet une fau

te grave privative de toute indemnité compensatrice de la cessation de son contrat l'agent com...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Festina France (la société) ayant mis fin au contrat d'agent commercial qui la liait à M. X... pour faute grave, ce dernier l'a assignée en paiement de diverses sommes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à verser à M. X... certaines sommes à titre d'indemnités de préavis, de résiliation, de remploi et pour frais irrépétibles, alors, selon le moyen :

1° / que commet une faute grave privative de toute indemnité compensatrice de la cessation de son contrat l'agent commercial qui, en raison d'une activité insuffisante, n'atteint pas les objectifs contractuellement fixés et produit un chiffre d'affaires en baisse constante ; qu'en refusant de rechercher si la non réalisation de son objectif chiffré et la baisse du chiffre d'affaires de M. X... ne procédaient pas d'une activité insuffisante de sa part, ce qui résultait du comparatif des ventes par agents que la société versait aux débats, la cour d'appel, qui s'est bornée à relever de façon inopérante que la société n'avait pas fait de reproche à son agent au titre d'un chiffre d'affaires insuffisant pendant cinquante-deux mois sur les cinquante six de la durée totale du contrat, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 134-13 du code de commerce ;

2° / que l'agent commercial légalement et contractuellement tenu d'une obligation d'information doit apporter la preuve de son exécution ; qu'en énonçant qu'il eut été facile pour la société de démontrer, par des attestations de clients, que M. X... ne les visitait pas ou insuffisamment, quand ce dernier était légalement tenu d'un devoir d'information à l'égard de sa mandante et avait contractuellement l'obligation de visiter la clientèle de son secteur au moins quatre fois par an et que, malgré les demandes réitérées de la société mandante, justifiées par la baisse constante du chiffre d'affaires de son mandataire, il se refusait à communiquer les dates auxquelles il avait effectué ses visites, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé de l'article 1315 du code civil, ensemble les articles L. 134-4 du code de commerce et 1134 du code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'après avoir relevé que seul le non respect d'une clause d'objectifs résultant d'un manque d'activité notoire et fautif démontré de l'agent commercial était constitutif d'une faute grave et constaté le caractère tardif de ce grief ainsi que la reconnaissance par la société de la difficulté du marché, l'arrêt retient qu'aucun des éléments considérés par la mandante dans la lettre de rupture comme cause de la baisse du chiffre d'affaires de M. X... qui serait due à ses négligences dans la prospection et à son refus de se plier aux méthodes de travail de sa mandante, n'est établi, l'agent ayant adressé à la société les rapports d'activité conformes aux exigences de cette dernière et la liste des visites effectuées auprès de la clientèle ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Et attendu, d'autre part, qu'après avoir constaté que la demande d'information de la société sur les visites à la clientèle par l'agent était tardive puisque les conditions dans lesquelles il les avait effectuées, pendant plus de quatre ans, n'avaient pas été critiquées auparavant par la mandante, l'arrêt retient que M. X... y a répondu par un courrier du 28 janvier 2005 ; qu'ainsi, la cour d'appel, sans inverser la charge de la preuve, a fait l'exacte application des textes invoqués ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Mais sur le second moyen :

Vu l'article L. 134-12 du code de commerce ;

Attendu que pour condamner la société à verser à M. X... la somme de 39 514, 78 euros à titre d'indemnité de remploi, l'arrêt retient que la réparation du préjudice devant être intégrale, c'est à bon droit que celui-ci réclame une indemnité de remploi pour compenser l'incidence fiscale résultant de l'imposition de l'indemnité de résiliation qui lui est allouée ;

Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'assujettissement à l'impôt de l'indemnité de cessation de contrat ne constitue pas un préjudice réparable, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Festina France à verser à M. X... la somme de 39 514, 78 euros à titre d'indemnité de remploi, l'arrêt rendu le 30 avril 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze septembre deux mille neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par Me Hémery, avocat de la société Festina France

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société FESTINA FRANCE à verser à M. X... les sommes de 18. 293, 88 euros hors taxes à titre d'indemnité de préavis, de 146. 351, 04 euros à titre d'indemnité de résiliation, de 39. 514, 78 euros à titre d'indemnité de remploi et celle de 7. 000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

AUX MOTIFS QUE « la SAS FESTINA FRANCE conteste le fait que le premier juge ait estimé nulle la clause de résultat figurant dans le contrat liant les parties, aux termes de laquelle « le mandataire s'engage à atteindre chaque trimestre un chiffre de ventes HT égal à 1200 KF », ce montant pouvant « être augmenté chaque année par l'entreprise pour un montant maximum de 20 % » ; mais que si, en tant que telle, une telle clause n'est pas nulle, elle ne pouvait se concevoir, spécialement dans son ampleur, qu'en relation avec l'interdiction initialement convenue, puis retirée conventionnellement quelques mois plus tard comme étant contraire aux principes élémentaires d'un contrat d'agent commercial, faite à Olivier X... de représenter d'autres entreprises ou d'agir pour son propre compte dans des domaines d'activité distincts et non concurrents de ceux de la SAS FESTINA FRANCE ; qu'en outre son non respect ne saurait justifier une rupture pour faute grave, sauf à justifier que l'insuffisance de chiffre d'affaires résulte d'un manque d'activité notoire et fautif de l'agent ; que, quant au fond du litige, tout au long du contrat et jusque dans les semaines ayant précédé sa rupture, soit pendant 52 mois sur les 56 de sa durée totale, pas le moindre reproche n'a été fait à Olivier X..., que ce soit au titre d'une information régulière de sa mandante, ou à celui d'un chiffre d'affaires insuffisant ; que cela n'est tout de même pas un élément anodin ; que le 7 octobre 2004, la SAS FESTINA FRANCE a adressé à Olivier X... une lettre recommandée avec avis de réception ne lui faisant aucun reproche, mais lui rappelant les dispositions contractuelles en matière de compte rendu et de visite de la clientèle et lui notifiant qu'à l'avenir un compte rendu hebdomadaire dans neuf rubriques dûment précisées devra être réalisé, et sollicitant que les dates de visite censées avoir été effectuées en 2004 chez chaque client lui soient indiquées ; qu'il n'est pas inintéressant de constater que le même jour, sous la même forme, une même lettre a été adressée à David Z...(annexe 7 bis d'olivier X...) ; que c'est ce qui fait écrire à ce dernier, non sans raison, qu'il s'agissait en fait d'une lettre circulaire adressée à tous les agents, ce que la SAS FESTINA FRANCE ne dément pas, refusant simplement de fournir le moindre renseignement et la moindre justification au sujet de ce qui s'est passé concernant les autres agents, malgré sommation réitérée de son adversaire, au prétexte que seule l'affaire le concernant intéresse le présent litige ; que le 28 octobre 2004 Olivier X... répond par la même voie pour marquer sa grande surprise, se demander ce que cache ce courrier non personnalisé, mais accepter néanmoins de mettre en place un système de reporting hebdomadaire entrant dans le cadre de sa mission et ce par fax à compter de la semaine 44 ; qu'il a tenu parole, comme en font foi les rapports adressés dont la SAS FESTINA FRANCE a fourni quelques exemplaires, et qui respectaient les rubriques précisément indiquées ; que le 25 novembre 2004 Olivier X... était à nouveau destinataire d'une lettre recommandée avec avis de réception le mettant quasiment en demeure de fournir par retour les dates de visites, en 2004, chez 57 clients dûment répertoriés, et se plaignant de l'indigence des rapports hebdomadaires ; que la réponse d'Olivier X..., par la même voie, en date du 28 janvier 2005, s'est croisée avec la lettre de la SAS FESTINA FRANCE lui notifiant la rupture du contrat ; qu'en dehors des échanges de correspondances susvisés, celle-ci n'apporte aucun élément de preuve relativement aux deux manques qui en sont la clef de voûte : les comptes rendus qu'elle n'a jamais sollicités par écrit antérieurement à octobre 2004 ni d'une telle fréquence, et les visites chez les clients au nombre minimal de quatre ; que, sur ce dernier point, il eût été facile pour la SAS FESTINA FRANCE de démontrer, par attestations d'un certain nombre de clients, qu'Olivier X... ne les visitait pas, ou insuffisamment eu égard aux prescriptions contractuelles ; qu'aucun élément n'est fourni à et égard, alors qu'il appartient à la SAS FESTINA FRANCE d'établir la réalité et le bien fondé de la faute reprochée, ainsi que son caractère de faute grave ; qu'au regard du déroulement du contrat et de la soudaine attaque revendicatrice de la SAS FESTINA FRANCE adressée non pas à Olivier X... seul, mais au minimum à deux agents commerciaux et dans des termes identiques, et en considération tant des éléments susvisés que de ce qu'ellemême, dans sa lettre du 25 novembre 2004, reconnaît que le marché est difficile (ce qui induit un chiffre d'affaires également difficile à réaliser), il convient de considérer que l'attitude fautive d'Olivier X... n'est pas établie, encore moins qu'il ait commis une faute grave ; que c'est dès lors à bon droit qu'il réclame une indemnité de préavis de trois mois calculée sur la base de la moyenne annuelle des commissionnements hors taxes, soit la somme de 18. 293, 88 euros hors taxes ; que c'est également à bon droit qu'il sollicite l'indemnisation de la rupture du contrat ; qu'ainsi qu'il le précise, son préjudice est constitué par la perte de revenu qu'il aurait pu continuer à percevoir si le contrat s'était poursuivi, ainsi que par la perte de valeur économique de son contrat, enfin par l'atteinte morale portée au regard des circonstances de la rupture ; que ces différents chefs de préjudice seront justement indemnisés par l'allocation d'une indemnité égale à 24 mois de commissions, calculée sur la base de la même moyenne mensuelle que celle utilisée pour l'indemnité de préavis, soit une indemnité de rupture de 146. 351, 04 euros ; qu'aux deux indemnités susvisées s'ajoutent les intérêts légaux à compter de l'assignation, lesquels intérêts, conformément à ce qui est demandé, se capitaliseront annuellement en application de l'article 1154 du Code Civil ; que la réparation du préjudice doit être intégrale ; que c'est dès lors à bon droit qu'est sollicitée une indemnité de réemploi pour compenser l'incidence fiscale dont il est justifié par la production de la réponse du Ministère de l'Économie et des Finances quant au régime fiscal des indemnités versées aux agents commerciaux par leurs mandants en cas de cessation de leurs fonctions, soit une taxation au taux réduit au titre du régime d'imposition des plus values professionnelles ; que le montant de ladite indemnité a été, dans ce cadre, justement calculée à concurrence de 27 % de l'indemnité de résiliation, soit un montant de 39. 514, 78 euros outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ; » (arrêt p. 4 à 6)

1°) ALORS QUE commet une faute grave privative de toute indemnité compensatrice de la cessation de son contrat l'agent commercial qui, en raison d'une activité insuffisante, n'atteint pas les objectifs contractuellement fixés et produit un chiffre d'affaires en baisse constante ; qu'en refusant de rechercher si la non réalisation de son objectif chiffré et la baisse du chiffre d'affaires de M. X... ne procédaient pas d'une activité insuffisante de sa part, ce qui résultait du comparatif des ventes par agents que la société FESTINA FRANCE versait aux débats (sa pièce 11), la Cour, qui s'est bornée à relever, de façon inopérante, que la société FESTINA FRANCE n'avait pas fait de reproche à son agent au titre d'un chiffre d'affaires insuffisant pendant 52 mois sur les 56 de la durée totale du contrat, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L 134-13 du Code de Commerce.

2°) ALORS QUE l'agent commercial légalement et contractuellement tenu d'une obligation d'information doit apporter la preuve de son exécution ; qu'en énonçant qu'il eut été facile pour la société FESTINA France de démontrer, par des attestations de clients, que M. X... ne les visitait pas ou insuffisamment, quand ce dernier était légalement tenu d'un devoir d'information à l'égard de sa mandante et avait contractuellement l'obligation de visiter la clientèle de son secteur au moins 4 fois par an et que, malgré les demandes réitérées de la société FESTINA FRANCE, justifiées par la baisse constante du chiffre d'affaires de son mandataire, il se refusait à communiquer les dates auxquelles il avait effectué ses visites, la Cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé de l'article 1315 du Code Civil, ensemble les articles L 134-4 du Code de Commerce et 1134 du Code Civil.

SECOND MOYEN, SUBSIDIAIRE, DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société FESTINA FRANCE à verser à M. X... la somme de 39. 514, 78 euros à titre d'indemnité de remploi et celle de 7. 000 euros au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

AUX MOTIFS QUE « la réparation du préjudice doit être intégrale ; que c'est dès lors à bon droit qu'est sollicitée une indemnité de réemploi pour compenser l'incidence fiscale dont il est justifié par la production de la réponse du Ministère de l'Économie et des Finances quant au régime fiscal des indemnités versées aux agents commerciaux par leurs mandants en cas de cessation de leurs fonctions, soit une taxation au taux réduit au titre du régime d'imposition des plus values professionnelles ; que le montant de ladite indemnité a été, dans ce cadre, justement calculée à concurrence de 27 % de l'indemnité de résiliation, soit un montant de 39. 514, 78 euros outre intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ; » (arrêt p. 6)

ALORS QUE l'assujettissement d'une ressource à l'impôt n'est pas constitutif d'un préjudice réparable ; que le fait générateur de l'impôt exigible sur l'indemnité de résiliation allouée à un agent commercial au titre de la rupture de son contrat est le versement de l'indemnité même, l'impôt n'apparaissant pas en soi comme une conséquence directe de la rupture du contrat ; qu'en allouant à M. X... une indemnité dite de réemploi, destinée à compenser l'incidence fiscale du versement de l'indemnité de résiliation allouée à l'intéressé, la Cour d'Appel a violé l'article 134-12 du Code de Commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 08-16696
Date de la décision : 15/09/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

AGENT COMMERCIAL - Contrat - Fin - Indemnité au mandataire - Montant - Evaluation du préjudice - Réparation de l'assujettissement à l'impôt de l'indemnité de cessation de contrat (non)

L'assujettissement à l'impôt de l'indemnité de cessation de contrat d'agent commercial ne constitue pas un préjudice réparable


Références :

ARRET du 30 avril 2008, Cour d'appel de Besançon, Chambre civile 2, 30 avril 2008, 07/00284
article L. 134-12 du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, 30 avril 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 15 sep. 2009, pourvoi n°08-16696, Bull. civ. 2009, IV, n° 108
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, IV, n° 108

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : M. Bonnet
Rapporteur ?: Mme Laporte
Avocat(s) : Me Bertrand, Me Hémery

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.16696
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