LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n°s R. 08-42.320 à P. 08-42.479 et F. 08-42.541 ;
Sur le moyen unique des pourvois :
Attendu, selon les arrêts attaqués (Paris, 18 mars 2008), que, dans le cadre des articles L. 322-4-18 à L. 322-4-21 du code du travail alors applicables ainsi que d'un accord signé le 16 décembre 1997 entre elle et l'Etat, la SNCF a, au cours des années 1998 et 1999, engagé des salariés par des contrats de travail à durée déterminée de cinq ans ; que ces contrats comportaient, à l'article 4, la précision selon laquelle le salarié, outre une rémunération mensuelle, bénéficierait «le cas échéant, des indemnités, gratifications et allocations dans les conditions prévues au titre D du règlement PS 25, au taux prévu pour le personnel appartenant à la classe A de l'annexe A1 de ce règlement» ; qu'ils stipulaient, à l'article 6, que «l'intéressé(e) déclare avoir pris connaissance du règlement PS 25 qui définit les règles générales qui lui sont applicables et notamment à l'annexe C qui lui est applicable.... Il s'engage à s'y conformer» ;
Attendu que la SNCF fait grief aux arrêts de l'avoir condamnée à payer différentes sommes aux salariés, à titre de dommages-intérêts et à titre de rappel de prime de fin d'année et de prime de travail, ainsi que des sommes au syndicat Sud-Rail à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que les contrats de travail conclus entre la SNCF et les différents salariés stipulaient que ces derniers bénéficieraient "le cas échéant" des indemnités, gratifications et allocations prévues au titre D du Règlement PS 25, ce qui excluait que leur exigibilité fût automatique ; qu'au demeurant, l'article 39 du titre D du règlement PS 25, qui énumère ces indemnités, n'y inclut pas les primes de travail et de fin d'année, lesquelles ne sont pas davantage visées par les termes du contrat ; qu'en jugeant néanmoins que ces primes devaient être versées par la SNCF, par une motivation qui méconnaît, d'une part, le caractère aléatoire («le cas échéant») des indemnités visées par le contrat, lequel ni ne faisait «référence» à la rémunération des agents du cadre permanent, pour reprendre les termes de l'annexe C, ni «n'assimilait» les missions confiées à celles de ces agents, et, d'autre part, le fait que les primes litigieuses sont exclues en toute hypothèse de ces dernières et ne sont pas visées par le contrat, la cour a violé l'article 1134 du code civil, ensemble les dispositions du règlement PS 25 et de ses annexes ;
2°/ que les dispositions de l'annexe C, qui ne prévoient aucune automaticité du paiement de primes de travail et de fin d'année, indiquent que la rémunération des agents concernés s'établit de gré à gré ; qu'elles indiquent encore qu'elle est fixée soit «par référence» à celle des agents du cadre permanent auxquels ces agents peuvent être assimilés en fonction de la mission prévue par le contrat, la rémunération tenant alors compte de ces primes, soit par vacation pour des missions non pérennes (saisonnières ou occasionnelles) ; qu'en décidant dès lors que les emplois-jeunes conclus avec la SNCF devaient être assimilés à des emplois du cadre permanent, rendant exigible le paiement de primes de travail et de fin d'année, quand les contrats auxquels ils ont donné lieu, conclus pour cinq ans, pour des missions non pérennes et différentes des missions permanentes exercées par les cadres permanents, ne faisaient aucune «référence» à une telle assimilation et ne renvoyaient aux agents de l'annexe A de l'annexe A1 que pour les seules modalités de calcul des taux applicables aux «indemnités, gratifications et allocations», exclusives des primes litigieuses, dans l'hypothèse ici non vérifiée où elles seraient exigibles, la cour a violé l'article 1134 du code civil, ensemble les dispositions du règlement PS 25 et de ses annexes ;
Mais attendu que, selon l'annexe C du règlement PS 25, la rémunération des agents utilisés dans des emplois autres que ceux ressortissant aux annexes A et B, est fixée de gré à gré, soit par référence à celle des agents du cadre permanent auxquels ils peuvent être assimilés en fonction de l'emploi ou de la mission prévue au contrat, la rémunération forfaitaire mensuelle tenant compte de la prime de travail et de la prime de fin d'année, soit par vacation pour des missions à caractère saisonnier ou des tâches occasionnelles ;
Et attendu qu'il résulte des constatations des arrêts, d'abord, que le contrat de travail des intéressés déclarait l'annexe C applicable, ensuite, que les salariés n'étaient pas rémunérés à la vacation pour des missions à caractère saisonnier ou des tâches occasionnelles, enfin, que la SNCF ne contestait pas que leur rémunération ne tenait pas compte de la prime de travail et de la prime de fin d'année ;
Qu'ainsi, les arrêts qui ont décidé que les salariés étaient bien fondés à percevoir les primes de travail et de fin d'année, et que le syndicat Sud-Rail était bien fondé en sa demande, se trouvent légalement justifiés ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la SNCF aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer aux salariés et au syndicat Sud-Rail la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille neuf.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me X..., avocat aux Conseils pour la SNCF (demanderesse aux pourvois n°s R. 08-42.320 à P. 08-42.479 et F. 08-42.541).
Il est fait grief aux arrêts attaqués D'AVOIR, confirmant les jugement déférés, condamné la SNCF à payer différentes sommes aux salariés, à titre de dommages et intérêts, et, par voie d'infirmation, de l'avoir condamnée à payer différentes sommes aux salariés au titre de rappel de prime de fin d'année et de prime de travail, ainsi que différentes sommes au syndicat Sud-Rail à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES ET ADOPTES QUE les contrats en cause sont intitulés "Contrat de travail à durée déterminée emplois jeunes conclu dans le cadre des art. L.322-4-1 8 à L. 322.-4-20 du code du travail" et indiquent dans leur art. 1 que les intéressés sont engagés "en qualité de : emploi-jeune (Annexe C du Règlement PS 25)" ; que l'art. 4 de ces contrats stipule: "II est alloué à l'intéressé un salaire mensuel de .... (réduit en cas d'absence dans les conditions prévues au Règlement PS 25). Il bénéficiera en outre, le cas échéant, des indemnités, gratifications et allocations dans les conditions prévues au Règlement PS 25, aux taux prévus pour le personnel appartenant à la classe A de l'annexe Al de ce règlement. Le montant des éléments constituant la rémunération en espèces est révisé à l'initiative de la SNCF" ; qu'il résulte de l'art. 2 du Règlement PS 25 (RH 0254) qu'il a pour objet de définir les dispositions à appliquer au personnel contractuel de la SNCF ; qu'il traite dans une première partie des dispositions communes applicables à l'ensemble de ce personnel et que dans une seconde il fixe, sous forme d'annexes, les dispositions particulières aux catégories de personnel concerné ; que ce règlement distingue diverses catégories de personnels relevant de trois annexes : A, B et C, à savoir : - Annexe A-l : personnel utilisé dans des emplois du dictionnaire des filières autres que celui chargé de la gérance des passages à niveau et des points d'arrêt et autres que les psychologues, le personnel paramédical et le personnel de l'économie sociale et familiale, - Annexe A-2 : personnel chargé de la gérance des passages à niveau et des points d'arrêt. - Annexe A-3: psychologues, personnel paramédical et personnel de l'économie sociale et familiale. - Annexe B : personnel de service et de surveillance des établissements sociaux autres que ceux visés à l'annexe A3, - Annexe C : personnel utilisé dans les emplois autres que ceux ressortissants aux annexes A et B ; que les salariés titulaires de contrats emploi-jeune relèvent, au terme d'une clause expresse de leur contrat, de cette annexe C, laquelle stipule : "La rémunération des agents utilisés dans des emplois autres que ceux ressortissant aux annexes A et B est fixée de gré à gré : -soit par référence à celle des agents du cadre permanent auxquels ils peuvent être assimilés en fonction de l'emploi ou de la mission prévue au contrat, la rémunération forfaitaire mensuelle tient compte de la prime de travail et de la prime de fin d'année, - soit par vacation, pour des missions à caractère saisonnier ou des tâches occasionnelles ; que les conditions dans lesquelles cette rémunération est révisée sont prévues au contrat qui est établi sur la base des dispositions générales prévues au présent règlement" ; que par leur objet (assistance, information, surveillance) et par leur durée de cinq ans, les missions, telles que définies par l'Accord-cadre de décembre 1997, confiées par les contrats emploi-jeune en cause ne sont ni saisonnières, ni occasionnelles ; qu'aux termes de l'annexe C, elles n'ont donc pas vocation à être rémunérées à la vacation ; que dès lors, l'annexe C applicable entre les parties au terme d'une disposition contractuelle expresse n'offrant qu'une alternative, la rémunération des titulaires de contrats emploi-jeune doit se faire conformément à la première hypothèse "par référence à celle des agents du cadre permanent auxquels ils peuvent être assimilés en fonction de l'emploi ou de la mission prévue au contrat" et leur "rémunération forfaitaire mensuelle" doit tenir "compte de la prime de travail et de la prime de fin d'année" ; que ce texte n'exige pas que l'emploi du cadre permanent servant de référence pour la fixation de la rémunération soit le même que celui du contrat emploi-jeune considéré ; qu'il suffit que le second soit "assimilable" au premier ; qu'il s'ensuit que doit être considérée la rémunération correspondant à l'emploi du cadre permanent dont les tâches se rapprochent le plus de celles du contrat emploi-jeune concerné ; qu'il convient de constater qu'en l'espèce il n'est pas formulé de contestation sur le montant du salaire de base retenu par la SNCF pour rémunérer les emplois jeunes ; qu'indépendamment du salaire ainsi fixé, la rémunération du contrat emploi-jeune doit, en outre, tenir, "compte de la prime de travail et de la prime de fin d'année", ce qui implique que ces deux primes sont dues aux titulaires de ces contrats ; qu'il est constant que la rémunération versée par la SNCF à l'intimé(e) n'inclut pas de prime de travail ou de fin d'année, l'employeur contestant le principe même du versement de ces gratifications ; qu'il doit, par conséquent, être fait droit à la demande en paiement de rappels de salaire formée à ce titre ; qu'en ce qui concerne le montant des primes en litige, l'article 4 des contrats emploi-jeune prévoit que si (le cas échéant) le salarié bénéficie d'indemnités, de gratifications ou d'allocations, ce sera dans les conditions prévues au Règlement PS 25, aux taux prévus pour le personnel appartenant à la classe A de l'annexe A1 de ce règlement ;
1° ALORS QUE les contrats de travail conclus entre la SNCF et les différents salariés stipulaient que ces derniers bénéficieraient «le cas échéant» des indemnités, gratifications et allocations prévues au titre D du Règlement PS 25, ce qui excluait que leur exigibilité fût automatique ; qu'au demeurant, l'article 39 du titre D du règlement PS 25, qui énumère ces indemnités, n'y inclut pas les primes de travail et de fin d'année, lesquelles ne sont pas davantage visées par les termes du contrat ; qu'en jugeant néanmoins que ces primes devaient être versées par la SNCF, par une motivation qui méconnaît, d'une part, le caractère aléatoire («le cas échéant») des indemnités visées par le contrat, lequel ni ne faisait «référence» à la rémunération des agents du cadre permanent, pour reprendre les termes de l'annexe C, ni «n'assimilait» les missions confiées à celles de ces agents, et, d'autre part, le fait que les primes litigieuses sont exclues en toute hypothèse de ces dernières et ne sont pas visées par le contrat, la cour a violé les l'article 1134 du code civil, ensemble les dispositions du Règlement PS 25 et de ses annexes ;
2° ALORS QUE les dispositions de l'annexe C, qui ne prévoient aucune automaticité du paiement de primes de travail et de fin d'année, indiquent que la rémunération des agents concernés s'établit de gré à gré ; qu'elles indiquent encore qu'elle est fixée soit «par référence» à celle des agents du cadre permanent auxquels ces agents peuvent être assimilés en fonction de la mission prévue par le contrat, la rémunération tenant alors compte de ces primes, soit par vacation pour des missions non pérennes (saisonnières ou occasionnelles) ; qu'en décidant dès lors que les emplois-jeunes conclus avec la SNCF devaient être assimilés à des emplois du cadre permanent, rendant exigible le paiement de primes de travail et de fin d'année, quand les contrats auxquels ils ont donné lieu, conclus pour cinq ans, pour des missions non pérennes et différentes des missions permanentes exercées par les cadres permanents, ne faisaient aucune «référence» à une telle assimilation et ne renvoyaient aux agents de l'annexe A de l'annexe A1 que pour les seules modalités de calcul des taux applicables aux «indemnités, gratifications et allocations», exclusives des primes litigieuses, dans l'hypothèse ici non vérifiée où elles seraient exigibles, la cour a violé l'article 1134 du code civil, ensemble les dispositions du Règlement PS 25 et de ses annexes.