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23/06/2009 | FRANCE | N°09-82292

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 23 juin 2009, 09-82292


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Frédéric,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de DIJON, en date du 18 février 2009, qui, sur renvoi après cassation, l'a renvoyé devant la cour d'assises de la HAUTE-SAÔNE sous l'accusation de viols aggravés et de viols ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 191 du code de procédure pénale, L. 312-4 du code de l'organisation judiciaire, des articles R. 121-2 et R.

312-3 du même code, de l'article 592 du code de procédure pénale, 34 de la Consti...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Frédéric,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de DIJON, en date du 18 février 2009, qui, sur renvoi après cassation, l'a renvoyé devant la cour d'assises de la HAUTE-SAÔNE sous l'accusation de viols aggravés et de viols ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 191 du code de procédure pénale, L. 312-4 du code de l'organisation judiciaire, des articles R. 121-2 et R. 312-3 du même code, de l'article 592 du code de procédure pénale, 34 de la Constitution de 1958, violation de la loi, excès de pouvoir ;
"en ce qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que la chambre de l'instruction était présidée par M. Jeannoutot, premier président de la cour d'appel de Dijon, président de la chambre de l'instruction en application des articles R. 121-2 et R. 312-3 du code de l'organisation judiciaire, en l'absence du président titulaire régulièrement empêché ;
"alors qu'il ne saurait être dérogé aux prescriptions de l'article 191 du code de procédure pénale prévoyant que le président de la chambre de l'instruction est désigné par décret, après avis du Conseil supérieur de la magistrature et qu'en cas d'absence ou d'empêchement, le premier président désigne pour le remplacer à titre temporaire un autre président de chambre ou un conseiller, dispositions touchant à la composition de la chambre de l'instruction, par des dispositions réglementaires du code de l'organisation judiciaire relatives au service des chambres de la cour d'appel, inapplicables à la chambre de l'instruction, dont les règles de fonctionnement sont fixées par le code de procédure pénale ; qu'ainsi, le premier président de la cour d'appel ne pouvait se substituer au président titulaire de la chambre de l'instruction, ce dernier fût-il légitimement empêché, et le remplacer d'office sur le fondement desdits textes réglementaires du code de l'organisation judiciaire, sans justifier d'une désignation temporaire d'un président suppléant, par ordonnance, dans les termes de l'article 191, alinéa 2, du code de procédure pénale" ;
Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que la chambre de l'instruction était présidée par le premier président, en l'absence du président empêché ; qu'en cet état, et dès lors qu'aucune disposition légale ne fait obstacle à ce que, lorsque le président de la chambre de l'instruction est empêché, il soit remplacé par le premier président, les griefs allégués ne sont pas encourus ;
Que, dès lors, le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-23, 222-24-2° du code pénal, 214, 215, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a prononcé la mise en accusation de Frédéric X... devant la cour d'assises du département de la Haute-Saône des chefs de viols commis du 18 juin 1988 jusqu'au 6 avril 1990 sur la personne de Lucie Y... avec cette circonstance que la victime était mineure de 15 ans comme étant née le 6 avril 1975 et viols commis sur la personne de Lucie Y... du 6 avril 1990 à courant 1993 ;
"aux motifs que Lucie Y... accusait son oncle Frédéric X... et faisait remonter les premiers faits à l'année de ses sept ans ; que ce jour-là, son oncle l'avait conduite dans la salle de bains, et sous couvert de lui révéler un secret, l'avait obligée à lui faire une fellation jusqu'à éjaculation ; que, lors du second épisode, son oncle, après lui avoir proposé de venir voir des dessins qu'il réalisait dans une pièce située au sous-sol, lui avait caressé le sexe par-dessus ses vêtements, avait sorti son propre sexe et lui avait indiqué comment pratiquer une masturbation ; qu'il ne l'avait pas forcée à lui pratiquer une fellation et la masturbation avait été interrompue avant qu'il y ait eu éjaculation ; que Lucie Y... précisait également qu'il n'avait jamais été menaçant lors d'agissements de 1986 ; que, dans le courant de 1989 ou 1990, alors que son oncle la reconduisait au domicile de ses parents, il s'était arrêté sur une aire de repos, avait introduit sa main dans son pantalon, sous sa culotte et lui avait caressé le clitoris puis avait introduit un doigt dans son vagin ; qu'elle avait tenté de résister sans succès tout en ajoutant que la contrainte n'était pas d'ordre «physique mais plutôt psychologique» ; qu'elle précisait avoir, dans le même temps de sa tentative d'opposition, succombé à une sorte de résignation ; que Lucie Y... indiquait que de tels faits s'étaient reproduits au moins une dizaine de fois entre ce jour et celui de ses dix-sept ans, soit en 1992 ; que là encore, elle décrivait des faits similaires, à savoir des attouchements, des caresses sur le clitoris et l'introduction d'un doigt dans le vagin alors que Frédéric X... lui demandait de le masturber ; qu'elle décrivait également la même résignation, précisant sa pensée : «de toute façon, je suis seule avec lui sur la route et cela va une fois de plus arriver ; autant qu'il ne s'arrête qu'une fois et qu'il se satisfasse tout de suite» ; que, lors de ces actes, Frédéric X... a utilisé la contrainte pour atteindre, en-dehors de la volonté de la victime, le but qu'il se proposait en s'isolant avec elle dans son véhicule sur une aire de repos lors de trajets routiers ; que Lucie Y... indiquait que les derniers faits remontaient à l'année de ses dix-huit ans, soit 1993 ; que son oncle l'avait alors conduite à l'hôtel Kyriad de Besançon ; qu'une fois dans la chambre il s'était dévêtu, avait fait de même sur sa nièce avant de s'allonger sur le lit et de lui imposer une pénétration sexuelle vaginale ; qu'étant vierge, alors qu'elle lui avait affirmé le contraire dans l'espoir de le voir cesser ses agissements, elle avait éprouvé une vive douleur et l'avait repoussé vivement ; que celui-ci s'était alors excusé en comprenant la situation ; que cette fois-là, comme les autres son oncle n'avait pas usé de menace ou de violence pour parvenir à ses fins ; qu'elle précisait qu'elle n'avait pu opposer la moindre résistance, ni même indiquer qu'elle refusait ce qui allait se passer et dont elle avait pleinement conscience, car elle était tétanisée à l'idée de ce qu'elle allait subir, ayant à l'esprit la représentation d'un viol tel qu'on le décrit dans les films ; qu'elle craignait donc que son refus ou l'évocation de celui-ci ne déchaîne la violence et la rage de son oncle sur elle ; que ce n'est en fait que sous le coup de la douleur qu'elle avait pu réagir ; qu'à l'appui de son ordonnance de non-lieu, le juge d'instruction relève que l'information n'a pas permis de recueillir des éléments de preuve matériels ou extrinsèques suffisants corroborant les déclarations faites par Lucie Y... tant à ses proches qu'aux enquêteurs et au magistrat instructeur ; que certes, il n'existe aucun élément matériel permettant de caractériser les infractions reprochées à ce dernier, les faits dénoncés ayant cessé près de huit ans avant d'être portés à la connaissance de la justice ; que les dénégations et les accusations des parties en présence doivent dès lors être examinées par rapport à l'ensemble figurant à la procédure ; qu'il résulte de ces éléments des charges suffisantes à l'encontre de Frédéric X... d'avoir commis les faits dénoncés même s'il a nié les accusations de Lucie Y... ;
"1) alors que le crime de viol suppose qu'un acte de pénétration sexuelle soit commis sur la personne d'autrui par violence, contrainte, menace ou surprise ; que l'arrêt attaqué ne peut donc prononcer la mise en accusation de Frédéric X... du chef de viols sans avoir caractérisé en quoi les actes reprochés auraient été commis avec violence, contrainte, menace ou surprise ; qu'en l'état de ces seuls motifs se bornant à faire allusion au sentiment de «résignation» éprouvé par Lucie Y... et à une «forme de contrainte psychologique» qui n'est absolument pas caractérisée dans les faits, tout en constatant que selon les dires de Lucie Y... elle-même, son oncle n'avait jamais usé de menace ou de violence pour parvenir à ses fins et qu'elle ne lui avait pas opposé la moindre résistance, ni refus explicite, la chambre de l'instruction n'a pu donner une base légale à sa décision ;
"2) alors que l'existence de l'élément constitutif du crime de viol résultant de l'exercice de la contrainte sur la victime ne peut se déduire que d'éléments objectifs et non des seules appréciations subjectives de la victime ; que dès lors, les sentiments de résignation et d'appréhension éprouvés par cette dernière qui indiquait n'avoir subi ni violence, ni menace, ni contrainte physique et n'avoir jamais résisté, ni refusé les actes dont elle prétend avoir été victime, ne pouvaient, à eux seuls, justifier de l'existence d'une contrainte exercée par le prévenu sur Lucie Y..., de quelque nature soit-elle ;
"3) alors que l'arrêt qui constate qu'il n'existe aucun élément matériel objectif susceptible de caractériser les infractions reprochées n'a pu justifier autrement que par une appréciation subjective de la personnalité de Lucie Y... et non des faits eux-mêmes, l'existence de charges qui ne peuvent donc suffire à motiver le renvoi de Frédéric X... devant une cour d'assises sous l'accusation de viols ;
"4) alors qu'hormis les faits déclarés prescrits par la chambre de l'instruction, antérieure au 18 juin 1988, Lucie Y... ne situe pas précisément les faits suivants qui auraient été commis "dans le courant de l'année 1989 ou 1990" ; qu'ainsi, l'arrêt ne pouvait considérer que ces viols avaient été commis sur Lucie Y... entre le 10 juin 1988 et jusqu'au 6 avril 1990, jour où elle a eu 15 ans, pour retenir la circonstance de minorité de 15 ans ; que la chambre de l'instruction n'a pu justifier légalement sa décision ;
Attendu que les motifs de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la chambre de l'instruction, après avoir exposé les faits et répondu comme elle le devait aux articulations essentielles du mémoire dont elle était saisie, a relevé l'existence de charges qu'elle a estimé suffisantes contre Frédéric X... pour ordonner son renvoi devant la cour d'assises sous l'accusation de viols aggravés et de viols ;
Qu'en effet, les juridictions d'instruction apprécient souverainement si les faits retenus à la charge de la personne mise en examen sont constitutifs d'une infraction, la Cour de cassation n'ayant d'autre pouvoir que de vérifier si, à supposer ces faits établis, la qualification justifie la saisine de la juridiction de jugement ;
Que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que la procédure est régulière et que les faits, objet principal de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Joly conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Palisse conseiller rapporteur, Mme Anzani conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 09-82292
Date de la décision : 23/06/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION - Composition - Président et conseillers - Président - Président titulaire empêché - Remplacement - Premier président - Régularité - Condition

Selon l'article 191, alinéa 2, du code de procédure pénale, en cas d'absence ou d'empêchement du président de la chambre de l'instruction, le premier président désigne pour le remplacer à titre temporaire un autre président de chambre ou un conseiller. N'encourt pas les griefs allégués, l'arrêt de la chambre de l'instruction qui mentionne que celle-ci, en l'absence du président titulaire empêché, était présidée par le premier président en application des dispositions réglementaires du code de l'organisation judiciaire, dès lors que les prescriptions de l'article du code de procédure pénale susvisé ne font pas obstacle à ce que lorsque le président de la chambre de l'instruction est empêché, il soit remplacé par le premier président


Références :

article 191, alinéa 2, du code de procédure pénale

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Dijon, 18 février 2009

Sur le remplacement du président titulaire de la chambre de l'instruction, anciennement dénommée "chambre d'accusation", non empêché, par le premier président, à rapprocher :Crim., 26 septembre 1990, pourvoi n° 90.84.341, Bull. crim. 1990, n° 320 (cassation) Sur le remplacement d'un conseiller titulaire de la chambre de l'instruction, anciennement dénommée "chambre d'accusation", empêché, par le premier président, à rapprocher :Crim., 15 novembre 1995, pourvoi n° 95-84534, Bull. crim. 1995, n° 348 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 23 jui. 2009, pourvoi n°09-82292, Bull. crim. criminel 2009, n° 128
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2009, n° 128

Composition du Tribunal
Président : M. Joly (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Mouton
Rapporteur ?: Mme Palisse
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:09.82292
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