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28/05/2009 | FRANCE | N°08-16380

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 28 mai 2009, 08-16380


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que la société Centre de loisirs de Béthune devenue la société Centre de loisirs de Calais (la société), ayant proposé d'acquérir le bowling installé dans le complexe de sports et de loisirs que la commune de Béthune avait fait construire en 1987, en a assuré l'exploitation durant plusieurs années tandis que se poursuivaient des négociations qui n'ont pas abouti ; qu'à la suit

e de plusieurs procédures, au cours desquelles il a notamment été jugé qu'aucun bail...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 16 du code de procédure civile ;

Attendu que la société Centre de loisirs de Béthune devenue la société Centre de loisirs de Calais (la société), ayant proposé d'acquérir le bowling installé dans le complexe de sports et de loisirs que la commune de Béthune avait fait construire en 1987, en a assuré l'exploitation durant plusieurs années tandis que se poursuivaient des négociations qui n'ont pas abouti ; qu'à la suite de plusieurs procédures, au cours desquelles il a notamment été jugé qu'aucun bail ne liait les parties, la commune de Béthune a assigné la société au fond afin de voir constater qu'elle est occupante sans droit ni titre et obtenir son expulsion et sa condamnation à lui payer une indemnité d'occupation; que la société a pour sa part invoqué le bénéfice de la propriété commerciale ;

Attendu que pour rejeter ces demandes et juger que les parties sont liées par un prêt à usage immobilier l'arrêt attaqué énonce que, dès lors que la vente des murs s'est éloignée définitivement et que la ville a manifesté, plus ou moins explicitement, son intention de reprendre les locaux, la convention litigieuse "a répondu exactement aux tenants et aboutissants du commodat tel que défini à l'article 1875 du code civil", en ajoutant qu'il est loisible à la cour d'appel, le litige portant tout entier sur la qualification des rapports entre les parties, de redonner à ceux-ci "la coloration juridique qu'il appartient, sans même rouvrir les débats" ;

Qu'en statuant ainsi sans inviter au préalable les parties, qui fondaient leurs prétentions sur d'autres qualifications, à présenter leurs observations sur le moyen relevé d'office tiré de l'existence d'un prêt, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 mars 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;

Condamne la société Centre de Loisirs de Calais aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mai deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour la commune de Béthune

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir constaté que les parties sont liées par un commodat ou prêt à usage immobilier, et débouté en conséquence la ville de Béthune de sa demande de percevoir un prix pour l'occupation de la SA Centre de Loisirs de Béthune depuis 1993 ;

AUX MOTIFS QU' il résulte de manière irréfragable du précédent arrêt rendu entre les mêmes parties que le Centre de Loisirs n'est ni locataire, ni acheteur potentiel ni crédit preneur ; qu'étant entré dans les lieux du fait de la ville de Béthune, le Centre de Loisirs a bénéficié d'une véritable convention ; que ne s'étant rendu auteur d'aucun manquement avéré à une clause claire et précise, le Centre de Loisirs ne saurait être qualifié d'occupant sans droit ni titre ; qu'il a au contraire satisfait aux demandes financières ou autres de la ville lorsqu'il lui en était fait et n'a pas pu se dérober aux termes d'un contrat demeuré si longtemps indéterminé dans sa nature et dans ses modalités ; qu'en revanche, la convention qui lie les parties dès lors que l'hypothèse de la vente des murs s'est éloignée définitivement et que la ville a manifesté plus ou moins explicitement son intention de reprendre un jour les locaux pour son usage ou celui d'un tiers a répondu exactement aux tenants et aboutissants du commodat tel que défini à l'article 1875 du code civil ; qu'il est loisible à la cour dès lors que le litige porte tout entier sur la question de la qualification des rapports entre les parties de redonner à ces rapports la coloration juridique qu'il appartient, sans même rouvrir les débats ; que la période pendant laquelle la ville a pu hésiter, c'est à dire songer encore à une vente est antérieure de plus de cinq ans à la présente instance, de sorte que la qualification exacte de la convention existant à l'époque n'offre plus d'intérêt ; que conformément à l'article 1876 du code civil, la commodat est essentiellement gratuit ; que d'ailleurs l'offre de paiement de la Sté Centre de Loisirs n'est faite que dans le cadre ferme de la qualification de bail qu'elle propose derechef et vainement à la cour ;

1 ) ALORS QUE conformément aux articles 1101 et 1134 du code civil, la jouissance d'un bien par un tiers consentie pour une durée déterminée et sous une condition résolutoire constituée par la réalisation de conditions suspendant la régularisation d'un acte confère à celui qui continue d'occuper le bien après le défaut de régularisation de l'acte la qualité d'occupant sans droit ni titre, peu important qu'il n'ait pas commis de manquement à des obligations ; qu'en retenant, pour décider que la Sté Centre de Loisirs n'avait pas la qualité d'occupant sans droit ni titre, qu'elle était entrée dans les lieux du fait de la commune de Béthune, avait bénéficié d'une convention «véritable » et ne s'était rendu l'auteur d'aucun manquement à une clause claire et précise, la cour d'appel qui n'a pas recherché si le seul fait de se maintenir dans les lieux une fois constaté que la promesse de crédit bail immobilier ne pouvait plus être régularisée, faute pour le crédit preneur d'avoir réalisé la condition suspensive tenant au financement, ne conférait pas à la Sté Centre de Loisirs la qualité d'occupant sans droit ni titre qui, en outre, à défaut de convention expresse, ne pouvait pas manquer à l'une d'elles a, en statuant ainsi, violé les dispositions susvisées ;

2 ) ALORS QUE le juge doit, en toute circonstance, respecter le principe contradictoire et il doit, en conséquence, inviter au préalable les parties à présenter leurs observations dans le cas où il entend requalifier la nature des rapports existant entre elles ; qu'en l'espèce, la commune de Béthune a fait valoir que la Sté Centre de Loisirs, occupante sans droit ni titre d'un immeuble faisant partie de son domaine privé, devait payer une indemnité d'occupation et la Sté Centre de Loisirs a invoqué l'existence d'un bail commercial, se fondant sur l'article L.145-1 du code de commerce ; qu'en qualifiant de prêt à usage gratuit les relations entre les parties et en énonçant qu'elle n'avait pas à rouvrir les débats pour leur redonner la «coloration juridique » qu'il appartient, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3 ) ALORS QUE le prêt à usage est un contrat à titre gratuit par lequel une partie livre à une autre une chose pour s'en servir, à charge pour le preneur de la rendre après s'en être servi ; qu'en l'espèce, la Sté Centre de Loisirs est entrée en possession des locaux appartenant à la commune de Béthune lors de la signature de l'acte de cession du 12 février 1993 portant sur des éléments d'exploitation de l'établissement, soit la licence IV et des pistes de bowling, dans l'attente de la réalisation des conditions suspensives relatives notamment à l'obtention du financement nécessaire au crédit preneur pour régulariser la convention de crédit bail immobilier, prêt qui n'a pas été en définitive obtenu ; qu'il en résulte que l'occupation des lieux a été opérée sous la condition résolutoire de la formation d'un contrat définitif et avait pour terme extinctif la caducité de la promesse ; Qà défaut de régularisation de la promesse, les locaux devaient être restitués, faute de quoi la Sté Centre de Loisirs était occupant sans droit ni titre ; qu'en constatant que les parties avaient formé un contrat de commodat qui, pourtant, ne correspondait pas à leur volonté, lors de l'entrée dans les lieux, d'être liées par un contrat d'usage de la chose sans terme déterminé et à titre gratuit, la cour d'appel a violé les articles 1875 et 1876 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 08-16380
Date de la décision : 28/05/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 27 mars 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 28 mai. 2009, pourvoi n°08-16380


Composition du Tribunal
Président : M. Bargue (président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.16380
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