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20/05/2009 | FRANCE | N°08-11355

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 20 mai 2009, 08-11355


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu que Pierre X... est décédé le 21 octobre 1999, en laissant pour lui succéder ses deux enfants issus de son premier mariage, Christine et Sylvain, et sa seconde épouse, Mme Y... ; que, par testament authentique du 13 octobre 1998, il avait institué ses deux enfants légataires universels, "à charge pour eux de délivrer" à Mme Y... "le capital décès" d'un contrat d'assurance-vie les désignant bénéficiaires ; que, le capital garanti ay

ant été versé à Mme et M. X..., Mme Y... les a assignés en reversement de ce...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :

Attendu que Pierre X... est décédé le 21 octobre 1999, en laissant pour lui succéder ses deux enfants issus de son premier mariage, Christine et Sylvain, et sa seconde épouse, Mme Y... ; que, par testament authentique du 13 octobre 1998, il avait institué ses deux enfants légataires universels, "à charge pour eux de délivrer" à Mme Y... "le capital décès" d'un contrat d'assurance-vie les désignant bénéficiaires ; que, le capital garanti ayant été versé à Mme et M. X..., Mme Y... les a assignés en reversement de ce capital ;

Attendu que Mme et M. X... font grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Besançon, 8 novembre 2007) d'avoir fait droit à la demande, alors, selon le moyen :

1°/ que le testament du 13 octobre 1998 prévoyait explicitement que les exposants, légataires universels, avaient la charge de délivrer à Mme Christiane Régine Y... "les legs particuliers ci-après : … troisièmement : le capital décès de Peugeot moto cycles caisse de retraite qui reviendra en intégralité à mon épouse" ; qu'en jugeant pourtant que cette clause prévoyant le versement du capital décès à Mme Y... ne constituait pas un legs, la cour d'appel a dénaturé le testament établi par Pierre X..., violant ainsi l'article 1134 du code civil ;

2°/ que le capital payable aux bénéficiaires d'une assurance-vie au décès du souscripteur est réputé appartenir aux seuls bénéficiaires du contrat dès la date de conclusion du contrat ; que le souscripteur du contrat d'assurance-vie ne peut donc pas léguer ce capital à un tiers, le legs de la chose d'autrui étant nul ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément constaté que les exposants étaient les bénéficiaires du contrat d'assurance-vie conclu le 6 juin 1984 ; qu'il s'en évinçait que le capital payable au titre de ce contrat était réputé leur appartenir dès le 6 juin 1984 et n'appartenait pas à Pierre X... ; que ce capital ne pouvait par conséquent pas faire l'objet d'un legs par Pierre X..., de sorte qu'en condamnant les exposants à exécuter un legs nul au bénéfice de Mme Y..., la cour d'appel a violé l'article 1021 du code civil ;

3°/ subsidiairement, que, si le capital payable au bénéficiaire d'une assurance-vie ne fait pas partie de la succession de l'assuré et n'est pas soumis aux règles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers de l'assuré, les sommes allouées à un tiers en exécution d'un testament ne doivent en revanche pas excéder la quotité disponible ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que Mme Y... n'était pas bénéficiaire du contrat d'assurance-vie du 6 juin 1984, mais qu'elle avait droit aux sommes perçues au titre de ce contrat par exécution du testament du 13 octobre 1998 ; qu'en refusant pourtant de réduire les sommes allouées à Mme Y... à la quotité disponible, la cour d'appel a violé les articles L. 132-12 et L. 132-13 du code des assurances par fausse application, ensemble les articles 912 et suivants du code civil par refus d'application ;

Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel a exactement décidé, hors toute dénaturation, que les dispositions testamentaires litigieuses s'analysaient en un legs universel avec charge ;

Attendu, ensuite, que, dès lors qu'il ne fait pas partie de la succession de l'assuré, le capital stipulé payable lors du décès de l'assuré à un bénéficiaire déterminé ou à ses héritiers n'entre pas dans la masse de calcul de la réserve et de la quotité disponible ; que, la charge du legs universel ayant pour objet "le capital décès", la cour d'appel a jugé à bon droit que Mme et M. X... ne pouvaient solliciter une éventuelle réduction du capital garanti à hauteur de la quotité disponible ;

D'où il suit que le moyen, qui n'est pas fondé en ses première et troisième branches et qui est inopérant en sa deuxième, ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme et M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mai deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP GATINEAU et FATTACCINI, avocat aux Conseils pour Mme et M. X...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné Monsieur Sylvain X... et Madame Christine X... à payer chacun à Madame Christiane Y... la somme de 42.675,36 , outre intérêts au taux légal à compter du 13 février 2003,

AUX MOTIFS PROPRES QUE par testament du 13 octobre 1998, reçu par Me A..., notaire, Pierre X... a institué pour légataires universels de tous les biens meubles et immeubles, ses deux enfants, Sylvain X... et Christine X..., à charge pour eux de délivrer à son épouse le capital-décès de PEUGEOT MOTO CYCLES CAISSE DE RETRAITE, qui lui reviendra en totalité ; que Pierre X... avait souscrit par l'intermédiaire de son employeur un contrat décès collectif le 6 juin 1984, désignant comme bénéficiaires ses deux enfants par parts égales, et en cas de décès de l'un d'eux la totalité au survivant ; que l'URPIMMEC, dont fait partie le Groupe MALAKOFF, a versé, le 24 juillet 2000, le capital garanti de 559.864 F, soit 85.350,72 en deux versements de 42.675,36 ; que les dispositions testamentaires ne peuvent s'analyser en une modification du bénéficiaire puisque les bénéficiaires du contrat n'ont pas varié, à savoir Sylvain X... et Christine X... ; qu'il ne s'agit pas d'un legs au titre d'une quote part de la succession, mais selon les termes mêmes du testament d'une charge pour Sylvain X... et Christine X... en tant que légataires universels de percevoir le montant du capital, dont ils étaient bénéficiaires, et de le remettre à Christiane Y..., veuve X... ; qu'il appartient à Sylvain X... et Christine X... d'exécuter la charge en leur qualité de légataires universels et de reverser les sommes perçues au titre du capital-décès à Christiane Y..., veuve X... ; qu'en l'absence de legs, Sylvain X... et Christine X..., ne peuvent solliciter la réduction des montants à la quotité disponible ; que Christiane Y..., veuve X..., se verra allouer une indemnité procédurale au titre des sommes exposées et non comprises dans les dépens,

ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES PARTIELLEMENT QU'aux termes de l'article L.132-8 du Code des Assurances, la substitution du bénéficiaire d'un contrat d'assurance-vie peut être réalisée soit par voie d'avenant au contrat, soit en remplissant les formalités édictées par l'article 1690 du Code Civil, soit par endossement quand la police est à ordre, soit par voie testamentaire ; que le souscripteur est donc en droit de substituer au bénéficiaire une autre personne à n'importe quel moment et sans obligation d'en informer l'assureur ; qu'en l'espèce le testament de Pierre X... impose aux enfants de délivrer divers legs dont : « Troisièmement, le capital-décès de Peugeot Moto Cycles Caisse de Retraite, qui reviendra en intégralité à mon épouse » ; que si la formulation retenue par le défunt est maladroite puisqu'elle inclut au titre de la masse successorale un élément qui lui échappe, elle fait apparaître de façon certaine et non équivoque sa volonté que son épouse bénéficie du capital-décès ; que ces dispositions testamentaires emportent donc modification du bénéficiaire de l'assurance-vie et que les défendeurs doivent restituer les sommes qu'ils ont perçues ; que par ailleurs il n'y pas lieu d'examiner leur argumentation relative à la réduction du montant du legs à la quotité disponible s'agissant de sommes qui ne sont pas entrées dans la masse successorale et qui n'ont donc pas la nature juridique d'un legs ; qu'il conviendra en conséquence de faire droit à la demande et ce outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 13 février 2003 valant mise en demeure de restituer ; qu'en outre chacun des défendeurs sera condamné à payer la somme de 600 euros à Christiane Y... au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

1- ALORS QUE le testament du 13 octobre 1998 prévoyait explicitement que les exposants, légataires universels, avaient la charge de délivrer à Madame Christiane Régine Y... « les legs particuliers ci-après : … troisièmement : le capital décès de PEUGEOT MOTO CYCLES Caisse de retraite qui reviendra en intégralité à mon épouse » ; qu'en jugeant pourtant que cette clause prévoyant le versement du capital décès à Madame Y... ne constituait pas un legs, la Cour d'appel a dénaturé le testament établi par Monsieur Pierre X..., violant ainsi l'article 1134 du Code civil.

2- ALORS QUE le capital payable aux bénéficiaires d'une assurance-vie au décès du souscripteur est réputé appartenir aux seuls bénéficiaires du contrat dès la date de conclusion du contrat ; que le souscripteur du contrat d'assurance-vie ne peut donc pas léguer ce capital à un tiers, le legs de la chose d'autrui étant nul ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a expressément constaté que les exposants étaient les bénéficiaires du contrat d'assurance-vie conclu le 6 juin 1984 ; qu'il s'en évinçait que le capital payable au titre de ce contrat était réputé leur appartenir dès le 6 juin 1984 et n'appartenait pas à Monsieur Pierre X..., que ce capital ne pouvait par conséquent pas faire l'objet d'un legs par Monsieur Pierre X..., de sorte qu'en condamnant les exposants à exécuter un legs nul au bénéfice de Madame Y..., la Cour d'appel a violé l'article 1021 du Code civil.

3- ALORS, subsidiairement, QUE si le capital payable au bénéficiaire d'une assurance-vie ne fait pas partie de la succession de l'assuré et n'est pas soumis aux règles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers de l'assuré, les sommes allouées à un tiers en exécution d'un testament ne doivent en revanche pas excéder la quotité disponible ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a jugé que Madame Y... n'était pas bénéficiaire du contrat d'assurance-vie du 6 juin 1984, mais qu'elle avait droit aux sommes perçues au titre de ce contrat par exécution du testament du 13 octobre 1998 ; qu'en refusant pourtant de réduire les sommes allouées à Madame Y... à la quotité disponible, la Cour d'appel a violé les articles L.132-12 et L.132-13 du Code des assurances par fausse application, ensemble les articles 912 et suivants du Code civil par refus d'application.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 08-11355
Date de la décision : 20/05/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

TESTAMENT - Legs - Legs universel - Legs avec charge - Applications diverses - Obligation pour les légataires universels de délivrer le capital décès d'un contrat d'assurance-vie à une tierce personne

RESERVE - Quotité disponible - Masse de calcul - Définition - Exclusion - Capital d'un contrat d'assurance-vie payable au décès de l'assuré à un bénéficiaire déterminé ASSURANCE DE PERSONNES - Assurance-vie - Décès - Décès du souscripteur - Sommes dispensées de rapport à la succession - Capital d'un contrat d'assurance-vie payable au décès de l'assuré à un bénéficiaire déterminé

Un testateur ayant institué ses deux enfants légataires universel, à charge pour eux de délivrer à sa seconde épouse, à titres de legs particulier, le capital décès d'un contrat d'assurance-vie les désignant bénéficiaires, une cour d'appel décide exactement que les dispositions testamentaires s'analysent en un legs universels avec charge. Dès lors qu'il ne fait pas partie de la succession de l'assuré, le capital stipulé payable lors du décès de l'assuré à un bénéficiaire déterminé ou à ses héritiers n'entre pas dans la masse de calcul de la réserve et de la quotité disponible. Il en résulte que, la charge du legs universel ayant pour objet le capital décès, une cour d'appel juge à bon droit que les enfants du défunt ne peuvent solliciter une éventuelle réduction du capital garanti à hauteur de la quotité disponible


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, 08 novembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 20 mai. 2009, pourvoi n°08-11355, Bull. civ. 2009, I, n° 105
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, I, n° 105

Composition du Tribunal
Président : M. Bargue
Avocat général : M. Chevalier
Rapporteur ?: Mme Vassallo
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.11355
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