LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'engagé le 16 janvier 1990 par la société Ecopol, devenue la société Ecovert, M. X... a vu son contrat de travail poursuivi par la société Ecofibre ; qu'ayant, le 11 juin 2002, été victime d'un accident du travail, le salarié a, à l'issue de visites de reprise en date des 24 février et 12 mars 2003, été déclaré inapte à son poste par le médecin du travail ; qu'il a, le 10 avril 2003, été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;
Sur le premier moyen :
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer au salarié une somme à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que le groupe au sein duquel doivent être recherchées les possibilités de reclassement d'un salarié est constitué par les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent la permutation de tout ou partie du personnel ; que la seule identité de papier à en-tête et de siège social, ainsi que « l'existence de rapports entre des entités » ne peuvent à elles seules, caractériser une activité et une organisation permettant la permutation du personnel ; qu'en se bornant à de telles énonciations pour considérer que la société Ecofibre devait rechercher un reclassement pour M. X... au sein des sociétés Ecofer et Ecodis, dont l'activité était différente, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-32-5 du code du travail ;
2°/ que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; que la cour d'appel ne pouvait donc affirmer, d'une part, que l'existence de « rapports », de la société Ecofibre avec les sociétés Ecofer et Ecodis résultait de ce que l'employeur avait recherché un reclassement pour son salarié auprès de ces sociétés, ce qui ressortait d'un échange de lettres avec la société Ecofer et d'une réunion du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la société Ecodis, et d'autre part, que l'employeur ne justifiait pas de la recherche de reclassement dès lors qu'il n'établissait pas que la date de ces pièces soit exacte ; que la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que, sans se borner aux mentions visées par la première branche, la cour d'appel, qui a constaté l'existence de sociétés ayant un papier à en-tête identique, les mêmes coordonnées et le même numéro de téléphone et leur siège social au même endroit, s'est également fondée sur les conditions d'une réunion ayant eu pour objet d'examiner les possibilités de reclassement du salarié au sein de plusieurs sociétés ; qu'ayant pu déduire de ses constatations la possibilité de permutation du personnel au sein d'un groupe, la cour d'appel a, sans se contredire, légalement justifié sa décision ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 122-32-6 devenu L. 1226-14 du code du travail ;
Attendu que pour condamner l'employeur à payer au salarié une somme à titre de solde d'indemnité de licenciement, l'arrêt retient que l'indemnité conventionnelle étant plus favorable que l'indemnité légale, cette indemnité conventionnelle doit s'appliquer et être doublée alors qu'il s'agit d'un licenciement pour inaptitude à la suite d'un accident du travail ;
Qu'en statuant ainsi alors que l'indemnité spéciale de licenciement prévue par l'article L. 1226-14 du code du travail est sauf dispositions conventionnelles plus favorables, égale au double de l'indemnité légale prévue par l'article L. 1234-9 de ce code, la cour d'appel, qui n'a pas relevé l'existence de telles dispositions conventionnelles, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de la société Ecofibre en restitution de la somme de 3 823,40 euros à titre de trop perçu à titre d'indemnité de licenciement et condamné cette société à payer à M. X... la somme de 193,76 euros, l'arrêt rendu le 7 février 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu les articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de la SCP Boulloche ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mars deux mille neuf.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour la société Ecofibre.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que la société Ecofibre n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement, que le licenciement était par conséquent dépourvu de cause réelle et sérieuse et de l'avoir condamnée à verser à ce titre à M. X... la somme de 25 000 ;
AUX MOTIFS QUE la société Ecofer, a pour activité la serrurerie et le travail de produit métallurgique et applique la convention collective de la métallurgie ; QUE la société Ecodis a pour activité la conception, la fabrication, la commercialisation, l'installation et la maintenance de produits pour le bâtiment de types lanterneaux, systèmes de désenfumage et de sécurité incendie et applique la convention collective du bâtiment ; QUE la société Ecofibre a pour activité la fabrication d'embrasés Polyester et de tous produits et accessoires du bâtiment en polyesters renforcés en fibres de verre et applique la convention collective de la plasturgie ; QUE bien qu'il n'y ait aucun organe commun entre les trois sociétés, et que la société Ecofibre ait un dirigeant distinct, la cour relève que la société Ecofibre qui affirme à titre subsidiaire qu'elle a procédé à une recherche de reclassement dans les sociétés Ecofer et Ecodis, produit un échange de courriers entre Ecofer et Ecofibre sur un papier à en tête identique et portant les mêmes coordonnées et le même numéro de téléphone et qu'une réunion du CHSCT s'est tenue pour examiner la possibilité de reclassement de Tewfik X..., ce qui ne peut avoir donc d'autre justification que l'existence de rapports entre des entités qui ont leur siège social au même endroit et dont l'activité, l'organisation ou le lieu de travail, permettent la permutation de tout ou partie du personnel, démontrant ainsi l'existence d'un groupe ; QUE Tewfik X... a fait l'objet de deux visites de reprise qui ont conclu à son inaptitude au poste occupé et la société qui produit l'analyse des postes de travail et des photographies in situ établit que compte tenu de la structure de l'entreprise comportant 7 salariés et ne disposant d'aucun emploi sédentaire ou de bureau, en dehors de celui occupé par son représentant légal, aucune possibilité de reclassement n'était envisageable, même par aménagement du poste de travail au sein de la société Ecofibre, ainsi que l'a mentionné le médecin du travail, après étude des postes de travail existant au sein de la société Ecofibre dans son courrier du 4 mars 2003 : "il n'y avait pas de poste correspondant aux aptitudes de ce salarié dans l'atelier de production aussi bien au niveau de la mise en place du gel Coat que du poste de projection ou celui de débullage, chacun de ces postes nécessitant une sollicitation permanente et répétée des membres supérieurs. Il en est de même pour le poste de démoulage et de détourage qui eux aussi sollicitent de façon forte et répétée les épaules" ; QU'iI résulte toutefois des courriers adressés à Tewfik X... les 10 et 13 mars 2003 et de la lettre de licenciement, qui font seulement référence à une impossibilité de reclassement dans la seule société Ecofibre, qu'aucune recherche préalable de reclassement n'a été effectuée dans les autres sociétés du groupe auquel appartient la société Ecofibre ; QUE la société Ecofibre ne démontre pas que l'échange de courrier avec la société Ecofer, de même que la réunion du CHSCT de la société Ecodis qui n'ont été produits qu'en cause d'appel aient bien eu lieu à la date indiquée ; QUE la cour constate donc que le licenciement de Tewfik X... est dénué de cause réelle et sérieuse en raison du non respect par la société Ecofibre de son obligation de reclassement ;
1) ALORS QUE le groupe au sein duquel doivent être recherchées les possibilités de reclassement d'un salarié est constitué par les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent la permutation de tout ou partie du personnel ; que la seule identité de papier à en-tête et de siège social, ainsi que « l'existence de rapports entre des entités » ne peuvent à elles seules, caractériser une activité et une organisation permettant la permutation du personnel ; qu'en se bornant à de telles énonciations pour considérer que la société Ecofibre devait rechercher un reclassement pour M. X... au sein des sociétés Ecofer et Ecodis, dont l'activité était différente, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-32-5 du code du travail ;
2) ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; que la cour d'appel ne pouvaient donc affirmer, d'une part, que l'existence de « rapports », de la société Ecofibre avec les sociétés Ecofer et Ecodis résultait de ce que l'employeur avait recherché un reclassement pour son salarié auprès de ces sociétés, ce qui ressortait d'un échange de lettres avec la société Ecofer et d'une réunion du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la société Ecodis, et d'autre part, que l'employeur ne justifiait pas de la recherche de reclassement dès lors qu'il n'établissait pas que la date de ces pièces soit exacte ; que la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est encore reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de la société Ecofibre tendant à la restitution de l'excédent d'indemnité spéciale de licenciement, soit 3 823,40 et de l'avoir au contraire condamnée à payer à M. X... la somme de 193,76 à ce titre ;
AUX MOTIFS QUE Tewfik X... a bien une ancienneté remontant au 19 janvier 1990, son contrat de travail ayant fait l'objet de transferts successifs en application des dispositions de l'article L. 122-12-2 du code du travail, ce que ne conteste pas la société Ecofibre ; QUE la moyenne des salaires perçus au cours des douze derniers mois s'élevant à 1 802,12 , l'indemnité légale s'élevait donc à 2 828,31 , et l'indemnité conventionnelle à 4 835,09 ; QUE l'indemnité conventionnelle étant plus favorable, c'est cette dernière qui doit s'appliquer et être doublée s'agissant d'un licenciement pour inaptitude suite à accident du travail et la société reste bien redevable d'une somme de 193,76 ; QUE la société qui calcule l'indemnité légale doublée et la compare avec une indemnité conventionnelle non doublée doit donc être déboutée de sa demande ;
ALORS QUE la règle du doublement de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 122-32-6 du code du travail ne vise, selon ce texte, et à défaut de dispositions conventionnelles plus favorables, que l'indemnité légale prévue par l'article L. 122-9 du même Code et non l'indemnité conventionnelle de licenciement ; qu'en jugeant que l'indemnité spéciale de licenciement due à M. X... était du double de l'indemnité conventionnelle de licenciement, la cour d'appel a violé l'article L. 122-32-6 du code du travail.