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18/03/2009 | FRANCE | N°07-44691

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 mars 2009, 07-44691


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 du code du travail devenus les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 de ce code ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 1er septembre 1997 en qualité de moniteur d'atelier par l'Association pour adultes et jeunes handicapés (APAJH) du Val d'Oise, a été licencié pour faute grave le 24 décembre 2004 ;

Attendu que pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que le fait,

pour le salarié, d'avoir exigé le 1er décembre 2004 d'un travailleur handicapé, appa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu les articles L. 122-6, L. 122-8 et L. 122-9 du code du travail devenus les articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 de ce code ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 1er septembre 1997 en qualité de moniteur d'atelier par l'Association pour adultes et jeunes handicapés (APAJH) du Val d'Oise, a été licencié pour faute grave le 24 décembre 2004 ;

Attendu que pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt retient que le fait, pour le salarié, d'avoir exigé le 1er décembre 2004 d'un travailleur handicapé, appartenant au groupe qu'il était chargé d'encadrer, qu'il aille, seul, dans le froid, casser des pierres, était constitutif d'une faute mais que, compte tenu de son ancienneté et en l'absence de toute perturbation causée à ce travailleur ou à d'autres membres du groupe, témoins des faits, cette faute n'était pas une cause sérieuse de licenciement ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le fait pour le salarié, moniteur chargé de l'encadrement et de l'insertion de travailleurs handicapés que leur état rendait vulnérables, d'infliger à l'un d'eux, sans justification, un traitement spécifique, humiliant et dégradant, était constitutif d'une faute grave justifiant, en dépit de son ancienneté, la rupture immédiate des relations contractuelles, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 11 septembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

.

Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils pour l'APAJH du Val d'Oise.

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé que le licenciement de Monsieur X... était dépourvu de cause réelle et sérieuse et d'avoir en conséquence condamné l'APAJH du Val d'Oise à lui verser 4223, 56 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 7901, 57 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement et 17 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi qu'à rembourser l'ASSEDIC concerné des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de trois mois

AUX MOTIFS QUE « les motifs du licenciement de M. X... sont énoncés en ces termes par la lettre du 24 décembre 2004 :

• Nous vous avons remis une lettre de convocation avec mise à pied à titre conservatoire, le 10 décembre 2004, après avoir vérifié les plaintes formulées par des travailleurs handicapés de l'équipe travaillant sur le site de la SNECMA.
En effet, le 1er décembre 2004, vous avez demandé à un travailleur handicapé de casser des cailloux avec un marteau, dans le froid, de13h30 à 15h30, alors que l'exécution de ce travail ne se justifiait en aucun cas, ce que nous a confirmé la Direction de la SNECMA.
• Vous avez infligé ce traitement, sous prétexte, que ce travailleur handicapé était une « forte tête » et que vous vouliez lui faire comprendre qui commandait dans votre atelier.
• Cet incident a eu pour conséquence, non seulement de perturber le travailleur sanctionné, mais également les autres travailleurs handicapés de l'équipe.
Vous comprendrez que nous ne pouvons, en aucun cas, accepter que vous vous comportiez de cette façon mal traitante envers des travailleurs en situation de handicap et les explications recueillis, auprès de vous, au cours de notre entretien, ne nous ont pas permis de modifier notre appréciation à ce sujet.
Compte tenu de la gravité des faits, votre maintien dans l'établissement s'avère impossible, y compris pendant la durée de votre préavis... » ;
Qu'elle informe M. X... que le salaire correspondant à la période de mise à pied lui sera payé ; Que par lettre du 17 février 2005, M. X... niant les faits reprochés indiquait à l'employeur notamment qu'il avait demandé à M. Y..., travailleur handicapé, d'exécuter un travail consistant à casser un morceau de parpaing avec un marteau postillon afin d'obtenir de petits éléments et de les récupérer pour les placer dans le fond d'une jardinière et servir à l'irrigation de celle-ci, que ce travail s'est déroulé entre 14h30 et 15 h et n'a duré qu'une vingtaine de minutes, qu'il est faux de dire que l'exécution de ce travail ne se justifiait pas car 60 % de « notre » activité sur site concerne l'entretien des parcs et voiries, que lors de l'entretien préalable il avait confirmé que ce travail rentre dans le cadre normal et pédagogique de « notre » activité ; Considérant que la faute grave résulte d'un fait fautif ou d'un ensemble de faits fautifs imputable au salarié qui constitue une violation des obligations s'attachant à son emploi d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis ; Qu'il incombe à l'employeur d'en apporter la preuve ; Considérant que M. Mickaël Y... atteste que M. X... lui avait dit que s'il faisait mal son travail il lui ferait casser les pierres sur les lignes de chemin de fer ; que le 1er décembre, il travaillait au ramassage des feuilles et M. X... lui a dit avant le déjeuner que son travail était mal fait et qu'il irait casser les pierres sur la voie de chemin de fer après le café, qu'à 1 heure de l'après-midi devant ses collègues il lui a donné un marteau ; Que M. Z..., travailleur handicapé, atteste que le 1er décembre à 13 h 30 M. X... leur a dit d'aller travailler et a sorti un marteau pour que Mickaël aille casser des pierres au P2 ; que l'après-midi « nous avons » fait un petit tour pour aller chercher les sacs de déchets verts trois travailleurs handicapés et « nous avons » vu Mickaël casser des pierres dans le froid ; Que MM A... et B..., également travailleurs handicapés, attestent avoir vu le 1er décembre M. Y... dans l'après-midi casser des pierres au P2 ; Que M. C..., moniteur en détachement sur le site de la SNACMA, atteste avoir vu M. Y... Michâel casser des pierres avec un petit marteau au niveau du parking P2 lors d'une tournée sur les postes de travail avec le moniteur exerçant sur le site de la SNECMA, précisant qu'ils étaient dans le véhicule du CAT avec M. X... et un travailleur handicapé M. Frédéric Z... ; Que Mme G..., directrice du foyer La Cerisaie, atteste que M. Y... résidant au foyer s'est plaint en rentrant un soir d'avoir été obligé de casser des cailloux toute la journée sur son lieu de travail et qu'il semblait choqué de l'attitude de son moniteur à son égard ; Que les attestations de MM. D... et H..., moniteurs d'atelier, qui certifient n'avoir jamais vu M. X... avoir des problèmes avec son équipe ou maltraiter les salariés handicapés, M. D... faisant en outre état d'un harcèlement de la part de M. E..., directeur, à l'encontre des moniteurs, ne sont pas de nature à confirmer les dénégations de M. X... ; Qu'il en est de même de l'attestation de Mme F..., monitrice d'atelier, qui évoque un prétendu harcèlement dont serait victime M. X... de la part de M. E... allant jusqu'à demander aux travailleurs handicapés de témoigner contre M. X... pour des faits dont ils n'étaient pas témoins, Mme F... qui, tout comme MM. D... et H... ne peut utilement témoigner sur les faits auxquels elle n'a pas assisté, ne fournissant aucun élément lui permettant d'affirmer que les travailleurs handicapés qui ont témoigné n'y ont pas assisté ; Qu'étant relevé qu'une altération des facultés mentales des travailleurs handicapés affectant leur capacité de témoigner n'est pas alléguée, les attestations produites par l'employeur, concordantes, établissent que M. X... a demandé à M. Y... de casser des pierres ; Que l'affirmation par M. Y..., dont la tendance à l'exagération ressort de l'attestation de Mme G..., qu'il s'agissait d'une sanction d'un travail considéré par M. X... comme mal fait, n'est confirmée par aucun des témoins dont les attestations sont produites ; Que s'il résulte du planning des travaux prévus pour le deuxième semestre 2004 des travaux à réaliser à l'extérieur et si un état des travaux réalisés semaine 49, qui correspond à la première semaine du mois de décembre, mentionne également des travaux concernant les espaces verts à l'extérieur et « Entrée Valmy plantation d'arbustes dans les jardinières », « Entrée Valmy » étant supposée compte tenu de la rédaction du document un lieu couvert ou à tout le moins protégé, ces travaux n'impliquaient pas le travail demandé à M. Y... ; Que d'ailleurs, au cours de l'entretien préalable, selon le compte rendu de l'entretien préalable établi par le délégué du personnel ayant assisté M. X..., celui-ci se défendant d'avoir voulu donner une punition à M. Y... évoquait une démarche pédagogique dont le but était, compte tenu du peu de moyens financiers dont disposent les travailleurs handicapés, d'apprendre à préparer une jardinière à moindre frais ; Que toute démarche pédagogique devant être adaptée à la fois aux personnes et aux circonstances, si M. X... a commis une faute, cette faute, compte tenu de l'ancienneté du salarié, n'étant pas établi que M. Y... est resté deux heures à casser les cailloux et les perturbations causées à M. Y... n'étant pas autrement établies que par l'attestation de Mme G... et celles causées aux autres salariés handicapés n'étant pas démontrées, justifiait une sanction disciplinaire mais ne constituait pas une cause sérieuse de licenciement ; Considérant que par ces motifs substitués le jugement qui a décidé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse se trouve confirmé ; Que l'indemnité compensatrice de préavis étant égale au salaire qu'aurait perçu le salarié qu'il avait travaillé pendant le délai-congé, sur la base d'un salaire mensuel de 2111, 78, la somme perçue par le salarié en janvier 2005 correspondant à une indemnité de congés payés et le salaire perçu au mois de décembre 2004 comportant un rappel, l'indemnité compensatrice de préavis allouée par les premiers juges sera réduite à la somme de 4. 223, 56 ; Que l'indemnité conventionnelle de licenciement, en tenant compte des années incomplètes que n'excluent pas les dispositions de l'article 17 de la convention collective, s'établit à la somme de 7. 901, 57 ; Que compte tenu de l'âge du salarié, de son ancienneté de son aptitude à retrouver un emploi et des pièces justificatives produites, le préjudice subi par le salarié sera évalué, en application de l'article L. 122-14-4 du Code du travail, à la 17. 000 ; Qu'en vertu du même texte, l'employeur devra rembourser aux organismes concernés les éventuelles indemnités de chômage servies à M. X... depuis son licenciement jusqu'au jugement dans la limite de trois mois d'indemnité »
ALORS QUE constitue une faute grave le fait pour un moniteur chargé de l'encadrement et de l'insertion de travailleurs handicapés que leur état rendait vulnérables, d'infliger à l'un d'entre eux un traitement pénible, humiliant et dégradant ; qu'en l'espèce, il résultait des propres constatations de l'arrêt attaqué que le 1er décembre 2004, lorsque les travailleurs handicapés de l'APAJH affectés sur le site de la SNECMA y effectuaient des travaux de jardinage et de nettoyage, Monsieur X... chargé de les encadrer, avait exigé de l'un d'entre eux, Monsieur Y..., qu'il aille, seul, dans le froid, casser des cailloux sur le parking de la SNECMA, à genoux, avec un petit marteau, pendant au moins I heure 30, sans justification valable ; qu'en décidant qu'un tel comportement, bien que fautif, ne justifiait pas le licenciement immédiat de Monsieur X..., la Cour d'appel a violé les articles L122-6, L122-8 et L122-9 du code du travail


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-44691
Date de la décision : 18/03/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 11 septembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 18 mar. 2009, pourvoi n°07-44691


Composition du Tribunal
Président : M. Chauviré (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Roger et Sevaux

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.44691
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