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18/03/2009 | FRANCE | N°07-21261

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 18 mars 2009, 07-21261


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 septembre 2007), que M. X... a donné à bail à Mme Y... un local d'habitation à compter du 1er octobre 2001, moyennant un loyer mensuel de 1 500 francs, le contrat précisant que le loyer avait été fixé compte tenu de la participation de la locataire à la surveillance du bailleur de jour comme de nuit et prévoyant la réalisation par la locataire de divers travaux ; que M. X...

est décédé le 6 février 2002 et M. Z..., administrateur provisoire à la successi...

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 18 septembre 2007), que M. X... a donné à bail à Mme Y... un local d'habitation à compter du 1er octobre 2001, moyennant un loyer mensuel de 1 500 francs, le contrat précisant que le loyer avait été fixé compte tenu de la participation de la locataire à la surveillance du bailleur de jour comme de nuit et prévoyant la réalisation par la locataire de divers travaux ; que M. X... est décédé le 6 février 2002 et M. Z..., administrateur provisoire à la succession des époux X..., et M. A..., liquidateur à la liquidation judiciaire des héritiers de M. X..., ont assigné Mme Y... aux fins de voir convertir "l'obligation de surveillance" en complément de loyer et de voir fixer le loyer dû à compter du 1er juin 2003 à la somme mensuelle de 1 250 euros ;

Attendu que pour déclarer recevable la demande de conversion de l'obligation de surveillance du bailleur en équivalent de loyer, la cour d'appel retient qu'il résulte des clauses du bail que la mise à disposition du logement avait pour contrepartie le versement par la locataire d'une somme en espèces et l'exécution par elle d'une obligation de faire, que si le contrat n'a pas prévu expressément le versement d'un complément de loyer dans le cas où l'obligation de surveillance ne serait plus possible, il convient, pour respecter l'équilibre contractuel, s'agissant d'un contrat à exécution successive, de substituer à l'obligation de surveillance, devenue impossible par suite du décès du bailleur, une obligation financière équivalente ;

Qu'en statuant ainsi, alors que le bail ne comportait aucune clause prévoyant la modification des modalités d'exécution du contrat, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 septembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne MM. Z... et A..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne MM. Z... et A..., ès qualités, ensemble, à payer à Mme Y... la somme de 2 500 euros ; rejette la demande de MM. Z... et A..., ès qualités ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP LAUGIER et CASTON, avocat aux Conseils pour Mme Y...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR reçu en leur action Maître Z... et Maître A..., ès qualités, action tendant à la conversion d'une obligation de surveillance du bailleur en équivalent de loyer et, en conséquence, d'AVOIR ordonné une expertise pour fixer le loyer à raison de cette conversion ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE les dispositions de l'article 17 c et d de la loi du 6 juillet 1989 qui prévoient les modalités de réévaluation du loyer lors du renouvellement du contrat, lorsqu'il est manifestement sous-évalué, ou de révision du loyer au terme de chaque année de location, ne sont pas applicables en l'espèce dès lors que la demande porte non sur une modification du loyer mais sur la conversion en équivalent financier de l'obligation de surveillance du bailleur de jour comme de nuit, devenue sans objet par suite du décès du bailleur ; qu'il s'ensuit que la demande est recevable ; que le bail litigieux contient une clause mettant à la charge de la locataire les travaux suivants : « aménagement d'un hall d'entrée au rez-de-chaussée, création d'une salle de bains avec douche au premier étage, réfection conduit de cheminée pour aération, remise aux normes du circuit électrique de tout le 1er étage, rénovation enduit et peinture des murs et plafonds et boiserie, réparation des fuites provenant de la toiture, faux plafond » ; qu'il comporte en outre une clause particulière aux termes de laquelle « le loyer mensuel a été fixé compte tenu que la locataire participe à la surveillance jour et nuit du bailleur, compte tenu de cette charge le loyer est fixé à 1.500 francs mensuels » ; qu'il est ainsi établi que la mise à disposition du logement avait pour contrepartie le versement par la locataire d'une somme en espèces et l'exécution par elle d'une obligation de faire ; que si le contrat n'a pas prévu expressément le versement d'un complément de loyer dans le cas où l'obligation de surveillance ne serait plus possible, il convient, pour respecter l'équilibre contractuel, s'agissant d'un contrat à exécution successive, de substituer à l'obligation de surveillance, devenue impossible par suite du décès du bailleur, une obligation financière équivalente ; que le montant du loyer exigible contractuellement ne peut toutefois être fixé par référence à la seule valeur locative du marché ; qu'en outre les parties sont en désaccord concernant la consistance des locaux occupés par Mademoiselle Y... en vertu du bail et l'exécution des travaux mis à sa charge par le contrat ; qu'en l'état de ces éléments, c'est à bon droit que le premier juge a ordonné une mesure d'instruction (arrêt, p. 4 et 5) ;

et AUX MOTIFS DU PREMIER JUGE, A LES SUPPOSER ADOPTES, QUE le bail stipule que « le loyer mensuel a été fixé compte tenu que la locataire participe à la surveillance jour et nuit du bailleur. Compte-tenu de cette charge, le loyer est fixé à 1.500 francs mensuels – sous-location autorisée » ; que cette clause est licite et fait la loi des parties en application de l'article 1134 du Code civil ; que cette charge, qui vient en compensation partielle du loyer dû, comme est venue en déduction la minoration à déterminer, pour travaux, peut également être chiffrée ; qu'en l'espèce, les obligations de chacune des parties ont une cause, conformément aux dispositions de l'article 1131 du Code civil ; que l'obligation du bailleur de donner les lieux en jouissance à la locataire et à tel prix, a pour contrepartie de la part de cette dernière les obligations de payer une partie de loyer, d'exécuter certains travaux et d'assurer la surveillance jour et nuit du bailleur ; que l'addition de ces trois obligations de la locataire permet de déterminer le montant du loyer qui aurait été exigé si les deux dernières obligations n'avaient pas été stipulées ; que ce montant total obtenu peut ne pas correspondre au loyer du marché ; que le fait que l'une des obligations vient à disparaître rend le contrat sans cause pour partie ; que, contrairement à ce que soutient donc à tort Mademoiselle Y..., les dispositions des articles 17 et 19 de la loi du 6 juillet 1989 ne sont pas applicables en l'espèce dans la mesure où il ne s'agit pas d'une augmentation ou revalorisation du prix du loyer qui est sollicitée ; que c'est un équivalent en loyer qui est sollicité, compte-tenu du fait que l'une des trois obligations de la locataire est devenue sans contrepartie et donc sans cause (jugement, p. 3) ;

1°) ALORS QU' en l'état d'un contrat de location de locaux à usage d'habitation régi par les dispositions d'ordre public de la loi du 6 juillet 1989, la réévaluation du loyer ou sa révision sont soumises à des conditions d'application strictes auxquelles les parties ne sauraient déroger ; qu'en décidant néanmoins que Maître Z... et Maître A..., ès qualités, étaient recevables à solliciter, en dehors des dispositions impératives de la loi, la conversion en équivalent financier de l'obligation de surveillance du bailleur de jour comme de nuit, du fait du décès du bailleur, ce qui en réalité constituait une réévaluation ou une révision du montant du loyer, la Cour d'appel a violé les articles 2, 10, 17 c et 17 d de la loi du 6 juillet 1989 ;

2°) ALORS QUE le contrat a force de loi entre les parties ; que lorsque le bailleur et le preneur ont décidé de fixer le loyer au paiement d'une somme d'argent assorti d'une obligation en nature, le juge ne saurait porter atteinte à la substance même des droits et obligations légalement convenus entre les parties en procédant à la conversion de cette obligation en nature, impossible à exécuter du fait de la survenance du décès du bailleur, en une obligation financière, à défaut de stipulation expresse prévue au contrat de bail en ce sens ; qu'en décidant néanmoins qu'il convenait, pour respecter l'équilibre contractuel, de substituer à l'obligation de surveillance du bailleur une obligation financière équivalente, du fait du décès dudit bailleur, après avoir constaté que le bail n'avait prévu aucun complément de loyer dans le cas où l'obligation de surveillance ne serait plus possible à raison de cette circonstance, la Cour d'appel a, en toute hypothèse, violé l'article 1134 du Code civil ;

3°) ALORS QUE l'existence de la cause d'une obligation doit s'apprécier à la date où elle est souscrite ; qu'en retenant enfin, par motif éventuellement adopté, que le décès du bailleur en cours de contrat avait privé de cause celui-ci, la Cour d'appel a violé l'article 1131 du Code civil ;

4°) ALORS QUE l'absence de cause est sanctionnée par la nullité du contrat ; qu'au demeurant, en faisant appel à la théorie de la cause pour justifier une modification du contrat, la Cour d'appel a violé l'article 1131 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 07-21261
Date de la décision : 18/03/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 18 septembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 18 mar. 2009, pourvoi n°07-21261


Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats (président)
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Laugier et Caston

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.21261
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