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04/02/2009 | FRANCE | N°08-40184

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 février 2009, 08-40184


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Reçoit le Syndicat national de l'édition phonographique (SNEP) et l'Union des producteurs phonographiques français indépendants (UPFI) en leurs interventions volontaires ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 122-1, L. 122-1-1, 3°, L. 122-3-1, L. 122-1-2- III, devenus L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1242-12, L. 1242-7 du code du travail ;
Attendu, d'abord, que dans le secteur de l'édition phonographique où il est d'usage constant, en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature tempo

raire des emplois, de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Reçoit le Syndicat national de l'édition phonographique (SNEP) et l'Union des producteurs phonographiques français indépendants (UPFI) en leurs interventions volontaires ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 122-1, L. 122-1-1, 3°, L. 122-3-1, L. 122-1-2- III, devenus L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1242-12, L. 1242-7 du code du travail ;
Attendu, d'abord, que dans le secteur de l'édition phonographique où il est d'usage constant, en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire des emplois, de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée, un contrat à durée déterminée et des contrats à durée déterminée successifs peuvent être conclus pour l'enregistrement d'un ou plusieurs phonogrammes ; ensuite, que le contrat à durée déterminée doit être établi par écrit et comporter la définition précise de son motif et qu'à défaut il est réputé conclu pour une durée indéterminée ; enfin, que lorsque le contrat à durée déterminée n'a pas de terme précis, il est conclu pour une durée minimale et a pour terme la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., dit Gérald Y..., et la société de production phonographique Universal music ont signé le 30 octobre 2000 un contrat d'exclusivité portant sur les futurs enregistrements de l'artiste-interprète pour la durée nécessaire à la réalisation d'un minimum de trois albums, prévoyant une durée minimale du contrat de trente-six mois, et maximale de quatre-vingt-dix-huit mois, et stipulant que le délai entre chaque album pouvait être de seize à vingt-quatre mois ; que, par avenant du 19 décembre 2002, les parties sont convenues de porter le nombre d'albums à cinq et la durée minimale du contrat à soixante-seize mois et sa durée maximale totale à deux cent trente mois, le terme de l'exclusivité consécutive à la sortie commerciale du dernier album étant fixé à douze mois ; que le délai passait de seize à trente-six mois pour la réalisation d'un album à partir de la sortie commerciale du précédent enregistrement ; que M. X... a enregistré l'album « Un homme sans racine » sorti le 25 octobre 2004 ; que le 24 mai 2006, l'artiste a notifié à la société Universal music sa décision de mettre fin à sa collaboration motif pris de la durée excessive de son engagement et offert d'accomplir un préavis d'un an ; que devant le refus de la société de production phonographique, M. X... a saisi la juridiction prud'homale pour voir requalifier le contrat du 30 octobre 2000 et son avenant en un contrat à durée indéterminée, et dire que le contrat a pris fin le 26 mai 2006 ;
Attendu que pour accueillir ces demandes et condamner la société Universal music au paiement d'une indemnité de requalification, la cour d'appel a retenu, par motifs propres et adoptés, qu'il ne pouvait s'agir d'un contrat à durée déterminée au regard de la durée maximale totale de dix-neuf années du contrat imposé à l'artiste, que les clauses du contrat initial et de son avenant introduisent un aléa dans la durée de réalisation puis de commercialisation des enregistrements, nonobstant la définition de délais, et une imprécision quant à l'objet contractuel, à savoir l'enregistrement d'oeuvres multiples distinctes et non définies, sur trois puis cinq albums, et en conséquence selon trois puis cinq échéances ; que ces clauses viennent en violation de l'article L. 122-1-2- III du code du travail selon lequel le contrat d'usage peut notamment ne pas comporter un terme précis mais a pour objet la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu ; que cet objet sans contenu exactement défini doit intervenir en plusieurs étapes de durée aléatoire ; que le contrat et son avenant litigieux, qui ne relèvent en conséquence pas d'un cas d'ouverture du contrat d'usage nonobstant l'appartenance de la société Universal music au secteur de la phonographie, est réputé, en application de l'article L. 122-3-13 du code du travail, du fait de la violation précitée, à durée indéterminée ; qu'elle a, en conséquence, décidé que M. X... était fondé à user du droit de résiliation unilatérale de droit commun ;
Qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant tiré de la durée maximale prévue par le contrat, alors qu'il résulte de ses constatations que le contrat du 30 octobre 2000, modifié par l'avenant du 19 décembre 2002, était conclu dans le secteur de l'édition phonographique où il est d'usage constant de ne pas recourir pour les enregistrements de phonogrammes à un contrat à durée indéterminée, qu'il stipulait une durée minimale et avait pour terme la réalisation par l'artiste de cinq albums dits LP, dont les caractéristiques étaient définies par les clauses contractuelles, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 20 novembre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... dit Gérald Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre février deux mille neuf.

Moyen annexé au présent arrêt

Moyen produit par la société Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils pour la société Universal music.

MOYEN UNIQUE DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir requalifié en contrat à durée indéterminée le contrat signé le 30 octobre 2000, d'avoir dit que ce contrat avait pris fin le 26 mai 2006 et octroyé, avec intérêts au taux légal, un euro au titre de la requalification ;
AUX MOTIFS QUE la société Universal Music France et l'artiste interprète ont signé le 30 octobre 2000 un contrat d'enregistrement exclusif portant sur les futurs enregistrements de celui-ci « pour la durée nécessaire à la réalisation d'un minimum … », soit selon l'article 5 du contrat un minimum de trois albums à savoir, compte tenu des délais de réalisation contractuellement définis de ceux-ci, pour « une durée totale minimum de trente-six mois et maximum de quatre-vingt-dix-huit mois, étant entendu d'une part que la société se réservait la possibilité de résilier par anticipation le contrat dans l'hypothèse où les ventes en France de chacun des albums seraient au cours d'une période de quatorze mois à compter de leur date de sortie commerciale respective inférieures à 50. 000 unités et d'autre part, que l'exclusivité concédée par l'artiste devait cesser à l'issue du délai de dix-huit mois de la date de sortie commerciale du dernier enregistrement inédit publié par la société ; que par avenant du 19 décembre 2002 la durée minimum du contrat est passée de trente-six à soixante-seize mois et sa durée maximum de quatre-vingt-dix-huit à deux cent trente mois, le nombre minimum d'enregistrements d'albums étant porté à cinq avec allongement des périodes requises, le terme de l'exclusivité consécutive à la sortie commerciale du dernier album étant lui fixé à douze mois et la clause de résiliation unilatérale au bénéfice de l'employeur supprimée ; que sur les cinq albums envisagés Monsieur Y... a enregistré l'album « Un homme sans racine » sorti le 25 octobre 2004 ; que par courrier du 24 mai 2006 Monsieur Y... confirmait à la société Universal Music sa décision de mettre un terme à sa collaboration, motifs pris de la durée excessive (dix-neuf ans et plus) de son engagement, et proposait d'accomplir un préavis d'un an ; que la société Universal Music ayant refusé cette rupture, Monsieur Y... a saisi la juridiction prud'homale ; que pour fonder son appel, la société Universal Music fait valoir son appartenance à un des secteurs réglementaires, l'édition phonographique, où il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire des emplois et soutient qu'en l'espèce la durée du contrat ne peut dans ces conditions lui être opposée ; que les clauses contractuelles du contrat d'exclusivité initial et de son avenant ci7 dessus exposées introduisent un aléa dans la durée de réalisation puis de commercialisation des enregistrements de l'artiste, nonobstant la définition de délais, et une imprécision quant à l'objet contractuel, à savoir l'enregistrement d'oeuvres multiples distinctes et non définies sur trois puis cinq albums et en conséquence selon trois puis cinq échéances devant s'échelonner sur un minimum de trente-six mois (en définitive soixante-seize), jusqu'à quatre-vingt-dix-huit mois (en définitive deux cent trente mois) ; que ces clauses viennent en violation de l'article L. 122-1-2- III du code du travail selon lequel le contrat d'usage peut notamment ne pas comporter un terme précis mais a pour terme la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu, dès lors qu'en l'espèce cet objet sans contenu exactement défini doit intervenir en plusieurs étapes de durée aléatoire ; que le contrat et son avenant litigieux, qui ne relèvent en conséquence pas d'un cas d'ouverture au contrat d'usage nonobstant l'appartenance de la société Universal Music au secteur de la phonographie, est réputé en application de l'article L. 122-3-13 du code du travail du fait de la violation précitée à durée indéterminée ; que Monsieur Y... était en conséquence fondé à user du droit de résiliation unilatérale de droit commun, droit que la société Universal Music s'était au demeurant reconnu à elle-même dans le contrat initial ;
1 / ALORS QUE la conclusion d'un contrat de travail à durée déterminée est justifiée dans les secteurs d'activité définis par décret ou par voie de convention ou d'accord collectif étendu dans lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois ; qu'il est d'usage constant de conclure des contrats à durée déterminée avec les artistes dans le secteur de l'édition phonographique ; qu'en décidant que le contrat du 30 octobre 2000 et son avenant du 19 décembre 2002 ne relevaient pas d'un cas d'ouverture au contrat d'usage nonobstant l'appartenance de la société Universal Music au secteur de la phonographie, sans rechercher si l'emploi occupé par Monsieur Y... relevait de ceux pour lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-3-13, L. 122-1-1 3° et D. 121-2 du code du travail ;
2 / ALORS QUE lorsque le contrat à durée déterminée est conclu au titre du 3° / de l'article L. 122-1-1 du c ode du travail, il peut ne pas comporter un terme précis ; qu'il doit alors être conclu pour une durée minimale et a pour terme la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu ; que l'article 3. 1 du contrat du 30 octobre 2000 modifié par avenant du 19 décembre 2002 fixait la durée minimum du contrat à 76 mois ; que ce contrat avait en outre pour terme la réalisation de son objet, à savoir, la réalisation de 5 albums studios inédits ; qu'en décidant de requalifier le contrat litigieux en contrat à durée indéterminée après avoir constaté l'existence d'une durée minimum de 76 mois en vue de l'enregistrement de cinq albums, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles L. 122-1-1, L. 122-1-2 et L. 122-3-3-13 du code du travail ;
3 / ALORS QUE subsidiairement, lorsque le contrat à durée déterminée est conclu au titre du 3° / de l'article L. 122-1-1 du code du travail, il peut ne pas comporter un terme précis ; qu'il doit alors être conclu pour une durée minimale ; que son terme est la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu ; que la cour d'appel a constaté que le contrat avait pour objet l'enregistrement de 5 albums en application de l'avenant du 19 décembre 2002 ; qu'en justifiant la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée par la circonstance que l'objet du contrat n'aurait pas eu un contenu exactement défini, la cour d'appel a violé les articles L. 122-1-1, L. 122-1-2 et L. 122-3-3-13 du code du travail ;
4 / ALORS QUE subsidiairement, lorsque le contrat à durée déterminée est conclu au titre du 3° / de l'article L. 122-1-1 du code du travail, il peut ne pas comporter un terme précis ; qu'il doit alors être conclu pour une durée minimale ; que son terme est la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu ; qu'en justifiant la requalification du contrat de travail par la circonstance que la réalisation des cinq albums devait intervenir en plusieurs étapes de durée aléatoire et par l'existence d'un aléa dans la durée de réalisation puis de commercialisation des enregistrements, la cour d'appel a violé les articles L. 122-1-1, L. 122-1-2 et L. 122-3-3-13 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 08-40184
Date de la décision : 04/02/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, DUREE DETERMINEE - Formalités légales - Mentions obligatoires - Durée minimale - Terme précis - Défaut - Portée

CONTRAT DE TRAVAIL, DUREE DETERMINEE - Durée - Durée maximale - Exclusion - Cas CONTRAT DE TRAVAIL, DUREE DETERMINEE - Cas de recours autorisés - Emploi pour lequel il est d'usage constant de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée - Constance de l'usage - Secteurs d'activité concernés - Activité visée - Secteur de l'édition phonographique - Relation entre un producteur et un interprète

Il résulte des articles L. 122-1, L. 122-1-1 3°, L. 122-3-1 et L. 122-1-2 III devenus L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1242-12 et L. 1242-7 du code du travail, d'abord, que, dans le secteur de l'édition phonographique où il est d'usage constant, en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire des emplois, de ne pas recourir à un contrat à durée indéterminée, un contrat à durée déterminée et des contrats à durée déterminée successifs peuvent être conclus pour l'enregistrement d'un ou plusieurs phonogrammes, ensuite que le contrat à durée déterminée doit être établi par écrit et comporter la définition précise de son motif et, qu'à défaut, il est réputé conclu pour une durée indéterminée, enfin que lorsque le contrat à durée déterminée n'a pas de terme précis, il est conclu pour une durée minimale et a pour terme la réalisation de l'objet pour lequel il a été conclu. Encourt dès lors la cassation pour violation des dispositions précitées, l'arrêt qui requalifie en contrat à durée indéterminé, le contrat à durée déterminé conclu pour la réalisation d'enregistrement de phonogrammes au motif inopérant tiré de sa durée maximale alors qu'il résultait de ses constatations qu'il stipulait une durée minimale et avait pour terme la réalisation par l'artiste de cinq albums dits "LP" dont les caractéristiques étaient définies contractuellement


Références :

articles L. 122-1, L. 122-1-1 3°, L. 122-3-1 et L. 122-1-2 III devenus L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1242-12 et L. 1242-7 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 20 novembre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 fév. 2009, pourvoi n°08-40184, Bull. civ. 2009, V, n° 31
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, V, n° 31

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Foerst
Rapporteur ?: M. Ludet
Avocat(s) : SCP Baraduc et Duhamel, SCP Piwnica et Molinié, SCP Thomas-Raquin et Bénabent

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.40184
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