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21/01/2009 | FRANCE | N°07-22055

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 21 janvier 2009, 07-22055


Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 12-2 du code de l'expropriation ;
Attendu que l'ordonnance d'expropriation éteint, par elle-même et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur les immeubles expropriés ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 25 octobre 2007), que M. Fernand X... a donné une exploitation agricole à bail en 1981 à son fils Éric ; que par ordonnance du 16 mai 2003, le juge de l'expropriation de Saint-Brieuc a déclaré expropriés au profit de la communauté de communes de Lamballe 5 ha 75 a 36 ca de terres exploitées par le preneur ; qu

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Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 12-2 du code de l'expropriation ;
Attendu que l'ordonnance d'expropriation éteint, par elle-même et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur les immeubles expropriés ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 25 octobre 2007), que M. Fernand X... a donné une exploitation agricole à bail en 1981 à son fils Éric ; que par ordonnance du 16 mai 2003, le juge de l'expropriation de Saint-Brieuc a déclaré expropriés au profit de la communauté de communes de Lamballe 5 ha 75 a 36 ca de terres exploitées par le preneur ; que le bailleur et son épouse, après avoir fait délivrer commandement au preneur de payer les fermages pour les années 2000 à 2004, l'ont assigné en résiliation du bail ; que le preneur a soutenu qu'il ne devait par de fermage pour les parcelles qui avaient fait l'objet de l'ordonnance d'expropriation ;
Attendu que pour prononcer la résiliation du bail, l'arrêt retient que les dispositions combinées des articles L. 12-1 et L. 15-1 du code de l'expropriation ne permettent à l'administration de prendre possession qu'après avoir payé ou consigné l'indemnité, qu'avant paiement ou consignation, l'exproprié conserve la jouissance de ses biens et les droits qui en découlent, qu'en l'espèce les sommes dues aux époux Fernand X... ont été consignées le 7 juillet 2004 et versées en septembre 2004, et qu'il en résulte que le bailleur est recevable à demander le fermage de l'année 2003-2004 sur les parcelles expropriées ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le bail était résilié sur les parcelles expropriées à la date de l'ordonnance, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 octobre 2007, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers (chambre des expropriations) ;
Condamne les époux Fernand X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne les époux Fernand X... à payer la somme de 2 500 euros à M. Eric X... ; rejette la demande des époux Fernand X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un janvier deux mille neuf.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par Me Copper-Royer, avocat aux Conseils pour M. Eric X...

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la résiliation du bail dont Monsieur Eric X... est titulaire en vertu d'un jugement prononcé par le Tribunal de Grande Instance de SAINT-BRIEUC, le 25 avril 1995, confirmé par arrêt de la Cour de RENNES du 19 juin 1996 et portant sur une superficie présentée de 62 ha 60 a 69 ca dont le détail est fourni par le jugement du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de SAINT-BRIEUC en date du 16 juin 1997 confirmé par arrêt de la Cour de RENNES du 15 octobre 1998, d'AVOIR ordonné l'expulsion de Monsieur Eric X... et de tout occupant de son chef dans les trois mois de la signification de son jugement, et de l'AVOIR condamné à payer à Monsieur et Madame Fernand X... la somme de 11. 112, 80 ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le premier juge a motivé la résiliation par l'absence de tout paiement dans les trois mois du commandement, ce qui est peut-être un raisonnement erroné mais ne constitue pas une absence de motivation ;
Qu'il a indiqué que peu importe qu'il existe un désaccord quant à l'étendue des sommes dues au titre de la taxe de remembrement ;
Qu'en constatant l'absence de tout paiement dans le délai imparti il a implicitement mais nécessairement estimé que le désaccord sur les comptes ne justifiait pas le défaut total de paiement ;
(…) qu'aux termes de l'article 515 du nouveau code de procédure civile hors le cas où elle est de droit, l'exécution provisoire peut être ordonnée, à la demande des parties ou d'office, chaque fois que le juge l'estime nécessaire et compatible avec la nature de l'affaire, à condition qu'elle ne soit pas interdite par laloi ; qu'il n'existe pas de contrôle au fond par la cour d'appel puisque l'article 523 dispose que l'exécution provisoire ne peut être arrêtée, en cas d'appel, que si elle est interdite par la loi ou si elle risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; que la nécessité de son prononcé relève de l'appréciation souveraine du premier juge et n'a donc pas à être spécialement motivée ;
que le jugement rendu le 7 juin 1997 par le tribunal paritaire des baux ruraux de SAINT BRIEUC mentionne dans son dispositif que le bail rural porte sur une surface totale de 62ha 66a 48ca ; que l'arrêt du 15 octobre 1998 confirme dans son intégralité le jugement entrepris ; que c'est donc vainement que M. Eric X... prétend que la cour lui a reconnu un bail portant sur 68 ha ;
que le commandement a été délivré à personne et que l'erreur d'adresse est sans conséquence et n'a pu tromper le preneur ;
que par ordonnance du 16 mai 2003 le juge de l'expropriation de SAINT-BRIEUC a déclaré expropriés au profitde la communauté de communes de LAMBALLE 5ha 75a 36ca de terres exploitées par le preneur qui en conclut qu'il ne doit pas defermage pour la période de septembre 2003 à septembre 2004 ;
qu'aux termes de l'article L 12-2 du code del'expropriation l'ordonnance d'expropriation éteint, par elle-même et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur lesimmeubles expropriés ;
Que cependant les dispositions combinées des articles L 12-1 et L 15-1 ne permettent à l'administration de prendre possession qu'après avoir payé ou consigné l'indemnité ; qu'avant paiement ou consignation l'exproprié conserve la jouissance de ses biens et les droits qui en découlent ;
Qu'en l'espèce les sommes dues aux époux Fernand X... ont été consignées le 7 juillet 2004 7 et versées en septembre 2004 ; que le preneur ne précise pas à quelle date il a reçu l'indemnité d'éviction ;
Qu'il résulte de ce qui précède que le bailleur est recevable à demander les fermages de l'année 2003-2004 sur les parcelles expropriées ;
que le preneur ne démontre pas avoir été évincé d'une partie de la parcelle B... alors que M. A... atteste l'avoir exploitée selon bail verbal depuis le départ du précédent preneur en1995 ;
Que la parcelle 142ZW0077 figure au compte M. S. A du propriétaire ;
Que les contestations sur les surfaces exploitées ne sont pas pertinentes ;
que lors des échanges de courriers relatifs à la taxe de remembrement et devant le premier juge la contestation a porté sur l'application de la taxe à des terres qui n'avaient pas été remembrées ;
Que la contestation sur des terres non remembrées porte enfait sur des terres qui ne font pas l'objet du bail ; qu'elle est donc inopérante.
Qu'il résulte du jugement du 16 juin 1997 que le montant des fermages pour les parcelles constituées de Kerrosen, la Grande et la Petite Hèche (44ha 97a 19ca) est de 300 quintaux de blé outre le remboursement partiel des taxes sur le foncier bâti et non bâti, et la moitié de la taxe de remembrement ;
Que c'est donc de façon étonnante que le preneur prétend que le bail judiciaire n'a prévu qu'il n'est redevable de la moitié de la taxe de remembrement que sur les parcelles D... ;
que le bailleur a produit le décompte cadastral à partir duquel a été calculé le paiement des taxes foncières ; que le preneur ne propose aucun décompte différent et ne porte qu'une critique générale et non circonstanciée du calcul ;
Que sa contestation est sans effet ;
que le bailleur peut, aux termes des dispositions combinées des articles L. 411-31 et L. 411-53 du code rural, faire résilier le bail s'il y a eu deux défauts de paiement de fermage ayant persisté à l'expiration d'un délai de trois mois après mise en demeure postérieure à l'échéance ;
qu'il importe peu que les fermages n'aient pas été appelés chaque année ; que M. Eric X... savait qu'il était redevable d'un loyer, seul le montant des taxes pouvant éventuellement être ignoré ;
Qu'il n'a rien payé dans le délai de trois mois qui lui avait été rappelé ;
Qu'il a été vu ci-dessus qu'il a fait de mauvaises contestations, rien ne venant démontrer que le bailleur a tenté de le mettre en faute ; qu'il n'a produit aucun contre élément de compte ;
Que la chute d'arbres à une époque non précisée, des aléas climatiques allégués et des incendies qui paraissent postérieurs au commandement ne constituent pas des raisons sérieuses et légitimes de ne payer aucun fermage dans le délai de trois mois du commandement de payer ;
Que la demande de compensation avec des créances qui ne sont ni certaines, ni liquides, ni exigibles doit être rejetée » (arrêt attaqué p. 4, 5 et 6, § 1 à 9).
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE Dans le cadre de leur régime matrimonial de communauté universelle Monsieur et Madame Fernand X... peuvent régulièrement agir ensemble en résiliationdu bail.
Par ailleurs, l'erreur d'adresse sur la requête n'a causé aucun grief à Monsieur Eric X..., celui-ci ayant régulièrement signé la lettre recommandée de convocation, les services postaux ayant opéré la rectification.
Il convient donc de rejeter les demandes aux fins de voir déclarer l'action introduite irrecevable.
Suivant jugement du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux du 16 juin 1997, confirmé par la Cour d'Appel de RENNES le 15 octobre 1998, il est établi que le bail dont il est demandé larésiliation porte sur les parcelles intitulées « Kerrozen» « La GrandeHêche », et « La Petite Hèche » ; « D... » et « B... » pour une surface totale de 62 hectares 66 ares 48 centiares, moyennant les fermages suivants :
- Fermage annuel pour les parcelles constituées de Kerrozen, " La Grande Hèche " et " La Petite Hèche ", de 300 quintaux de blé, outre le remboursement partiel des taxes foncières sur le bâti et le non bâti et de la moitié de la taxe de remembrement.
- Fermage annuel au titre de la mise à disposition de la parcelle D... de 16 quintaux de blé, 1318. 32 litres de lait, 206. 2 kgs de porc charcutier et 111. 75 kgs de viande bovine, outre le remboursement partiel des taxes foncières sur le bâti et le non-bâti et la prise en charge de la moitié de la taxe de remembrement.
- Fermage annuel pour la parcelle dite B... de 40 quintaux de blé.
Le 27 avril 2005, Monsieur Fernand X... a fait délivrer un commandement de payer pour ce bail, visant à la résiliation du bail, pour un montant total de39. 324, 91 euros au titre des fermages 2000 à 2004, sous déduction d'acompte pour 8. 384, 70 euros.
Le commandement est régulier et vise expressément les décisions de justice ayant reconnu le bail, il est donc de nature à faire courir le délai prévu à l'article L. 411-53 du Code Rural.
Les articles L. 411-31 et L. 411-53 du Code Rural permettent au bailleur de faire résilier le bail sur le fondement de deux défauts de paiement de fermage, (…) ayant persisté à l'expiration d'un délai de trois mois après mise en demeure postérieure à l'échéance.
En l'espèce, peu importe que Monsieur Eric X... estime qu'il existait un désaccord quant à l'étendue des sommes dues au titre du calcul de la taxe de remembrement, dès lors qu'il n'a effectué aucun règlement dans le délai de 3 mois soit avant le 27 juillet 2005, le premier règlement partiel étant intervenu, le 12 septembre 2005 ce que le preneur neconteste pas.
Le Tribunal ne peut donc que constater cette absence totalede règlement dans le délai imparti dans le commandement et prononcer la résiliation du bail, ainsi que l'expulsion du preneur sans qu'il y ait lieu de l'assortir d'une astreinte.
Il convient de condamner Monsieur Eric X... au paiement de la somme de 11. 112, 80 euros s'établissant ainsi
-Fermages au 29 / 09 / 2000 : 9 364, 31 euros
-Fermages au 29 / 09 / 2001 : 9 476, 72 euros
-Fermages au 29 / 09 / 2002 : 9 765, 67 euros
-Fermages au 29 / 09 / 2003 : 9 506, 52 euros
-Fermages au 29 / 09 / 2004 : 9 384, 28 euros
A déduire paiement antérieurs au 27 / 04 / 2005 : 8. 384, 7 euros Paiement du 12 / 09 / 2005 : 28 000, 00 euros.
(...) Il convient d'assortir la présente décision de l'exécution provisoire (jugement p. 3, § 2 au dernier §, p. 4 et 5, § 2).
ALORS, D'UNE PART, QU'après avoir elle-même relevé quele jugement rendu le 7 (16) juin 1997 par le tribunal paritaire des baux ruraux de SAINT-BRIEUC mentionne dans son dispositif que le bail rural porte sur une surface totale de 62ha 66a 48ca ; que l'arrêt du 15 octobre 1998 confirme dans son intégralité le jugement entrepris (arrêt attaqué p. 4, § 5), la Cour d'Appel, laquelle était saisie d'un litige portant notamment sur la surface des terres données à bail rural, a cependant confirmé le jugement du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de SAINT-BRIEUC du 6 juillet 2006 ayant prononcé la résiliation du bail dont Monsieur Eric X... est titulaire en vertu d'un jugement prononcé par le Tribunal de Grande Instance de SAINT-BRIEUC le 25 avril 1995, confirmé par arrêt de la Cour d'Appel de RENNES du 19 juin 1996 et portant sur une superficie de 62 hectares 60 ares 69 centiares … ; qu'en statuant ainsi, la Cour d'Appel s'est contredite, privant sa décision d'un défaut de motifs, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile.
ALORS, D'AUTRE PART, QUE constitue une raison sérieuse et légitime de non-paiement des fermages, de nature à exclure le prononcé de la résiliation du bail rural, la procédure d'expropriation dont font l'objet, pour partie, les parcelles louées ; que l'ordonnance d'expropriation emportant de plein droit, à compter de la date à laquelle elle intervient, la résolution de tous les droits réels ou personnels existant sur l'immeuble exproprié, le preneur n'est pas tenu de s'acquitter de son loyer au-delà de cette date ; qu'en prononçant cependant la résiliation du bail litigieux pour défaut de paiement des fermages motifs pris de ce que le bailleur est recevable à demander les fermages de l'année 2003-2004 sur les parcelles expropriées (par ordonnance du 16 mai 2003) » (arrêt attaqué p. 5, § 4), la Cour d'Appel a violé les dispositions des articles L. 411-31 et L. 411-53 du Code rural, ensemble les dispositions des articles L. 12-2 et suivants du Code de l'expropriation.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 07-22055
Date de la décision : 21/01/2009
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Civile

Analyses

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - Transfert de propriété - Ordonnance d'expropriation - Effets - Extinction des droits existant sur l'immeuble exproprié - Bail à ferme

L'ordonnance d'expropriation éteignant, par elle-même et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur les immeubles expropriés, le bail à ferme qui porte sur des parcelles expropriées est résilié à la date de cette ordonnance et le fermage dû en exécution de ce bail cesse de l'être à cette même date


Références :

article L. 12-2 du code de l'expropriation

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes, 25 octobre 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 21 jan. 2009, pourvoi n°07-22055, Bull. civ. 2009, III, n° 19
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, III, n° 19

Composition du Tribunal
Président : M. Weber
Avocat général : M. Cuinat
Rapporteur ?: M. Peyrat
Avocat(s) : Me Copper-Royer, SCP Peignot et Garreau

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:07.22055
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