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14/01/2009 | FRANCE | N°08-82084

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 14 janvier 2009, 08-82084


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Bernard,
- X... Imogen, épouse Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 9e chambre, en date du 27 février 2008, qui les a condamnés, le premier, pour abus de confiance, à huit mois d'emprisonnement avec sursis, la seconde, pour recel, à quatre mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation

des articles 314-1, 314-10 et 321-1 du code pénal, 177 et 593 du code de procédure pénale, dé...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Bernard,
- X... Imogen, épouse Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 9e chambre, en date du 27 février 2008, qui les a condamnés, le premier, pour abus de confiance, à huit mois d'emprisonnement avec sursis, la seconde, pour recel, à quatre mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 314-1, 314-10 et 321-1 du code pénal, 177 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Bernard X... coupable d'abus de confiance et Imogen Y... de recel d'abus de confiance au préjudice de Marie Z..., les a condamnés respectivement à huit mois d'emprisonnement avec sursis et à quatre mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

" aux motifs qu'il est incontestable que la remise des fonds par la partie civile aux deux prévenus n'a donné lieu à la rédaction d'aucun écrit ; qu'il est également constant qu'aucun des contrats, tous postérieurs au dépôt des fonds, ne fait allusion à leur remise, que de même n'y figure pas de clause permettant leur utilisation pour payer les prestations qui y sont prévues ; qu'il est dès lors incontestable qu'il existait une indépendance totale entre la remise des fonds et l'édition du livre ; que, d'ailleurs, interrogée par le magistrat instructeur, Imogen Y... a admis que le service rendu à Marie Z... avait pour but de « sortir son argent de France pour lui permettre de démarrer une vie ailleurs le cas échéant, en même temps il fallait assurer son quotidien en France, par la suite, cela s'est compliqué il fallait que cet argent finance le livre et sa nouvelle vie » ; que la falsification des dates des deux contrats au 12 avril 1994 et au 1er janvier 1994 démontre à l'évidence la vaine tentative des prévenus à faire accréditer leur thèse, liant le dépôt des fonds à l'édition du livre, et ne relève pas, comme Bernard X... le prétend, d'une simple erreur matérielle ; que les pièces versées au dossier démontrent qu'à partir du compte collectif « Imogen Y..., B. L et E. I X... » (Bernard et Edith X... son épouse), sur lequel étaient déposés les fonds de la partie civile, des ordres de virements sous la signature de Bernard X... ont été effectués au bénéfice d'un compte n°... ouvert à la Lloyds bank à Jersey sous le nom d'Imogen Y... pour des sommes de 54 000 francs, 23 000 francs, 25 000 francs, 23 000 francs, 28 000 francs, 28 000 francs, 30 000 francs, 54 000 francs, 27 000 francs, 30 000 francs, d'un compte n°... ouvert à la Lloyds Bank à Jersey sous les noms « B. L. et E. I. X... » pour des sommes de 30 000 francs, 30 000 francs, 30 000 francs, 30 000 francs, 30 000 francs, 30 000 francs 30 000 francs, 30 000 francs, 28 000 francs, d'un compte n°... ouvert à la Banque nationale de Paris, agence boulevard de Grenelle à Paris sous les noms « B. L et E. I. X... » pour des sommes de 30 000 francs, 28 000 francs, d'un compte N° C... ouvert à la banque Cantonale Vaudoise à VIllars-sur-Ollon en Suisse sous les noms « B. L. et E. I X... » pour les sommes de 46 000 francs, 46 000 francs, soit un total de 273 000 francs au profit d'Imogen Y... et 400 000 francs au profit des époux X... ; que comme les premiers juges, la cour relève que la faiblesse de la thèse des consorts X... tient essentiellement en l'absence d'une part, de documents justificatifs des dépenses alléguées, notamment de factures émises par ces derniers au nom de la partie civile pour justifier de leurs travail et dépenses dans son intérêt, en l'espèce des sommes dont ils ont directement bénéficié sur leurs comptes personnels et, d'autre part, de la tenue de toute comptabilité précise de chaque dépense ; que les rares pièces remises par la défense sont indigentes et sont des factures émises par des avocats au nom de Bernard X... ; qu'il résulte des pièces du dossier et des propres déclarations du prévenu que plusieurs éditeurs ont versés des avances de 300 000 francs, 50 000 dollars et 5 000 livres Sterling sur le compte de l'agent littéraire américain Toby A..., qui après déduction de sa commission, a viré le solde sur le compte de la société Schancastel à Jersey, société des consorts

X...

; qu'il apparaît dès lors que les dites avances n'ont bénéficié qu'aux consorts X..., alors qu'à l'évidence une partie aurait dû revenir à Marie Z..., ainsi que cela résulte de la facture établie par Toby A... qui mentionne « Acompte Imogen X... / B... », autre nom utilisé par Marie Z... ; qu'à ce titre Bernard X... s'était engagé auprès du magistrat instructeur à en apporter la preuve, ce qu'il n'a jamais fait ; les seules sommes dont il a prouvé le versement à Marie Z... étant les 605 000 francs en provenance du compte collectif des consorts X... sur lequel était déposé l'argent de cette dernière ; que la cour relève que ces avances ont compensé largement les fonds engagés soi-disant par les prévenus pour l'édition du livre ; qu'à l'inverse, comme les premiers juges l'ont à juste titre relevé, la thèse de la partie civile, selon laquelle elle avait confié ses fonds à Bernard X... pour qu'il les place et les gère, est accréditée d'une part, par le fait que rien ne justifiait que Marie Z..., sans profession et sans ressources en France, ne se sépare de tous ses avoirs au point qu'il lui fallait ensuite, ainsi que cela résulte de ses courriers, quémander des fonds aux consorts X... pour payer ses loyers et ses dépenses courantes ; qu'à ce titre le 23 avril 1998 elle écrivait à Imogen Y... « nous sommes le 23 avril au soir et le virement promis par ton père ne m'est toujours pas parvenu, je suis à découvert... la banque m'a envoyé un premier avertissement... ton père m'a dit qu'il était fiduciaire professionnel... j'ai beaucoup de difficultés à comprendre pourquoi il me met dans une telle situation alors qu'il avait proposé lui-même de gérer au mieux l'argent que je lui ai confié il y a quatre ans », et, d'autre part, la teneur de ses nombreux courriers adressés à Bernard X..., notamment celui du 5 mai 1998 où elle écrit « concernant la somme de 3 347 500 francs que je vous ai remise à titre de placement le 24 avril 1994, je vous demande de m'adresser sous huitaine, les relevés récapitulatifs des mouvements de comptes sur lequel vous avez placé cet argent et de me rembourser l'intégralité de ces sommes y compris les intérêts, déduction faite des 635 000 francs que vous m'avez, sauf erreur de ma part, déjà reversés » ; que les relevés de compte ne seront jamais produits par les deux prévenus à la partie civile, malgré ses nombreuses réclamations dès le courant de l'année 1996, pas plus qu'ils ne seront produits devant le magistrat instructeur et les juridictions pénales ; qu'il est incontestable que ces derniers ont entendu dissimuler à la partie civile l'état du compte afin qu'elle ignore l'utilisation des sommes déposées entre leurs mains ; qu'il apparaît dès lors, au vu de l'ensemble de ces éléments, que Marie Z... avait confié ses fonds à Bernard X..., dans le but, certes, de les soustraire aux autorités françaises comme le lui avait suggéré Bernard X..., mais également pour qu'il les place et les gère au mieux de ses intérêts, dans l'attente de la clarification de sa situation administrative ; qu'en conséquence, Bernard X... dépositaire des fonds remis par Marie Z..., et qui en avait accepté la gestion, notamment en lui faisant parvenir régulièrement des sommes pour assurer son existence, en a fait un usage contraire à l'objet du dépôt en dissipant lesdits fonds à son profit ou à celui de tiers ; qu'en conséquence, le délit d'abus de confiance est établi en tous ses éléments à l'égard de Bernard X... dans les termes de la prévention ; que le délit de recel d'abus de confiance, est également établi dans les termes de la prévention, à l'égard d'Imogen Y... qui a endossé les deux chèques remis par la partie civile et les a déposés sur le compte à Jersey dont elle avait la signature bancaire en sa qualité de dirigeante de la société Schancastel ; que destinataire des relevés de comptes, elle n'a pu que s'apercevoir de leur dissipation au profit de sa famille, de tiers et d'elle même, alors qu'elle n'ignorait pas l'objet du dépôt de ces sommes par Marie Z... ainsi qu'il a été développé ci-dessus ; que la cour estime que les premiers juges ont fait une exacte appréciation de la sanction pénale ; que, sur l'action civile, compte tenu de la déclaration de culpabilité intervenue à l'égard des deux prévenus la constitution de partie civile de Marie Z..., épouse C..., est recevable et fondée ; que s'agissant du montant des fonds détournés, l'ordonnance de renvoi vise une somme de 417 225 euros, le magistrat instructeur ayant tenu compte des sommes versées à la partie civile et reconnues par elle ; que, dès lors, la cour ne peut lui allouer une somme supérieure étant tenue dans les termes de ladite ordonnance ; que la cour, ayant retenu les prévenus coupables dans les termes de la prévention allouera à Marie Z... une somme de 417 225 euros au titre des sommes détournées, avec intérêts au taux légal à compter du 8 avril 1998, date de la demande de reddition des comptes, ainsi qu'une somme de 20 000 euros au titre du préjudice moral ; que dès lors le jugement déféré sera infirmé en ses dispositions civiles ;

" 1°) alors que des fonds ne peuvent être détournés que s'ils ont été remis à titre précaire ; que, le chèque est un instrument de paiement dont la remise transmet au bénéficiaire la propriété de la provision et qui rend exigible, à la date de son émission, la somme qui y figure sans que le tireur et le bénéficiaire puissent conventionnellement en modifier le caractère ni les effets de sorte qu'ils ne peuvent être considérés comme ayant été remis en dépôt à leur bénéficiaire ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que Marie Z..., qui désirait soustraire ses fonds aux autorités françaises, avait remis, le 24 avril 1994, à Imogen Y..., deux chèques d'un montant total de 3 342 500 fransc libellés à son nom, que cette dernière les avait endossés et déposés sur un compte ouvert à son nom et à celui de ses parents, M. et Mme X..., dans les livres de la Llyod's bank à Jersey ; qu'il s'ensuit que les fonds n'avaient pas été remis à titre précaire ; qu'en décidant, dans ces conditions, que faute de restituer les fonds, M. X... et Marie Z... s'étaient rendus coupables d'abus de confiance et de recel d'abus de confiance, la cour d'appel a violé les articles susvisés ;

" 2°) alors que ne détourne pas le bien remis le dépositaire qui l'utilise conformément aux fins qui ont été prévues ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de l'arrêt que plusieurs éditeurs ont versé des avances sur le compte de l'agent littéraire Toby A... pour le projet de livre de Mlle B..., avances qui ont été virées sur le compte de la société d'Imogen Y..., ce dont il résulte que les fonds litigieux avaient été remis aux prévenus, non seulement pour permettre à Mlle B... de soustraire sa fortune aux autorités françaises, mais également, pour financer la réalisation et la diffusion de sa biographie ; qu'en considérant, cependant, que les fonds avaient été remis à Bernard X... dans le but d'en assurer la gestion et non dans celui d'éditer un livre et qu'ainsi était établi l'usage contraire à l'objet du dépôt, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses constatations et a violé les dispositions précitées ;

" 3°) alors que tout jugement doit être motivé ; qu'en l'espèce, la prévention faisait état de contrats datés des 1er janvier 1994 et 12 avril 1994 faisant figurer Marie Z... sous le nom de D..., alors qu'à ces dates l'OFPRA n'avait pas encore attribué ce nom à Mlle B..., ce dont il serait résulté que les contrats auraient été falsifiés ; que, saisi de ces faits, le juge d'instruction n'a pas estimé qu'il existait charges suffisantes pour suivre du chef de faux et les juges du fond n'ont pas, non plus, considéré qu'était constitué le faux ; qu'en retenant, cependant, pour décider que B... n'avaient pas remis les fonds litigieux à Bernard X... à charge pour lui de faire écrire et éditer sa biographie, et déclarer les prévenus coupables d'abus de confiance et recel d'abus de confiance, sur la falsification des dates des deux contrats du 1er janvier 1994 et 12 avril 1994, sans autrement justifier la falsification retenue, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motif et violé les dispositions précitées " ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt confirmatif attaqué et des pièces de procédure que Bernard X... et Imogen Y... ont été respectivement poursuivis devant le tribunal correctionnel des chefs d'abus de confiance et de recel ;

Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables de ces délits, l'arrêt énonce que leurs allégations selon lesquelles les fonds leur auraient été remis pour l'édition d'un livre des mémoires de la partie civile n'est pas crédible ; qu'elle ajoute qu'il ressort notamment, des nombreux courriers échangés par les parties, que Marie Z... a confié ses fonds à Bernard X..., dans le but qu'il les place et les gère au mieux de ses intérêts, et que ce dernier, qui en était dépositaire, en a fait un usage contraire à l'objet du dépôt en les dissipant à son profit ou à celui de tiers ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, procédant de son pouvoir souverain d'appréciation, la cour d'appel a, sans insuffisance, caractérisé en tous leurs éléments tant matériels qu'intentionnel, les délits d'abus de confiance et de recel dont elle a reconnu les prévenus coupables ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

FIXE à 3 000 euros la somme que Bernard X... et Imogen X... épouse Y... devront payer à Marie Z... épouse C... au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Dulin conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Slove conseiller rapporteur, M. Rognon conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 08-82084
Date de la décision : 14/01/2009
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 27 février 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 14 jan. 2009, pourvoi n°08-82084


Composition du Tribunal
Président : M. Dulin (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Spinosi, SCP Monod et Colin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:08.82084
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