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13/01/2009 | FRANCE | N°06-46364

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 13 janvier 2009, 06-46364


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., salarié protégé, a été engagé le 5 mai 1975 par la société Ericsson en qualité d'aide monteur ; que son contrat de travail a été repris par la société Alcatel réseaux d'entreprise (ARE) puis transféré le 8 mars 1999 à la société Marine Consulting, après autorisation du ministre du travail du 19 février 1999, annulant la décision de refus de l'inspecteur du travail du 20 août 1998 ; que par jugement du 4 juillet 2001, le tribunal administratif a annulé

la décision ministérielle ; que M. X... a été réintégré le 4 mars 2002 par la s...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., salarié protégé, a été engagé le 5 mai 1975 par la société Ericsson en qualité d'aide monteur ; que son contrat de travail a été repris par la société Alcatel réseaux d'entreprise (ARE) puis transféré le 8 mars 1999 à la société Marine Consulting, après autorisation du ministre du travail du 19 février 1999, annulant la décision de refus de l'inspecteur du travail du 20 août 1998 ; que par jugement du 4 juillet 2001, le tribunal administratif a annulé la décision ministérielle ; que M. X... a été réintégré le 4 mars 2002 par la société ARE, devenue la société Nextiraone France, puis licencié pour faute le 9 avril 2002, sans que l'employeur ait saisi l'autorité administrative ; que contestant, notamment, la régularité de son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen, qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen :
Vu les articles L. 425-3, alinéa 3, L. 436-3, alinéa 3, L. 425-1, alinéa 2, phrase 1, et L. 436-1, alinéa 2, phrase 1, devenus L. 2422-2, L. 2411-5 et L. 2411-8 du code du travail ;
Attendu qu'en cas d'annulation d'une décision autorisant le licenciement d'un délégué du personnel ou d'un membre du comité d'entreprise, celui-ci est réintégré dans son mandat si l'institution n'a pas été renouvelée ; que dans le cas contraire, il bénéficie pendant une durée de six mois, à compter du jour où il retrouve sa place dans l'entreprise, de la procédure prévue aux articles L. 425-1, alinéa 2, phrase 1, et L. 436-1, alinéa 2, phrase 1, recodifiés sous les articles L. 2411-5 et L. 2411-8 du code du travail ; que cette protection doit également bénéficier au salarié protégé dont l'autorisation de transfert a été annulée ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en nullité de son licenciement pour violation du statut protecteur, la cour d'appel énonce que les dispositions légales prévoyant l'instauration d'une nouvelle période de protection de six mois après l'annulation d'une autorisation de licenciement, lorsque les institutions représentatives auxquelles appartenait le salarié ont été renouvelées, ne sont pas applicables en cas d'annulation d'une autorisation de transfert de sorte que l'employeur n'était pas tenu de saisir l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation de licenciement ;
Qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté le salarié de ses demandes en nullité de son licenciement et en paiement de dommages-intérêts pour licenciement illicite et pour violation du statut protecteur, l'arrêt rendu le 24 octobre 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Nextiraone France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Nextiraone France à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize janvier deux mille neuf.

Moyens annexés au présent arrêt
Moyens produits par la SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat aux Conseils pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Jean-Pierre X... de sa demande en paiement de dommages-intérêts en raison de son transfert au vu d'une autorisation administrative annulée.
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... a reçu chez MARINE CONSULTING une rémunération supérieure à celle perçue chez ARE et affirme n'avoir rencontré aucune difficulté chez cet employeur auprès duquel il s'est d'ailleurs représenté après la fin de son préavis le 10 juin 2002 ; qu'après le prononcé du jugement du Tribunal administratif, il a demandé sa réintégration au sein de la société NEXTIRAONE qui a accédé à sa demande en augmentant son salaire et sa qualification ; qu'il ne justifie donc d'aucun préjudice ouvrant droit à dommages-intérêts du fait de l'annulation de l'autorisation de transfert ; que les premiers juges ont exactement retenu qu'aucune disposition légale ou conventionnelle ne prévoit l'octroi d'indemnités dans ce cas ; que le jugement sera donc confirmé sur ce point.
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE Monsieur Jean-Pierre X... se fondant sur les articles L.412-19, L.425-3 et L.436-3 du Code du travail relatifs aux conséquences d'une annulation d'une décision d'autorisation de licenciement, prétend obtenir un dédommagement d'un montant de 50.000 euros en réparation du préjudice matériel subi au cours de la période qui s'est écoulée entre son transfert et sa réintégration ; qu'aucun de ces articles de loi ne vient indemniser un salarié dont l'autorisation de transfert a été annulée de sorte que Monsieur Jean-Pierre X... sera débouté de cette demande.
ALORS QUE Monsieur Jean-Pierre X... poursuivait la réparation du préjudice matériel et moral subi du fait de son transfert annulé par le Tribunal administratif ; qu'en refusant d'indemniser le salarié de ce préjudice au motif qu'aucune disposition légale ou conventionnelle ne prévoit l'octroi d'indemnités dans ce cas, la Cour d'appel a violé les articles 1146 et suivants du Code civil.
ALORS en outre QU'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué que les élections professionnelles avaient eu lieu au sein de la société ARE au cours du transfert, ultérieurement annulé, de Monsieur Jean-Pierre X... au sein de la société MARINE CONSULTING, transfert qui l'avait de facto privé de la possibilité de se présenter aux élections professionnelles, et de voir renouveler ses mandats, et en suite duquel il avait été licencié un mois après sa réintégration sans demande d'autorisation de licenciement ; qu'en affirmant que Monsieur Jean-Pierre X... n'aurait subi aucun préjudice, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles 1146 et suivants du Code civil.
ALORS encore QU'en omettant de rechercher si, comme le soutenait le salarié, la réintégration résultant de l'annulation du transfert n'avait pas été exécutée de manière déloyale par la société NEXTIRAONE, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 1146 et suivants du Code civil.
ET ALORS enfin QU'en s'abstenant de rechercher si le blocage dont la rémunération de Monsieur Jean-Pierre X... faisait l'objet au sein de la société ARE n'avait pas conduit à son transfert dans des conditions de rémunération inférieure à celles qui auraient du être les siennes s'il n'avait pas fait l'objet de la discrimination reconnue par elle, la Cour d'appel a de nouveau privé sa décision de base légale au regard des articles 1146 et suivants du Code civil.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Jean-Pierre X... de ses demandes en paiement de dommages-intérêts pour licenciement nul, pour licenciement illicite et pour préjudice moral résultant de l'impossibilité d'exercer ses mandats.
AUX MOTIFS QUE Monsieur X... soutient que la société NEXTIRAONE aurait du demander à l'inspecteur du travail l'autorisation de licenciement ; qu'il résulte des éléments produits que lors de son transfert en mars 1999, il était membre du comité d'établissement Rhône-Alpes, délégué du personnel, représentant syndical au comité central d'entreprise et délégué syndical d'établissement ; qu'il avait été jusqu'en septembre 1998 délégué syndical central ; qu'il affirme avoir été également jusqu'en 1999 représentant syndical au CHSCT, ce dont il ne justifie pas ; qu'en tout état de cause de telles fonctions, d'origine conventionnelle, n'ouvrent pas droit à une protection légale ; que le comité d'établissement et les délégués du personnel ont été renouvelés lors des élections de décembre 2000 pendant l'absence de Monsieur X... alors employé par MARINE CONSULTING, et le salarié a été remplacé dans son mandat de représentant syndical auprès du CCE par Monsieur Y... et dans son mandat de délégué syndical d'établissement par Monsieur Z... selon un courrier du 6 avril 1999 du syndicat FTM-CGT ; que les dispositions légales prévoyant l'instauration d'une nouvelle période de protection de six mois après l'annulation d'une autorisation de licenciement, lorsque les institutions représentatives auxquelles appartenaient le salarié ont été renouvelées, ne sont pas applicables en cas d'annulation d'une autorisation de transfert ; que la société NEXTIRAONE n'était donc pas tenue de solliciter l'autorisation administrative de licencier Monsieur X..., le licenciement n'est pas entaché de nullité et la demande de dommages-intérêts pour violation du statut protecteur a été à juste titre rejetée ; qu'il doit n être de même pour la demande de dommages-intérêts pour licenciement illicite, étant observé que Monsieur X... ne forme plus de demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que la demande de dommages-intérêts pour non exercice du mandat a été à juste titre rejetée, aucun mandant n'étant en cours lors de la réintégration de Monsieur X....
ALORS QUE dans l'hypothèse où l'institution a été renouvelée en son absence, le salarié protégé dont l'autorisation de transfert a été annulée bénéficie, pendant une période de six mois, à compter du jour où il retrouve sa place dans l'entreprise, de la protection reconnue soit aux délégués du personnel, soit aux membres du comité d'entreprise ; qu'en jugeant la société NEXTIRAONE autorisée à licencier Monsieur Jean-Pierre X... moins de six mois après sa réintégration sans demande préalable d'autorisation de licenciement, la Cour d'appel a violé les articles L.425-3 et L.436-3 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06-46364
Date de la décision : 13/01/2009
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

REPRESENTATION DES SALARIES - Règles communes - Contrat de travail - Modification dans la situation juridique de l'employeur - Transfert partiel d'entreprise - Salarié protégé compris dans le transfert - Autorisation administrative de transfert - Annulation - Effets - Réintégration - Licenciement postérieur - Bénéfice de la protection - Condition

REPRESENTATION DES SALARIES - Règles communes - Contrat de travail - Licenciement - Mesures spéciales - Autorisation administrative - Annulation par la juridiction administrative - Réintégration - Licenciement postérieur - Protection - Bénéfice - Condition

En cas d'annulation d'une décision autorisant le licenciement d'un délégué du personnel ou d'un membre du comité d'entreprise, celui-ci est réintégré dans son mandat si l'institution n'a pas été renouvelée. Dans le cas contraire, il bénéficie pendant une durée de six mois, à compter du jour où il retrouve sa place dans l'entreprise, de la procédure prévue aux articles L. 425-1, alinéa 2, phrase 1, et L. 436-1, alinéa 2, phrase 1, recodifiés sous les articles L. 2411-5 et L. 2411-8 du code du travail. Cette protection doit également bénéficier au salarié protégé dont l'autorisation de transfert a été annulée. Doit dès lors être cassé l'arrêt qui, après avoir constaté qu'un salarié, dont l'autorisation de transfert avait été annulée, avait perdu l'ensemble de ses mandats électifs du fait du renouvellement des institutions en son absence, refuse d'annuler son licenciement intervenu sans autorisation préalable de l'inspecteur du travail un mois après sa réintégration dans l'entreprise


Références :

articles L. 425-3, alinéa 3, et L. 436-3, alinéa 3, devenus L. 2422-2 du code du travail

article L. 425-1, alinéa 2, phrase 1, devenu L. 2411-5 et L. 436-1, alinéa 2, phrase 1, devenus L. 2411-8 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 24 octobre 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 13 jan. 2009, pourvoi n°06-46364, Bull. civ. 2009, V, n° 8
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2009, V, n° 8

Composition du Tribunal
Président : Mme Collomp
Avocat général : M. Aldigé
Rapporteur ?: Mme Darret-Courgeon
Avocat(s) : SCP Defrenois et Levis, SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2009:06.46364
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