LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 31 mai 2007), que M. X..., employé en qualité d'opérateur informatique à compter du 1er mars 1974 par le cabinet Lhommedet Pierre Pierre, devenu la SCEC experts associés, aux droits de laquelle est venue la société ADEC Atlantique, a été licencié le 9 novembre 2004 pour faute lourde ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement repose non sur une faute lourde, mais sur une cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que la copie par un salarié de données concernant un client du cabinet qui l'emploie, sur un support informatique, en vue de leur transmission à un tiers concurrent de l'entreprise constitue une faute lourde ou à tout le moins une faute grave ; qu'en constatant que M. X... avait copié des données informatiques à la demande de l'ancien associé du cabinet et en décidant néanmoins que cette faute ne constituait pas une faute lourde ni même une faute grave, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 122-6, L. 122- 8, L. 122-9 et L. 223-14 du code du travail ;
2°/ que dans ses conclusions, l'employeur faisait valoir que M. X... avait méconnu, d'une part, l'article 8.5.2 de la convention collective nationale des cabinets d'experts-comptables et de commissaires aux comptes du 9 décembre 1974 stipulant que les collaborateurs ne peuvent conserver ni de copies ni de photocopies des documents qu'ils établissent ou dont la communication leur est donnée par le cabinet et, d'autre part, la charte utilisateur pour l'usage de ressources informatiques et de services Internet qu'il s'était engagé à respecter et qui interdit notamment le détournement des ressources informatiques à des fins personnelles ainsi que la consultation ou la détention d'information administrative dont l'accès n'est pas autorisé et la copie de données autres que celles qui appartiennent en propre à l'utilisateur ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme il lui était demandé, si le simple fait de copier des données informatiques relatives à un client, même sans transmission à un tiers, ne constituait pas une violation par le salarié des obligations contractuelles et conventionnelles d'une importance telle qu'elle justifiait son licenciement pour faute lourde ou à tout le moins pour faute grave, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 8.5.2 de la convention collective nationale des cabinets d'experts-comptables et de commissaires aux comptes du 9 décembre 1974 et de l'article 1134 du code civil ;
3°/ que l'intention de nuire du salarié est établie dès lors que celui-ci a copié des données de l'entreprise en vue de leur transmission à un tiers, concurrent de l'employeur ; qu'en écartant l'intention de nuire de M. X... aux motifs inopérants tirés de ce qu'il avait agi au vu et au su de tous les autres employés et du litige existant entre les anciens associés sur l'attribution du client concerné, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 223-14 du code du travail ;
4°/ que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, la société produisait aux débats les attestations de Mmes Y... et Z..., collaboratrices du cabinet, qui établissaient le caractère trompeur du comportement de M. X... en vue d'obtenir des supports informatiques vierges fournis et vérifiés par le cabinet ; qu'en écartant la faute lourde ou grave du salarié, sans avoir examiné ses éléments de preuve, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté que si le salarié avait, en contravention avec les règles de la profession, réalisé la copie sur disquette d'un dossier, il s'était assuré, avant d'effectuer cette copie à la demande de l'associé qui quittait le cabinet, que le dossier avait été attribué à ce dernier ; qu'en l'état de ces constatations, elle a pu retenir que l'intention de nuire à l'employeur ou à l'entreprise, élément constitutif de la faute lourde, n'était pas caractérisée ; qu'elle a pu décider que le manquement unique reproché au salarié après vingt années passées au service du cabinet ne justifiait pas la rupture immédiate du contrat de travail et ne constituait pas une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Adec Atlantique aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Adec Atlantique à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille huit.