LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble 20 novembre 2006), que les consorts X... ont, par acte authentique du 27 avril 1990, vendu à la commune de Chatuzange Le Goubet une parcelle leur appartenant ; qu'une déclaration d'utilité publique concernant cette parcelle est intervenue le 10 juillet 1990 ; qu'en 2002, les consorts X... ont assigné la commune afin de faire constater leur droit à rétrocession ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... agissant tant en son nom personnel qu'en qualité d'héritier de Mme X... fait grief à l'arrêt de dire qu'il ne peut se prévaloir d'un droit à rétrocession alors, selon le moyen, que si les immeubles expropriés pour cause d'utilité publique n'ont pas reçu dans le délai de cinq ans la destination prévue ou ont cessé de recevoir cette destination, les anciens propriétaires ou leurs ayants droit à titre universel peuvent en demander la rétrocession pendant un délai de trente ans à compter de l'ordonnance d'expropriation, à moins que ne soit requise une nouvelle déclaration d'utilité publique ; que ce droit à rétrocession des biens expropriés s'applique également en cas de cession amiable, que la déclaration d'utilité publique ait été antérieure ou non à ladite cession ; qu'en énonçant cependant que les propriétaires ayant cédé amiablement leur immeuble avant la déclaration d'utilité publique ne bénéficient de ce droit qu'à la condition que la cession ait fait l'objet d'une ordonnance de donné acte de la part du juge de l'expropriation, la cour d'appel a ajouté au texte de l'article L. 12-6 du code de l'expropriation et a violé celui-ci, ensemble l'article L. 12-2 du même code ;
Mais attendu qu'ayant constaté que les consorts X... avaient cédé amiablement leur parcelle à la commune antérieurement à la déclaration d'utilité publique sans qu'ils aient demandé qu'il leur en soit donné acte par ordonnance du juge de l'expropriation, la cour d'appel en a exactement déduit que M. X... ne pouvait en solliciter la rétrocession ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes en indemnisation, présentées, à titre subsidiaire, sur le fondement de la faute de la commune alors, selon le moyen :
1°/ que, le droit de demander la nullité d'un contrat en application des articles 1116 et 1117 du code civil n'exclut pas l'exercice, par la victime des manoeuvres dolosives, d'une action en responsabilité pour obtenir de leur auteur une indemnisation du préjudice subi ; qu'en l'espèce la cour d'appel a violé les articles 1116 et 1117 du code civil en énonçant que l'action engagée sur le fondement du dol, comme sur celui de l'erreur, ne pouvait conduire qu'à la nullité ou à la rescision de la vente, et non à l'indemnisation du préjudice subi ensuite de ce dol ;
2°/ que, en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, si, en restant totalement silencieuse sur la faculté qu'avaient Mme Y... et M. X... de faire préserver leur droit à une éventuelle rétrocession par l'obtention d'une ordonnance de donné acte et en indiquant que, pour eux, la déclaration d'utilité publique n'avait qu'une simple valeur informative, la commune de Chatuzange Le Goubet ne s'était pas livrée à une rétention dolosive, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1116 du code civil ;
3°/ que, pèse sur l'autorité expropriante une obligation d'informer de l'étendue exacte de leurs droits les anciens propriétaires qui ont opté pour la voie d'une cession amiable avant que ne soit prise la déclaration d'utilité publique ; qu'à ce titre, elle doit, notamment, les informer de la possibilité pour eux de solliciter et d'obtenir du juge de l'expropriation une ordonnance de donné acte de la cession amiable, ainsi que des conséquences du prononcé de cette ordonnance ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil en jugeant que la commune de Chatuzange Le Goubet n'avait aucune obligation d'indiquer à Mme Y... et à M. X... qu'ils pouvaient solliciter une ordonnance de donné acte auprès du juge de l'expropriation afin de préserver un éventuel droit à rétrocession ;
Mais attendu qu'ayant constaté que la preuve de la volonté de la commune d'occulter le droit de M. X... de requérir une ordonnance de donné acte du juge de l'expropriation n'était pas rapportée et exactement retenu que la commune n'avait aucune obligation de lui indiquer qu'il pouvait ou devait solliciter une ordonnance de donné acte auprès du juge de l'expropriation afin de préserver un éventuel droit à rétrocession, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision de ce chef ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X..., le condamne à payer à la commune de Chatuzange Le Goubet la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé à l'audience publique du vingt-quatre septembre deux mille huit par M. Cachelot conseiller le plus ancien faisant fonction de président, conformément à l'article 452 du code de procédure civile.