LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Bahram,
- LA FONDATION OSTAD ELAHI - ÉTHIQUE ET SOLIDARITÉ HUMAINE, parties civiles,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 6e section, en date du 22 mai 2007 qui, dans l'information suivie sur leur plainte contre Thierry Y..., Bertrand Z..., et Mohammad A... du chef de diffamation publique envers des particuliers, a prononcé sur leur demande d'annulation de pièces de la procédure ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 50 de la loi du 29 juillet 1881, préliminaire, 6, 8, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a annulé la plainte avec constitution de partie civile déposée par la Fondation Ostad Elahi – Ethique et solidarité humaine et Bahram X..., ainsi que le réquisitoire introductif visant celle-ci et l'ensemble des actes d'instruction, et a déclaré l'action publique éteinte par prescription ;
"aux motifs que les demandeurs estiment enfin que la plainte serait irrégulière en ce qu'elle ne précise pas les propos qui viseraient particulièrement la fondation ou Bahram X... à titre personnel ; qu'à cet égard, il résulte de la lecture de la troisième partie de la plainte que Bahram X... serait visé par les six passages diffamatoires, alors que la fondation ne le serait que par les premier, troisième, quatrième et sixième ; qu'en revanche, l'examen de la quatrième partie de cet acte révèle que tant la Fondation Ostad Elahi – éthique et solidarité humaine, que Bahram X..., à titre personnel, déposent plainte pour les six propos incriminés ; que cette contradiction, qui ne permet pas aux personnes poursuivies de connaître avec exactitude l'étendue des infractions dont la Fondation Ostad Elahi – Ethique et solidarité humaine, s'estime victime, enfreint les dispositions de l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881 et entraîne la nullité de l'ensemble de la plainte ; que le réquisitoire introductif, qui se borne à viser la plainte avec constitution de partie civile, et à reprendre les qualifications et textes de loi qu'elle contient, est aussi irrégulier au regard de l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881 et doit être annulé ; que l'annulation des actes initiaux de poursuite entraîne celle de tous les actes et pièces subséquents de la procédure ; qu'il convient d'évoquer en application de l'article 206 du code de procédure pénale ; qu'il résulte de l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 qu'en matière de délits de presse la prescription de l'action publique est de trois mois ; que les faits incriminés ont été commis le 6 novembre 2005 ; que la plainte déposée le 23 décembre 2005 étant annulée, de même que le réquisitoire introductif du 3 avril 2006 et tous les actes d'instruction et de poursuite subséquents, il convient de constater que la prescription de l'action publique est acquise ;
"alors que la Cour de cassation est mesure de s'assurer que la conclusion de la plainte avec constitution de partie civile, conclusion désignée par la chambre de l'instruction sous le vocable « la quatrième partie », commence par les termes « c'est pourquoi » renvoyant aux précisions figurant dans la troisième partie et se borne à rappeler les six passages diffamatoires distincts identifiés dans cette partie dont elle entend saisir le juge ; que, par conséquent, cette plainte ne comporte aucune contradiction entre ses différentes parties, désignant sans équivoque, pour chacun des passages incriminés, Bahram X... ou Bahram X... et la Fondation Ostad Elahi – Ethique et solidarité humaine, et qu'ainsi, contrairement à ce qu'a décidé la chambre de l'instruction, les personnes poursuivies étaient parfaitement en mesure de savoir que la Fondation Ostad Elahi – Ethique et solidarité humaine ne se plaignait que des premier, troisième, quatrième et sixième passages, en sorte que la chambre de l'instruction ne pouvait, sans dénaturer les termes clairs de la plainte et méconnaître ce faisant le sens et la portée des dispositions de l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881, prononcer l'annulation de celle-ci" ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 50 de la loi du 29 juillet 1881, préliminaire, 6, 8, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a annulé la plainte avec constitution de partie civile déposée par Bahram X..., le réquisitoire introductif visant celle-ci et l'ensemble des actes d'instruction et a déclaré l'action publiques éteinte par prescription ;
"aux motifs que les plaignants ont clairement entendu délimiter, parmi l'ensemble des nombreux propos cités dans la partie argumentative de la plainte, ceux faisant précisément l'objet des poursuites permettant ainsi aux personnes poursuivies de connaître très exactement les faits qui leur sont reprochés ; que les demandeurs estiment enfin que la plainte serait irrégulière en ce qu'elle ne précise pas les propos qui viseraient particulièrement la fondation ou Bahram X... à titre personnel ; qu'à cet égard, il résulte de la lecture de la troisième partie de la plainte que Bahram X... serait visé par les six passages diffamatoires, alors que la fondation ne le serait que par les premier, troisième, quatrième et sixième ; qu'en revanche, l'examen de la quatrième partie de cet acte révèle que tant la Fondation Ostad Elahi – Ethique et solidarité humaine, que Bahram X..., à titre personnel, déposent plainte pour les six propos incriminés ; que cette contradiction, qui ne permet pas aux personnes poursuivies de connaître avec exactitude l'étendue des infractions dont la Fondation Ostad Elahi – Ethique et solidarité humaine, s'estime victime, enfreint les dispositions de l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881 et entraîne la nullité de l'ensemble de la plainte ; que le réquisitoire introductif, qui se borne à viser la plainte avec constitution de partie civile et à reprendre les qualifications et textes de loi qu'elle contient, est aussi irrégulier au regard de l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881 et doit être annulé ; que l'annulation des actes initiaux de poursuite entraîne celle de tous les actes et pièces subséquents de la procédure ; qu'il convient d'évoquer en application de l'article 206 du code de procédure pénale ; qu'il résulte de l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 qu'en matière de délits de presse la prescription de l'action publique est de trois mois ; que les faits incriminés ont été commis le 6 novembre 2005 ; que la plainte déposée le 23 décembre 2005 étant annulée, de même que le réquisitoire introductif du 3 avril 2006 et tous les actes d'instruction et de poursuite subséquents, il convient de constater que la prescription de l'action publique est acquise ;
"alors que la chambre de l'instruction, qui constatait dans sa décision que les six passages faisant l'objet des poursuites étaient clairement délimités dans la plainte et exactement qualifiés et qui constatait implicitement mais nécessairement qu'il n'existait aucune contradiction dans la plainte relativement aux propos figurant dans les six passages diffamatoires visant Bahram X..., ne pouvait, sans excéder ses pouvoirs et méconnaître ce faisant les dispositions de l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881, annuler la plainte déposée par Bahram X..." ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 50 de la loi du 29 juillet 1881, préliminaire, 6, 8, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a annulé en son ensemble la plainte avec constitution de partie civile déposée par la Fondation Ostad Elahi – Ethique et solidarité humaine, ainsi que le réquisitoire introductif visant celle-ci et l'ensemble des actes d'instruction et a déclaré l'action publique éteinte par prescription ;
"aux motifs que les demandeurs estiment enfin que la plainte serait irrégulière en ce qu'elle ne précise pas les propos qui viseraient particulièrement la Fondation ou Bahram X... à titre personnel ; qu'à cet égard, il résulte de la lecture de la troisième partie de la plainte que Bahram X... serait visé par les six passages diffamatoires, alors que la fondation ne le serait que par les premier, troisième, quatrième et sixième ; qu'en revanche, l'examen de la quatrième partie de cet acte révèle que tant la Fondation Ostad Elahi – Ethique et solidarité humaine, que Bahram X..., à titre personnel, déposent plainte pour les six propos incriminés ; que cette contradiction, qui ne permet pas aux personnes poursuivies de connaître avec exactitude l'étendue des infractions dont la Fondation Ostad Elahi – Ethique et solidarité humaine s'estime victime, enfreint les dispositions de l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881 et entraîne la nullité de l'ensemble de la plainte ; que le réquisitoire introductif, qui se borne à viser la plainte avec constitution de partie civile et à reprendre les qualifications et textes de loi qu'elle contient, est aussi irrégulier au regard de l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881 et doit être annulé ; que l'annulation des actes initiaux de poursuite entraîne celle de tous les actes et pièces subséquents de la procédure ; qu'il convient d'évoquer en application de l'article 206 du code de procédure pénale ; qu'il résulte de l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 qu'en matière de délits de presse la prescription de l'action publique est de trois mois ; que les faits incriminés ont été commis le 6 novembre 2005 ; que la plainte déposée le 23 décembre 2005 étant annulée, de même que le réquisitoire introductif du 3 avril 2006 et tous les actes d'instruction et de poursuite subséquents, il convient de constater que la prescription de l'action publique est acquise ;
"alors que la chambre de l'instruction, qui constatait dans sa décision que la plainte avec constitution de partie civile de la Fondation Ostad Elahi – Ethique et solidarité humaine était régulière en ce qu'elle visait les premier, troisième, quatrième et sixième passages diffamatoires puisqu'en ce qui concerne ces passages, la plainte ne renfermait aucune contradiction, pouvait, sans excéder ses pouvoirs, l'annuler dans son ensemble" ;
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Attendu que satisfont aux exigences de ce texte la plainte avec constitution de partie civile et le réquisitoire introductif avec lequel elle se combine qui articulent, qualifient les faits incriminés et énoncent le texte de loi applicable à la poursuite ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que la Fondation Ostad Elahi-Ethique et solidarité humaine, d'une part, et Bahram X..., d'autre part, ont porté plainte et se sont constitués parties civiles le 23 décembre 2005, du chef de diffamation publique envers des particuliers, à la suite de la diffusion, le 6 novembre 2005, d'un reportage télévisé les mettant en cause ; que Bertrand Z..., Thierry Y... et Mohammad A..., mis en examen, ont déposé auprès de la chambre de l'instruction des requêtes tendant à voir constater la nullité de ladite plainte ;
Attendu que, pour faire droit auxdites requêtes et constater l'extinction de l'action publique par la prescription, l'arrêt énonce que la plainte ne satisfait pas aux exigences de l'article 50 de la loi du 29 juillet 1881, en ce qu'elle comporte une contradiction qui ne permet pas aux mis en examen de connaître avec exactitude l'étendue des passages diffamatoires dont la fondation s'estime victime ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que la Cour de cassation est en mesure de s'assurer que la plainte vise six passages diffamatoires, et indique que ceux-ci sont incriminés dans leur ensemble par Bahram X... seul, et, s'agissant des premier, troisième, quatrième et sixième passages, à la fois par Bahram X... et par la Fondation Ostad Elahi, sans que ces précisions ne soient remises en cause par le récapitulatif final des propos poursuivis, la chambre de l'instruction a méconnu le sens et la portée du texte susvisé et du principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ; que n'impliquant pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond, elle aura lieu sans renvoi, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 22 mai 2007 ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE le retour du dossier au juge d'instruction aux fins de poursuite de l'information ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Pelletier président, Mme Guirimand conseiller rapporteur, M. Joly, Mmes Anzani, Palisse, MM. Beauvais, Guérin, Straehli, Finidori conseillers de la chambre, Mme Degorce conseiller référendaire ;
Avocat général : M. Lucazeau ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;