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24/06/2008 | FRANCE | N°08-12325

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 24 juin 2008, 08-12325


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les ordonnances attaquées, que la Société nationale des chemins de fer français (la SNCF) a, par deux avis d'appel public à candidatures, lancé une consultation sous forme d'une procédure négociée avec mise en concurrence en vue de la conclusion d'un accord-cadre portant sur la fourniture de prestations de téléphonie mobile, de terminaux et de services associés, destiné à prendre la suite d'un précédent marché et dont le titulaire est la Société française de radiotéléphone (la so

ciété SFR) ; que le règlement externe de consultation précisait, d'une part,...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon les ordonnances attaquées, que la Société nationale des chemins de fer français (la SNCF) a, par deux avis d'appel public à candidatures, lancé une consultation sous forme d'une procédure négociée avec mise en concurrence en vue de la conclusion d'un accord-cadre portant sur la fourniture de prestations de téléphonie mobile, de terminaux et de services associés, destiné à prendre la suite d'un précédent marché et dont le titulaire est la Société française de radiotéléphone (la société SFR) ; que le règlement externe de consultation précisait, d'une part, que celle-ci portait sur deux lots, le premier relatif à la prestation de services de télécommunications mobiles type GSM et le second relatif à la fourniture de terminaux et services associés, d'autre part, que le contrat serait attribué à la combinaison mieux disante des offres du lot 1 et du lot 2 compatibles entre elles et que chaque soumissionnaire du lot 2 devait préciser avec quel(s) opérateur(s) du lot 1 son offre était compatible ; qu'après avoir déposé des offres pour l'attribution des deux lots de ce marché, la société SFR, invoquant des manquements aux obligations de publicité et, notamment, la méconnaissance des règles de l'allotissement, a mis en demeure la SNCF de respecter les prescriptions de l'ordonnance du 6 juin 2005 et du décret n° 2005-1308 du 20 octobre 2005 pris pour son application ; qu'à la suite de la réponse de la SNCF en date du 10 janvier 2008, la société SFR l'a assignée devant le président du tribunal de commerce en demandant la suspension de la procédure de passation de l'accord-cadre et qu'il lui soit enjoint de se conformer à ses obligations de publicité et de mise en concurrence ; que par ordonnance du 30 janvier 2008, le juge des référés a dit que la SNCF avait manqué à ses obligations de publicité, de mise en concurrence et de transparence, par défaut d'information des soumissionnaires de l'attribution d'une note globale déterminée selon une formule communiquée à la société SFR dans sa réponse du 10 janvier 2008, et lui a ordonné de procéder à l'information adéquate des candidats par un avis additionnel dans un délai fixé ; que par une ordonnance interprétative du 14 février 2008, le même juge a dit que l'ordonnance du 30 janvier devait être interprétée dans le sens que la SNCF doit permettre aux candidats soumissionnaires, et non aux candidats seulement sélectionnés, de procéder au dépôt d'une nouvelle offre en disposant du détail de la formule relative à la notation globale déterminée ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société SFR reproche à l'ordonnance d'avoir rejeté le grief tiré de l'irrégularité des modalités d'allotissement retenues par la SNCF, alors selon le moyen, que l'article 6 de l'ordonnance du 6 juin 2005 impose le respect du principe d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures ; que la prise en compte de la valeur globale estimée de la totalité de ces lots et la procédure unique de mise en concurrence que le décret du 20 octobre 2005 autorise la SNCF à mettre en oeuvre ne sauraient la dispenser de l'obligation d'apprécier les offres au regard des critères d'attribution lot par lot lorsque la prestation, objet de la consultation, est divisée en deux lots définis par les documents contractuels ; que cette appréciation lot par lot est seule de nature à permettre au soumissionnaire d'un lot de connaître les modalités selon lesquelles son offre sera jugée ; qu'en autorisant la SNCF à apprécier les offres relatives aux lots 1 et 2 identifiés dans le règlement de la consultation par la "combinaison mieux disante" des offres des lots 1 et 2 compatibles entre elles et en la dispensant ainsi d'apprécier lot par lot les propositions des entreprises soumissionnaires, le juge des référés a méconnu l'exigence de transparence des procédures et le principe d'égalité de traitement des entreprises soumissionnaires, ensemble violé les articles 6 et 14 de l'ordonnance du 6 juin 2005 et 11-II du décret du 20 octobre 2005 ;

Mais attendu qu'aucune disposition n'interdit à une entité adjudicatrice, non soumise au code des marchés publics, de procéder à une appréciation combinée des offres à différents lots d'une mise en concurrence ; qu'après avoir relevé que le règlement de consultation précisait que le contrat serait attribué à la combinaison mieux disante des offres du lot 1 et du lot 2 compatibles entre elles et que chaque soumissionnaire du lot 2 devait préciser avec quel(s) opérateur(s) du lot 1 son offre était compatible, ce dont il résultait que les soumissionnaires étaient avertis que l'entité adjudicatrice apprécierait les offres pour les deux lots en fonction de leur compatibilité et de leur "combinaison mieux disante", c'est à bon droit que le juge des référés a rejeté le grief tiré de l'irrégularité des modalités d'allotissement retenues par la SNCF ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article 35, 7° du décret n° 2005-1308 du 20 octobre 2005 ;

Attendu qu'aux termes de ce texte la lettre de consultation qui doit contenir la pondération des critères d'attribution, doit être adressée à tous les candidats sélectionnés ;

Attendu que dans son ordonnance interprétative, le juge des référés a dit que la SNCF devait communiquer aux seuls candidats soumissionnaires l'information concernant le détail de la formule relative à la notation globale déterminée selon la formule énoncée par la lettre du 10 janvier 2008 adressée par la SNCF à la société SFR ;

Attendu qu'en statuant ainsi, après avoir relevé, dans son ordonnance du 30 janvier 2008, que la formule de calcul de la note globale présentait les caractéristiques d'une formule de pondération et constituait une information déterminante, ce dont il résultait que l'égalité des candidats sélectionnés réclamait qu'ils aient tous connaissance de cette formule de calcul, le juge des référés a violé le texte susvisé ;

Et sur le second moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l'article 33 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 ;

Attendu que selon les termes de ce texte, toute personne ayant intérêt à conclure le contrat peut demander au juge de prendre, avant la conclusion du contrat, des mesures tendant à ce qu'il soit ordonné à la personne responsable du manquement de se conformer à ses obligations ;

Attendu que pour dire que la SNCF devait communiquer aux seuls candidats soumissionnaires l'information concernant le détail de la formule relative à la notation globale, l'ordonnance retient qu'une communication à tous les candidats sélectionnés équivaudrait implicitement à l'annulation de la procédure ;

Attendu qu'en statuant ainsi, en apportant à ce texte une limitation qu'il ne prévoit pas, le juge des référés l'a violé ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

REJETTE le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'ordonnance rendue le 30 janvier 2008 ;

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 14 février 2008, entre les parties, par le président du tribunal de commerce de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Ordonne à la SNCF, avant qu'elle se prononce sur la consultation qu'elle a engagée, de procéder à l'information adéquate des candidats sélectionnés par elle dans les conditions prévues par les dispositions du décret n° 2005-1308 du 20 octobre 2005, ce dans le délai de huit jours passé celui de quarante-huit heures à compter de la signification du présent arrêt, à la suite duquel sera réservé aux candidats le délai prévu à l'article 34 du décret du 20 octobre 2005 pour lui faire connaître leur réponse, pendant lesquels délais sera suspendue toute décision d'attribution du marché ;

Condamne la SNCF aux dépens exposés devant la Cour de cassation et devant le juge des référés statuant en interprétation ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 08-12325
Date de la décision : 24/06/2008
Sens de l'arrêt : Rejet et cassation sans renvoi
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

REFERE - Compétence - Applications diverses - Marché public par une entité adjudicatrice non soumise au code des marchés publics - Recours précontractuel

Viole l'article 33 de l'ordonnance n° 2005-469 du 6 juin 2005 aux termes duquel toute personne ayant intérêt à conclure le contrat peut demander au juge de prendre, avant la conclusion du contrat, des mesures tendant à ce qu'il soit ordonné à la personne responsable du manquement de se conformer à ses obligations, le juge des référés qui limite les injonctions qu'il peut prononcer à celles qui n'auraient pas pour conséquence une annulation implicite de la procédure


Références :

Sur le numéro 1 : articles 6 et 14 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005

article 11 II du décret n° 2005-1308 du 20 octobre 2005
Sur le numéro 2 : article 35 7° du décret n° 2005-1308 du 20 octobre 2005
Sur le numéro 3 : article 33 de l'ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Paris, 14 février 2008


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 24 jui. 2008, pourvoi n°08-12325, Bull. civ. 2008, IV, N° 130
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2008, IV, N° 130

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : M. Jobard
Rapporteur ?: Mme Michel-Amsellem
Avocat(s) : Me Odent, SCP Baraduc et Duhamel

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:08.12325
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