LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n°s G 06-45.870 à Q 06-45.876 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués, que plusieurs salariés de l'établissement de Lyon de la société de bourse Wargny, aux droits de laquelle vient la société Banque privée Fideuram Wargny, ont été licenciés pour motif économique le 13 février 2004, dans le cadre d'une procédure de licenciement collectif ; qu'ils ont saisi la juridiction prud'homale d'une contestation de leurs licenciements ;
Sur les première, deuxième et quatrième branches des pourvois G 06-45.870, J 06-45.871, M 06-45.873, N 06-45.874, P 06-45.875 et les première et troisième branches des pourvois n° K 06-45.872 et Q 06-45.876 qui sont rédigés dans les mêmes termes :
Attendu que les salariés font grief aux arrêts d'avoir décidé que leurs licenciements étaient fondés sur une cause réelle et sérieuse alors, selon le moyen, que :
1°/ pour justifier de la suppression du poste de travail, la cour d'appel a déclaré que les postes basés à Lyon et à Paris étaient matériellement différents ; qu'il était pourtant acquis aux débats que ces postes étaient identiques et ne faisaient en réalité qu'un ; qu'en se prononçant comme elle l'a fait, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ la suppression de poste supposant la disparition des tâches y afférentes ou leur répartition entre d'autres salariés, le remplacement du salarié licencié par un autre ou bien l'embauche concomitante d'une personne pour occuper les mêmes fonctions prive de cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé pour suppression de poste ; que les salariés faisaient valoir que concomitamment à leur licenciement, la société Fideuram Wargny avait procédé à plusieurs recrutements de vendeurs institutionnels à Paris, postes identiques aux leurs ; qu'en omettant de répondre à ce moyen déterminant des conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ les salariés faisaient valoir que la société Fideuram Wargny avait embauché concomitamment à leur licenciement un technico-commercial sans leur proposer ce poste à titre de reclassement ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de fait soumis à son examen, la cour d'appel a constaté que la réorganisation de l'entreprise s'était traduite par la cessation de l'activité d'intermédiation institutionnelle et d'analyse du bureau de Lyon et que les postes de travail des salariés étaient différents de ceux de l'établissement de Paris, ce dont il résultait que leurs emplois n'y avaient pas été transférés ; que, sans encourir les griefs du moyen, elle en a déduit que les postes occupés par les salariés avaient été effectivement supprimés ;
Et attendu que les arrêts constatent qu'après avoir recherché les emplois disponibles en France et correspondant à leur compétence, l'employeur avait fait à chacun des salariés une proposition de reclassement à Paris qui avait été refusée ; que la cour d'appel a ainsi répondu aux conclusions ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé en ces trois branches ;
Mais sur la troisième branche des pourvois n° G 06-45.870, J 06-45.871, M 06-45.873, N 06-45.874, P 06-45.875 et la deuxième s'agissant des pourvois n°s K 06-45.872 et Q 06-45.876 qui sont rédigés dans les mêmes termes :
Vu les articles L. 122-14-3 et L. 321-1, codifiés sous L. 1233-2 et L 1233-4 du code du travail ;
Attendu que pour décider que l'obligation de reclassement n'avait pas été méconnue par l'employeur et que les licenciements étaient fondés sur une cause économique, les arrêts retiennent que les salariés avaient refusé, pour des raisons personnelles ou familiales, des propositions de reclassement à Paris dans leur domaine de compétence et qu'il ne pouvait raisonnablement être reproché à la société de ne pas leur avoir offert d'autres postes disponibles à l'étranger dès lors que les intéressés avaient, par leur refus d'une mutation à Paris, clairement manifesté leur volonté de ne pas s'éloigner de la région lyonnaise ;
Attendu, cependant qu'avant tout licenciement pour motif économique, l'employeur est tenu, d'une part, de rechercher toutes les possibilités de reclassement existant dans le groupe dont il relève, parmi les entreprises dont l'activité, l'organisation ou le lieu d'exploitation permettent d'effectuer des permutations de personnels, et d'autre part, de proposer ensuite aux salariés dont le licenciement est envisagé tous les emplois disponibles de la même catégorie ou, à défaut, d'une catégorie inférieure; que l'employeur ne peut limiter ses offres en fonction de la volonté présumée des intéressés de les refuser ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes leurs dispositions, les arrêts rendus le 28 septembre 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne la société Fideuram Wargny aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Fideuram Wargny à verser aux salariés la somme globale de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille huit.