LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 décembre 2006) que M. X... est entré en février 1986, en qualité de conducteur mécanicien, au service de la société Traitement industriel des résidus urbains (TIRU), filiale d'EDF, dont les salariés bénéficiaient du statut national du personnel des industries électriques et gazières ; qu'à la suite d'un congé de longue maladie, le médecin du travail l'a déclaré apte à reprendre son emploi, le 22 février 1992, sous réserve d'une mutation "climatique" en Haute-Savoie, puis a estimé, le 30 avril 1997, que l'intéressé était apte à reprendre un emploi en région parisienne ; qu'à la suite du refus de M. X... de rejoindre un des quatre postes proposés en région parisienne et de la suspension du paiement du salaire par l'employeur, un premier litige a opposé les parties en 1997, qui a donné lieu le 12 juin 2001 à un arrêt de la cour d'appel de Paris ; que le médecin du travail ayant entre-temps estimé que le périmètre d'affectation du salarié pouvait être étendu à la Savoie, la société TIRU, qui n'avait pu trouver d'emploi de reclassement chez EDF en Haute-Savoie, lui a proposé de nouvelles affectations à Chambéry, auprès de la société Valespace, avec maintien des avantages statutaires et de la qualité de salarié de TIRU ; que, faisant état du refus de M. X... et de l'impossibilité de faire d'autres propositions, la société TIRU l'a licencié le 24 juillet 2002 ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement illicite ou abusif alors, selon le moyen :
1°/ que le chapitre II A 2° de la circulaire Pers 268, complétant le statut national des industries électriques et gazières approuvé par le décret n° 46-1541 du 22 juin 1946, (affectation et rémunération des agents statutaires inadaptés) précise «les modalités de recherche de poste dans le cas de mutations climatiques» ; que ces mutations climatiques nécessitent l'avis du médecin du travail local, celui du médecin chef et celui de la commission secondaire de l'unité d'origine ; que les recherches de poste se font en liaison avec le médecin chef du service médical du travail à l'intérieur des zones prescrites par le médecin du travail ; qu'en énonçant qu'il était loisible au médecin du travail de modifier la zone de reclassement climatique et que l'agent ne pouvait refuser une mutation dans la zone élargie par le seul médecin du travail, la cour d'appel a violé le chapitre II /A -2° de la circulaire Pers 268 du 1er juillet 1955 complétant le statut national agents des industries électriques et gazières approuvé par le décret n° 46-1541 du 22 juin 1946 ;
2°/ que la circulaire Pers 268 Chapitre II A 2° «mutations climatiques», dernier alinéa, prévoit que dans le cas où un agent refuserait d'être affecté à un poste d'une des zones pouvant convenir à son état de santé, son cas serait soumis à la commission supérieure nationale du personnel sous commission des agents inadaptés ; qu'en décidant que M. X... ne pouvait demander la saisine de cette commission sans s'expliquer préalablement sur son refus, la cour d'appel a ajouté au texte une condition qui n'y est pas prévue et a violé le chapitre II /A -2° de la circulaire Pers 268 du 1er juillet 1955 complétant le statut national des industries électriques et gazières approuvé par le décret n° 46-1541 du 22 juin 1946 ;
3°/ que l'article 3 du statut national des industries électriques et gazières approuvé par le décret du 22 juin 1946, institue les commissions du personnel pour s'occuper des questions intéressant le recrutement, l'avancement et autres problèmes statutaires du personnel ; que la circulaire Pers 268 complétant le statut prévoit la saisine de la commission supérieure nationale du personnel -sous-commission des agents inadaptés en cas de refus par un agent faisant l'objet d'une mutation climatique de son affectation ; qu'en décidant que la saisine de la commission supérieure nationale- sous-commission des agents inadaptés ne s'imposait pas à la société TIRU sous prétexte que le syndicat professionnel des entreprises locales avait décidé de la supprimer, alors que ce texte réglementaire s'impose aux employeurs la cour d'appel a violé par refus d'application l'article 3 du statut national des industries électriques et gazières et la circulaire Pers 268 chapitre II A -2°complétant ce statut ;
4°/ que le chapitre II § B de la Pers 268 prévoit que les agents inadaptés des industries électriques et gazières peuvent être réemployés à des postes après rééducation professionnelle ; que dans ses conclusions d'appel M. X... a fait valoir que son reclassement à Chambéry aux termes de la Pers 268 aurait dû se traduire pas une réadaptation professionnelle ; qu'en énonçant que M. X... ne pouvait refuser le poste qui lui était proposé au seul motif que la commission nationale du personnel -sous-commission des agents inadaptés n'avait pas été saisie, sans s'expliquer comme cela lui était demandé sur l'obligation de l'employeur de procéder préalablement à sa réadaptation professionnelle, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard du chapitre II /B de la circulaire Pers 268 du 1er juillet 1955 complétant le statut national des agents des industries électriques et gazières approuvé par décret du 22 juin 1946 ;
Mais attendu, d'abord, que les dispositions statutaires ne limitant pas les pouvoirs du médecin du travail, telles qu'elles résultent de l'article L. 241-10-1, devenu l'article L. 4624-1 du code du travail, la cour d'appel a exactement retenu que ce médecin était habilité à faire des propositions de mutation, pour raisons climatiques, et à les modifier en fonction de l'évolution de l'état de santé du salarié ;
Attendu, ensuite, qu'après avoir relevé à bon droit que la consultation de la sous-commission des agents inadaptés n'était imposée par la circulaire réglementaire Pers 268 qu'après que l'agent ait refusé une proposition d'affectation, la cour d'appel, qui a constaté que le refus d'affectation dans l'un des deux emplois au service de la société Valespace avait été exprimé par le salarié en mai 2002, après la suppression de la sous-commission, a ainsi fait ressortir que l'employeur se trouvait alors dans l'impossibilité de recueillir l'avis de cette instance, pour une cause qui ne lui était pas imputable ;
Attendu, enfin, d'une part, que la circulaire Pers 268 n'oblige pas l'employeur à mettre en place, avant de proposer des emplois répondant aux préconisations du médecin du travail, des mesures de réadaptation fonctionnelle ; d'autre part, qu'il résulte des constatations des juges du fond que dans ses propositions de mutation l'employeur avait pris l'engagement de satisfaire aux demandes de formation du salarié, destinées à favoriser son adaptation aux postes offerts ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il est encore fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la demande indemnitaire du salarié alors, selon le moyen :
1°/ que, dès lors que le statut du personnel des agents des industries électriques et gazières limite les possibilités de licenciement, le licenciement pour des motifs autres que ceux prévus statutairement n'est pas justifié ; que l'article 6 du statut et la circulaire Pers 846 limitent et réglementent les possibilités de licenciement ; qu'ils ne prévoient en aucun cas la possibilité de licenciement lorsque le salarié ayant fait l'objet d'une mutation climatique, refuse un poste de reclassement proposé par le médecin du travail , qu'en décidant que le refus du salarié d'accepter le poste de reclassement qui lui était proposé justifiait son licenciement sans rechercher, alors que cela lui était demandé, si les dispositions statutaires autorisaient le licenciement pour ce motif, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article 6 du statut du personnel des industries électriques et gazières, la circulaire Pers 846 complétant le statut et l'article L 122-14-3 du code du travail ;
2°/ que le fait pour un salarié de revendiquer le respect de ses droits institués par dispositions réglementaires statutaires ou par une convention collective ne peut en aucun cas constituer un abus ; que M. X... a refusé le poste qui lui était proposé en faisant valoir qu'il n'avait pas bénéficié d'une réadaptation professionnelle et que la commission du personnel habilitée à donner son avis n'avait pas été saisie et encore qu'il pouvait bénéficier d'une affectation en surnombre conformément aux dispositions du statut ; qu'en décidant que le fait pour M. X... d'avoir refusé un poste convenant à son état de santé et auquel le médecin du travail avait estimé qu'il était apte, constituait un abus, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 6 du statut, complétées par la circulaire Pers 846, les dispositions du chapitre II de la circulaire Pers 268 et l'article L. 122-14-3 du code du travail ;
3°/ que dans ses conclusions d'appel, M. Y... a rappelé que par arrêt rendu le 12 juin 2001, la cour d'appel de Paris avait relevé que la société TIRU n'avait pas respecté à l'égard de M. X... ses obligations relatives au reclassement prévues par les dispositions de la circulaire Pers 268 à la suite de sa mutation climatique (pas de suivi médical, pas de saisine de la sous-commission, pas de formation professionnelle, arrêt de paiement des salaires ) ; que cet arrêt a condamné la société à payer au salarié la somme de 50 000 francs au titre du préjudice qu'il a subi de ce fait ; qu'en énonçant que le salarié avait bénéficié d'une mutation climatique à laquelle il n'avait pu être satisfait pendant plus de 10 années sans que les raisons de cette situation puissent être imputées à la société TIRU si bien que son licenciement était justifié, la cour d'appel qui n'a pas pris en compte comme cela lui était demandé les termes de l'arrêt rendu le 12 juin 2001, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.122-14-3 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel n'était pas tenue d'effectuer la recherche visée dans la première branche du moyen, qui ne lui était pas demandée ;
Attendu, ensuite, d'une part, que l'affectation en surnombre dans les services d'EDF n'est prévue qu'en cas d'impossibilité de trouver un poste conforme à l'avis du médecin du travail, d'autre part, que la cour d'appel n'avait pas à se prononcer sur un différend survenu en 1997 entre M. X... et son employeur qui ne pouvait exercer d'influence sur l'appréciation des causes de la rupture intervenue en 2002 ;
Attendu, enfin, qu'abstraction faite du motif surabondant visé dans la deuxième branche du moyen, la cour d'appel, qui a constaté que la société TIRU ne disposait d'aucune implantation en Savoie et Haute-Savoie et qu'aucune autre possibilité de reclassement n'existait dans les services d'EDF, sur ces départements, a fait ressortir que le refus par le salarié des deux propositions de reclassement conformes à l'avis du médecin du travail rendait impossible son maintien dans l'entreprise et constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze juin deux mille huit.