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10/06/2008 | FRANCE | N°07-14202

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 10 juin 2008, 07-14202


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 18 janvier 2007), que la société Liunic (la société ) a ouvert dans les livres de la société Lyonnaise de banque (la banque) un compte courant, fonctionnant avec une autorisation de découvert, garantie à concurrence de 30 489,81 euros en principal, par le cautionnement de M. X..., son dirigeant ; que la banque a assigné en paiement du solde débiteur la société et M. X..., lesquels lui ont reproché divers manquements ;

Sur le premier moyen :

Att

endu que la société et M. X... font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande p...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 18 janvier 2007), que la société Liunic (la société ) a ouvert dans les livres de la société Lyonnaise de banque (la banque) un compte courant, fonctionnant avec une autorisation de découvert, garantie à concurrence de 30 489,81 euros en principal, par le cautionnement de M. X..., son dirigeant ; que la banque a assigné en paiement du solde débiteur la société et M. X..., lesquels lui ont reproché divers manquements ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société et M. X... font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande portant sur le taux effectif global (TEG) appliqué par la banque pendant la durée du compte courant – avec autorisation de découvert - de la société ouvert dans les livres de la banque, alors, selon le moyen :

1°/ que la prétendue modification mécanique, résultant de la suppression, ordonnée prioritairement par l'arrêt, des dates de valeur illicites sur l'ensemble des relevés de compte depuis le 24 avril 1998 jusqu'à la clôture, aura nécessairement pour effet de fausser rétroactivement pendant toute la durée de cette longue période la détermination effective du TEG appliqué sur plus de cinq ans, en gonflant artificiellement et illégalement son montant, ce qui peut être de nature à ne faire appliquer que le seul taux d'intérêt légal ; que l'arrêt a donc violé déjà les articles 1907 du code civil, L. 313-1, L. 313-2, R. 313-1, R. 313-2 et R. 313-3 du code de la consommation, ayant codifié les dispositions correspondantes issues du décret du 4 septembre 1985, pris en application de la loi du 28 décembre 1966 ;

2°/ que l'arrêt n'a pas tiré les conséquences légales de sa motivation première, formulée à partir de constatations ne visant que quelques exemples non limitatifs, selon laquelle les dates de valeur comptabilisées par la banque (autres que celles de deux jours pour les remises de chèques et pour les virements d'American express) n'avaient aucune contrepartie justifiée par la banque à son dossier et créaient un déséquilibre dans les obligations réciproques des parties, en sorte qu'elles étaient dépourvues de la cause prévue à l'article 1131 du code civil, sans que la banque puisse invoquer le fait que la société avait reçu les relevés pendant quinze ans sans manifester son désaccord ; d'où il résultait donc que ce vice affectant les dates de valeur avait une incidence décisive sur le TEG appliqué par la banque qui était inévitablement erroné ; que l'arrêt a donc violé également l'article 1131 du code civil en relation avec les articles précités du code de la consommation ;

3°/ que dans la mesure où dans un chef de son dispositif l'arrêt enjoignait à la banque de produire un nouveau décompte expurgé, depuis le 24 avril 1998 jusqu'à la clôture, de toute date de valeur négative pour les chèques émis par la société et pour les prélèvements et virements autres que ceux d'American express, comme devant être débités le jour même de leur émission ou de leur intervention, l'arrêt ne pouvait exclure a priori, à partir de deux exemples seulement, toute incidence de cette rectification sur le calcul du TEG appliqué par la banque pendant plus de cinq ans ; qu'il y a donc encore matière à défaut de base légale au regard des articles 1131 et 1907 du code civil, L. 313-1 et L. 313-2, R. 313-1 à R. 313-3 du code de la consommation ;

4°/ que l'arrêt a méconnu la règle d'ordre public que le TEG n'est licite qu'à la condition que soient indiqués clairement par la banque, d'une part un taux indicatif avec des exemples chiffrés soit dans la convention initiale, soit – à partir de la promulgation du décret du 4 septembre 1985 - dans tout autre document significatif porté à la connaissance du client avant l'application dans l'avenir du TEG à son égard, d'autre part sur tous les relevés de compte le taux annuel effectif et la somme correspondante ; qu'en effet, en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt que l'information de la société résulte d'un document très postérieur (juin 2003) non seulement aux relevés de compte visés (30 juin 1996 et 4 octobre 2001) mais encore à la dénonciation de la convention de compte courant faite par la banque en mars 2003 ; que l'arrêt a donc violé les articles 1907 du code civil et L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir relevé que la banque devait rectifier son décompte, en ne retenant aucune date de valeur négative pour les chèques émis, pour les prélèvements et les virements, autres que ceux émanant d'American express, et en appliquant une date de valeur de deux jours pour les remises de chèques et de factures carte bleue, l'arrêt retient que la société et M. X... ne justifient aucunement en quoi la banque aurait fait une application inexacte du TEG, hormis la modification mécanique de ce taux résultant de cette rectification ; qu'ayant ainsi fait ressortir que le TEG indiqué sur les relevés de compte correspondait au coût du crédit réellement supporté pendant la période considérée, la cour d'appel n'a pas encouru les griefs des trois premières branches ;

Attendu, en second lieu, qu'en cas d'ouverture de crédit en compte courant, l'obligation de payer dès l'origine des agios conventionnels par application du taux effectif global exige non seulement que soit porté sur un document écrit préalable à titre indicatif le taux effectif global mais aussi que le taux effectif global appliqué soit porté sur les relevés périodiques, reçus par l'emprunteur sans protestation ni réserve ;

Et attendu qu'à défaut de cette première exigence, les agios ne sont dus qu'à compter de l'information régulièrement reçue, valant seulement pour l'avenir, et qu'à défaut de la seconde exigence, la seule mention indicative de ce taux, ne vaut pas, s'agissant d'un compte courant, reconnaissance d'une stipulation d'intérêts conventionnels ; que l'arrêt relève qu'il résulte des documents produits que la banque a expressément mentionné sur les relevés de compte le taux effectif global retenu par elle ; qu'en l'état de cette constatation, dont il résulte que figurait pour la période considérée sur chacun des documents adressés à la société l'indication d'un taux effectif global répondant à cette double exigence, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu que la société et M. X... font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande portant sur le calcul des intérêts sur l'année civile, alors, selon le moyen, que c'est uniquement compte tenu d'un usage bancaire très ancien, encore largement pratiqué par les banques françaises, qu'ils faisaient valoir en droit que cette pratique coutumière était contraire aux dispositions impératives des articles L. 313-1, L. 313-2, R. 313-1 et R. 313-2 du code de la consommation prescrivant le calcul des intérêts sur 365 ou 366 jours et non sur 360 jours, ce qui imposait à la banque d'administrer la preuve qu'elle avait effectivement appliqué cette modalité légale de calcul des intérêts sans pouvoir se borner à une dénégation de la pratique lombarde ; d'où il suit que l'arrêt a inversé la charge de la preuve, violant ainsi l'article 1315 du code civil en relation avec les articles précités du code de la consommation ;

Mais attendu que l'arrêt retient que le dossier ne contient aucun élément de nature à corroborer l'affirmation de la société et de M. X..., selon laquelle la banque a calculé ses intérêts sur la base d'une année bancaire de 360 jours au lieu de 365 ou 366 jours ; qu'en l'état de ses constatations et appréciations, faisant ressortir que la société et M. X... s'étaient bornés à une pure allégation, cependant qu'il n'était pas contesté que la banque leur avait communiqué tous les éléments leur permettant d'administrer la preuve du bien-fondé de cette dernière, la cour d'appel n'a pas encouru le grief du moyen ; que celui-ci n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Liunic et M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à la société Lyonnaise de banque la somme globale de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix juin deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 07-14202
Date de la décision : 10/06/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Intérêts - Taux - Taux effectif global - Calcul - Mention dans les relevés de compte - Définition

PROTECTION DES CONSOMMATEURS - Intérêts - Taux - Taux effectif global - Calcul - Dates de la période considérée - Inexactitude - Preuve - Charge

Il résulte des articles 1907 du code civil et L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation que le taux effectif global indiqué dans les relevés de compte doit correspondre au coût du crédit réellement supporté pendant la période considérée. Doit, en conséquence, être approuvée une cour d'appel qui a retenu qu'il n'était pas justifié que la banque avait fait une application inexacte du taux effectif global (TEG) en l'état d'une rectification mécanique du TEG résultant d'une modification des dates de valeur qu'elle avait ordonnée


Références :

article 1907 du code civil

articles L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 18 janvier 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 10 jui. 2008, pourvoi n°07-14202, Bull. civ. 2008, IV, N° 119
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2008, IV, N° 119

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre
Avocat général : M. Jobard
Rapporteur ?: M. Gérard
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Choucroy, Gadiou et Chevallier

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.14202
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