LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article L. 143-2 du code rural ;
Attendu que les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural peuvent exercer un droit de préemption qui a pour objet l'installation, la réinstallation ou le maintien des agriculteurs ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Orléans, 15 janvier 2007) que la Société d'aménagement foncier et d'établissement rural du centre (SAFER), ayant été avisée par le notaire que les époux X... envisageaient de vendre deux parcelles à la société civile immobilière Lalonde (la société), a préempté le 23 décembre 2003 puis a rétrocédé ces parcelles le 2 juin 2004 aux époux Y..., preneurs en place qui ne remplissaient pas eux-mêmes les conditions requises pour bénéficier du droit de préemption, étant déjà propriétaires de parcelles représentant une superficie supérieure à trois fois la surface minimum d'installation ; que la société a alors assigné la SAFER en annulation des décisions de préemption et de rétrocession ;
Attendu que pour accueillir la demande, l'arrêt retient que l'objectif de maintien d'un agriculteur suppose que la vente envisagée soit de nature à remettre en cause la situation de l'exploitant en place, que les intéressés sont titulaires d'un bail sur les parcelles en cause, qu'il n'existe aucun risque réel de reprise des terres par l'un quelconque des associés de la société, aucun d'entre eux n'exerçant la profession d'agriculteur et ne remplissant les conditions requises pour pouvoir bénéficier d'une telle reprise, que les preneurs sont assurés de leur maintien en place et que l'objectif déclaré par la SAFER est donc purement fictif, étant observé que ce n'est pas l'accession à la propriété des exploitants agricoles qui, au terme de l'article L. 143-2 du code rural, doit être recherché mais seulement leur maintien sur l'exploitation ;
Qu'en statuant ainsi, alors que rien n'interdit à une SAFER d'exercer son droit de préemption pour permettre à un exploitant en place d'accéder à la propriété, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 janvier 2007, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans, autrement composée ;
Condamne, ensemble, la SCI Lalonde, les époux Y... et M. Z..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne, ensemble, la SCI Lalonde, les époux Y... et M. Z..., ès qualités, à payer à la SAFER du Centre la somme de 2 500 euros ; rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mai deux mille huit.