-D... Frédérik-Karel,
contre l'arrêt de la cour d'appel de VERSAILLES, 8e chambre, en date du 22 février 2007, qui, pour complicité de diffamation publique envers des particuliers, l'a condamné à 2 500 euros d'amende avec sursis, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 32, alinéa 1er, 23, alinéa 1er, 29, alinéa 1er, 42 de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que la cour d'appel a confirmé le jugement ayant déclaré le demandeur auteur des propos repris par le journaliste coupable du chef de complicité du délit de diffamation publique envers particuliers, en l'espèce la société Canal Plus, et de l'avoir condamné à une amende de 2 500 euros assortie du sursis et, statuant sur l'action civile, de l'avoir condamné solidairement avec d'autres à payer à la société Canal Plus la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts, outre celle de 500 euros par application de l'article 475-1 du code de procédure civile ainsi qu'à la publication judiciaire selon les termes rapportés au dispositif et d'avoir réformé le jugement en ce qu'il avait relaxé le demandeur du chef de complicité de diffamation publique envers Bertrand E..., d'avoir déclaré le demandeur coupable de diffamation publique envers Bertrand E... et de l'avoir condamné à payer diverses sommes par application de l'article 475-1 du code de procédure pénale, tant à la société Canal Plus qu'à Bertrand E... ;
" aux motifs qu'affirmer qu'un auxiliaire de justice, peu suspect de par cette qualité de se livrer au délit de dénonciation calomnieuse, a déposé plainte pour diverses infractions, c'est laisser entendre qu'il existe des charges sérieuses pour que ces infractions aient été commises, ce qui porte évidemment atteinte à l'honneur et à la considération des personnes visées par cette plainte ; qu'il s'agit bien d'une imputation susceptible de faire l'objet d'une preuve et donc d'une diffamation ; que si l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme protège le droit pour la presse de communiquer des informations sur toutes les questions d'intérêt général, y compris celles concernant le fonctionnement du pouvoir judiciaire, c'est à la condition qu'elle le fasse dans le respect de ses devoirs, notamment d'une vérification minimale des informations dont elle se fait l'écho ; que l'article 10 ne saurait ainsi protéger la désinformation que constitue la publication d'une nouvelle fausse, alors que cette fausseté pouvait aisément être vérifiée ; que, s'il apparaît que l'allégation de la commission de plusieurs délits vise la société Canal Plus, clairement soupçonnée de versement de commissions, elle ne concerne pas moins Bertrand E..., président du conseil d'administration de Canal Plus, et en tant que tel son organe décisionnel ; que, d'ailleurs, la définition même de l'abus de bien social, à savoir l'usage, contraire à l'intérêt social des biens sociaux, fait de mauvaise foi et dans un but personnel par un administrateur, permet d'affirmer que ce sont les dirigeants de Canal Plus, dont le plus éminent d'entre eux, qui sont désignés comme les auteurs d'actes qui pourraient être ainsi qualifiés ; qu'il importe peu qu'il ne soit pas désigné nommément dans l'article, puisqu'il est facilement identifiable pour tous ceux qui le connaissent ; que le journaliste Karim X... a affirmé n'avoir fait que reproduire exactement les propos que lui a tenus Frédérik-Karel D... ; que ceci a été confirmé par un attestataire, François Y... ; que les déclarations faites au Parisien par Didier Z..., le lendemain de la parution de l'article incriminé et non démenties sur ce point, viennent confirmer la teneur des déclarations faites dans cet article par Frédérik-Karel D..., puisque le président de l'APPAC fait état du dépôt de deux plaintes par cette association, « afin de comprendre pourquoi Canal Plus a dépensé 160 millions d'euros pour obtenir les droits télé de cinq clubs … puis la somme record de 1 800 millions d'euros sur trois ans » ; qu'il apparaît ainsi suffisamment établi que Frédérik-Karel D... a bien tenu les propos exacts qui lui sont prêtés ; qu'en s'adressant à un journaliste sportif du Parisien pour lui faire part de plusieurs plaintes à l'encontre de Canal Plus, qui est l'un des acteurs majeurs des retransmissions télévisuelles sportives, Frédérik-Karel D... ne pouvait ignorer que ses propos seraient repris dans cet organe de presse ; que la bonne foi de Frédérik-Karel D... ne saurait être retenue, alors qu'il a sciemment fait état du dépôt de plainte qu'il n'a jamais déposée ; qu'il s'est donc bien rendu coupable de complicité de diffamation publique, tant envers Canal Plus qu'envers son dirigeant, Bertrand E... ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré Frédérik-Karel D... coupable de complicité de diffamation envers Canal Plus mais infirmé sur sa relaxe du chef de complicité de diffamation envers Bertrand E..., Frédérik-Karel D... étant déclaré également coupable de ce délit ;
" alors que, d'une part, si l'auteur d'un propos repris par un journaliste peut en répondre en qualité de complice dans les termes du droit commun, c'est à la condition que soient relevés contre la personne poursuivie sous cette qualification des faits personnels, positifs et conscients de complicité ; qu'en retenant que le journaliste a affirmé n'avoir fait que reproduire exactement les propos que lui a tenus Frédérik-Karel D..., que ceci étaient confirmés par un attestataire François Y..., que les déclarations faites au Parisien par Didier Z... le lendemain de la parution de l'article incriminé et non démenties sur ce point viennent confirmer la teneur des déclarations faites dans cet article par Frédérik-Karel D..., puisque le président de l'APPAC fait état du dépôt de deux plaintes par cette association, pour en déduire qu'il apparaît établi que Frédérik-Karel D... a bien tenu les propos exacts qui lui sont prêtés, sans préciser comment l'attestataire, François Y..., pouvait confirmer la teneur d'un entretien téléphonique, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;
" alors que, d'autre part, si l'auteur d'un propos repris par un journaliste peut en répondre en qualité de complice dans les termes du droit commun, c'est à la condition que soient relevés contre la personne poursuivie sous cette qualification des faits personnels, positifs et conscients de complicité ; qu'ayant relevé que le journaliste a affirmé n'avoir fait que reproduire exactement les propos que lui a tenus Frédérik-Karel D..., que ceci a été confirmé par François A..., que les déclarations faites au Parisien par Didier Z..., le lendemain de la parution de l'article incriminé et non démenties sur ce point, viennent confirmer la teneur des déclarations faites dans l'article par Frédérik-Karel D..., qu'il apparaît établi que Frédérik-Karel D... a bien tenu les propos exacts qui lui sont prêtés, puis en décidant qu'en s'adressant à un journaliste sportif du Parisien pour lui faire part de plusieurs plaintes à l'encontre de Canal Plus qui est l'un des acteurs majeurs des retransmissions télévisuelles sportives, Frédérik-Karel D... ne pouvait ignorer que ses propos seraient repris dans cet organe de presse, la cour d'appel, qui se contente de relever que l'entretien a eu lieu avec un journaliste, pour affirmer que le demandeur ne pouvait ignorer que les propos seraient repris dans l'organe de presse, n'a pas caractérisé, par ce seul fait, les faits personnels, positifs et conscients de complicité et a violé les textes susvisés ;
" alors que, de troisième part, en affirmant que la bonne foi de Frédérik-Karel D... ne saurait être retenue alors qu'il a sciemment fait état du dépôt de plaintes qu'il n'a jamais déposées, sans relever en quoi le fait de s'adresser à un journaliste était de nature à établir la connaissance par le demandeur du fait que les propos seraient publiés, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés ;
" alors que, enfin, ayant relevé les propos imputés au demandeur ayant affirmé que l'association portait plainte pour abus de biens sociaux, faux et usage de faux et recel, l'enquête devant permettre de savoir si des versements occultes ou parallèles sous forme de commissions ont été réalisés, après l'achat des droits du football pour 600 millions d'euros par an par Canal Plus, puis retenu que s'il apparaît que l'allégation de la commission de plusieurs délits vise la société Canal Plus, clairement soupçonnée de versements de commissions, elle ne concerne pas moins Bertrand E..., président du conseil d'administration de Canal Plus, et en tant que tel son organe décisionnel, que d'ailleurs la définition même de l'abus de bien social, à savoir l'usage contraire à l'intérêt social des biens sociaux fait de mauvaise foi et dans un but personnel par un administrateur, permet d'affirmer que ce sont les dirigeants de Canal Plus, dont le plus éminent d'entre eux, qui sont désignés comme les auteurs des actes qui pourraient être ainsi qualifiés, qu'il importe peu qu'il ne soit pas désignés nommément dans l'article puisqu'il est facilement identifiable pour tous ceux qui le connaissent, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales s'évinçant de ses constatations en retenant que les propos visaient Bertrand E... et a violé les textes susvisés " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que la société Canal Plus et son président Bertrand E..., ont fait citer, devant le tribunal correctionnel, du chef de diffamation publique envers des particuliers, Philippe B..., directeur de publication du journal Le Parisien, Karim X..., journaliste, Frédérik-Karel D..., avocat de l'association des petits porteurs d'actifs (APPAC) et Didier Z..., représentant légal de l'APPAC, à la suite de la publication, dans ce journal, d'un article mettant en cause le prix d'achat, par la société Canal Plus, des droits de diffusion des matchs de football, et annonçant le dépôt, par l'association, d'une plainte pour abus de biens sociaux, faux et usage, recel ; que le tribunal correctionnel a relaxé Didier Z..., mais condamné les trois autres prévenus ; qu'appel a été interjeté par Frédérik-Karel D..., le ministère public et les parties civiles ;
Attendu que, pour déclarer Frédérik-Karel D... coupable, en qualité de complice, du délit de diffamation publique envers la société Canal Plus, d'une part, et Bertrand E..., d'autre part, l'arrêt énonce que le journaliste s'est borné à reproduire les propos que lui a tenus Frédérik-Karel D... ; qu'il ajoute que ce dernier, s'adressant à un journaliste sportif du Parisien, ne pouvait ignorer que ses propos seraient repris dans cet organe de presse et ne peut revendiquer le bénéfice de la bonne foi dès lors qu'il a sciemment fait état du dépôt de plaintes qu'il n'a jamais déposées ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Que, d'une part, il appartient aux juges du fond d'apprécier souverainement la valeur probante d'une attestation produite et contradictoirement débattue ;
Que, d'autre part, le fait de livrer des informations à un journaliste au cours d'un entretien donné en toute connaissance de cause constitue un fait personnel, positif et conscient de complicité au sens de l'article 60 du code pénal ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 32, alinéa 1er, 23, alinéa 1er, 29, alinéa 1er, 42 de la loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que la cour d'appel a confirmé le jugement ayant déclaré le demandeur auteur des propos repris par le journaliste coupable du chef de complicité du délit de diffamation publique envers particuliers, en l'espèce la société Canal Plus, et de l'avoir condamné à une amende de 2 500 euros assortie du sursis et, statuant sur l'action civile, de l'avoir condamné solidairement avec d'autres à payer à la société Canal Plus la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts, outre celle de 500 euros par application de l'article 475-1 du code de procédure civile ainsi qu'à la publication judiciaire selon les termes rapportés au dispositif et d'avoir réformé le jugement en ce qu'il avait relaxé le demandeur du chef de complicité de diffamation publique envers Bertrand E..., d'avoir déclaré le demandeur coupable de diffamation publique envers Bertrand E... et de l'avoir condamné à payer diverses sommes par application de l'article 475-1 du code de procédure pénale, tant à la société Canal Plus qu'à Bertrand E... ;
" aux motifs que, sur les intérêts civils, le tribunal a fait du préjudice de la société Canal Plus et de Bertrand E... une appréciation tenant parfaitement compte non seulement de la diffusion importante du Parisien mais encore de la reprise de l'information par d'autres médias ; que la réparation du préjudice subi étant parachevée par la publication d'un communiqué dans Le Parisien, ordonnée par une disposition devenue définitive, il n'y a pas lieu de condamner Frédérik-Karel D... aux frais d'une publication dudit communiqué dans Le Figaro et Le Monde, ni au paiement d'une somme complémentaire de celle à laquelle Philippe B... et Karim X... ont été condamnés, la cour devant se borner à dire Frédérik-Karel D... tenu solidairement des condamnations prononcées contre ceux-ci ; que l'équité conduit la cour à condamner en outre Frédérik-Karel D... à payer à la société Canal Plus, à titre de participation aux frais non compris dans les dépens qu'elle a dû engager devant la cour d'appel, la somme de 1 000 euros et pour ceux de première instance et d'appel engagés par Bertrand E... la somme de 2 000 euros ;
" alors qu'en décidant que sur les intérêts civils le tribunal a fait du préjudice de la société Canal Plus et de Bertrand E... une appréciation tenant parfaitement compte non seulement de la diffusion importante du Parisien mais encore de la reprise de l'information par d'autres médias, la cour se bornant à dire Frédérik-Karel D... tenu solidairement des condamnations prononcées contre Philippe B... et Karim X..., pour motiver sa condamnation à dommages-intérêts, cependant qu'il ne ressort d'aucun motif du jugement que le tribunal ait pris en considération la diffusion importante du Parisien et la reprise de l'information par d'autres médias, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Attendu qu'en évaluant, comme elle l'a fait, la réparation du délit de diffamation dont le prévenu a été déclaré coupable, la cour d'appel n'a fait qu'user de son pouvoir d'apprécier souverainement, dans la limite des conclusions des parties, l'indemnité propre à réparer le dommage né de l'infraction ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Cotte président, Mme Ménotti conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;