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12/03/2008 | FRANCE | N°06-44416

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 12 mars 2008, 06-44416


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 juin 2006), que M. X... engagé par EDF-GDF en qualité d'ouvrier d'entretien au classement GF 3 (groupe fonctionnel), le 2 juillet 1973, puis employé en qualité d'animateur promotion des ventes 2e degré au centre de Pantin, rattaché au groupe fonctionnel 10 dit GF 10, a été désigné représentant du personnel au sous comité mixte à la production du service commercial de Pantin en avril 1991, puis représentant du personnel au comité mixte à la production en avril 19

97, et est devenu membre du CHSCT de la direction commerciale en 2002 ; ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 13 juin 2006), que M. X... engagé par EDF-GDF en qualité d'ouvrier d'entretien au classement GF 3 (groupe fonctionnel), le 2 juillet 1973, puis employé en qualité d'animateur promotion des ventes 2e degré au centre de Pantin, rattaché au groupe fonctionnel 10 dit GF 10, a été désigné représentant du personnel au sous comité mixte à la production du service commercial de Pantin en avril 1991, puis représentant du personnel au comité mixte à la production en avril 1997, et est devenu membre du CHSCT de la direction commerciale en 2002 ; que par arrêt du 26 mars 2002, la cour d'appel de Paris a annulé la mutation d'office dont il avait fait l'objet le 8 octobre 1998, ordonné sa réintégration sous astreinte dans le poste précédemment occupé ou dans un poste équivalent et sursis à statuer sur la discrimination syndicale invoquée dans l'attente de l'enquête ordonnée par les premiers juges ; que par décision du 9 octobre 2003, la cour d'appel a ordonné la liquidation de l'astreinte et assorti la décision du 26 mars 2002 d'une nouvelle astreinte ; qu'ayant été reclassé dans le poste d'attaché commercial collectivités locales au GF 10, position E, M. X... a présenté devant la juridiction prud'homale des demandes tendant à l'attribution de la classification au GF 13, position D, NR 22 et au paiement de dommages-intérêts ;
Sur les deux premiers moyens réunis :
Attendu que le salarié reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de sa demande tendant à ce que la société EDF-GDF soit condamnée à lui attribuer la classification GF 13 dans un poste réévalué en position D, avec le NR 22 (niveau de rémunération), et à lui verser des sommes à titre de dommages-intérêts en réparation des préjudices matériel et moral, alors, selon les moyens ;
1°/ qu'en cas de litige relatif à une discrimination syndicale, le salarié doit présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination et, au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, lesquels ne peuvent résulter du seul exercice d'un pouvoir discrétionnaire ; qu'il appartient au juge de vérifier les conditions dans lesquelles la carrière du salarié s'est déroulée ; qu'il doit analyser l'ensemble des faits invoqués par le salarié et rechercher, notamment par une étude comparative avec les autres salariés de même ancienneté et de même niveau exerçant le même travail ou un travail équivalent, si celui-ci n'a pas subi dans l'évolution de sa carrière professionnelle une discrimination présentant un lien avec ses mandats et son activité syndicale ; qu'en se bornant à reprendre, de façon inopérante, l'étude comparative présentée par la société EDF-GDF, selon laquelle il n'existait pas de disparité de traitement entre M. X... et l'ensemble des agents du Centre de Pantin embauchés comme lui en 1973, quand le salarié soutenait, dans ses conclusions d'appel, qu'il avait fait l'objet d'une discrimination de carrière, non pas à partir de 1973, mais à partir de 1985, lorsqu'il était devenu un militant syndical actif, puis, de façon plus nette encore, à partir de 1991, lorsqu'il avait été désigné représentant du personnel au sous-comité mixte à la production du service commercial de Pantin, et qu'en outre, cette discrimination résultait du comparatif qu'il avait présenté entre son déroulement de carrière depuis 1985 et celui de dix autres agents de son service effectuant le même travail que lui et ayant une ancienneté équivalente, la cour d'appel, qui n'a aucunement vérifié les faits allégués par le salarié, a violé, par refus d'application, les dispositions de l'article L. 122-45, alinéa 4 du code du travail ;
2°/ qu'il avait soutenu, dans ses conclusions d'appel, en premier lieu, qu'à partir de 1985, sa carrière avait été bloquée en GF 10 tandis que ses collègues de travail du service commercial de l'unité de Pantin, à ancienneté et absence de mobilité comparables depuis leur embauche, ainsi qu'au regard de leur nomination dans les fonctions d'APV 2e degré (qu'occupait également l'exposant) ou dans des fonctions analogues, avaient été, en dernier lieu, classés entre GF 12 et GF 16, avec un NR allant de NR 20 à NR 25, tandis que lui ne bénéficiait que d'un NR 14, en deuxième lieu, que son salaire n'avait plus connu aucune augmentation à partir de 1991, hormis un avancement accordé le 1er janvier 1994 et ce, par l'effet d'une décision, non pas d'EDF-GDF qui s'y était opposée, mais de la commission supérieure nationale du personnel en 1996, en troisième lieu, qu'il n'avait, depuis 1985, bénéficié d'aucun avancement au choix contrairement à ses collègues de travail et ce, sans aucune justification, contrairement aux prévisions de la convention salariale du 31 mai 1982 (PERS 965), en quatrième lieu, que l'ensemble de ses candidatures à des postes publiés comme vacants avait été refusé, et en cinquième lieu, qu'il avait été privé de nombreux stages de formation qui correspondaient pourtant à ses compétences ; qu'en ne répondant aucunement à ces conclusions qui faisaient ressortir l'existence d'une discrimination de carrière concomitante avec le début de l'exercice d'une activité syndicale par l'exposant, puis la prise de responsabilités représentatives, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs, en méconnaissance de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que l'employeur doit justifier la mesure invoquée à titre de discrimination par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, lesquels ne peuvent résulter du seul exercice d'un pouvoir discrétionnaire ; que M. X... avait soutenu, dans ses conclusions d'appel, qu'il n'avait jamais bénéficié ni d'entretien d'évaluation ni d'appréciation de son professionnalisme, alors qu'au sein d'EDF-GDF, les promotions s'effectuaient selon le critère du professionnalisme de l'agent au vu des entretiens annuels d'évaluation ; que la société EDF-GDF avait rappelé, dans ses conclusions d'appel, que les critères relatifs à l'avancement et à la promotion au sein de l'entreprise étaient ceux du professionnalisme, à savoir les compétences et les qualités de travail du salarié ; que ces règles résultaient dans leur intégralité des documents EDF-GDF relatifs à l'appréciation du professionnalisme et au Référentiel RH d'entreprise ; qu'en s'abstenant de rechercher si EDF-GDF avait justifié le blocage de la carrière à partir de 1985 de M. X... par les critères précités du professionnalisme, à titre d'éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et en relevant, de façon inopérante, que, selon les affirmations de la hiérarchie, les performances professionnelles de M. X... étaient insuffisantes, qu'en outre, il avait été sanctionné pour des faits d'insubordination, que, par ailleurs, il n'avait manifesté aucune mobilité, qu'il avait une ancienneté inférieure aux autres salariés classés en GF 12, qu'il n'avait pas de diplôme et que la promotion à la catégorie cadre qui était exceptionnelle était décidée par EDF-GDF, la cour d'appel, qui n'a caractérisé l'existence d'aucun critère objectif étranger à toute discrimination, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des dispositions de l'article L. 122-45, alinéa 4 du code du travail ;
4°/ que l'employeur doit justifier la mesure invoquée à titre de discrimination par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, lesquels ne peuvent résulter du seul exercice d'un pouvoir discrétionnaire ; que M. X... avait soutenu, dans ses conclusions d'appel, qu'il n'avait jamais bénéficié des entretiens d'évaluation dont bénéficiaient les salariés de l'entreprise aux fins d'apprécier leur professionnalisme ; qu'en se bornant à relever que les performances professionnelles du salarié ne justifiaient pas une promotion en catégorie cadre selon les affirmations de la hiérarchie, sans rechercher si M. X... avait bénéficié des entretiens annuels d'évaluation en tant que garantie de mise en oeuvre objective des critères du professionnalisme, la cour d'appel a, de nouveau, privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 122-45, alinéa 4 du code du travail ;
5°/ qu'il incombe à chaque partie de prouver, conformément à la loi, les faits nécessaires au succès de sa prétention ; qu'en application de l'article 15, alinéa 3 de la loi du 6 août 2002, une partie ne peut invoquer devant un juge une sanction disciplinaire amnistiée ; qu'en se fondant sur la sanction de mise à pied du 8 juillet 1998 pour justifier le blocage de carrière de M. X... en GF 10 quand, par arrêt du 26 janvier 2005, la Cour de cassation avait déclaré amnistiés les faits objet de la sanction précitée par l'effet de la loi d'amnistie du 6 août 2002, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les dispositions de l'article 15, alinéa 3 de la loi du 6 août 2002 et de l'article 9 du code de procédure civile ;
6°/ que lorsque c'est le juge lui-même qui relève la réalité d'une disparité de traitement, il lui appartient de rechercher si l'employeur justifiait celle-ci par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination syndicale ; que la cour d'appel a relevé, en premier lieu, que, par arrêt du 26 mars 2002, elle avait considéré, de façon définitive, que la mutation du 8 octobre 1998 était illicite et qu'elle avait ordonné la réintégration de M. X... dans son poste antérieur ou dans un poste équivalent, en deuxième lieu, qu'EDF-GDF n'ayant pas procédé à la réintégration, elle avait, par arrêt du 9 octobre 2003, précisé que le salarié devait être reclassé dans un poste GF 10, position E, liquidé l'astreinte et fixé une nouvelle astreinte et, en troisième lieu, que la réintégration en GF 10 position E s'était alors effectuée seulement à ce moment-là ; qu'en ne recherchant pas, comme l'y invitaient les conclusions d'appel de M. X..., si cette mutation d'office ne constituait pas une discrimination qui n'était justifiée par aucun élément objectif étranger à toute discrimination dès lors qu'en premier lieu, constituant une rétrogradation à un poste classé en GF 8, soit dans une plage GF 7/8/9, elle ne permettait plus l'accès du salarié au niveau hiérarchique cadre (GF 12), en deuxième lieu, cette mutation l'empêchait d'exercer son mandat de représentant au Comité mixte à la production de Pantin et, en troisième lieu, elle avait perduré au mépris de la chose jugée et des dispositions de la PERS 212 relative à la réintégration d'office, laquelle impose une telle réintégration en cas de postes disponibles, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-45, alinéa 1 et 4 et L. 412-2 du code du travail ;
7°/ que M. X... avait, en outre, soutenu, dans ses conclusions d'appel, qu'après la signification du deuxième arrêt précité de la cour d'appel, alors qu'il tenait un mandat de membre du CHSCT, il avait été, à nouveau, muté d'office le 22 avril 2004 contre son gré dans une autre Direction, pour un emploi de nouveau inférieur à celui qui était le sien avant le 8 octobre 1998 et le privant à ce titre de toute possibilité d'accès au niveau hiérarchique cadre, dès lors que cet emploi correspondait à celui de «développeur de réseau» de position G (GF 7, 8, 9), avant que cette Direction, contrainte par l'Inspecteur du travail, ne revienne sur sa décision ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs, en méconnaissance de l'article 455 du code de procédure civile ;
8°/ que lorsque c'est le juge lui-même qui relève la réalité d'une disparité de traitement, il lui appartient de rechercher si l'employeur justifiait celle-ci par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination syndicale ; qu'en se bornant à relever que l'arrêt du 9 octobre 2003 avait été exécuté dès lors que M. X... avait été réintégré sur un poste d'attaché commercial collectivité locale au pôle régional DR GN Ile-de-France, sans rechercher, comme l'y invitaient les conclusions d'appel du salarié, si la société EDF-GDF n'avait pas rendu impossible la réintégration effective du salarié au poste de travail précité en émaillant celle-ci de nombreux incidents, de sorte que son déroulement de carrière avait, de nouveau, été bloqué, la cour d'appel a, là encore, privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-45, alinéa 1 et 4 et L. 412-2 du code du travail ;
9°/ que M. X... avait soutenu, dans ses conclusions d'appel, qu'il avait été progressivement victime d'une privation complète de travail dès le 24 janvier 1996, lorsque la société EDF-GDF, lui interdisant toute démarche de prospection avec les collectivités locales, l'avait d'abord affecté de façon fictive à de prétendues activités de prestataire pour lesquelles il n'avait jamais été sollicité, puis l'avait privé de tout travail lorsqu'en mars 1997, son poste d'APV 2e degré avait été annoncé «non pérenne» en raison d'une prétendue saturation du marché, tandis qu'un autre salarié avait été nommé sur un poste de même nature avec la même qualification, et enfin, avait invoqué, de façon fallacieuse, le transfert de ses activités vers des directions autres que celles de Pantin, ce qui avait eu pour conséquence que l'exposant s'était retrouvé seul, sans aucun travail à effectuer, à partir du 30 juin 1998 ; qu'en ne répondant pas davantage à ces conclusions, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de motifs en méconnaissance de l'article 455 du code de procédure civile ;
10°/ que M. X... avait soutenu, dans ses conclusions d'appel, qu'alors qu'une évolution de la grille des classifications intervenue au 1er janvier 2004 avait eu pour effet de rattacher le poste d'attaché commercial des collectivités locales qu'il occupait, non plus en position E mais en position D, laquelle, regroupant les groupes fonctionnels 11, 12, 13, et donnant à ce titre accès au niveau hiérarchique de cadre, le salarié, à la différence de ses collègues se trouvant au même niveau de classement, était demeuré rattaché à la position E qui, dans la nouvelle grille, rendait à nouveau impossible tout accès au niveau hiérarchique des cadres ; qu'en ne répondant pas à ces conclusions d'appel, la cour d'appel a, derechef, entaché sa décision d'un défaut de motifs en méconnaissance de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'abstraction faite du motif surabondant critiqué par la cinquième branche, la cour d'appel, vérifiant, en présence de la discrimination syndicale invoquée, les conditions dans lesquelles la carrière de l'intéressé s'était déroulée, a, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis et sans avoir à entrer dans le détail de l'argumentation des parties, relevé que les différences constatées reposaient sur des raisons objectives étrangères à son activité syndicale ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le troisième moyen :
Attendu que le salarié reproche encore à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande tendant à la liquidation intégrale de l'astreinte fixée par arrêt du 9 octobre 2003 et à la condamnation de la société EDF-GDF au paiement d'une somme, alors, selon le moyen, qu'en se bornant à relever que l'arrêt du 9 octobre 2003 avait été exécuté dès lors que le salarié avait été nommé sur un poste d'attaché commercial collectivité locale au pôle régional DR GN Ile-de-France, sans rechercher, comme l'y invitaient les conclusions d'appel du salarié, si la société EDF-GDF n'avait pas rendu impossible sa réintégration effective au poste de travail précité en émaillant celle-ci de nombreux incidents, de sorte que l'arrêt du 9 octobre 2003 n'avait pas été correctement exécuté, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 120-4 du code du travail et 1134, alinéa 3, du code civil, ensemble l'article 35 de la loi du 9 juillet 1991 ;
Mais attendu que le moyen ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine par la cour d'appel des éléments qui lui étaient soumis ;
Que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du douze mars deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06-44416
Date de la décision : 12/03/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 13 juin 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 12 mar. 2008, pourvoi n°06-44416


Composition du Tribunal
Président : M. Bailly (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Defrenois et Levis, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:06.44416
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