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13/02/2008 | FRANCE | N°06-21202

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 13 février 2008, 06-21202


LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 19 septembre 2006), que la société civile immobilière Les Trois Figuiers (la SCI), propriétaire d'une parcelle "C" 435 se trouvant comprise, en partie, dans le périmètre d'une opération déclarée d'utilité publique concernant la réalisation d'une ligne ferroviaire à grande vitesse entre Perpignan et Figueras, confiée, en concession, à la société de droit espagnol TP Ferro Concesionaria (la société TP), a, le 18 novembre 2002, mis en demeure l'Etat fran

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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 19 septembre 2006), que la société civile immobilière Les Trois Figuiers (la SCI), propriétaire d'une parcelle "C" 435 se trouvant comprise, en partie, dans le périmètre d'une opération déclarée d'utilité publique concernant la réalisation d'une ligne ferroviaire à grande vitesse entre Perpignan et Figueras, confiée, en concession, à la société de droit espagnol TP Ferro Concesionaria (la société TP), a, le 18 novembre 2002, mis en demeure l'Etat français, de procéder à l'acquisition de la totalité de cette parcelle conformément aux articles L. 11-7 et L. 13-10 du code de l'expropriation ; qu'aucun accord amiable n'étant intervenu sur l'assiette de l'acquisition et sur le prix, la SCI a saisi le juge de l'expropriation du département des Pyrénées-Orientales en vue d'obtenir le délaissement de la totalité de la parcelle et la fixation du prix ; que la société TP agissant pour le compte de l'Etat a, en première instance, déclaré renoncer à l'expropriation de la parcelle ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de dire que la renonciation de l'Etat à exproprier la parcelle "C 435" privait d'objet sa demande de délaissement, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en affirmant que la recevabilité de l'appel n'était pas discutée, que rien ne conduisait à le faire d'office, que l'appel principal de l'État français représenté par la SA TP Ferro Concesionaria était recevable sans préciser d'où il ressortait que l'État pouvait être représenté par une société de droit étranger, serait-elle titulaire d'une concession de service public, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle et a violé les articles 112 et suivants du nouveau code de procédure civile ;
2°/ que l'État ne peut être représenté en justice par une société de droit privé étranger ; qu'en relevant que la recevabilité de l'appel n'était pas discutée, que rien ne conduisait à le faire d'office, que l'appel principal de l'État français représenté par la SA TP Ferro Concesionaria était recevable, la cour d'appel, qui était tenue de vérifier d'office la recevabilité de l'appel interjeté par une société de droit étranger au nom de l'État français, a violé les articles 117 et suivants du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu que la société TP, concessionnaire de l'Etat en vertu d'un contrat lui donnant tous les droits conférés au concédant en matière d'expropriation, ayant agi en première instance en qualité de représentant de l'Etat Français, la cour d'appel qui a relevé que la recevabilité de l'appel, formé par la société TP en cette qualité, n'était pas discutée, a retenu à bon droit que ce recours était recevable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt d'avoir dit que la renonciation de l'Etat à exproprier la parcelle n° 435 lui appartenant privait d'objet sa demande de délaissement, alors, selon le moyen :
1°/ que demandant confirmation du jugement, la SCI faisait valoir que l'argument selon lequel la requête serait devenue sans objet du fait de l'abandon du projet d'expropriation est inopérant dès lors que l'objectif du droit de délaissement de l'article L. 11-7 est de rendre impossible ce genre de volte-face lorsque le propriétaire a adressé régulièrement sa mise en demeure après déclaration d'utilité publique, la renonciation de l'État ne produisant aucun effet sur la demande de délaissement ; qu'en retenant que la renonciation de l'expropriant tout comme l'annulation de la DUP est de nature à faire échec au droit mis en oeuvre par l'exproprié sur le fondement de l'article L. 11-7 dès lors que la renonciation est antérieure à la fixation du prix et au transfert de propriété prononcé par une décision passée en force de chose jugée, que ni l'arrêté de cessibilité ni l'ordonnance d'expropriation n'ont été rendus, pour en déduire que la renonciation de l'expropriant prive le droit de délaissement mis en oeuvre par l'exproprié de son objet dans la mesure où le bien n'est plus soumis aux contraintes qui pesaient sur lui du fait de la déclaration d'utilité publique, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs inopérants et a violé l'article L. 11-7 du code de l'expropriation ;
2°/ qu'en affirmant que la renonciation de l'expropriant tout comme l'annulation de la déclaration d'utilité publique est de nature à faire échec au droit de délaissement mis en oeuvre sur le fondement de l'article L. 11-7 du code de l'expropriation dès lors que la renonciation est antérieure à la fixation du prix ou au transfert de propriété prononcé par une décision passée en force de chose jugée, que ni l'arrêté de cessibilité ni l'ordonnance d'expropriation n'ont été rendus sans rechercher si, eu égard aux termes de la déclaration d'utilité publique, toujours en vigueur, l'État n'était pas en mesure de revenir sur cette renonciation, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 11-7 du code de l'expropriation ;
3°/ que la SCI faisait valoir que si l'État indique qu'il n'est plus intéressé par l'expropriation, aucun acte juridique n'indique que la parcelle C 435 n'est plus concernée par la procédure d'expropriation issue de la DUP, aucun arrêté de cessibilité dont le but est de préciser les parcelles exactement expropriées et qui excluraient la parcelle C 435 n'étant produit pas plus qu'une ordonnance d'expropriation déterminant les parcelles expropriées et leur superficie, la renonciation résultant des seules affirmations faites étant indifférente ; qu'en jugeant que la déclaration d'utilité publique n'est pas un acte créateur de droit et que l'expropriant peut renoncer à l'expropriation à tout moment, que la renonciation de l'expropriant tout comme l'annulation de la DUP est de nature à faire échec au droit mis en oeuvre par l'exproprié sur le fondement de l'article L. 11-7 invoqué en l'espèce dès lors que la renonciation est antérieure à la fixation du prix et au transfert de propriété prononcé par une décision passée en force de chose jugée, qu'en l'espèce ni l'arrêté de cessibilité ni l'ordonnance d'expropriation n'ont été rendus pour en déduire que la renonciation de l'expropriant prive le droit de délaissement mis en oeuvre par l'exproprié de son objet dans la mesure où le bien n'est plus soumis aux contraintes qui pesaient sur lui du fait de la DUP, la cour d'appel qui a ainsi constaté que la déclaration d'utilité publique n'avait pas été remise en cause ni modifiée, qu'aucun arrêté de cessibilité n'avait été pris ni de jugement d'expropriation rendu, n'a pas tiré les conséquences légales résultant de ses propres constatations, dont il résultait l'absence de tout acte juridique matérialisant cette renonciation et excluant définitivement la parcelle litigieuse n'était produit et a violé l'article L. 11-7 du code de l'expropriation ;
4°/ que la SCI faisait valoir qu'à supposer même que l'expropriant puisse dans de telles conditions renoncer au projet d'expropriation, une telle renonciation ne pourrait avoir un quelconque effet que si elle est manifestée dans le délai de deux ans ouvert à l'expropriant pour acquérir le terrain à la suite de la mise en demeure formulée par le propriétaire du terrain, qu'à l'expiration de ce délai l'État ne peut plus renoncer à l'achat, qu'en affirmant que la renonciation de l'expropriant tout comme l'annulation de la DUP est de nature à faire échec au droit mis en oeuvre par l'exproprié sur le fondement de l'article L. 11-7 invoqué en l'espèce dès lors que la renonciation est antérieure à la fixation du prix et au transfert de propriété prononcé par une décision passée en force de chose jugée cependant qu'une telle renonciation devait intervenir dans le délai légal de deux ans, la cour d'appel a violé l'article L. 11-7 du code de l'expropriation ;
Mais attendu qu'ayant relevé que l'expropriant avait renoncé à l'expropriation par conclusions du 18 juillet 2005, ce dont le premier juge lui avait donné acte et que ni l'arrêté de cessibilité ni l'ordonnance d'expropriation n'avaient alors été rendus, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise, et qui a justement retenu que la mise en demeure d'acquérir un bien inclus dans le périmètre d'une opération déclarée d'utilité publique n'était pas un acte créateur de droit et que l'expropriant pouvait renoncer à l'expropriation antérieurement à la fixation du prix et au transfert de propriété, en a déduit, à bon droit, que la parcelle n'étant plus soumise, à la date où le premier juge a statué, aux contraintes résultant de la déclaration d'utilité publique, la demande de délaissement était privée d'objet ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SCI Les 3 Figuiers aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SCI Les 3 Figuiers à payer la somme de 2 000 euros à la société TP Ferro Concesionaria ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCI Les 3 Figuiers ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize février deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 06-21202
Date de la décision : 13/02/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

EXPROPRIATION POUR CAUSE D'UTILITE PUBLIQUE - Indemnité - Fixation - Procédure - Droit de délaissement - Exercice - Conditions - Détermination

La mise en demeure d'acquérir une parcelle incluse dans le périmètre d'une opération déclarée d'utilité publique prévue par l'article L. 11-7 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique n'étant pas un acte créateur de droit, la cour d'appel qui relève qu'un expropriant a renoncé à l'expropriation antérieurement à l'arrêté de cessibilité et à l'ordonnance d'expropriation, en déduit à bon droit que cette parcelle n'étant plus soumise, à la date où le premier juge à statué, aux contraintes résultant de la déclaration d'utilité publique, la demande de délaissement est privée d'objet


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 19 septembre 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 13 fév. 2008, pourvoi n°06-21202, Bull. civ. 2008, III, N° 26
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2008, III, N° 26

Composition du Tribunal
Président : M. Weber
Avocat général : M. Bruntz
Rapporteur ?: M. Mas
Avocat(s) : SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Delaporte, Briard et Trichet

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:06.21202
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