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12/02/2008 | FRANCE | N°07-87950

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 12 février 2008, 07-87950


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur les pourvois formés par :

-X... Pierre,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de RENNES, en date du 13 novembre 2007, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de complicité d'assassinat, arrestation, enlèvement, séquestration ou détention arbitraire, en bande organisée, a infirmé l'ordonnance de mise en liberté sous contrôle judiciaire rendue par le juge des libertés et de la détention et ordonné la prolongation de sa détention provisoire après s

'en être réservé le contentieux ; Joignant les pourvois en raison de la conn...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur les pourvois formés par :

-X... Pierre,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de RENNES, en date du 13 novembre 2007, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de complicité d'assassinat, arrestation, enlèvement, séquestration ou détention arbitraire, en bande organisée, a infirmé l'ordonnance de mise en liberté sous contrôle judiciaire rendue par le juge des libertés et de la détention et ordonné la prolongation de sa détention provisoire après s'en être réservé le contentieux ; Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Sur la recevabilité du pourvoi formé le 15 novembre 2007 :
Attendu que le demandeur, ayant épuisé, par l'exercice qu'en avait fait son avocat le 14 novembre 2007, le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, était irrecevable à se pourvoir à nouveau contre la même décision ; que seul est recevable le pourvoi formé le 14 novembre 2007 ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5 § 1,6 de la Convention européenne des droits de l'homme,114, alinéa 2,145-2,207,591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a infirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ordonnant la mise en liberté du mis en examen et, se réservant la connaissance du contentieux de la détention provisoire, a prolongé la détention provisoire du mis en examen pour une durée de six mois à compter du 13 novembre 2007 à 0 heure ;
" aux motifs que « dans son mémoire Pierre X... fait valoir que le débat devant le juge des libertés et de la détention n'étant pas intervenu, la chambre de l'instruction « ne dispose pas du pouvoir d'évoquer et ne peut en conséquence organiser devant elle le débat contradictoire » ; qu'il résulte des pièces de la procédure que Pierre X... a été placé en détention provisoire le 13 mai 2006 ; que cette détention a été prolongée une première fois par le juge des libertés et de la détention le 3 mai 2007 pour une durée de six mois à compter du 13 mai 2007 à 0 heure ; que cette détention venant à expiration le 13 novembre 2007 à 0 heure, le 6 novembre 2007, le juge d'instruction a saisi le juge des libertés et de la détention afin qu'il soit statué sur la nécessité d'une nouvelle prolongation de la détention provisoire de Pierre X... ; que la date du 8 novembre 2007 à 11 heures a été retenue par le juge des libertés et de la détention pour l'organisation du débat contradictoire ; que, le 31 octobre 2007, le greffe du magistrat a avisé par télécopie le procureur de la République et Me Stéphan, l'avocat de Pierre X..., lequel a été également extrait, que, par suite d'une erreur de numérotation, l'avis destiné au conseil de Pierre X... a été faxé au... et non pas au..., le numéro de fax de Me Stéphan, l'avocat de Pierre X... ; que, le 8 novembre 2007, à 11 heures, le juge des libertés et de la détention, après avoir constaté que l'avocat de Pierre X..., absent, n'avait pas été avisé de la date du débat, procédait néanmoins à celui-ci ; que le ministère public était entendu en ses réquisitions et Pierre X... en ses explications ; qu'à l'issue de ce débat, le juge des libertés et de la détention informait Pierre X... « qu'il ne prolongeait pas sa détention provisoire et que par ordonnance de ce jour, il le plaçait sous contrôle judiciaire » ; que, par ordonnance du même jour, sans attendre le 13 novembre 2007 à 0 heure, terme normal de la détention, il ordonnait la mise en liberté sous contrôle judiciaire immédiate de Pierre X... ; que cette ordonnance était notifiée au procureur de la République le même jour à 15 heures 40 ; qu'à 15 heures 45, ce magistrat en relevait appel, et, dans le même temps, à 18 heures 57, saisissait le premier président de la cour d'appel d'un référé-détention afin de déclarer cet appel suspensif ; que le 9 novembre 2007 à 15 heures, le délégué du premier président de la cour d'appel ordonnait la suspension des effets de l'ordonnance de mise en liberté de Pierre X... jusqu'à sa comparution devant la chambre de l'instruction ; que, le 9 novembre 2007, le procureur général près cette cour notifiait par lettre recommandée aux parties civiles, à leur avocat, à Pierre X... et son avocat que l'appel du procureur de la République de Quimper serait appelé à l'audience de la chambre de l'instruction du mardi 13 novembre à 10 heures 30 ; que Pierre X... reconnaît avoir participé de façon active à la première phase de l'opération, qui s'est déroulée à Benodet, au domicile de la victime, puis au transport de celle-ci jusqu'à Nantes ; qu'au cours de cette phase des actes d'une très grande violence ont été commis ; que les faits pour lesquels Pierre X... est mis en examen causent un trouble exceptionnel et persistant à ce jour à l'ordre public tant en raison de leur gravité (assassinat), des circonstances de leur commission (séquestration) que du préjudice causé (mort de la victime) ; qu'ils constituent des atteintes intolérables à la dignité, à l'intégrité de la personne humaine et à sa vie, que la détention est l'unique moyen de mettre fin au trouble ainsi caractérisé ; que ce dossier est fait à la fois de tentatives de concertation frauduleuse et de pressions des uns sur les autres et réciproquement ; que la détention est l'unique moyen de prévenir cette concertation et ces pressions ; encore que la gravité de la délinquance de Pierre X... suit une courbe ascendante ; qu'il a déjà été condamné à quatre mois d'emprisonnement avec sursis le 5 avril 2005 par le tribunal correctionnel de Paris pour acquisition, détention et transport de stupéfiant, conduite sans permis, conduite en état d'ivresse ; qu'en dépit de cet avertissement, par appât du gain, il n'a pas hésité à apporter son concours à un enlèvement ayant abouti ensuite à l'assassinat de l'otage ; que ses explications selon lesquelles il avait voulu seulement apporter son concours à un cambriolage sont en totale contradiction avec son comportement lors du transport de la victime depuis Benodet jusqu'à Nantes et sa remise de la victime à Y... ; qu'enfin, un contrôle judiciaire qui implique essentiellement des mesures de surveillance a posteriori et discontinues est insuffisant pour prévenir de manière efficace les concertations ou les pressions et prévenir le renouvellement des infractions ; qu'il y a lieu en conséquence d'infirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ordonnant la mise en liberté sous contrôle judiciaire de Pierre X... ; que, désormais, cette chambre sera seule compétente pour statuer sur les demandes de mise en liberté et prolonger le cas échéant la détention provisoire de Pierre X... ; que, dès l'instant où, par une mention expresse de son arrêt, elle se réserve le contentieux de la détention provisoire, cette chambre devient compétente pour ordonner la prolongation de la détention ; que les dispositions du code de procédure pénale relatives au débat contradictoire devant le juge des libertés et de la détention ne lui sont pas applicables ; que l'information touche à sa fin ; que le juge d'instruction s'attache actuellement à rassembler les dernières informations de curriculum vitae des mis en examen ; que le délai prévisible d'achèvement de l'information est donc de quatre mois ; que les mêmes motifs qui ont conduit la cour à infirmer l'ordonnance de mise en liberté, à savoir le trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public résultant de la nature des faits reprochés à Pierre X..., les risques de concertation et de pressions ainsi que les risques de renouvellement de l'infraction justifient également la prolongation de la détention de Pierre X... pour une nouvelle période de six mois ;
1) " alors que, l'effet dévolutif de l'appel commande que le juge du second degré ne dispose pas de plus de pouvoirs que celui de première instance et ne puisse ainsi s'affranchir des garanties processuelles substantielles instaurées par le législateur ; qu'ainsi quand le débat contradictoire n'a pu être régulièrement tenu conformément aux dispositions de l'article 114 du code de procédure pénale, devant le juge des libertés, préalablement à la prolongation de la détention, la chambre de l'instruction saisie en appel, qui le constate, n'a pas d'autre choix que de confirmer la décision de remise en liberté prise et ne peut sans excès de pouvoirs, infirmer la détention de première instance et prolonger la détention en s'en réservant expressément le contentieux ;
2) " alors que, retenir le contraire conduirait à la reconnaissance d'un véritable détournement de pouvoirs permettant aux juges de la détention d'éviter commodément de faire application des dispositions impératives imposées par le législateur en matière de détention provisoire en permettant que, lorsque le délai de convocation prévu par l'article 114 du code de procédure ne peut être respecté, une décision de mise en liberté soit rendue par le juge de première instance, neutralisée par le référé détention du ministère public, et que devant la chambre de l'instruction cette décision soit infirmée, couvrant ce faisant le vice initial de la procédure pourtant dirimant ; qu'un tel stratagème juridique qui vise expressément à éviter la remise en liberté du mis en examen, en le privant au passage du droit à un double degré de juridiction, constitue nécessairement un détournement de procédure " ;
Attendu que Pierre X..., placé en détention provisoire le 13 mai 2006, a été mis en liberté sous contrôle judiciaire le 8 novembre 2007 ; que le procureur de la République a relevé appel de cette décision dont les effets ont été suspendus par ordonnance du premier président de la cour d'appel, en application de l'article 187-3 du code de procédure pénale ;
Attendu que la chambre de l'instruction, après avoir infirmé l'ordonnance de mise en liberté sous contrôle judiciaire, s'est expressément réservé la connaissance du contentieux de la détention provisoire et, évaluant à quatre mois le délai prévisible d'achèvement de la procédure, a ordonné la prolongation de la détention provisoire de Pierre X... pour une durée de six mois, en retenant que cette détention demeurait indispensable pour mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public résultant de la nature des faits reprochés à l'intéressé, empêcher des pressions sur les témoins et toute concertation frauduleuse entre les mis en examen, et prévenir le renouvellement de l'infraction ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application de l'article 207 du code de procédure pénale, sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3,143-1 et suivants du code de procédure pénale ;
Par ces motifs :
I-Sur le pourvoi formé le 15 novembre 2007 :
Le DÉCLARE IRRECEVABLE ;
II-Sur le pourvoi formé le 14 novembre 2007 :
Le REJETTE ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Cotte président, M. Beauvais conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 07-87950
Date de la décision : 12/02/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION - Pouvoirs - Détention provisoire - Infirmation d'une ordonnance - Réserve du contentieux de la détention - Cas

DETENTION PROVISOIRE - Demande de mise en liberté - Compétence - Réserve du contentieux de la détention provisoire par la chambre de l'instruction

Il résulte de l'article 207 du code de procédure pénale que la chambre de l'instruction, qui infirme une ordonnance de mise en liberté ou de refus de prolongation de détention provisoire, est seule compétente pour statuer sur les demandes de mise en liberté et prolonger, le cas échéant, la détention provisoire, lorsqu'elle s'est réservée expressément la connaissance de ce contentieux. Fait l'exacte application de ce texte la chambre de l'instruction, qui, saisie de l'appel par le procureur de la République de l'ordonnance prescrivant la mise en liberté du mis en examen, au motif que son avocat n'a pu être régulièrement convoqué au débat contradictoire, infirme cette décision et, après s'être réservé expressément la connaissance du contentieux de la détention provisoire, a ordonné la prolongation de celle-ci


Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Rennes, 13 novembre 2007

Sur la compétence de la chambre de l'instruction pour statuer sur la détention provisoire en cas d'infirmation d'une ordonnance, à rapprocher :Crim., 25 février 2003, pourvoi n° 02-87791, Bull. crim. 2003, n° 49 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 12 fév. 2008, pourvoi n°07-87950, Bull. crim. criminel 2008 N° 33 p. 125
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2008 N° 33 p. 125

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Salvat
Rapporteur ?: M. Beauvais
Avocat(s) : Me Spinosi

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.87950
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