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17/01/2008 | FRANCE | N°06-21556

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 17 janvier 2008, 06-21556


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., salarié de la société Cophoc aux droits de laquelle vient la société Shell direct (la société), a été placé en arrêt de travail à compter du 29 avril 1989 pour un syndrome dépressif ; que par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 20 novembre 2003, il a demandé à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône (la caisse) la reconnaissance du caractère professionnel de la dépression dont il souffre depuis 1989 et invo

qué la faute inexcusable de son employeur ; que le 6 février 2004, la caisse ...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., salarié de la société Cophoc aux droits de laquelle vient la société Shell direct (la société), a été placé en arrêt de travail à compter du 29 avril 1989 pour un syndrome dépressif ; que par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 20 novembre 2003, il a demandé à la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône (la caisse) la reconnaissance du caractère professionnel de la dépression dont il souffre depuis 1989 et invoqué la faute inexcusable de son employeur ; que le 6 février 2004, la caisse a refusé la prise en charge en opposant la prescription biennale ;

Sur la troisième branche du premier moyen du pourvoi principal :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire prescrite son action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, alors selon le moyen, que l'interruption de la prescription s'étend d'une action à une autre même si chacune d'elles procède de causes distinctes lorsqu'elles tendent l'une et l'autre à un seul et même but ou procède d'un même fait dommageable ; qu'en l'espèce, comme le faisait valoir M. X... dans ses conclusions d'appel, à l'annonce de son licenciement, il a développé un syndrome anxio-dépressif réactionnel le 29 avril 1989, il a été en arrêt de travail pour cette cause à partir du 29 avril puis d'une rechute le 26 juin 1989, il a intenté pratiquement simultanément plusieurs actions judiciaires tendant toutes vers un seul et même but à savoir l'indemnisation de son entier préjudice tant moral, physique que psychologique et le paiement des indemnités différentielles à celles servies par la sécurité sociale en cas d'arrêt de travail et invalidité résultant de l'événement à l'origine de sa dépression à savoir son licenciement abusif et ses conditions (harcèlements) ; qu'en décidant cependant que M. X... ne pouvait sérieusement soutenir que les multiples instances judiciaires l'ayant opposé à son employeur entre 1989 et 2003 avaient interrompu le cours de la prescription, la cour d'appel a violé l'article 2244 du code civil, ensemble les articles L. 431-2, L. 452-1 et L. 453-3 du code de la sécurité sociale ;

Mais attendu qu'il résulte du dernier alinéa de l'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale qu'en cas d'accident susceptible d'entraîner la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur , la prescription de deux ans opposable aux demandes d'indemnisation complémentaire visée aux articles L. 452-1 et suivants du même code est interrompue par l'exercice de l'action pénale engagée pour les mêmes faits ou de l'action en reconnaissance du caractère professionnel de l'accident ;

Et attendu qu'ayant constaté qu'aucune des demandes formées par M. X... à l'occasion des instances judiciaires l'ayant opposé à son employeur entre 1989 et 2003 ne tendait à faire reconnaître le caractère professionnel de sa dépression nerveuse et que celui-ci ne s'était pas trouvé dans l'impossibilité de saisir parallèlement de cette question la juridiction de sécurité sociale, la cour d'appel en a exactement déduit que le délai de la prescription biennale de l'action en reconnaissance de faute inexcusable n'avait pas été interrompu ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen du pourvoi principal :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le débouter de toutes ses autres demandes dirigées contre la société, alors selon le moyen, qu'il résulte de l'article L. 441-2 du code de la sécurité sociale que l'obligation faite à l'employeur, quelque soit son opinion sur les causes de l'accident, de déclarer tout accident du travail dont il a eu connaissance survenu à son employé est indépendant de la faculté laissée à celui-ci de déclarer l'accident dans les limites de la prescription ; qu'est considérée comme un accident du travail la dépression nerveuse liée à l'activité professionnelle apparue soudainement ; qu'en l'espèce, M. X... avait rappelé dans ses conclusions d'appel que c'était à l'annonce de son licenciement soit le 29 avril 1989 qu'il avait développé un syndrome anxio-dépressif réactionnel qui s'était poursuivi pendant de nombreuses année, la date de consolidation étant du 31 juillet 1993 ; que son employeur était parfaitement informé de son état par les arrêts et prolongation d'arrêts de travail qu'il avait reçus, la lettre de notification de licenciement du 27 avril 1989 mentionnant « l'absence de toute harmonie relationnelle nécessaire à votre poste » et l'attestation de M. Y... en date du 21 septembre 1990 déclarant avoir clairement informé l'employeur le 19 septembre 1989 de la sévère dépression dont souffrait M. X... consécutive à son licenciement ; qu'en décidant cependant que M. X... ne saurait sérieusement reprocher à son employeur de ne pas avoir déclaré d'accident du travail auprès de la caisse, alors qu'il était à l'époque en arrêt maladie de droit commun et n'envisageait aucunement de qualifier autrement sa dépression nerveuse, s'étant lui-même abstenu d'effectuer la déclaration spécifique mise à la charge de la victime d'un accident du travail par les articles L. 441-1 et R 441-2 du code de la sécurité sociale ou de saisir directement la caisse tout en constatant que les multiples instances judiciaires ayant opposé M. X... à son employeur avaient trait à des pressions diverses, à des faits de harcèlement, au caractère abusif de son licenciement, à la non-communication par la société Cophoc de ses arrêts maladie à la société d'assurance Proxima, au défaut de couverture suffisante auprès de cet assureur au regard de la convention collective, au retard volontaire de délivrance de l'attestation patronale ainsi qu'au non versement de ses salaires et indemnités diverses, la cour d'appel, qui a statué par des motifs inopérants relatifs au non-usage par M. X... dans le délai légal de la faculté qui lui était offerte d'effectuer lui-même cette déclaration à la caisse, n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles L. 411-61, L. 441-2, R 441-3 du code de la sécurité sociale, ensemble 1382 du code civil ;

Mais attendu que le délai imparti à l'employeur pour déclarer un accident du travail ne court qu'à compter du jour où il en a eu connaissance ; qu'abstraction faite du motif erroné mais surabondant critiqué par le moyen, les juges du fond, appréciant souverainement la portée des éléments de preuve qui leur étaient soumis, en ont exactement déduit que la société n'avait pas eu connaissance de ce que M. X... imputait son état dépressif à un accident du travail avant que celui-ci n'engage son action en reconnaissance d'un accident du travail et d'une faute inexcusable, de sorte qu'aucun manquement à son obligation déclarative ne pouvait lui être imputé ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le moyen unique du pourvoi incident de la société Shell direct et la seconde branche du moyen unique du pourvoi incident de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, réunis :

Vu l'article L. 431-2, alinéa 1er, du code de la sécurité sociale ;

Attendu qu'il résulte de ce texte que les droits de la victime ou de ses ayants droit aux prestations et indemnités prévues par la législation professionnelle se prescrivent par deux ans à dater du jour de l'accident ou de la cessation du paiement de l'indemnité journalière ;

Attendu que l'arrêt retient que, faute de réponse de la caisse dans le délai de trente jours à partir de la demande de reconnaissance d'accident du travail présentée par M. X..., celui-ci est fondé à se prévaloir de l'existence d'une décision de reconnaissance implicite du caractère professionnel du syndrome anxio-dépressif qu'il a présenté à compter du 29 avril 1989 ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'à la date de la réception par la caisse de la déclaration d'accident du travail faite par M. X..., ses droits aux prestations et indemnités prévues par la législation professionnelle pour cet accident étaient prescrits, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du premier moyen du pourvoi principal et sur la première branche du moyen unique du pourvoi incident de la caisse primaire d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône :

REJETTE le pourvoi principal ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a constaté la reconnaissance implicite par la caisse du caractère professionnel du syndrome dépressif présenté par M. X... à compter du 29 avril 1989 et dit qu'il devait en conséquence être pris en charge au titre de la législation professionnelle, l'arrêt rendu le 17 février 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Déclare irrecevable comme prescrite la demande en reconnaissance d'accident du travail formée le 20 novembre 2003 par M. X... ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Shell direct, ensemble l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de la SCP Le Bret-Desaché ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept janvier deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 06-21556
Date de la décision : 17/01/2008
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Procédure - Procédure préliminaire - Appréciation du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie - Décision de la caisse - Reconnaissance implicite - Conditions - Détermination - Portée

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Procédure - Procédure préliminaire - Appréciation du caractère professionnel de l'accident ou de la maladie - Décision de la caisse - Reconnaissance implicite - Exclusion - Cas - Prescription des droits aux prestations et indemnités prévus par la législation professionnelle à la date de la déclaration d'accident

L'auteur d'une déclaration d'accident du travail ne peut prétendre à la reconnaissance implicite du caractère professionnel de l'accident résultant de l'absence de réponse de l'organisme social dans le délai prévu à l'article R. 441-10 du code de la sécurité sociale, lorsqu'à la date de la déclaration de cet accident ses droits aux prestations et indemnités prévus par la législation professionnelle étaient déjà prescrits en application de l'article L. 431-2, alinéa 1er, du même code


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Besançon, 17 février 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 17 jan. 2008, pourvoi n°06-21556, Bull. civ. 2008, II, N° 10
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2008, II, N° 10

Composition du Tribunal
Président : M. Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Lautru
Rapporteur ?: Mme Renault-Malignac
Avocat(s) : SCP Boutet, SCP Le Bret-Desaché, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:06.21556
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