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13/11/2007 | FRANCE | N°07-83621

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 13 novembre 2007, 07-83621


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par :

-X... Claire, épouse Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de DIJON, chambre correctionnelle, en date du 5 avril 2007, qui, pour délaissement d'une personne incapable de se protéger, l'a condamnée à 2 000 euros d'amende ;

Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 6, § 1 et 2, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des articles 111-4,121-3 et 223-3

du code pénal,591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble violation des dr...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par :

-X... Claire, épouse Y...,

contre l'arrêt de la cour d'appel de DIJON, chambre correctionnelle, en date du 5 avril 2007, qui, pour délaissement d'une personne incapable de se protéger, l'a condamnée à 2 000 euros d'amende ;

Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 6, § 1 et 2, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des articles 111-4,121-3 et 223-3 du code pénal,591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense, défaut de réponse à conclusions, contradiction et défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré la prévenue (Claire X..., la demanderesse) coupable de délaissement d'une personne âgée, en l'espèce sa mère, et l'a condamné à la peine de 2 000 euros ;
" aux motifs que le jour de la première intervention de l'aide ménagère, mardi 7 septembre 2004, Claire X..., épouse Y..., était intervenue auprès de l'aide ménagère pour s'étonner de sa présence dont elle n'avait pas été informée ; que tout en la laissant terminer ses tâches du jour, elle avait immédiatement téléphoné à l'association dont dépendait la personne pour interdire toute action à venir chez ses parents et avait écrit au " responsable " de la gendarmerie de Dompierre pour s'opposer à toute venue sur sa propriété et dans l'appartement occupé par ses parents même à titre provisoire et pour un bref délai ; que, par courrier du 10 novembre 2004 adressé au " responsable " du groupement de brigades de Cluny, Claire X..., épouse Y..., avait confirmé sa position ; que, entendu en son lieu et place le 9 novembre 2004 à la brigade de Cluny, son mari avait soutenu que les époux X... étaient en pleine forme et n'avaient besoin d'aucune aide ménagère ; que, à la suite de la démarche téléphonique de Claire X..., épouse Y..., du 7 septembre 2004, l'association avait suspendu l'intervention de l'aide ménagère ; qu'il résultait de ces faits que Claire X..., épouse Y..., s'était opposée à la venue de quiconque sur sa propriété et singulièrement de l'aide ménagère chez ses parents ; que, nonobstant le droit d'usage et d'habitation dont bénéficiaient ses parents sur une partie de son château, elle s'était opposée à la venue de l'aide ménagère chez sa mère dès le premier jour en avisant le responsable de l'association et dans des termes suffisamment convaincants puisque, à compter de l'appel téléphonique, l'association avait suspendu la venue de l'aide ménagère ; qu'en s'opposant à toute venue sur sa propriété et en interférant directement dans l'aide apportée à sa mère qui avait été estimée nécessaire tant par l'hôpital qui avait constitué le dossier que par l'Organic qui avait accordé son concours, ce qui avait été de nouveau confirmé par deux professionnels, c'est-à-dire l'infirmière et le médecin traitant, Claire X..., épouse Y..., avait manifesté son opposition à toute forme d'aide extérieure pour sa mère sans y suppléer en apportant une quelconque contrepartie ; que, ce faisant, l'attitude délibérée de Claire X..., épouse Y..., susceptible de mettre en danger cette personne âgée et vulnérable, caractérisait le délaissement si bien que la cour constatait que le délit visé à la prévention était établi en tous ses éléments constitutifs ;
" alors que, d'une part, le délit de délaissement n'est caractérisé que si le prévenu a commis un acte positif susceptible de mettre en danger la vie ou la sécurité d'une personne vulnérable ; que la suspension de l'intervention d'une aide ménagère ne pouvant porter atteinte à la sécurité ou à la vie d'une personne, la cour d'appel ne pouvait ériger cette aide ménagère en objet du délit de délaissement, sans constater que la prévenue aurait empêché que des soins médicaux fussent prodigués à sa mère qui avait toujours été régulièrement visitée tant par son médecin traitant que par une infirmière ;
" alors que, en toute hypothèse, la cour d'appel ne pouvait s'abstenir de répondre aux conclusions par lesquelles la demanderesse soulignait que le délit de délaissement de personne vulnérable ne pouvait s'appliquer à des problèmes d'aide ménagère, qu'elle n'avait jamais fait obstacle à un quelconque service nécessaire à sa mère dont, au demeurant, elle ignorait totalement l'état de santé selon la volonté même de celle-ci, qu'une attestation de Claire Z..., infirmière, confirmait qu'à aucun moment l'accès de celle-ci au logement de la vieille dame n'avait été entravé, notamment au cours de l'année 2004, ce dont elle déduisait qu'invoquer un délit de délaissement de personne vulnérable à propos de la suspension d'une simple aide ménagère, quand la personne concernée vivait d'ailleurs en compagnie de son mari, relevait d'un détournement de la loi ;
" alors que, d'autre part, le délit de délaissement n'est caractérisé que si le prévenu a commis un acte positif qui démontre sa volonté d'abandonner, en un lieu quelconque et de manière définitive, la personne vulnérable ; qu'en l'espèce, à le supposer même établi, le seul fait pour la prévenue de s'être opposée à la venue sur sa propriété de l'aide ménagère censée intervenir pour faciliter l'entretien du logement de sa mère âgée et malade, ne pouvait caractériser la volonté de délaisser définitivement la vieille dame, vivant en couple avec son époux, ni celle d'attenter à sa sécurité, quand un médecin et une infirmière venaient régulièrement lui prodiguer des soins " ;
Vu l'article 223-3 du code pénal ;
Attendu que, selon ce texte, le délit de délaissement suppose un acte positif, exprimant de la part de son auteur la volonté d'abandonner définitivement la victime ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Claire Y..., citée pour avoir " délaissé Simone X..., sa mère, personne vulnérable hors d'état de se protéger en raison de son âge (84 ans), notamment en faisant obstacle à la venue d'une aide-ménagère ", a été relaxée par le tribunal correctionnel au motif que le comportement de la prévenue, pour moralement blâmable qu'il fût, ne caractérisait pas le délit poursuivi, en l'absence de la démonstration d'une volonté d'abandon définitif ;
Attendu que, pour déclarer Claire Y... coupable, l'arrêt retient qu'elle s'est énergiquement opposée à l'intervention de l'aide-ménagère envoyée par une association au domicile de sa mère, sans apporter à celle-ci, âgée de 84 ans et venant d'être hospitalisée, une autre forme d'assistance ; que les juges en concluent que le délaissement est caractérisé par le comportement délibéré de la prévenue, de nature à mettre en danger une personne vulnérable ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que les faits retenus n'entraient pas dans les prévisions de l'article 223-3 du code pénal, la cour d'appel a méconnu les exigences de ce texte ;
D'où il suit que la cassation est encourue ; que, n'impliquant pas qu'il soit à nouveau statué sur le fond, elle aura lieu sans renvoi, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Dijon, en date du 5 avril 2007 ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Dijon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Cotte président, M. Delbano conseiller rapporteur, M. Farge conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Lambert ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 07-83621
Date de la décision : 13/11/2007
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

MISE EN DANGER DE LA PERSONNE - Délaissement d'une personne hors d'état de se protéger - Eléments constitutifs - Acte positif - Volonté d'abandonner définitivement la victime

Le délit de délaissement suppose un acte positif, exprimant de la part de son auteur la volonté d'abandonner définitivement la victime. Encourt la cassation l'arrêt qui, pour condamner une personne, citée pour avoir "délaissé Simone X, sa mère, personne vulnérable hors d'état de se protéger en raison de son âge (84 ans), notamment en faisant obstacle à la venue d'une aide-ménagère", préalablement relaxée par le tribunal correctionnel au motif que le comportement de la prévenue, pour moralement blâmable qu'il fût, ne caractérisait pas le délit poursuivi, en l'absence de la démonstration d'une volonté d'abandon définitif, retient qu'elle s'est énergiquement opposée à l'intervention de l'aide-ménagère envoyée par une association au domicile de sa mère, sans apporter à celle-ci, âgée de 84 ans et venant d'être hospitalisée, une autre forme d'assistance, alors que les faits retenus n'entraient pas dans les prévisions de l'article 223-3 du code pénal


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Dijon, 05 avril 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 13 nov. 2007, pourvoi n°07-83621, Bull. crim. criminel 2007, N° 273
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2007, N° 273

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Fréchède
Rapporteur ?: M. Delbano
Avocat(s) : SCP Masse-Dessen et Thouvenin

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2007:07.83621
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