LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par :
-X... Frédéric-Paul,
contre l'arrêt de la cour d'appel de PARIS, 12e chambre, en date du 29 janvier 2007, qui, pour faux et usage, l'a condamné à un an d'emprisonnement, a ordonné la confiscation des scellés et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires en demande et en défense et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen additionnel de cassation, pris de la violation des articles 167,459,593 et 802 du code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse aux conclusions, violation des droits de la défense, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande d'annulation du rapport de l'expertise diligentée par Mme Y..., lequel sera écarté des débats en tant qu'élément de preuve ;
aux motifs que la demande tendant à l'annulation du rapport d'expertise de Mme Y... avait été présentée par le conseil de Frédéric-Paul X... au cours de l'audience du 6 février 2006 et avait conduit la cour – dans les motifs de l'arrêt rendu le 20 mars 2006 – à dire n'y avoir lieu à annulation du rapport critiqué mais à ce qu'il soit écarté expressément en tant qu'élément de preuve ; qu'en raison du sursis à statuer sur les demandes des parties figurant au dispositif de l'arrêt rendu le 20 mars 2006, et dans la mesure où la demande est reprise dans les écritures déposées à l'audience du 6 décembre 2006, il y a lieu de dire n'y avoir lieu à annulation de ce rapport, lequel sera toutefois écarté des débats en tant qu'élément de preuve, ainsi qu'il sera précisé au dispositif du présent arrêt ;
" alors que la cour d'appel a laissé sans réponse les conclusions d'appel du prévenu soutenant que dès lors qu'il apparaît que l'expert a été requis par l'une des parties avant sa désignation par le magistrat instructeur, l'annulation pure et simple du rapport devait être prononcée eu égard au motif légitime de récusation opposable à l'expertise Y... ; que l'expertise devait être annulée et ne plus apparaître au dossier même comme simple moyen de preuve ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé l'article 459 du code de procédure pénale ;
Attendu que le demandeur est sans intérêt à critiquer l'arrêt en ce qu'il a refusé d'annuler le rapport d'expertise de Mme Y..., dès lors que la cour d'appel a écarté cette pièce des débats et a prononcé sans se référer audit rapport ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être admis ;
Sur le moyen de cassation, pris de la violation des articles 441-1 du code pénal, des articles préliminaire,158,171,459,593 et 802 du code de procédure pénale,6 § 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs, défaut de réponse aux conclusions, renversement de la charge de la preuve, violation des droits de la défense, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Frédéric-Paul X... coupable de faux et d'usage de faux ;
" aux motifs que la demande d'annulation de l'expertise ordonnée par l'arrêt du 20 mars 2006 est fondée sur les articles 238 du nouveau code de procédure civile et sur l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, motif pris de ce que les experts auraient outrepassé la mission qui leur a été confiée par les ordonnances du 22 mars 2006 et du 19 mai 2006 dans la mesure où ces décisions visaient l'étude technique des signatures » et qu'il a été procédé par les experts commis à l'étude technique des signatures et écritures ; que, ce faisant, la violation du principe de la loyauté des preuves a conduit au non-respect de l'exigence d'un procès équitable ; que, toutefois, la mission confiée aux experts par l'ordonnance du 22 mars 2006 mentionne notamment : Procéder à tous les examens et formuler toutes observations utiles à la manifestation de la vérité » ; que, dès lors, le rapport déposé par Mmes Z... et A..., experts commis par la cour, n'encourt pas la critique formulée à son encontre ; qu'en effet, l'examen des signatures mais également des écritures de la pièce de question et des pièces de comparaison relève d'une question d'ordre technique, qui répond à la demande contenue dans le dernier paragraphe de la mission confiée aux experts ; qu'en conséquence, ce rapport d'expertise, qui a été régulièrement communiqué aux parties et a été discuté, tant dans les écritures qu'au cours des débats d'audience, ne constitue donc pas une violation de la loyauté des preuves ; qu'il convient, donc, de rejeter la demande d'annulation de cette expertise qui restera acquise aux débats, étant en outre observé que les conseils de Frédéric-Paul X... n'ont formulé, postérieurement au dépôt de ce rapport, aucune demande de contre-expertise ; qu'au soutien de sa contestation des délits qui lui sont reprochés, Frédéric-Paul X... fait notamment valoir qu'il n'existe aucune preuve objective sérieuse du caractère frauduleux du testament daté du 3 mai 1999, se réfère aux contradictions des différentes expertises graphologiques réalisées – et plus particulièrement celles qui ont été réalisées par Mme B... et Mme I... émet des critiques quant aux moyens utilisés par les experts désignés par la cour (Z... et A...) et aux conclusions formulées ; que, cependant, il doit être rappelé que, dans son premier rapport d'expertise-qui n'a fait l'objet d'aucune critique de procédure ou de fond-Mme C... avait conclu : 1 Le texte du testament de question n'a pas été rédigé par Louise E.... Il s'agit d'une imitation à main libre de très bonne facture ; 2 La signature de question est une imitation à main libre de celle de Mme E... ; 3 Le texte et la signature de question sont de la même main : ils ont été rédigés à l'aide d'un même instrument scripturant » ; que, dans leur rapport, les experts Z... et A... concluent en ces termes : Le testament du 3 mai 1999 n'a pas été rédigé, daté et signé par Louise E... » ; qu'en présence des conclusions concordantes de ces deux expertises, il doit donc être retenu que le testament du 3 mai 1999 est un faux ; que ces deux expertises divergent quant à l'auteur de ce faux puisque Mme C..., dans son second rapport conclut : Parmi les dissemblances d'ordonnance et de graphisme retrouvées entre l'écriture du testament et celle de la main de Mme E..., entre 54 % et 69 % d'entre elles constituent des caractéristiques de l'écriture manuscrite de la main de Fréderic-Paul X... », tandis que Mmes Z... et A... terminent leur rapport en indiquant : Ce testament est un faux réalisé par Frédéric-Paul X..., pour partie par transparence, et pour l'autre partie à main levée, à partir d'un document mis au point pour servir de modèle » ; que, sans se prononcer sur la méthode utilisée par le faussaire – qui est seul à pouvoir décrire avec une certitude totale le ou les procédés qu'il a utilisés-plusieurs indices, en sus des expertises, corroborent l'imputation du faux à Frédéric-Paul X... ; qu'il convient, à ce titre, de relever que le testament litigieux est daté du 3 mai 1999, que Frédéric-Paul X... soutient l'avoir reçu, par courrier simple, mais n'a pas été en mesure de produire l'enveloppe qui le contenait, ce qui rend ainsi impossible de dater son expédition mais suscite une interrogation dans la mesure où il est établi que Mme E... est arrivée à Paris le 6 mai 1999, où elle est décédée le 9 juillet 1999 ; qu'en outre, les témoignages invoqués par Frédéric-Paul X... pour justifier, notamment, de ses rencontres depuis mai ou juin 1998 avec Mme E... au Ritz devaient se révéler pour certains inopérants à la suite de vérifications effectuées en particulier dans l'entourage familial et amical de Mme E..., tandis qu'un témoin, après avoir affirmé avoir assisté à ces rencontres, a finalement reconnu avoir fait un faux témoignage (Mme De F...) ; qu'en définitive, la totalité des allégations de Frédéric-Paul X... sont infirmées, tant sur l'origine, la réalité de ses contacts avec Mme E..., que sur leur objet ; que les circonstances dans lesquelles il a obtenu certains documents qui ont été transmis par Frédéric-Paul X... pour les expertises graphologiques sont pour le moins douteuses ; qu'en conséquence, en fonction de ce faisceau d'indices, et des expertises graphologiques, il convient de confirmer le jugement entrepris sur la déclaration de culpabilité, tant du chef de faux que de celui d'usage de ce faux ;
1) " alors que, la cour, qui a constaté dans l'arrêt attaqué, que la mission confiée aux experts Z... et A... par l'ordonnance du 22 mars 2006 portait seulement sur l'étude technique des signatures de Mme E... figurant sur le testament litigieux et sur diverses pièces de comparaison et qui n'a pas contesté que, comme le prévenu le soutenait dans ses conclusions d'appel, lesdits experts avaient vainement sollicité une extension de leur mission à une étude comparative des écritures figurant sur ces documents, a violé les dispositions des articles 158,171 et 802 du code de procédure pénale en admettant dans ces conditions, la validité du rapport de ces experts qui avaient outrepassé les limites de leur mission, en examinant l'écriture du testament ;
2) " alors que, la cour qui a laissé sans réponse les conclusions d'appel du prévenu soutenant que diverses expertises réalisées dans le cadre de procédures civiles avaient conclu à l'authenticité du testament litigieux et qui n'a pas non plus tenu compte des hypothèses divergentes retenues par les experts C... et A... Shmitt sur l'authenticité ou la fausseté d'un document de comparaison adressé à Mme G... entraînant une inversion des résultats de l'expertise réalisée par Mme C..., a ainsi violé l'article 459 du code de procédure pénale ;
3) " alors que, l'article préliminaire du code de procédure pénale qui, comme l'article 6 § 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, pose le principe de la présomption d'innocence de tout accusé, implique, par voie de conséquence, qu'il n'incombe pas à ce dernier de prouver son innocence, mais aux parties poursuivantes, ministère public et partie civile, de démontrer sa culpabilité ; qu'en déduisant celle-ci de l'absence de preuve de son innocence rapportée par le prévenu quant à l'existence de l'enveloppe contenant le testament litigieux et de l'existence de témoins l'ayant vu en compagnie de la testatrice, la cour a donc renversé la charge de la preuve et violé le texte précité ;
Attendu que, d'une part, pour écarter la demande d'annulation du rapport de l'expertise ordonnée par la cour d'appel, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen et énonce, notamment, que les experts n'ont pas outrepassé leur mission, leurs diligences effectuées rentrant dans le cadre de celle-ci ;
Attendu que, d'autre part, les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous leurs éléments, tant matériels qu'intentionnel, les délits de faux et usage, dont elle a déclaré le prévenu coupable et a justifié qu'il soit donné acte à la partie civile de la réserve de ses droits ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question, l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que les éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2 500 euros la somme que Frédéric-Paul X... devra payer à François de H... au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Dulin conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Bayet conseiller rapporteur, Mme Thin conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;