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30/10/2007 | FRANCE | N°06-89365

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 30 octobre 2007, 06-89365


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente octobre deux mille sept, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire GUIHAL, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN, FABIANI et THIRIEZ, et de Me BLONDEL, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FINIELZ ;
CASSATION PARTIELLE et désignation de juridiction sur les pourvois formés par X... Alain, Y... Nelly, agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité de représentants légaux de leur

s enfants mineurs, X... Marie, Lucie et Léa, Z... Marjorie, épouse...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trente octobre deux mille sept, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire GUIHAL, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN, FABIANI et THIRIEZ, et de Me BLONDEL, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FINIELZ ;
CASSATION PARTIELLE et désignation de juridiction sur les pourvois formés par X... Alain, Y... Nelly, agissant tant en leur nom personnel qu'en qualité de représentants légaux de leurs enfants mineurs, X... Marie, Lucie et Léa, Z... Marjorie, épouse A..., agissant tant en son nom personnel qu'en qualité de représentante légale de son fils mineur, A... Sulyvann, B... Yves, B... Yannick, G... Denise, épouse D..., F... Hervé,
F...
Nelly, parties civiles, le procureur général près la cour d'appel de Reims, contre l'arrêt de ladite cour d'appel, chambre correctionnelle, en date du 7 novembre 2006, qui, dans la procédure suivie contre la société Métal Blanc du chef de mise en danger d'autrui, blessures involontaires, pollution des eaux et infraction à la législation sur les installations classées, a débouté les parties civiles de leurs demandes après relaxe du premier chef de prévention et requalification du délit en contravention de blessures involontaires ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I. Sur les pourvois de Hervé et Nelly
F...
, Alain X... et Nelly Y... :
Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;
II. Sur le pourvoi du procureur général près la cour d'appel de Reims et sur les pourvois de Denise
G...
, d'Yves et Yannick B... et de Marjorie Z..., épouse A... :
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que la société Métal blanc exploite à Bourg-Fidèle (Ardennes), à 500 mètres du centre du village, sur le site d'une ancienne fonderie, une usine de recyclage de batteries automobiles et de résidus métalliques, installation classée, initialement autorisée par un arrêté du 15 octobre 1969, puis, par plusieurs arrêtés successifs prenant en considération les modifications du processus industriel ainsi que l'accroissement des volumes produits, et, en dernier lieu, au moment des faits, par un arrêté du 24 décembre 1996 ; que le préfet, par un arrêté du 22 décembre 1998, a mis l'exploitant en demeure de respecter les valeurs limites applicables aux effluents liquides, ainsi que l'obligation de mise en place d'un dispositif d'alarme sur les installations de dépoussiérage, imposées par l'arrêté du 24 décembre 1996 ; que, sur la plainte de riverains, une enquête administrative a été diligentée, puis une information judiciaire ouverte le 19 juin 1998, qui ont révélé de fortes concentrations de plomb et de cadmium dans les eaux pluviales issues de l'établissement, ainsi que dans l'air, dans le sol, et dans les végétaux aux alentours de l'usine ; qu'il est apparu que deux salariés de l'entreprise étaient atteints de saturnisme et que plusieurs habitants de la commune, en particulier des enfants, présentaient des taux de plombémie importants ; que la société Métal blanc a été renvoyée devant le tribunal correctionnel sous la prévention de mise en danger d'autrui par l'inobservation des prescriptions de l'arrêté du 24 décembre 1996 et de l'obligation de signaler à l'administration les incidents survenus dans l'entreprise, blessures involontaires sur la personne de deux salariés, pollution des eaux et poursuite de l'exploitation d'une installation classée sans se conformer à une mise en demeure préfectorale d'avoir à respecter les valeurs limites de rejet dans les eaux pluviales et l'obligation de mise en place de dispositifs d'alarme sur les installations de dépoussiérage ; qu'en première instance, la prévenue a été relaxée du premier chef et condamnée des trois autres ; que la cour d'appel a confirmé la relaxe pour la mise en danger d'autrui, a confirmé les condamnations pour les délits environnementaux, a requalifié les délits de blessures involontaires en contravention, dont l'amnistie a été constatée et a débouté de leurs demandes d'indemnisation les parties civiles qui invoquaient des préjudices liés à des atteintes corporelles, à des inconvénients de voisinage ou à la contamination de leur bétail ;
En cet état ;
Sur le premier moyen de cassation, proposé par le procureur général, pris de la violation de l'article 222-19 du code pénal :
Attendu que, pour décider que Jean-Claude H... et Bernard I..., salariés de la société Métal blanc, atteints d'un syndrome biologique de saturnisme, n'avaient pas subi d'incapacité totale de travail, de sorte que les blessures involontaires commises sur leurs personnes constituaient des contraventions, l'arrêt retient que l'interdiction médicale d'exposition au plomb pendant un an avait seulement eu pour effet, pendant cette période, de rendre les victimes inaptes à tout poste de travail de fabrication dans l'entreprise ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations procédant de son appréciation souveraine, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Sur le second moyen de cassation, proposé par le procureur général, pris de la violation de l'article 223-1 du code pénal :
Sur le moyen unique de cassation, proposé pour Yves et Yannick B..., pris de la violation des articles 223-1 du code pénal,514-11 II du code de l'environnement,2,3,388,463,591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué qui a condamné la société Métal Blanc pour pollution de cours d'eau et non-respect d'un arrêté de mise en demeure concernant une installation classée et l'a relaxée pour les faits de risque causé à autrui, a débouté Yves et Yannick B... de leur demande de dommages et intérêts présentée tant en leur nom personnel qu'au nom de leur fille ;
" aux motifs que, l'analyse des prélèvements réalisés les 7 et 8 janvier 1998 permettait aux experts de mettre en cause, en 1999, l'usine Métal Blanc dans l'existence d'une pollution des sols et des végétaux au plomb (avec des dépassements de 7 à 40 fois les critères d'hygiène de l'environnement de l'office mondial de la santé) et au cadmium (avec des dépassements de 3 à 25 fois les critères d'hygiène de l'environnement de l'office mondial de la santé) mais également d'une pollution atmosphérique significative dans un rayon de 500 mètres incluant le village de Bourg Fidèle " ; que " la contre-expertise confiée à A. J...et H. K... évoquait également la contamination des personnels de l'usine ainsi que des enfants habitant la commune et en particulier de ceux dont l'un des parents travaillait dans l'usine, en la rattachant à une défaillance des conditions d'hygiène du travail (absence de système efficace de captage et de dépoussiérage des fumées inhalées par les personnels, insuffisance des règles prescrites dans la société) " ; qu'« un comité de pilotage chargé d'un programme de suivi et de dépistage de la plombémie chez les enfants de la commune de Bourg Fidèle et des salariés a été institué lequel, à partir des prélèvements réalisés d'abord en juin et novembre 1998 puis en juin 1999, déposait les rapports faisant état d'une contamination d'une partie de la population en janvier puis en juillet 1999 " ; que " l'arrêté préfectoral d'autorisation n° 4366 du 24 décembre 1996 est un acte administratif individuel qui ne répond pas à la définition du règlement pris comme un acte à caractère général et absolu " ; qu'" en revanche le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 présente un tel caractère " ; qu'" en son article 38, il dispose que l'exploitant d'une installation soumise à autorisation ou à déclaration est tenu de déclarer dans les meilleurs délais à l'inspection des installations classées les accidents ou incidents survenus du fait du fonctionnement de cette installation qui sont de nature à porter atteinte aux intérêts mentionnés à l'article 1er de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement " ; qu'" il s'agit d'une obligation particulière de sécurité qui impose un modèle de conduite circonstanciée " ; que cependant, " il n'est pas établi en l'espèce qu'en ne déclarant que le 27 avril 1999 l'incident survenu dans la nuit du 23 au 24 avril, Métal Blanc eût pour autant exposé instantanément le voisinage de l'usine à un péril létal ou même à un danger d'affection chronique " ; que sur les trois premiers chefs de prévention, " par des motifs pertinents que la cour fait siens, le tribunal a exactement exposé, analysé et qualifié les faits " ; que, sur l'action civile, les parties civiles " ne justifient pas en l'espèce d'un lien direct entre le préjudice dont elles poursuivent la réparation et les deux seules infractions imputables à la société Métal Blanc " ; qu'il n'est pas établi en effet que l'intoxication du poisson, l'absence d'un dispositif d'alarme sur les installations de dépoussiérage ou le dépassement des valeurs limites applicables au rejet des eaux aient pu causer par eux-mêmes, de 1996 à 1999, les dommages respectivement allégués ; que " la juridiction pénale n'a pas été indistinctement saisie de l'ensemble des nuisances occasionnées par l'activité ordinaire de l'usine Métal Blanc " ;
" et aux motifs adoptés que, sur la deuxième infraction visée à la prévention, " suite au non-respect des dispositions de l'arrêté d'autorisation en date du 24 décembre 1996, le préfet met en demeure l'exploitant d'installer un dispositif d'alarme sur les installations de dépoussiérage des fours à fusion et d'affinage dans un délai d'un mois et de respecter les valeurs limites de rejet des eaux pluviales et de process dans le délai de trois mois " ; que " les 2 février et 24 mars 1999, la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE) dresse deux procès-verbaux à l'encontre de la SA Métal Blanc à raison du non-respect des dispositions de l'arrêté du 22 décembre 1998, en particulier au vu des résultats d'analyses des eaux pluviales du mois de mars 1999 relevant des taux de concentration en plomb dix fois supérieurs aux maxima fixés " ; que " par ailleurs, l'Institut de Recherche Criminelle relève une absence d'aspiration des aérosols au-dessus des fours d'affinage, une panne de la vanne de relevage des eaux de ruissellement sans que la production soit arrêtée " ; que " en conséquence, la société Métal Blanc reconnaissant les faits qui lui sont reprochés et qui sont par ailleurs établis par les éléments d'enquête, le tribunal de Céans considérera l'infraction susvisée constituée et la prévenue déclarée coupable de ce chef " ;
" alors que, d'une part, l'article 2 du code de procédure pénale exige seulement que le préjudice invoqué par la victime soit personnel et résulte directement de l'infraction ; qu'il n'exige pas que l'infraction soit la cause exclusive du dommage invoqué par la victime ; que, dès lors, la cour d'appel, qui a débouté les parties civiles de leur action au motif qu'elles n'avaient pas établi que leur préjudice résultait exclusivement des faits dont elle avait déclaré la société Métal Blanc coupable et non du fait de l'exploitation depuis des années de l'usine, alors qu'il suffisait que les faits visés à la prévention aient participé à la réalisation du préjudice invoqué pour en justifier l'indemnisation, la cour d'appel a violé l'article précité ;
" alors que, d'autre part, l'article 3 du code de procédure pénale prévoit que l'action civile est recevable pour tous les chefs de préjudice découlant des faits objet de la poursuite ; que, dès lors, que la cour d'appel constatait qu'un comité de pilotage concluait à la contamination d'une partie de la population de la commune en janvier et en juillet 1999, elle ne pouvait sans se contredire ou mieux s'en expliquer, et au besoin ordonner une mesure d'instruction complémentaire, affirmer que les parties civiles n'établissaient pas que les faits de non-respect de l'arrêté de mise en demeure pour le dépassement des valeurs limites applicables au rejet d'eaux pluviales ou de process fixées par l'arrêté d'autorisation d'exploitation de l'installation classée qui auraient été commis en 1999, soit la même année que les contaminations des habitants de la commune constatées, avaient pu leur causer un quelconque préjudice ;
" alors que, de troisième part, dès lors que la cour d'appel constatait que le délit de destruction de poissons dans les eaux de La Murée et celui de non-respect de l'arrêté de mise en demeure pour le dépassement des valeurs limites applicables au rejet d'eaux pluviales ou de process fixées par l'arrêté d'autorisation d'exploitation de l'installation classée qui auraient été commis sur la commune de Bourg-Fidèle étaient établis, elle ne pouvait sans se contredire et, à tout le moins, sans mieux s'en expliquer, considérer que les faits en cause n'avaient pu causer aucun préjudice aux habitants de la commune ;
" alors qu'enfin, les juges doivent se prononcer sur l'ensemble des faits visés à la prévention ; qu'en ne recherchant pas si le fait d'avoir laissé se répandre des eaux usées dépassant les valeurs limites de rejet fixées par l'arrêté d'autorisation d'exploitation du 24 décembre 1996, visé à la prévention, n'était pas de nature à créer un risque immédiat de mort ou de blessure pour les habitants de la commune de Bourg-Fidèle au sens de l'article 223-1 du code pénal, la cour d'appel a méconnu l'article 388 du code de procédure pénale et n'a donc pu, par conséquent, se prononcer sur les préjudices dont faisaient état les parties civiles, préjudice d'agrément du fait de la contamination de l'air et du sol, préjudice physiologique subi par leur fille du fait du développement d'un cancer et préjudice moral lié au risque de développer des affections graves pour les parents, dont l'infraction qui aurait été commise entre le 1er janvier 1996 et le 29 octobre 1999, aurait été au moins l'un des faits causals " ;
Sur le moyen unique de cassation, proposé pour Denise
G...
, pris de la violation des articles 223-1 du code pénal,514-11 II du code de l'environnement,2,3,388,463,591 et 593 du code de procédure pénale ; défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué qui a condamné la société Métal Blanc pour pollution de cours d'eau et non-respect d'un arrêté de mise en demeure concernant une installation classée et l'a relaxée pour les faits de risque causé à autrui, a débouté Denise
G...
de leur demande de dommages et intérêts ;
" aux motifs que, l'analyse des prélèvements réalisés les 7 et 8 janvier 1998 permettait aux experts de mettre en cause, en 1999, l'usine Métal Blanc dans l'existence d'une pollution des sols et des végétaux au plomb (avec des dépassements de 7 à 40 fois les critères d'hygiène de l'environnement de l'office mondial de la santé) et au cadmium (avec des dépassements de 3 à 25 fois les critères d'hygiène de l'environnement de l'office mondial de la santé) mais également d'une pollution atmosphérique significative dans un rayon de 500 mètres incluant le village de Bourg Fidèle ; que la contre-expertise confiée à A. J...et H. K... évoquait également la contamination des personnels de l'usine ainsi que des enfants habitant la commune et en particulier de ceux dont l'un des parents travaillait dans l'usine, en la rattachant à une défaillance des conditions d'hygiène du travail (absence de système efficace de captage et de dépoussiérage des fumées inhalées par les personnels, insuffisance des règles prescrites dans la société) ; qu'" un comité de pilotage chargé d'un programme de suivi et de dépistage de la plombémie chez les enfants de la commune de Bourg-Fidèle et des salariés a été institué lequel, à partir des prélèvements réalisés d'abord en juin et novembre 1998 puis en juin 1999, déposait les rapports faisant état d'une contamination d'une partie de la population en janvier puis en juillet 1999 " ; que " l'arrêté préfectoral d'autorisation n° 4366 du 24 décembre 1996 est un acte administratif individuel qui ne répond pas à la définition du règlement pris comme un acte à caractère général et absolu " ; qu'" en revanche le décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 présente un tel caractère " ; qu'" en son article 38, il dispose que l'exploitant d'une installation soumise à autorisation ou à déclaration est tenu de déclarer dans les meilleurs délais à l'inspection des installations classées les accidents ou incidents survenus du fait du fonctionnement de cette installation qui sont de nature à porter atteinte aux intérêts mentionnés à l'article 1er de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement " ; qu'" il s'agit d'une obligation particulière de sécurité qui impose un modèle de conduite circonstanciée " ; que cependant, " il n'est pas établi en l'espèce qu'en ne déclarant que le 27 avril 1999 l'incident survenu dans la nuit du 23 au 24 avril, Métal Blanc eut pour autant exposé instantanément le voisinage de l'usine à un péril létal ou même à un danger d'affection chronique " ; que sur les trois premiers chefs de prévention, " par des motifs pertinents que la cour fait siens, le tribunal a exactement exposé, analysé et qualifié les faits " ; que, sur l'action civile, les parties civiles " ne justifient pas en l'espèce d'un lien direct entre le préjudice dont elles poursuivent la réparation et les deux seules infractions imputables à la SA Métal Blanc " ; qu'il n'est pas établi en effet que l'intoxication du poisson, l'absence d'un dispositif d'alarme sur les installations de dépoussiérage ou le dépassement des valeurs limites applicables au rejet des eaux aient pu causer par eux-mêmes, de 1996 à 1999, les dommages respectivement allégués ; que " la juridiction pénale n'a pas été indistinctement saisie de l'ensemble des nuisances occasionnées par l'activité ordinaire de l'usine Métal Blanc " ;
" et aux motifs adoptés que, sur la deuxième infraction visée à la prévention, " suite au non-respect des dispositions de l'arrêté d'autorisation en date du 24 décembre 1996, le préfet met en demeure l'exploitant d'installer un dispositif d'alarme sur les installations de dépoussiérage des fours à fusion et d'affinage dans un délai d'un mois et de respecter les valeurs limites de rejet des eaux pluviales et de process dans le délai de trois mois " ; que " les 2 février et 24 mars 1999, la direction régionale de l'industrie, de la recherche et de l'environnement (DRIRE) dresse deux procès-verbaux à l'encontre de la SA Métal Blanc à raison du non-respect des dispositions de l'arrêté du 22 décembre 1998, en particulier au vu des résultats d'analyses des eaux pluviales du mois de mars 1999 relevant des taux de concentration en plomb dix fois supérieurs aux maxima fixées " ; que " par ailleurs, l'Institut de recherche criminelle relève une absence d'aspiration des aérosols au-dessus des fours d'affinage, une panne de la vanne de relevage des eaux de ruissellement sans que la production soit arrêtée " ; que " en conséquence, la SA Métal Blanc reconnaissant les faits qui lui sont reprochés et qui sont par ailleurs établis par les éléments d'enquête, le tribunal de Céans considèrera l'infraction susvisée constituée et la prévenue déclarée coupable de ce chef " ;
" alors que d'une part, l'article 2 du code de procédure pénale exige seulement que le préjudice invoqué par la victime soit personnel et résulte directement de l'infraction ; qu'il n'exige pas que l'infraction soit la cause exclusive du dommage invoqué par la victime ; que dès lors la cour d'appel qui a débouté les parties civiles de leur action au motif qu'elles n'avaient pas établi que leur préjudice résultait exclusivement des faits dont elle avait déclaré la société Métal Blanc coupable et non du fait de l'exploitation depuis des années de l'usine, alors qu'il suffisait que les faits visés à la prévention aient participé à la réalisation du préjudice invoqué pour en justifier l'indemnisation, la cour d'appel a violé l'article précité ;
" alors que d'autre part, l'article 3 du code de procédure pénale prévoit que l'action civile est recevable pour tous les chefs de préjudice découlant des faits objets de la poursuite ; que dès lors que la cour d'appel constatait qu'un comité de pilotage concluait à la contamination d'une partie de la population de la commune en janvier et en juillet 1999, elle ne pouvait sans se contredire ou mieux s'en expliquer, et au besoin ordonner une mesure d'instruction complémentaire, affirmer que les parties civiles n'établissaient pas que les faits de non-respect de l'arrêté de mise en demeure pour le dépassement des valeurs limites applicables du rejet d'eaux pluviales ou de process fixées par l'arrêté d'autorisation d'exploitation de l'installation classée qui auraient été commis en 1999, soit la même année que les contaminations des habitants de la commune constatées, avaient pu leur causer un quelconque préjudice ;
" alors que, de troisième part, dès lors que la cour d'appel constatait que le délit de destruction de poissons dans les eaux de La Murée et celui de non-respect de l'arrêté de mise en demeure pour le dépassement des valeurs limites applicables au rejet d'eaux pluviales ou de process fixées par l'arrêté d'autorisation d'exploitation de l'installation classée qui auraient été commis sur la commune de Bourg-Fidèle étaient établis, elle ne pouvait sans se contredire et, à tout le moins, sans mieux s'en expliquer, considérer que les faits en cause n'avaient pu causer aucun préjudice aux habitants de la commune, qui invoquaient comme Denise
G...
, outre une dépréciation de leur bien, un préjudice d'agrément résultant d'un mode de vie modifié par les pollutions et un préjudice moral résultant de leur contamination et de la crainte de développer des maladies, dès lors que ces délits sanctionnent des contaminations nuisibles pour la faune, la flore et par conséquent l'être humain ;
" alors que, de quatrième part, les juges doivent se prononcer sur l'ensemble des faits visés à la prévention ; qu'en ne recherchant si le fait, visé à la prévention, d'avoir laissé se répandre des eaux usées dépassant les valeurs limites de rejet fixées par l'arrêté d'autorisation d'exploitation du 24 décembre 1996 pris en application du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 soumettant à autorisation des installations classées et imposant le respect des obligations fixées par ledit arrêté, n'était pas de nature à créer un risque immédiat de mort ou de blessure pour les habitants de la commune de Bourg-Fidèle au sens de l'article 223-1 du code pénal, la cour d'appel a méconnu l'article 388 du code de procédure pénale et n'a donc pu, par conséquent, se prononcer sur les préjudices dont faisait état la partie civile, préjudice d'agrément du fait de la contamination de l'air et du sol, préjudice physiologique et préjudice moral lié au risque de développer des affections graves, dont l'infraction qui aurait été commise entre le 1er janvier 1996 et le 29 octobre 1999, aurait été au moins l'un des faits causals ;
" alors qu'à tout le moins, l'article 223-1 du code pénal incrimine la mise en danger d'autrui par le non-respect d'une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement ; qu'il n'exige pas que cette obligation soit prévue par la loi ou le règlement ; que, dès lors, à supposer que la cour d'appel ait considéré que l'article 17 du décret du 21 septembre 1977 n'imposait aucune obligation particulière de sécurité, alors qu'il prévoit expressément que l'autorisation d'exploitation d'une installation classée donne lieu à un arrêté préfectoral fixant les conditions d'aménagement et d'exploitation de cette installation, elle a méconnu l'article précité ;
" alors qu'en tout état de cause, en ne recherchant pas si les dispositions de l'arrêté préfectoral qui auraient été méconnues n'avaient pas été prises en application d'un arrêté ministériel visé par l'article 17 du décret du 21 septembre 1977, et notamment de l'arrêté du 1er mars 1993 relatif aux prélèvements et à la consommation d'eau ainsi qu'aux rejets de toute nature des installations classées pour la protection de l'environnement soumises à autorisation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale " ;
Sur le moyen unique de cassation, proposé pour Marjorie Z..., pris de la violation des articles 223-1 du code pénal,514-11 II du code de l'environnement,2,3,388,463,591 et 593 du code de procédure pénale ; défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué qui a condamné la société Métal Blanc pour pollution de cours d'eau et non-respect d'un arrêté de mise en demeure concernant une installation classée et l'a relaxée pour les faits de risque causé à autrui, a débouté Marjorie Z..., agissant tant en son nom personnel qu'au nom de son fils mineur, Sulyvann ;
" alors que d'une part, l'article 2 du code de procédure pénale exige seulement que le préjudice invoqué par la victime soit personnel et résulte directement de l'infraction ; qu'il n'exige pas que l'infraction soit la cause exclusive du dommage invoqué par la victime ; que dès lors la cour d'appel qui a débouté les parties civiles de leur action au motif qu'elles n'avaient pas établi que leur préjudice résultait exclusivement des faits dont elle avait déclaré la société Métal Blanc coupable et non du fait de l'exploitation depuis des années de l'usine, alors qu'il suffisait que les faits visés à la prévention aient participé à la réalisation du préjudice invoqué pour en justifier l'indemnisation, la cour d'appel a violé l'article précité ;
" alors que d'autre part, l'article 3 du code de procédure pénale prévoit que l'action civile est recevable pour tous les chefs de préjudice découlant des faits objets de la poursuite ; que dès lors que la cour d'appel constatait qu'un comité de pilotage concluait à la contamination d'une partie de la population de la commune en janvier et en juillet 1999, elle ne pouvait sans se contredire ou mieux s'en expliquer, et au besoin ordonner une mesure d'instruction complémentaire, affirmer que les parties civiles n'établissaient pas que les faits de non-respect de l'arrêté de mise en demeure pour le dépassement des valeurs limites applicables du rejet d'eaux pluviales ou de process fixées par l'arrêté d'autorisation d'exploitation de l'installation classée qui auraient été commis en 1999, soit la même année que les contaminations des habitants de la commune constatées, avaient pu leur causer un quelconque préjudice ;
" alors que, de troisième part, dès lors que la cour d'appel constatait que le délit de destruction de poissons dans les eaux de La Murée et celui de non-respect de l'arrêté de mise en demeure pour le dépassement des valeurs limites applicables au rejet d'eaux pluviales ou de process fixées par l'arrêté d'autorisation d'exploitation de l'installation classée qui auraient été commis sur la commune de Bourg-Fidèle étaient établis, elle ne pouvait sans se contredire et, à tout le moins, sans mieux s'en expliquer, considérer que les faits en cause n'avaient pu causer aucun préjudice aux habitants de la commune dès lors que ces délits sanctionnent des contaminations nuisibles pour la faune, la flore et par conséquent l'être humain et Marjorie Z... invoquant, outre une dépréciation de ses biens, un préjudice d'agrément résultant d'un mode de vie modifié par les pollutions, un préjudice moral résultant de sa contamination et de celle de son fils et de la crainte de développer des maladies, et même un préjudice physique, les contaminations de leur organisme étant établie et Sulyvann présentant des symptômes inquiétants pour un tout jeune enfant ;
" alors que, de quatrième part, les juges doivent se prononcer sur l'ensemble des faits visés à la prévention ; qu'en ne recherchant si le fait, visé à la prévention, d'avoir laissé se répandre des eaux usées dépassant les valeurs limites de rejet fixées par l'arrêté d'autorisation d'exploitation du 24 décembre 1996 pris en application du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977 soumettant à autorisation des installations classées et imposant le respect des obligations fixées par ledit arrêté, n'était pas de nature à créer un risque immédiat de mort ou de blessure pour les habitants de la commune de Bourg-Fidèle au sens de l'article 223-1 du code pénal, la cour d'appel a méconnu l'article 388 du code de procédure pénale et n'a donc pu, par conséquent, se prononcer sur les préjudices dont faisait état la partie civile, préjudice d'agrément du fait de la contamination de l'air et du sol, préjudice physiologique et préjudice moral lié au risque de développer des affections graves pour les parents, dont l'infraction qui aurait été commise entre le 1 er janvier 1996 et le 29 octobre 1999, aurait été au moins l'un des faits causals ;
" alors qu'à tout le moins, l'article 223-1 du code pénal incrimine la mise en danger d'autrui par le non-respect d'une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement ; qu'il n'exige pas que cette obligation soit prévue par la loi ou le règlement ; que dès lors, à supposer que la cour d'appel ait considéré que l'article 17 du décret du 21 septembre 1977 n'imposait aucune obligation particulière de sécurité, alors qu'il prévoit expressément que l'autorisation d'exploitation d'une installation classée donne lieu à un arrêté préfectoral fixant les conditions d'aménagement et d'exploitation de cette installation, elle a méconnu l'article précité ;
" alors qu'en tout état de cause, en ne recherchant pas si les dispositions de l'arrêté préfectoral qui auraient été méconnues n'avaient pas été prises en application d'un arrêté ministériel visé par l'article 17 du décret du 21 septembre 1977, et notamment de l'arrêté du 1 er mars 1993 relatif aux prélèvements et à la consommation d'eau ainsi qu'aux rejets de toute nature des installations classées pour la protection de l'environnement soumises à autorisation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale " ;
Sur les mêmes moyens relevés d'office au profit des parties s'étant pourvues mais n'ayant pas produit :
Les moyens étant réunis ;
Sur les trois premières branches des moyens ;
Attendu que, pour débouter les parties civiles de leurs demandes formées du chef des délits réprimés par les articles L. 432-2 et L. 514-11 du code de l'environnement, l'arrêt énonce qu'il n'est pas établi que l'absence d'un dispositif d'alarme sur les installations de dépoussériage, le dépassement des valeurs limites applicables au rejet des eaux ou l'intoxication du poisson aient pu, par eux-mêmes, directement causer les préjudices d'agrément et les dommages physiologiques allégués ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, procédant de son appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que les griefs ne sont pas fondés ;
Mais sur la quatrième branche du moyen proposé pour Yves et Yannick B... ;
Sur les quatrième, cinquième et sixième branches des moyens proposés pour Denise
G...
et Marjorie Z... :
Et sur le second moyen de cassation proposé par le procureur général :
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article 223-1 du code pénal ;
Attendu que ce texte punit le fait d'exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente par la violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence prévue par la loi ou le règlement ; qu'il n'exige pas que les fautes reprochées au prévenu soient la cause exclusive du danger ;
Attendu que, pour relaxer la société Métal blanc du chef de mise en danger d'autrui et débouter les parties civiles de leurs demandes, la cour d'appel énonce, par motifs propres, d'une part, que l'article 223-1 du code pénal, qui ne vise que la violation des obligations de sécurité ou de prudence imposées par la loi ou le règlement, ne saurait s'appliquer aux prévisions d'un acte administratif individuel, tel que l'arrêté préfectoral du 24 décembre 1996, d'autre part, que, si l'exploitant est tenu, en vertu de l'article 38 du décret n° 77-1133 du 21 septembre 1977, de déclarer dans les meilleurs délais à l'administration les incidents survenus du fait d'une installation classée, il n'est pas établi en l'espèce que le signalement tardif d'une fuite d'eaux résiduaires, survenue dans l'usine au cours de la nuit du 23 au 24 avril 1999, ait exposé instantanément le voisinage à un péril létal ou même à un danger d'affection chronique ;
Que l'arrêt, par motifs adoptés du jugement de première instance, retient en outre, que les données de la science ne permettent pas d'établir une valeur de toxicité du plomb caractérisant un risque immédiat de mort ou de blessures et que l'instruction n'a pas établi que les séquelles et pathologies médicalement attestées dont souffraient les victimes avaient pour origine les faits visés par la citation sur la période du 24 décembre 1996 au 29 octobre 1999 ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans rechercher si l'arrêté d'autorisation du 24 décembre 1996 ne se bornait pas à appliquer à l'installation, conformément à l'article 17 du décret du 21 septembre 1977 visé à la prévention, des prescriptions techniques, relatives, en particulier, aux émissions aériennes de plomb et de cadmium, fixées par des arrêtés ministériels à caractère réglementaire, et alors que, d'une part, il résultait de ses propres énonciations que l'usine était située à proximité immédiate du centre du village, en face d'une aire de jeux qui avait dû être fermée en raison de la contamination de son sol, et que, d'autre part, le jugement de première instance, dont les motifs étaient partiellement adoptés, relevait que le plomb, l'arsenic et le cadmium favorisaient le cancer du rein, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Que l'intérêt d'une bonne administration de la justice commande que, en application de l'article 612-1 du code de procédure pénale, l'annulation prononcée ait effet à l'égard des parties à la procédure qui ne se sont pas pourvues ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Reims, en date du 7 novembre 2006, en ses seules dispositions pénales et civiles relatives à la mise en danger d'autrui, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;
DIT que l'annulation prononcée aura effet à l'égard des autres parties qui ne se sont pas pourvues et qui sont concernées par la prévention de mise en danger d'autrui ;
Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Reims, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Farge conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Guihal conseiller rapporteur, MM. Blondet, Palisse, Le Corroller, Mme Radenne, M. Straehli conseillers de la chambre, Mme Slove, MM. Chaumont, Delbano conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Finielz ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 06-89365
Date de la décision : 30/10/2007
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

MISE EN DANGER DE LA PERSONNE - Risques causés à autrui - Eléments constitutifs - Violation délibérée d'une obligation particulière de sécurité ou de prudence - Lien de causalité - Lien de causalité exclusif - Nécessité (non)

L'article 223-1 du code pénal n'exige pas que les fautes reprochées au prévenu soient la cause exclusive du danger. Encourt la cassation l'arrêt qui, pour prononcer une relaxe de ce chef, retient qu'il n'est pas établi que le risque résultant pour les victimes de l'exposition à des émissions aériennes de plomb et de cadmium ait pour seule origine les faits d'inobservation des normes de rejet de ces substances pendant la période de trois années visée par la prévention


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 07 novembre 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 30 oct. 2007, pourvoi n°06-89365, Bull. crim.Buleltin criminel 2007, N°261
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle Buleltin criminel 2007, N°261

Composition du Tribunal
Président : M. Farge (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat général : M. Finielz
Rapporteur ?: Mme Guihal
Avocat(s) : Me Blondel, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2007:06.89365
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