LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le seize octobre deux mille sept, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire DELBANO, les observations de Me DE NERVO, et de la société civile professionnelle PARMENTIER et DIDIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;
CASSATION et désignation de juridiction sur le pourvoi formé par X... Tony, X... André, Y... Ginette, épouse X..., civilement responsables, contre l'arrêt de la cour d'appel de Besançon, chambre spéciale des mineurs, en date du 15 février 2007, qui, dans la procédure suivie contre le premier des chefs de vols et dégradations du bien d'autrui, a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 1382 du code civil,2,203,464 et 593 du code de procédure pénale, contradiction de motifs et violation de la loi :
" en ce que l'arrêt attaqué a, d'une part, confirmé le jugement en ce qu'il avait statué sur la part de responsabilité de chacun des mineurs ayant participé aux dégradations visées par la poursuite et, d'autre part, a condamné solidairement les coauteurs de chaque infraction commise au préjudice de la société Besançon Préfa à réparer les dommages subis par cette dernière avant de condamner Tony X... et ses parents, civilement responsables à verser une indemnité provisionnelle de 10 000 euros à la société Besançon Préfa ;
" aux motifs qu'il sera rappelé que, concernant les véhicules de collection, le tribunal a fixé le préjudice subi par François A... et par Jacques A... à la somme de 23 562 euros et a condamné in solidum Tony X... et ses parents civilement responsables, Guillaume B... et ses parents civilement responsables, Francis C... et ses parents civilement responsables, Fabien D... et ses parents civilement responsables, Mathieu E... et ses parents civilement responsables, Adrien F... et ses parents civilement responsables, et Yohann G... et ses parents civilement responsables à payer chacun (chaque mineur) la somme de 3 366 euros à François A... à titre de dommages-intérêts toute cause de préjudice confondue, somme qui portera intérêts de droit à compter du jugement, la présente condamnation étant déclarée solidaire entre tous les mineurs et civilement responsables qui en font l'objet ; que, s'il est vrai qu'une erreur matérielle a été commise dans la prévention, puisque seul le nom de Jacques A... a été mentionné alors que le tribunal était saisi de l'ensemble des faits visés dans la procédure pénale et que tant Jacques A... que François A... ont été entendus et ont porté plainte, il n'est pas envisageable de retarder davantage une indemnisation attendue depuis les mois d'avril et mai 2005 et qui a donné lieu à un débat contradictoire loyal devant le tribunal pour enfants, certains mineurs et leurs parents ayant au demeurant pris leurs responsabilités en dédommageant les victimes, comme l'ont fait les consorts H... qui se désistent de leur appel et qui ont d'ores et déjà payé à François A... la somme de 3 600 euros ; que la demande de constitution civile de François A... est donc bien recevable ;
" 1) alors que, aux termes de l'article 464 du code de procédure pénale, en matière d'action civile, la compétence de la juridiction pénale, limitée à l'examen des demandes formées par les parties civiles contre les prévenus, ne s'étend pas aux recours de ces derniers entre eux ; que, saisis de la réparation du préjudice subi par la société Besançon Préfa en suite des agissements dont les mineurs X..., D..., B..., E... et leurs parents civilement responsables, d'une part, et les mineurs X..., I..., J... et leurs parents civilement responsables, d'autre part, les juges du second degré ont déclarés ces derniers solidairement responsables des dommages causés à la partie civile avant de fixer la part de responsabilité incombant à chacun d'eux ; qu'en statuant ainsi, la chambre spéciale des mineurs de la cour d'appel, qui n'avait pas compétence pour fixer la part de responsabilité incombant aux personnes poursuivies, a violé l'article 464 du code de procédure pénale ;
" 2) alors que, au sens de l'article 464 du code de procédure pénale, tous les individus condamnés pour un même délit ou pour un délit connexe sont tenus solidairement des amendes, des restitutions, des dommages-intérêts et des frais causés par leur faute commune ; que cette solidarité s'applique aux condamnations au paiement tant des indemnités définitives que des indemnités provisionnelles ; que, dès lors, la cour d'appel ne pouvait pas condamner les seuls consorts X... à verser à la société Besançon Préfa une indemnité provisionnelle sans violer cet article " ;
Vu les articles 480-1 et 464 du code de procédure pénale ;
Attendu que, d'une part, aux termes du premier de ces textes, les personnes condamnées pour un même délit sont tenues solidairement des restitutions et des dommages-intérêts ;
Attendu que, d'autre part, il résulte du second de ces textes qu'en matière civile, la compétence de la juridiction pénale, limitée à l'examen des demandes formées par les parties civiles contre les prévenus, ne s'étend pas aux recours de ces derniers entre eux ; qu'il s'ensuit qu'il n'appartient pas à cette juridiction de prononcer un partage de responsabilité entre les coauteurs du dommage dont la réparation a été ordonnée ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Tony X... et six autres mineurs ont été déclarés coupables de dégradations commises au préjudice de la société Besançon Préfa ;
Attendu qu'après avoir condamné solidairement les sept coauteurs, ainsi que leurs parents en qualité de civilement responsables, à réparer les dommages subis par la victime, restant à évaluer par expertise, l'arrêt procède à une répartition des responsabilités entre coauteurs, dans leurs rapports entre eux, et alloue à la société Besançon Préfa une provision de 10 000 euros, mise à la charge des seuls consorts X..., de façon à " éviter toute difficulté d'exécution à ce stade de la procédure " ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel, qui n'avait pas compétence pour opérer un partage de responsabilité entre les coauteurs et qui était tenue de les condamner solidairement au paiement de la provision, a méconnu les textes susvisés et le principe rappelé ci-dessus ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Besançon, chambre spéciale des mineurs, en date du 15 février 2007, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Dijon, chambre spéciale des mineurs, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
DIT n'y avoir lieu à application, au profit de la société Besançon Préfa, de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Besançon, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Farge conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Delbano conseiller rapporteur, M. Blondet conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;