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12/09/2007 | FRANCE | N°06-87498

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 12 septembre 2007, 06-87498


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le douze septembre deux mille sept, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller POMETAN, les observations de la société civile professionnelle BOULLOCHE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FINIELZ ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Stéphanie, agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure Léa Y...,
parties civiles,
contre l'arrêt de la

cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 19e chambre, en date du 21 juin 2006, qui l'a ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le douze septembre deux mille sept, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller POMETAN, les observations de la société civile professionnelle BOULLOCHE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FINIELZ ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Stéphanie, agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure Léa Y...,
parties civiles,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 19e chambre, en date du 21 juin 2006, qui l'a déboutée de ses demandes après relaxe de Jean-Luc Y... du chef d'agressions sexuelles aggravées ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 222-29, 222-30 du code pénal, de l'article préliminaire et de l'article 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Jean-Luc Y... du chef d'atteinte sexuelle avec violence, contrainte, menace ou surprise sur la personne de Léa Y..., mineur de moins de 15 ans, faits commis par un ascendant légitime ;
"aux motifs qu'il résulte de l'audition, par la cour, de Léa, aujourd'hui âgée de 8 ans, qu'elle n'a plus que des souvenirs imprécis des faits dénoncés à l'origine de l'affaire et des circonstances dans lesquelles ils se seraient produits ; qu'elle décrit principalement des sévices qui ne figurent pas dans la procédure mais que la psychologue qui la suivait avait tenu à communiquer à la juridiction de première instance ; que les sévices décrits par la thérapeute consistaient en l'introduction par trois fois d'une pince à linge dans le vagin ; que l'enfant lui déclarait qu'il avait serré avec ses doigts et que cela lui faisait de plus en plus mal et qu'elle situait cette scène juste avant le film sur la mariée, le même jour ; que, cependant, ces actes de violence ne pouvaient pas, compte tenu de la description qu'en fait Léa et la douleur qu'elle y a associé, ne pas provoquer des blessures que sa maman aurait nécessairement constatées ou dont le médecin légiste aurait dû trouver la trace, fût-ce légère, lors de l'examen approfondi pratiqué le 16 septembre 2003 ; que ce médecin n'a relevé aucune trace traumatique et constaté que l'hymen était intact ; que Léa a ajouté, à l'audience, qu'en dehors de cela, son papa avait mis son doigt et qu'il lui avait embrassé une fois le minou ; que la cour relève que la procédure initiale ne s'est pas déroulée dans des conditions satisfaisantes qui ont faussé son déroulement ultérieur ; que la psychologue auprès de laquelle Stéphanie X... avait conduit Léa ne s'est pas limitée à faire le signalement que la loi exige ; qu'elle a pris contact avec les services de police qui ont entrepris des investigations en procédant notamment à une perquisition chez Jean-Luc Y... et ont entendu l'enfant ; que cette audition, ainsi que la cour a pu le vérifier par la lecture de l'enregistrement numérisé, n'avait pas pour objet de permettre à Léa de se livrer mais visait à lui faire redire ce que la psychologue avait dit aux policiers ; que cet enregistrement, effectué en présence de Stéphanie X..., interdit à Léa toute spontanéité, l'enfant se retournant régulièrement vers sa mère pour savoir si elle ne s'était pas trompée ; que, loin d'être un recueil indiscutable de la parole de l'enfant, cette étape essentielle de la procédure a été viciée par la pression exercée sur l'enfant et par l'induction des réponses ; que Jean-Luc Y... a vivement dénoncé au cours de l'instruction les conditions de l'enquête préliminaire qui porte la trace de ses constatations sur les propos qu'on lui fait tenir et sur la sélection de ses réponses ; que la cour relève qu'alors qu'une confrontation était nécessaire entre le père et l'enfant, celle-ci sera organisée dans des conditions qui ont bouleversé Léa, lui faisant perdre ses repères, Jean-Luc Y... ayant pendant cette confrontation été attaché au mur par des menottes et tournant le dos à sa fille ; qu'il en résulte que, si Léa était une enfant perturbée par des préoccupations sexuelles, qui avait le plus vraisemblablement été confrontée à des jeux à connotation sexuelle prématurés comme le laisse penser l'histoire racontée de la mariée, rien dans la procédure soumise à la cour ne lui permet de conclure que Jean-Luc Y... est l'auteur d'actes d'agression à l'égard de Léa, ni même de gestes inappropriés ; que les dénonciations à l'origine de l'affaire sont intervenues dans un contexte marqué par la naissance d'un nouvel enfant de Stéphanie X... et le fait que les parents avaient eu recours à la justice, ne parvenant plus à s'entendre directement sur les conditions du droit de visite et d'hébergement du père ;
"1) alors que, les juges ne sauraient fonder leur décision sur des éléments qui n'ont pas été librement débattus entre les parties ; qu'en se fondant en l'espèce sur l'enregistrement audiovisuel de l'audition, par les services de police, de l'enfant Léa en septembre 2003, et notamment sur le fait que cette audition n'aurait pas été spontanée, l'enfant se retournant constamment vers sa mère pour s'assurer qu'elle ne s'était pas trompée, quant il ne résulte d'aucun élément de l'arrêt que cette audition avait fait l'objet d'une projection à l'audience et avait été contradictoirement débattue, la cour d'appel a entaché sa décision d'une violation du principe du contradictoire et des textes susvisés ;
"2) alors que, les expertises psychologiques de l'enfant ont toutes conclu à la crédibilité de ses dires, la fillette présentant des symptômes caractéristiques des enfants victimes d'abus sexuels ; que, par ailleurs, une des deux expertises psychologiques du père a conclu qu'il présentait une personnalité structurée sur un mode pervers et qu'il était susceptible de mettre en scène des comportements sexuels déviants ; que l'expertise psychiatrique a mis en avant une personnalité en apparence équilibrée avec cependant des signes de dysfonctionnement affectif et un défaut d'empathie vis-à-vis de sa fille ; que Jean-Luc Y..., lors de sa garde-à-vue, a admis l'existence de gestes déplacés accidentels, précisant que sa fille pouvait être provocante ; qu'en estimant qu'aucun élément du dossier ne permettait de conclure que Jean- Luc Y... était l'auteur d'actes d'agression à l'égard de Léa ni même de gestes inappropriés, sans réfuter les éléments précités, la cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motifs et a violé les textes susvisés ;
"3) alors, qu'il apparaît qu'aucun enregistrement de la confrontation de Léa et de son père n'a pu s'opérer en raison d'un dysfonctionnement des appareils d'enregistrement ; qu'en estimant cependant que la confrontation entre l'enfant et son père s'était organisée dans des circonstances qui avaient bouleversé Léa, Jean-Luc Y... ayant été pendant cette confrontation attaché au mur par des menottes et tournant le dos à sa fille, sans expliquer sur quels éléments elle se fondait pour en décider ainsi, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des textes susvisés ;
"4) alors qu'il résulte des éléments versés au dossier que, si les parents avaient eu un différend sur les modalités de garde de leur enfant, ce qui avait entraîné la saisine du juge, ce différend avait été réglé et avait abouti à un accord attribuant une garde très élargie au père, cet accord étant entériné par le juge dans une ordonnance du 24 juin 2003, soit bien avant les faits dénoncés par la fillette en septembre 2003 ; qu'en se fondant, pour écarter les déclarations de l'enfant, sur le fait que ses dénonciations étaient intervenues dans un contexte marqué par le fait que les parents avaient eu recours à la justice, ne parvenant plus à s'entendre directement sur les conditions du droit de visite et d'hébergement du père, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs et a violé les textes susvisés" ;
Attendu qu'en fondant leur conviction sur l'examen, au cours du délibéré, de l'enregistrement audiovisuel de l'audition de Léa Y..., réalisé en application des dispositions de l'article 706-52 du code de procédure pénale, ies juges n'ont pas méconnu le principe du contradictoire, dès lors qu'une copie de l'enregistrement était jointe au dossier et qu'elle pouvait être visionnée par les avocats des parties dans les conditions fixées par l'alinéa 7 de ce texte ;
Attendu que, par ailleurs, les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, et en répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, exposé les motifs pour lesquels elle a estimé que la preuve des infractions reprochée n'était pas rapportée à la charge du prévenu, en l'état des éléments soumis à son examen, et a ainsi justifié sa décision déboutant la partie civile de ses prétentions ;
D'où il suit que le moyen qui, en ses deuxième, troisième et quatrième branches, se borne à remettre en question l'appréciation souveraine des juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
DECLARE IRRECEVABLE la demande faîte par Stéphanie X... au titre de l'article 618-1 du du code de procédure pénale ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Pometan conseiller rapporteur, M. Le Gall, Mme Chanet, M. Pelletier, Mme Ponroy, M. Arnould, Mme Koering-Joulin, MM. Corneloup, Straelhi conseillers de la chambre, Mmes Caron, Slove conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Finielz ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 06-87498
Date de la décision : 12/09/2007
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PREUVE - Intime conviction - Eléments servant à la fonder - Enregistrement audiovisuel de l'audition d'un mineur victime - Examen de l'enregistrement par les juges au cours du délibéré - Principe du contradictoire - Respect - Condition

En fondant leur conviction sur l'examen, au cours du délibéré, de l'enregistrement audiovisuel réalisé en application des dispositions de l'article 706-52 du code de procédure pénale, de l'audition d'une mineure victime d'agressions sexuelles, les juges n'ont pas méconnu le principe du contradictoire, dès lors qu'une copie de cet enregistrement était jointe au dossier, laquelle pouvait être visionnée par les avocats des parties dans les conditions fixées par l'alinéa 7 de ce texte


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 21 juin 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 12 sep. 2007, pourvoi n°06-87498, Bull. crim. criminel 2007, N° 207
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2007, N° 207

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Finielz
Rapporteur ?: M. Pometan
Avocat(s) : SCP Boulloche

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2007:06.87498
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