Sur le moyen unique :
Attendu, selon la décision attaquée (ordonnance de référé rendue le 13 septembre 2005 par le conseil de prud'hommes de Paris), que la société Autogrill Paris Saint-Lazare a connu un mouvement de grève déclenché le 7 mai 2004 qui s'est achevé le 11 mai 2004 par la signature d'un protocole d' accord de fin de grève prévoyant que l'employeur ne serait pas tenu de payer aux salariés grévistes leurs salaires correspondant à la période de la grève ;
Attendu que M. X... et trente deux autres salariés de la société Autogrill Paris Saint-Lazare ont saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de sommes à titre d' indemnité compensatrice de la perte de salaires occasionnée par la grève ;
Attendu que l'employeur fait grief à la décision attaquée d'avoir fait droit à leurs demandes alors, selon le moyen :
1°/ qu'un accord de fin de grève signé par l'ensemble des organisations syndicales concernées est opposable en toutes ses clauses aux salariés grévistes qui, en mettant fin à leur grève en exécution de l'accord, l'ont implicitement ratifié ; qu'en l'espèce, l'accord de fin de grève signé par l'ensemble des organisations syndicales de l'entreprise, en exécution duquel les salariés grévistes avaient mis fin à leur grève et obtenu le respect des engagements de l'employeur qui y étaient stipulés, leur était opposable du fait de cette ratification implicite, notamment en sa clause prévoyant le non-paiement des heures de grève ; qu'en jugeant du contraire, le conseil de prud'hommes a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que les juges sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir dans ses conclusions que deux des salariés demandeurs avaient eux-mêmes signé l'accord de fin de grève, de sorte que celui ci, en sa clause visant le refus de l'employeur de régler les heures de grève, était au moins opposable à ces derniers ; qu'en condamnant l'employeur à payer à l'ensemble des demandeurs les heures de grève, sans répondre aux conclusions de l'employeur sur ce point, le conseil de prud'hommes a violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
3°/ que les juges du fond ne peuvent dénaturer les écrits qui leur sont soumis ; qu'en l'espèce, l'accord de fin de grève, conclu avec les organisations syndicales, stipulait, en son article 5 que "la direction confirme qu'elle ne paiera pas les heures de grève. Celles-ci seront retenues sur la paye du mois de mai 2004" ; qu'en affirmant qu'il ne ressort pas d'évidence du libellé de l'article 5, l'acceptation par les organisations syndicales du non-paiement des jours de grève, le conseil de prud'hommes a dénaturé les termes clairs et précis de l'accord de fin de grève en violation de l'article 1134 du code civil ;
4°/ que le paiement des heures de grève n'est pas dû sauf en cas de violation grave et délibérée par l'employeur de ses obligations de nature à contraindre les salariés à une cessation concertée du travail ; qu'en l'espèce, si le conseil de prud'hommes a relevé que l'employeur avait manqué à son obligation de payer des heures supplémentaires, il ne résulte nullement de ses motifs une violation délibérée par l'employeur de cette obligation ; qu'ainsi, le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard des articles R. 516-31 et L. 521-1 du code du travail ;
5°/ qu'en tout état de cause, l'employeur contestait sérieusement avoir eu l'intention délibérée de ne pas payer les heures supplémentaires avant le mouvement de grève litigieux dès lors d'une part qu'il lui avait seulement été demandé de réunir une commission de suivi de l'accord de réduction du temps de travail, que les salariés n'avaient d'ailleurs et d'autre part jamais réclamé d'heures supplémentaires jusqu'à la grève, les juges du fond ayant eux-mêmes constaté que cette revendication n'avait été formulée que deux heures après le débrayage, que le problème de paiement d'heures supplémentaires était enfin et en réalité exclusivement lié aux difficultés d'application de l'accord de réduction de travail ; qu'en affirmant que l'employeur avait commis une violation grave et délibérée à son obligation de payer les heures supplémentaires, le conseil de prud'hommes a tranché une contestation sérieuse opposée à l'obligation de paiement des heures de grève et violé, ainsi, l'article R. 516-31 du code du travail ;
6°/ que, par voie de conséquence, l'existence d'une obligation non sérieusement contestable de l'employeur de rémunérer les salariés des heures de grève n'étant pas caractérisée, en jugeant que l'inexécution de cette obligation de payer constituait un trouble manifestement illicite qu'il convenait de faire cesser en accordant la provision demandée, le conseil de prud'hommes a privé sa décision de base légale au regard des articles R. 516-31 et L. 521-1 du code du travail ;
Mais attendu que le mouvement de grève ayant été notamment motivé par le non-paiement des heures supplémentaires et donc, à l'évidence, par un manquement grave et délibéré de l'employeur à ses obligations, le juge des référés a exactement décidé que l'obligation de l'employeur au paiement des provisions sollicitées n'était pas sérieusement contestable, nonobstant le protocole d'accord de fin de grève ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Autogrill Paris Saint-Lazare aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois mai deux mille sept.