AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 9 septembre 2003), que la société BNP bail, aux droits de laquelle est la société BNP Paribas lease group (le crédit-bailleur), a, le 16 mars 1996, conclu avec M. X..., à la suite d'un courrier adressé par le fournisseur le 28 février 1996, un contrat de crédit-bail destiné au financement d'un outillage professionnel de fraisage, d'une valeur de 631 944 francs, moyennant le paiement de soixante loyers mensuels, le premier de 50 000 francs hors taxes, les autres de 9 950 francs hors taxes ; que le preneur n'ayant pas honoré ses engagements, le crédit-bailleur, après mise en demeure du 4 novembre 1996, a notifié la résiliation du contrat le 6 janvier 1997, puis réclamé paiement des indemnités prévues par ce dernier en pareil cas ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli cette demande, alors, selon le moyen :
1 / qu'il incombe au crédit-bailleur, tenu d'un devoir de conseil à l'égard du crédit-preneur, de s'informer lui-même sur la situation financière et économique de l'entreprise à laquelle il entend consentir un financement et de vérifier que la charge du remboursement ne sera pas excessive au regard de ses capacités financières ; qu'en l'espèce, il était constant que le premier bilan de l'entreprise de M. X... accusait un déficit de 73 368 francs ; que, comme l'avait relevé le jugement dont il sollicitait la confirmation, même en tenant compte de la situation trimestrielle arrêtée au 31 décembre 1995 laissant apparaître un résultat de 3 000 francs en tablant sur une augmentation supposée du chiffre d'affaires de 10,60 %, la capacité annuelle d'autofinancement de l'entreprise n'aurait été que de 133 600 francs, alors que le contrat de crédit-bail prévoyait pour les neuf premiers mois une charge fixe de 139 550 francs ; que dès lors, en affirmant qu'il n'existait aucune obligation de conseil à la charge du crédit-bailleur qui n'avait pas à s'opposer à l'investissement litigieux, bien que l'établissement de crédit fût tenu, au titre du devoir de conseil lui incombant, de vérifier la situation financière de l'emprunteur et de lui refuser l'octroi d'un crédit-bail dont la charge apparaissait excessive au regard de ses capacités financières, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil ;
2 / que, comme il le soutenait dans ses conclusions d'appel, la lettre du 28 février 1996, dont il ignorait l'existence avant qu'elle ne soit versée aux débats par le crédit-bailleur, ne pouvait justifier l'octroi du crédit-bail de 631 944 francs litigieux, dès lors qu'elle émanait du vendeur de matériel, partie à l'opération de crédit-bail, ne le représentant pas, et dont l'intérêt était contraire au sien, et que les allégations y figurant étaient résolument flatteuses, souvent mensongères et exagérément optimistes ;
qu'en se fondant néanmoins sur ce document dépourvu de tout caractère objectif et dès lors impropre à démontrer que conformément à son obligation de conseil, la banque avait préalablement à l'octroi du financement litigieux, procédé à la vérification de la situation financière de l'entreprise et évalué les risques d'insolvabilité liés à la charge représentée par ce financement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt relève que M. X..., professionnel déjà expérimenté, s'était inscrit au répertoire des métiers le 29 août 1994 au titre d'une activité de tournage, commande numérique, fraisage et serrurerie, qu'il avait connaissance du bilan de sa première année d'activité ainsi que de celui du début de la seconde lors de la conclusion de l'opération de financement, et retient que les éléments comptables de celles-ci étaient simples à appréhender ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations, dont il se déduisait que M. X..., ainsi en mesure d'appréhender les risques et l'opportunité du crédit qu'il se préparait à souscrire, était un emprunteur averti, et dès lors qu'il n'était pas prétendu que le crédit-bailleur aurait eu sur la situation financière du preneur des renseignements que ce dernier aurait ignorés, la cour d'appel a, abstraction faite du motif critiqué par la seconde branche du moyen, légalement justifié sa décision selon laquelle ce preneur ne pouvait lui faire grief d'avoir accordé un financement qu'il avait lui-même sollicité ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du douze décembre deux mille six.