REJET du pourvoi formé par X... Bernard, contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, 7e chambre, en date du 11 janvier 2006, qui, sur renvoi après cassation, pour complicité de discrimination par refus de fourniture de bien en raison de l'origine ou de l'appartenance à une ethnie, l'a condamné à trois mois d'emprisonnement avec sursis, 1 000 euros d'amende, un an d'inéligibilité, et a prononcé sur les intérêts civils.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 6 § 1 et 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article préliminaire, et des articles 388, 512, 591 et 593 du code de procédure pénale, des articles 121-7 et 225-2 du code pénal, manque de base légale, défaut de motifs, violation du principe du contradictoire :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Bernard X... coupable du chef de complicité de discrimination par provocation et fourniture d'instructions au préjudice de Mme Y... ;
" aux motifs que Mme Z... avait déclaré que Bernard X... lui avait demandé de réfléchir à cette vente, qu'il y avait déjà assez de Y... dans la commune, et fait comprendre qu'elle devrait peut-être changer d'avis et ne plus signer le compromis ; qu'il appartenait à la juridiction de restituer aux faits dont elle était saisie leur véritable qualification ; que, durant les débats devant la cour, Bernard X... avait été invité à présenter sa défense sur la qualification envisagée de complicité de discrimination consistant dans le refus de la fourniture d'un bien, prévue par l'article 225-2 1° du code pénal ; qu'en ayant exercé des pressions rappelées précédemment sur la venderesse pour l'amener à renoncer à la vente en raison de l'appartenance de l'acquéreur à la communauté des gens du voyage, le prévenu s'était rendu complice, par provocation et fourniture d'instructions, du délit de discrimination consistant à refuser la fourniture d'un bien, commis par Liliane Z... ; que l'absence de poursuites exercées contre cette dernière était sans incidence sur la constitution de l'infraction ;
" alors, d'une part, que si le juge peut requalifier les faits, c'est à la condition de donner au prévenu un délai raisonnable pour présenter utilement sa défense sur la nouvelle qualification envisagée ; que la juridiction correctionnelle a requalifié seulement à l'audience du 24 novembre 2005 des faits ayant donné lieu à la plainte avec constitution de partie civile du 3 décembre 2001 ; que le juge a disposé de près de quatre ans pour donner aux faits une qualification définitive quand le prévenu n'a disposé que du temps de présenter sur le champ des observations orales lors de l'audience pour présenter sa défense sur cette nouvelle qualification ; que l'exercice effectif des droits de la défense et l'égalité des armes n'ont pas été respectés ;
" alors, d'autre part, que le complice ne peut être poursuivi même en l'absence de poursuites contre l'auteur principal de l'infraction que si des obstacles de fait ou de droit s'y sont opposés ; que l'auteur principal de l'infraction, bien que connue et interrogée, n'a pourtant jamais été inquiétée ; que la cour d'appel n'a aucunement précisé quels auraient été les obstacles à l'exercice de poursuites contre celle-ci ;
" alors, ensuite, que viole les garanties d'un procès équitable la juridiction qui condamne le complice d'une infraction en se fondant sur le témoignage à charge de l'auteur principal, lui-même non poursuivi et ce sans aucune justification de fait ou de droit ;
" alors, en outre, que la complicité par provocation implique qu'il y ait eu don, promesse, menace, ordre, abus d'autorité ou de pouvoir ; que la cour d'appel n'a pas précisé en quoi les conseils donnés par Bernard X... à Mme Z..., qui n'était d'ailleurs pas sa subordonnée, auraient correspondu à l'un des procédés prévus par la loi pour retenir la complicité par provocation ;
" alors, enfin, que la complicité par instructions consiste dans le fait de donner des renseignements ou directives de nature à faciliter la commission de l'infraction, ce qui n'est pas le cas d'un simple conseil de commettre l'infraction ; que la cour d'appel s'est abstenue de préciser en quoi les conseils donnés par Bernard X... à Mme Z... auraient constitué des renseignements de nature à faciliter la commission de l'infraction " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que Bernard X..., maire de la commune de Brangues, ayant fait pression sur une de ses administrées pour qu'elle renonce à vendre un terrain à Mireille Y... eu égard à l'appartenance de celle-ci à la communauté des gens du voyage, a été poursuivi sur citation directe pour discrimination économique par personne dépositaire de l'autorité publique, sur le fondement de l'article 432-7 2° du code pénal ; que l'arrêt ayant condamné Bernard X... de ce chef a été cassé au motif que la vente d'un bien immobilier par un particulier à un autre ne caractérise pas l'exercice d'une activité économique au sens du texte précité ; que la cour d'appel de renvoi a déclaré Bernard X... coupable de complicité du délit de discrimination prévu par l'article 225-2 1° du code pénal, après avoir invité le prévenu à présenter sa défense sur cette nouvelle qualification ;
En cet état :
Sur le moyen pris en sa première branche ;
Attendu qu'il ne résulte d'aucune mention de l'arrêt attaqué ni d'aucunes conclusions déposées que le demandeur ait sollicité un délai pour présenter sa défense sur la nouvelle qualification envisagée ;
Qu'ainsi le grief n'est pas fondé ;
Sur le moyen pris en ses autres branches ;
Attendu que, pour déclarer Bernard X... coupable de complicité de discrimination par refus de fourniture d'un bien en raison de l'origine ou de l'appartenance à une ethnie, l'arrêt attaqué retient que le prévenu a exercé des pressions réitérées sur Liliane Z..., propriétaire d'un terrain situé sur la commune dont il est le maire pour la dissuader de le vendre à Mireille Y... en raison de l'appartenance de cette dernière à la communauté des gens du voyage ; que les juges ajoutent que l'absence de poursuites contre la venderesse, auteur principal, est sans incidence sur la responsabilité du complice ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel, qui a caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable, a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées ;
Que, les juges ayant constaté l'existence d'un fait principal punissable, il n'importe que seul le complice ait été poursuivi ;
D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa troisième branche, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.