AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt déféré, que la société Lito-plast ayant confié à la société Rocca transports la livraison de marchandises, cette dernière, exerçant le privilège du voiturier, les a retenues en invoquant une créance antérieure au titre de factures impayées, sous déduction d'un avoir et de factures d'avaries ; que la société Lito-plast a assigné la société Rocca transports en paiement et en indemnisation ;
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 16 du nouveau code de procédure civile ;
Attendu que pour déclarer la société Lito-plast forclose en sa demande de paiement de la somme de 6 911,67 euros et la condamner à payer à la société Rocca transports la somme de 4 420,05 euros, l'arrêt retient que, dès lors que la société Lito-plast a conclu dans ses écritures initiales et modificatives de première instance à la compensation des créances réciproques des deux parties sur le fondement des articles 1291 et suivants du code civil, elle reconnaît nécessairement la créance invoquée par la société Rocca transports à son encontre ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que dans ses conclusions d'appel, la société Lito-plast faisait valoir la prescription des créances de la société Rocca transports et que cette dernière pour s'y opposer invoquait non la compensation sollicitée par la société Lito-plast en première instance, mais la nature de ses créances, la cour d'appel a fondé sa décision sur un moyen relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations et a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen :
Vu l'article L. 133-7 du code de commerce ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que, pour des créances de transport nées à l'occasion d'opérations antérieures, le transporteur ne dispose d'un privilège que dans la mesure où le propriétaire des marchandises sur lesquelles il l'exerce est impliqué dans lesdites opérations ;
Attendu que pour rejeter la demande de la société Lito-plast tendant à voir juger abusif le droit de rétention exercé par la société Rocca transports, l'arrêt se borne à relever que le propriétaire effectif de la marchandise, au moment où le transporteur a exercé son droit de rétention, soit la société Sapsa bedding, était bien concerné par les transports impayés ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans préciser en quoi le propriétaire des marchandises sur lesquelles la société Rocca transports avait exercé son privilège était impliqué dans les opérations de transport antérieures à l'occasion desquelles étaient nées les créances qu'elle entendait recouvrer, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a déclaré l'appel recevable, l'arrêt rendu le 24 mars 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne la société Rocca transports aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept juin deux mille six.