AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que M. X... a confié à M. Y... de Z..., commissaire-priseur, la vente d'une oeuvre en plâtre qu'il lui a présenté comme étant du sculpteur César ; que l'oeuvre a été inscrite au catalogue de la vente organisée le 9 décembre 2000 en la décrivant ainsi : "César (1921-1998), Rosine, 1988. Tirage en plâtre, pièce unique non signée. Moulée d'après un fer de 1959. La Rosine devait être éditée en bronze à huit exemplaires. 105 x 134 cm 80 000/100 000" ; qu'une référence au catalogue raisonné de l'artiste concernant le "fer soudé de dimension réduite" Rosine, était en outre indiquée ; que reprochant au commissaire-priseur d'avoir pris l'initiative de ne pas présenter l'oeuvre lors de la vente sans l'en avertir, M. X... a recherché la responsabilité de celui-ci et demandé réparation du préjudice qui lui aurait été ainsi causé ;
Attendu que M. Y... de Z... fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné à payer à M. X... une somme à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, que tout en constatant que l'objet ne constituait qu'un plâtre de travail, simple agrandissement en plâtre du modèle original en fer, ni signé, ni paraphé de son auteur, César, et destiné à être multiplié en fonderie, la cour d'appel qui, pour infirmer le jugement, a cependant considéré que l'unicité de cette pièce suffisait à lui conférer la qualification de "pièce unique" sur le marché de l'art, n'a pas tiré les conséquences légales de ses observations pour imputer à faute à M. Y... de Z..., sa décision de la retirer de la vente pour non conformité à la description dans le catalogue à raison de son défaut d'authenticité, au regard des articles 1147 et 1992 du Code Civil et de l'article 1er du décret du 3 mars 1981 ;
Mais attendu que l'arrêt, qui retient à bon droit que l'article 4 du Code de déontologie des fonderies d'art invoqué par M. Y... de Z... n'avait pas vocation à s'appliquer à une oeuvre en plâtre, fût-elle réalisée pour les besoins du tirage en bronze d'une oeuvre préexistante, relève souverainement qu'il ressortait des attestations de l'assistant de César, de sa fille et de sa veuve, ainsi que du contrat de cession des droits de reproduction que le plâtre n'existait qu'en un seul exemplaire, ce dont elle n'a pu que déduire que celui-ci était une pièce unique, et que le fait que ce plâtre n'était ni numéroté ni signé n'était pas de nature à le priver d'authenticité ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur la seconde branche du moyen :
Vu les articles 1147 et 1992 du Code civil, ensemble l'article 1er du décret du 3 mars 1981 ;
Attendu qu'en condamnant le commissaire-priseur à payer à M. X... une certaine somme à titre de dommages-intérêts, sans rechercher si le caractère erroné de la mention portée dans le catalogue à la demande de M. X..., relative au nombre d'éditions en bronze de la sculpture à partir du moulage en plâtre, n'était pas de nature à justifier la décision du commissaire-priseur de retirer l'oeuvre de la vente, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 4 novembre 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept février deux mille six.