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15/11/2005 | FRANCE | N°03-14208

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 15 novembre 2005, 03-14208


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en ses quatre branches :

Attendu que le 7 avril 1992, Mme X... a souscrit un plan d'épargne populaire (PEP) auprès de la Caisse régionale de Crédit maritime mutuel la Méditerranée (le Crédit maritime) ; que le 31 mars 1993, elle a signé un document intitulé "nantissement de titre" par lequel elle affectait le PEP au nantissement pour sûreté de toutes les opérations ou sommes pouvant être dues par elle au Crédit maritime ;

que le

10 mai 1993, elle a souscrit auprès du même établissement un emprunt d'un montant de 1...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique pris en ses quatre branches :

Attendu que le 7 avril 1992, Mme X... a souscrit un plan d'épargne populaire (PEP) auprès de la Caisse régionale de Crédit maritime mutuel la Méditerranée (le Crédit maritime) ; que le 31 mars 1993, elle a signé un document intitulé "nantissement de titre" par lequel elle affectait le PEP au nantissement pour sûreté de toutes les opérations ou sommes pouvant être dues par elle au Crédit maritime ;

que le 10 mai 1993, elle a souscrit auprès du même établissement un emprunt d'un montant de 150 000 francs, y affectant également le PEP en nantissement ; que le 10 janvier 1994, un découvert bancaire de 90 000 francs lui a été consenti et que par acte du 20 janvier suivant, Mme X... a déclaré affecter ce même PEP en nantissement au profit du Crédit maritime pour sûreté de toutes les opérations avec cet établissement ; qu'enfin, le 2 mai 1995, le montant du découvert accordé a été augmenté et que par acte du même jour, elle a réitéré le nantissement du PEP ; que le 21 novembre 1995, le Crédit maritime a adressé une mise en demeure à Mme X... d'avoir à rembourser les échéances impayées du prêt de 150 000 francs, puis, le 9 janvier 1996, une mise en demeure d'avoir à régler le solde débiteur de son compte dépassant l'autorisation de découvert ; qu'en juillet 1996, le Crédit maritime ayant avisé Mme X... qu'elle avait réalisé son gage en soldant les comptes par le biais de son PEP, elle a assigné cet établissement aux fins, notamment, de voir maintenir le solde créditeur du PEP ;

Attendu que le Crédit Maritime fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Montpellier, 4 mars 2003) d'avoir jugé, notamment, que le nantissement du PEP était régulier mais que le Crédit maritime avait méconnu les dispositions de l'article 2078 du Code civil en s'attribuant le solde de ce compte en l'absence de pacte commissoire sans s'y être fait autoriser en justice et a, en conséquence, condamné la banque à rétablir le PEP de Mme X..., alors, selon le moyen :

1 / qu'ayant constaté que les sommes déposées par Mme X... sur son compte PEP et données en garantie à la CRCMM constituaient un gage-espèces, ce dont il avait résulté de plein droit un effet translatif de propriété, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 2078 du Code civil en décidant que, faute pour Mme X... d'avoir consenti à un transfert de propriété immédiat de son compte PEP, la CRCMM n'avait pu compenser sa créance sur l'intéressée avec la dette de cette dernière sans y avoir été autorisée en justice ;

2 / qu'en retenant que les conventions des parties ne prévoyaient pas une compensation immédiate et automatique des créances en cas de non-paiement du solde débiteur du compte, pour décider que la CRCMM n'avait pu compenser sa créance sur Mme X... avec la créance de cette dernière résultant du gage-espèces sans y avoir été autorisée en justice, la cour d'appel a violé les articles 1291 et 2078 du Code civil ;

3 / que les actes de nantissement des 20 janvier 1994 et 2 mai 1995 stipulent chacun que "le PEP arrivé à échéance, les fonds pourront soit être remployés en nouveau PEP, qui sera compris de plein droit dans le présent nantissement, soit remboursés, le Crédit maritime imputant sur sa créance s'il y a lieu, le produit du remboursement et les intérêts dans les conditions fixées par la loi, soit enfin conservés par le Crédit maritime jusqu'à apurement complet des engagements", ce qui constituait un pacte commissoire ; que dès lors, en considérant au contraire que les conventions des parties ne prévoyaient cependant pas une compensation immédiate et automatique de l'ensemble des créances en cas de non paiement ou de solde débiteur du compte, et que la CRCMM ne rapportait pas la preuve d'un pacte commissoire, la cour d'appel a méconnu la loi des parties résultant des actes de nantissement et a ainsi violé, ensemble, les articles 1134 et 2078 du Code civil ;

4 / que si les actes de nantissement des 20 janvier 1994 et 2 mai 1995 stipulent chacun la possibilité d'une compensation avec les sommes retirées par Mme X... de son compte PEP et avec le solde de celui-ci à son échéance, c'est seulement "pour le cas d'obstacle légal à l'engagement pendant la durée du PEP des sommes créditées" ; que dès lors, en conférant à cette clause une portée générale limitative des effets du gage-espèce, que celle-ci n'a pas, la cour d'appel a méconnu la loi des parties résultant des actes de nantissement et violé, ensemble, les articles 1134 et 2078 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant constaté que le gage consenti par Mme X... au Crédit Maritime avait été réalisé au moyen de l'inscription de sommes en espèces sur un plan d'épargne populaire, lequel constituait un compte d'épargne rémunéré dont la stabilité devait permettre l'obtention d'exonérations fiscales et d'une prime d'épargne, ce dont il résultait que les sommes d'argent déposées n'étaient ni consomptibles ni fongibles, la cour d'appel a exactement décidé que la propriété de ces sommes n'avait pas été transférée au Crédit maritime et qu'un pacte commissoire n'aurait pu avoir pour objet que d'autoriser la compensation ; que c'est sans méconnaître la loi des parties, que l'arrêt retient ensuite, par motifs propres et adoptés, que les dispositions contractuelles selon lesquelles les retraits ordonnés au cours du plan et les sommes existantes ou acquises à sa clôture étaient dès à présent constituées en gage-espèces au bénéfice du Crédit maritime qui pouvait dans ce cas en compenser le montant avec celui des créances exigibles, prévoyaient seulement la possibilité d'une compensation en cas de retrait d'espèces au cours du plan ou à sa clôture sans qu'il soit besoin d'établir un nouvel acte et nullement une compensation immédiate et automatique de l'ensemble des créances en cas de non-paiement ou de solde débiteur de compte ; que le moyen, nouveau et mélangé de fait en sa quatrième branche, partant irrecevable, n'est pas fondé en ses trois autres griefs ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la Caisse régionale de Crédit maritime mutuel "La Méditérranée" aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la Caisse régionale de Crédit maritime mutuel "La Méditerranée" à payer à Mme X... la somme de 2 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze novembre deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 03-14208
Date de la décision : 15/11/2005
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

NANTISSEMENT - Gage - Effets - Pouvoir du créancier nanti - Etendue - Détermination.

NANTISSEMENT - Gage - Gage-espèces - Effets - Pacte commissoire - Défaut - Portée

Les sommes d'argent déposées sur un plan d'épargne populaire, lequel constitue un compte d'épargne rémunéré dont la stabilité doit permettre l'obtention d'exonérations fiscales et d'une prime d'épargne, ne sont ni consomptibles ni fongibles. Une cour d'appel décide dès lors exactement que la propriété de ces sommes, affectées en gage par le titulaire du plan en garantie du remboursement du prêt à lui consenti par l'organisme de crédit gestionnaire de ce plan d'épargne, n'était pas transférée à cet organisme, de sorte qu'aucune compensation automatique et immédiate de l'ensemble des créances en cas de non-paiement ou de solde débiteur du compte ne pouvait avoir lieu, seul un pacte commissoire pouvant avoir pour objet d'autoriser la compensation.


Références :

Code civil 2078

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 04 mars 2003

Sur l'étendue du pouvoir du créancier nanti, à rapprocher : Chambre commerciale, 2005-07-12, Bulletin 2005, IV, n° 175, p. 189 (rejet). Sur la possibilité d'un pacte commissoire, à rapprocher : Chambre commerciale, 1996-04-09, Bulletin 1996, IV, n° 116, p. 99 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 15 nov. 2005, pourvoi n°03-14208, Bull. civ. 2005 I N° 415 p. 347
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2005 I N° 415 p. 347

Composition du Tribunal
Président : M. Ancel.
Avocat général : M. Sarcelet.
Rapporteur ?: M. Bargue.
Avocat(s) : Me Cossa, la SCP Vincent et Ohl.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:03.14208
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