AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche du pourvoi principal de la salariée :
Vu les articles L. 122-45 et R. 241-51-1 du Code du travail ;
Attendu que, selon le second de ces textes, sauf dans le cas où le maintien du salarié à son poste entraîne un danger immédiat pour la santé et la sécurité de l'intéressé ou de celle de tiers, le médecin du travail ne peut constater l'inaptitude du salarié à son poste de travail qu'après deux examens médicaux espacés de deux semaines ; qu'il s'ensuit que l'inaptitude ne peut être déclarée après un seul examen médical que si la situation de danger résulte de l'avis du médecin du travail ou si cet avis indique, outre la référence à l'article R. 241-51-1 du Code du travail, qu'une seule visite est effectuée ;
Attendu que Mme X... a été embauchée le 3 janvier 1979 par l'association Amicale des frontaliers en qualité de secrétaire ; qu'elle a été placée en arrêt maladie en juin 1999 ; que le 23 juin 2000 le médecin du travail a émis l'avis suivant adressé notamment à l'employeur : "Après une nouvelle visite médicale effectuée ce jour le 23 juin 2000 et après avis du médecin inspecteur du travail, je certifie que l'état de santé actuel de Mme X...
Y... ne lui permet pas une reprise du travail dans son entreprise. Je vous rappelle que cet avis peut être contesté selon l'article L. 241-10-1 du Code du travail auprès de l'inspection du travail" ; que le 31 juillet 2000 le médecin du travail a précisé à l'employeur : "suite à votre courrier du 13 juillet 2000 concernant Mme X... je vous confirme qu'il s'agit bien d'une réintégration impossible au sein de son entreprise et non au niveau d'un poste en particulier" ; que la salariée a été licenciée le 5 septembre 2000 pour inaptitude physique ;
Attendu que pour débouter la salariée de ses demandes de dommages-intérêts, indemnité compensatrice de préavis et de congés payés sur préavis fondées sur la nullité du licenciement, la cour d'appel a notamment énoncé que le médecin du travail a constaté, le 23 juin 2000, l'inaptitude de la salariée à tout emploi au sein de l'association et a, le même jour, informé pour avis le médecin inspecteur du travail qu'il estimait que le maintien de l'intéressée à son poste de travail entraînait un danger immédiat pour sa santé ; que le fait que cette appréciation restrictive n'ait pas été mentionnée sur l'avis d'inaptitude n'ote rien à sa portée et qu'il en résulte que le deuxième examen médical prévu par l'article R. 241-51 du Code du travail n'avait pas à être réalisé ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ne résultait pas de l'avis du médecin du travail du 23 juin 2000 une situation de danger immédiat pour la salariée et que dans le délai de deux semaines suivant le premier avis médical, un second n'avait pas eu lieu, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer ni sur les autres branches du pourvoi principal, ni sur le pourvoi incident de l'employeur :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 septembre 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne l'association Amicale des frontaliers aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne l'association Amicale des frontaliers à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf octobre deux mille cinq.