AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-huit septembre deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller ARNOULD, les observations de la société civile professionnelle MONOD et COLIN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FRECHEDE ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Michel,
contre le jugement de la juridiction de proximité d'EVRY, en date du 9 décembre 2004, qui, pour usage d'un téléphone tenu en main par le conducteur d'un véhicule en circulation, l'a déclaré redevable d'une amende de 150 euros ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles L. 121-1 du Code pénal, L. 121-1, L. 121-2, L. 121-3 et R. 412-6-1 du Code de la route, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que le jugement attaqué a condamné Michel X... à une peine d'amende de 150 euros pour l'infraction d'usage d'un téléphone tenu en main par le conducteur d'un véhicule en circulation ;
"aux motifs que la culpabilité du prévenu n'est pas établie ; toutefois le prévenu est le titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule avec lequel il est régulièrement établi qu'a été commise une contravention mentionnée par l'article L. 121-2 du Code de la route ; que de surcroît, il n'apporte aucun élément permettant d'établir qu'il n'est pas l'auteur véritable de l'infraction et que, bien que propriétaire, il ne fournit pas de renseignements de nature à identifier l'auteur véritable de l'infraction ; qu'il convient donc, en application de l'article L. 121-2 du code de la route, de le déclarer redevable pécuniairement de l'amende encourue pour usage d'un téléphone tenu en main par le conducteur du véhicule en circulation ;
"1 ) alors que le conducteur d'un véhicule est responsable pénalement des infractions commises par lui dans la conduite dudit véhicule ; que les articles L. 121-2 et 121-3 prévoient que, par dérogation à cette disposition, le titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule est " responsable pécuniairement " d'un certain nombre d'infractions spécialement visées par ces textes ; que l'infraction d'usage d'un téléphone tenu en main par le conducteur du véhicule en circulation ne figurant pas au nombre de celles-ci, Michel X..., bien que titulaire du certificat du véhicule litigieux, ne pouvait être considéré comme redevable pécuniairement de cette infraction ; qu'en décidant le contraire, le tribunal a violé les dispositions susvisées ;
"2 ) alors que, en tout état de cause, le doute sur l'identité du conducteur profite au prévenu qui n'a, par ailleurs, aucune obligation de dénoncer le conducteur, à supposer qu'il le connaisse ; qu'en décidant que Michel X..., non coupable de l'infraction, était redevable pécuniairement au seul motif que, titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule avec lequel a été commise l'infraction, il n'apporte aucun élément permettant d'établir qu'il n'est pas l'auteur de celle-ci, sans relever aucune circonstance permettant de penser que Michel X... était le conducteur au moment de l'infraction, le tribunal a violé les articles précités, ensemble la présomption d'innocence" ;
Vu les articles L. 121-1 et L. 121-3 du Code de la route ;
Attendu que ces textes énumèrent limitativement les infractions pour lesquelles, sous certaines conditions et par dérogation à la règle selon laquelle le conducteur d'un véhicule est responsable pénalement des infractions commises par lui dans la conduite dudit véhicule, la responsabilité pécuniaire du titulaire du certificat d'immatriculation est encourue ;
Attendu qu'après avoir énoncé que la culpabilité du prévenu n'est pas établie, le jugement attaqué retient qu'il convient en application de l'article L. 121-2 du Code de la route de le déclarer redevable pécuniairement de l'amende encourue pour la contravention d'usage d'un téléphone tenu en main par le conducteur d'un véhicule en circulation ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que cette infraction ne figure dans aucune des énumérations que contiennent les textes susvisés, la juridiction de proximité en a méconnu le sens et la portée ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs,
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement susvisé de la juridiction de proximité d'Evry, en date du 9 décembre 2004, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la juridiction de proximité de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la juridiction de proximité d'Evry et sa mention en marge ou à la suite du jugement annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Arnould conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;